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Catégorie : INTÉGRATION RÉGIONALE
Un groupe marocain pour gérer les fonds de retraite à la Beac
La société marocaine de gestion d’actifs Wafa Gestion, filiale d’Attijariwafa Bank (66% d’actions), sera en charge du placement des fonds de la Caisse de retraite (CRBC) de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac). Wafa Gestion, se présente comme le « leader de la gestion d’actifs au Maroc » avec, au 31 décembre 2016, 101,89 milliards de dirhams d’encours sous gestion (27.11% de part de marché).
Ces placements en actifs financiers, libellés en francs CFA, seront capitalisés dans les zones d’émissions monétaires et financières de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale. C’est-à-dire dans la Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale (Cemac) et dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Soit 14 pays et deux places financières.
Le plan de retraite de la Beac est financé par ses contributions propres ainsi que celles de son personnel, sur la base de pourcentages spécifiques liés au régime à cotisations définies, indique un communiqué de l’Institut d’émission.
Lorsque la Beac lance, le 18 avril 2017, l’appel d’offres de recrutement d’une société pour placer ses fonds de retraite sur les marchés financiers, dans la Cemac et l’Uemoa, elle indique que cette caisse a été mise en place pour garantir un régime de retraite complémentaire à son personnel retraité ainsi qu’aux ayants droit des familles.
Créée en janvier 1999, la CRBC fait partie intégrante de la Banque centrale. Cependant, elle jouit d’une autonomie de gestion. Ses ressources sont confiées, contre rémunération, sur la base de mandats, à des institutions spécialisées dans la gestion de portefeuilles d’actifs financiers. Une mission désormais confiée à Wafa Gestion.
ZRM
Le Crowdfunding se cherche en Afrique centrale
Phénomène en pleine expansion dans le monde, le crowdfunding (financement participatif) constitue une opportunité intéressante pour le financement des projets et des entreprises de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale. Mais cet instrument reste assez mal connu et connait actuellement moins de rayonnement dans la Cemac que dans d’autres zones d’Afrique (notamment l’Afrique de l’Est). L’analyse de l’activité d’une des plateformes majeures de financement des projets en Afrique, Kiva, montre que sur les 348 162 prêts recensés en date de septembre 2017, le Cameroun est le seul pays représenté de la sous-région avec 4 421 projets financés pour un total de 1,1 milliard de francs CFA, soit 0,74% du montant total levé sur le continent. Cette performance est 8 fois inférieure à celle du Sénégal sur la même plateforme à la même date et 30 fois inférieure à celle du Kenya.
Malgré ces contreperformances, l’exemple de ces projets financés via crowdfunding peut susciter de l’optimisme quant à la pertinence de ce mode de financement alternatif. En effet, il s’agit généralement d’entreprises et de projets ne remplissant pas les conditions minimales d’éligibilité à un crédit bancaire ou une introduction en bourse. En d’autres termes, le crowdfunding est adapté pour le financement de la quasi-totalité des micros, petites et moyennes entreprises constituant l’essentiel du tissu productif de la Cemac.
En outre, bien que plus de 99% des projets financés via crowdfunding dans la Cemac le soient sur des plateformes étrangères, on relève la création de deux sites internet de financement participatif dans la communauté: «G-Starters» au Gabon et «GuanxiInvest» au Cameroun. Ce qui illustre un intérêt croissant pour le crowdfunding dans la sous-région. A titre d’exemple : entre juin et septembre 2017, le taux de croissance annualisé des montants levés par le Cameroun sur le site Kiva s’élève à 42,8%. A ce rythme, le total des fonds levés par le Cameroun sur cette plateforme pourrait ainsi être multiplié par un facteur égal à 17 en 2025. Les estimations tablent sur un total de fonds levés sur le site Kiva au niveau de la Cemac de 12,2 milliards de francs CFA à l’horizon 2020.
ZRM
Une tournée présidentielle pour la sécurité en Afrique centrale
Le président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), le Gabonais Ali Bongo Ondimba, est en tournée régionale depuis le 13 février dernier. L’odyssée du président Gabonais l’a successivement conduit auprès de ses homologues du Rwanda, de l’Angola, du Congo, de la République Démocratique du Congo (RDC) et de la Guinée Equatoriale. A la veille d’un sommet crucial de la CEEAC sur la paix et la sécurité, le président Ali Bongo tente de convaincre ses pairs sur la nécessité de l’implémentation d’actions fortes dont la première se veut la participation effective. Les 5 et 6 mars prochain, Libreville accueille en effet un sommet des chefs d’Etats du Conseil de paix et de sécurité (Copax) de la CEEAC.
Lors de cette session du Copax qui sera précédée les 3 et 4 mars du Conseil des ministres, les Chefs d’Etats devront se pencher sur les problématiques politiques et sécuritaires qui entravent la quiétude sociale dans la sous-région. Tous les pays de cette zone connaissent des crises, des conflits ou des troubles dormant. De la crise centrafricaine aux troubles du Congo-Kinshasa en passant le coup d’Etat manqué à Malabo, les tensions dans la partie anglophone du Cameroun ou dans le pool du Congo, l’Afrique centrale connait une certaine instabilité.
A cette situation s’ajoute l’environnement économique. Marquée par des ajustements économiques et financiers, cet espace continue de subir la dépréciation des cours des matières premières sur le marché international. La diversification économique et l’intensification des échanges intra-régionaux demeurent des solutions structurelles à cette addiction d’extraversion économique accompagnée d’une étroitesse de la structure de production. Et même si les sujets économiques ont jalonné les échanges entre Ali Bongo et ses hôtes, il est utile que les solutions aux crises régionales s’accompagnent d’une approche intégrée. Laquelle prendra en compte l’inclusion sociale et spatiale dans la gestion des sociétés de même que les questions de migrations.
ZRM
La CEEAC expérimente le poste de contrôle frontalier unique
Dans le cadre de l’harmonisation des règles et procédures de circulations préférentielles dans la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), le Cameroun et le Congo ont réceptionné, en mi-janvier 2018, le premier poste de contrôle frontalier unique (PCFU) de la sous-région. Financés à près de 5 milliards de francs CFA par la Banque africaine de développement (BAD), les travaux de construction du PCFU sont réalisés par l’entreprise Sinohydro Tianjin et le contrôle est assuré par la société Cira Ingenieurs Conseils.
Localisé sur le tronçon Ketta-Djoum (précisément à Ntam), ce poste permettra d’éradiquer les amoncellements de barrières que connaissent les corridors intra régionaux en général et celui liant le Cameroun au Congo en particulier. Pour cela, il faudra relever le défi de l’harmonisation des institutions juridiques, des procédures de dédouanement et même l’instauration des mécanismes de pré-dédouanement.
C’est une évidence, les difficultés de transports constituent des entorses de premier plan aux échanges de la sous-région. La dématérialisation en cours servira à la facilitation des échanges commerciaux par la fluidité du transport sur l’axe Brazzaville-Yaoundé. Ceci dans un contexte d’intensification quasi-obligatoire des échanges dans la région en vue de la diversification économique ; dans une dynamique continentale de préparation de l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange continental possiblement le 21 mars 2018.
La vocation du PCUF est de simplifier les formalités de contrôle et de réduire les délais d’attente aux frontières pour les marchandises et les personnes entre le Congo et le Cameroun. Il est aussi question de favoriser la prévention des pratiques illicites (par exemple la contrebande ou le commerce informel). Le PCUF est appelé à renforcer aussi l’efficacité des services douaniers et des autres
agences gouvernementales en évitant les doublons inutiles au niveau des formalités, en favorisant la coopération, le partage des informations et des données commerciales tout en permettant une meilleure utilisation des ressources.
La multiplication des PCUF dans la région revêt également un enjeu commercial considérable pour le Tchad, la RCA, le Rwanda et le Burundi qui sont des pays enclavés sans accès maritime. Ils sont parfois contraints de supporter des coûts de transit élevés pour exporter leurs productions. Lesquelles doivent d’abord être acheminées par route vers des ports situés dans des pays disposant d’une frontière maritime pour pouvoir être expédiées ensuite ailleurs.
Zacharie Roger Mbarga
Depuis des années, la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) ne rate pas l’occasion de se prononcer sur des questions politiques délicates dans ce pays.
quelques membres du clergé en RDC Alors que la carte religieuse du pays subit des changements profonds, l’Eglise catholique demeure présente sur l’ensemble du territoire de la République Démocratique du Congo (RDC).La réalité chiffrée indique qu’elle compte plus de 40 millions de fidèles, soit approximativement la moitié d’une population estimée à 80 millions d’habitants, éparpillés dans 06 archidiocèses et 41 diocèses. Sur le plan social, plus de 60 % des écoles primaires et hôpitaux du pays sont gérées par des institutions catholiques. Sur le plan économique, beaucoup de diocèses sont propriétaires d’entreprises, incluant des fermes ou des magasins.« Une puissante force religieuse et économique convertie ces dernières années en force politique de premier plan », selon des analystes.Depuis 1990, cette congrégation religieuse s’impose en première ligne des actualités politiques. Avec Mobutu, Kabila père et fils, les échanges nourris avec les différents pouvoirs ont créé une communauté idéologique de grande importance en RDC. Portée actuellement par S.E. Mgr Marcel Utembi Tapa, archevêque métropolitain de Kisangani et président de la CENCO, cette communauté parraine souvent des combats politiques.Faits d’armesLe 19 février 2018, lors d’une conférence de presse à l’issue de leur Assemblée plénière extraordinaire tenue du 15 au 17 février 2018 à Kinshasa, la CENCO a réaffirmé sa sollicitude à l’endroit du peuple congolais. Par ailleurs, les pasteurs de l’Église catholique en RDC ont exprimé leur profonde inquiétude par rapport aux faits très graves et aux attitudes hostiles, indiquent-ils, « alors que nous sommes censés nous préparer à la tenue des élections en vue d’une alternance pacifique au pouvoir. » Ils ont relevé et condamné notamment la répression sanglante des marches pacifiques du 31 décembre 2017 et celle du 21 janvier 2018 organisées par le Comité laïc de coordination pour réclamer l’application intégrale de l’Accord du 31 décembre 2016. Ils se sont dits remontés contre la compagne de dénigrement et de diffamation visant à affaiblir la force morale de l’Eglise catholique. A ce propos, le Cardinal Monsengwo, Archevêque de Kinshasa a martelé que : « nous n’abandonnerons jamais notre engagement pour l’avènement d’un Etat de droit en République Démocratique du Congo. »Accusant souvent la commission électorale d’être à la solde du pouvoir comme ce fut le cas entre 2003 et 2015, ou un long conflit a opposé la direction de l’Église à l’abbé Malu-Malu, président de la commission électorale et décédé en juin 2016, la CENCO s’est clairement opposée au régime en place, dans un effort de sortie de crise.En 1991 déjà, un pouvoir à bout de souffle convoquait la Conférence nationale souveraine (CNS), dans une manœuvre politique visant à redorer le blason d’un Mobutu Sese Seko vieillissant. C’est l’archevêque de Kisangani, Laurent Monsengwo, qui se retrouve alors à la tête du bureau national de la CNS. Il deviendra par la suite président du Haut Conseil de la République, de 1992 à 1994, tenant lieu de Parlement de transition. Près de vingt ans plus tard, devenu cardinal, le prélat est une des multiples voix qui dénoncent l’irrégularité de l’élection présidentielle de 2011 s’étant soldée par l’octroi d’un second mandat à Joseph Kabila. Le cardinal s’exprime alors au nom de la CENCO, qui officie en tant qu’observateur des élections, et s’emporte contre des élections qui « ne sont conformes ni à la vérité ni à la justice ».Hortense Utamuliza KanakuzeAgriculture : Un nouvel outil panafricain de productivité
L’Union africaine vient d’instituer un tableau de bord de la transformation de l’agriculture en Afrique. Sa mise sur pied devrait contribuer à la stimulation de la productivité agricole.
Le 30ème sommet de l’UA a été l’occasion pour l’Organisation panafricaine de présenter son rapport d’évaluation biennale inaugurale sur la mise en œuvre de la déclaration de Malabo de juin 2014 sur la croissance et la transformation accélérées de l’agriculture pour une prospérité partagée et l’amélioration des moyens de subsistance. Haile Mariam Desalegn, Premier ministre démissionnaire de l’Ethiopie et champion désigné de l’UA pour le Programme détaillé pour le développement de l’agriculture africaine (PDDAA), s’en est chargé. Son rapport révèle que seuls 20 des 47 États membres évalués sont sur la bonne voie pour respecter les engagements énoncés dans la déclaration de Malabo. Le Rwanda arrive en tête des 10 meilleurs pays avec un score de 6,1, suivi par le Mali (5,6), le Maroc (5,5), l’Ethiopie (5,3), le Togo (4,9), le Malawi (4,9), le Kenya (4,8), la Mauritanie (4,8), Burundi (4,7) et Ouganda (4,5).
Le rapport établit le point de référence de 2017 à 3,94 sur 10 comme score minimum pour qu’un pays soit considéré en voie d’atteindre les engagements de Malabo d’ici 2025. Au niveau régional, l’Afrique de l’Est a obtenu les meilleurs résultats avec un score de 4,2, suivi de l’Afrique australe avec un score de 4,02. Dans le même temps, H.E Kwesi Quartey, vice-président de la CUA, a décerné des prix aux pays les plus performants pour accélérer la transformation de l’agriculture sur le continent. La meilleure performance basée sur le score global pour atteindre les objectifs et les cibles de la Déclaration de Malabo d’ici 2025 a été remportée par le Rwanda, avec le Mali en deuxième place et le Maroc en troisième place.
Construction de l’indice
Bâtis sur la base des objectifs stratégiques de la déclaration de Malabo sur la croissance et la transformation accélérée de l’Agriculture, 43 indicateurs composent le tableau de bord qui suit les progrès des engagements pris par les chefs d’État et de gouvernement de l’UA à travers le PDDAA. Le tableau de bord, nouvel indice d’évaluation et de développement de l’agriculture africaine, étudiera les progrès agricoles du continent sur la base d’un exercice de collecte de données panafricaines mené par le département de l’Economie rurale et de l’Agriculture de la Commission de l’Union africaine (DREA), l’agence du Nepad, les Communautés économiques régionales et les partenaires techniques au développement. En 2017, la Commission de l’UA a organisé et animé 6 sessions de formation respectivement dans les régions d’Afrique de l’ouest, Afrique de l’Est, Afrique centrale, Afrique australe et Afrique du nord, avec 156 experts nationaux formés, y compris des spécialistes du PDDAA, des spécialistes du suivi et de l’évaluation en agriculture et autres ministères techniques.
Recommandations
Dans la déclaration de Malabo, les États membres de l’UA se sont engagés à rendre compte, tous les deux ans, des progrès accomplis dans la réalisation des sept engagements de la déclaration de Malabo. Un premier rapport a été présenté à la 30e Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’UA. Intitulé «rapport biennal inaugural sur la mise en œuvre de la Déclaration de Malabo de juin 2014 sur la croissance et la transformation accélérées de l’agriculture pour une prospérité partagée et des moyens de subsistance améliorés», la réunion de la deuxième session ordinaire du Comité technique spécialisé sur l’agriculture, le développement rural, l’Eau et l’Environnement a marqué la participation de Cinquante et un (51) États membres de l’UA au processus d’implémentation de l’indice, notamment dans la formation des relais nationaux. « Les administrations de ces pays et des CER se sont familiarisées avec la déclaration, les cibles et les indicateurs de Malabo, ainsi que le format de rapport biennal, qui a encore renforcé la culture de responsabilité mutuelle en Afrique » relève le rapport.
Le Commissaire à l’économie rurale et à l’agriculture de la CUA, Josefa Sacko, a félicité les pays pour leurs efforts dans la mise en œuvre des engagements de la Déclaration de Malabo. Il a déclaré que l’indice aiderait à partager les leçons et les meilleures pratiques. Certaines des principales recommandations du rapport concernent l’accroissement par les pays africains des investissements et des financements dans l’agriculture ; l’amélioration de l’accès aux services financiers et consultatifs des hommes et des femmes engagés dans l’agriculture ou l’amélioration des systèmes de collecte de données.
Coopération : vers un axe stratégique Union africaine – Chine
Le ministre chinois des Affaires Etrangères et le Président de la Commission de l’UA En pleine révélation française d’un espionnage chinois du siège de l’Union africaine, l’Empire du Milieu et l’Organisation panafricaine viennent de conclure une nouvelle feuille de route de collaboration.
Le temps d’un séjour de 48 heures à Pékin, la Commission de l’Union africaine (UA) a scellé un nouveau bail contractuel avec l’Empire du Milieu. La Chine deviendrait un allié du continent. En rencontrant les chefs de missions diplomatiques africaines dans le pays de Xi Jinping, le président de la Commission de l’UA a souligné le rôle crucial qui serait le leur dans la nouvelle configuration des relations sino-africaines. A Pékin, les différentes entrevues entre le patron de l’organisation continentale et les officiels chinois ont permis d’examiner différents aspects du partenariat Chine-Afrique, notamment la consolidation des positions internationales, l’appui à la mise en œuvre du premier plan décennal de l’Agenda 2063 de l’UA et l’Agenda 2030 des Nations unies.
Nouvelle gouvernance mondiale
La scène internationale connait des bouleversements marqués par le repli des Etats-Unis de Donald Trump, les tensions au Moyen orient ou les contestations aux discriminations de la mondialisation. L’axe Pékin /Addis – Adeba veut promouvoir le multilatéralisme et le rôle de l’Organisation des Nations unies (Onu). L’Afrique et la Chine représentent plus du tiers de l’humanité et partagent une histoire commune de domination étrangère. Les deux parties soutiendront mutuellement leur position sur la scène internationale. Elles ont convenu d’agir de manière volontariste en vue d’assurer une meilleure représentation de l’Afrique dans le système international, y compris au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, et ce dans le cadre d’un nouveau système de gouvernance mondiale.
Rapport institutionnel
L’une des nouveautés de ce tête à tête, c’est l’ouverture d’un bureau de l’UA à Pékin pour la réciprocité et la proximité des centres de décisions. Cette représentation appuiera également le travail du Groupe des ambassadeurs africains à Pékin, afin d’assurer la cohérence requise avec les positions de l’Union africaine. Il convient de noter que la Chine a établi une Mission permanente auprès de l’Union africaine depuis 2015. Se félicitant de cette initiative, la Chine s’engage à soutenir la mise en place de cette délégation de l’UA. Le quatrième sommet du Forum sur la coopération Afrique-Chine (Focac), prévu à Pékin en septembre 2018, sera l’occasion de renforcer le mécanisme de collaboration institutionnelle par les alignements géopolitiques. Par ailleurs, la Chine s’engage à continuer à soutenir la capacité institutionnelle de l’Union africaine, notamment la construction du nouveau centre de conférences et la rénovation d’autres bâtiments dans l’enceinte de l’Union africaine.
Sécurité et Santé
Les questions de paix et de sécurité sont d’intérêt mutuel. Le gouvernement de Pékin soutiendra pleinement les initiatives africaines de paix, de sécurité et de stabilité, notamment la Force conjointe du G5 Sahel et la mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom). La Base logistique de l’Union africaine, à Douala au Cameroun, recevra des équipements chinois d’une valeur de 25 millions de dollars au bénéfice de la Force africaine en attente (FAA). L’UA conjuguera ses positions géostratégiques avec la Chine à l’Onu. A cet effet, un mécanisme de consultation entre les membres africains du Conseil de sécurité (A3) et la Chine sera institué. Sur le plan de la santé, la Chine s’engage à accélérer la construction et l’équipement du Centre de contrôle et de prévention des maladies de l’Union africaine. Dans le cadre du plan stratégique quinquennal développé par cette institution, en collaboration avec des partenaires internationaux, dont la Chine, une dotation de 500 millions de yuan sera affectée à cette fin.
Investissement et intégration économique
En rapport avec les projets du premier plan décennal de l’Agenda 2063, la Chine entend accroitre ses investissements sur le continent. Une attention particulière sera accordée aux projets d’interconnexions à dimension régionale et continentale. Une liste de projets d’infrastructures du plan quinquennal du Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) bénéficiera de ces financements. Les corridors de transport d’énergie, les industries, les usines pharmaceutiques, l’agriculture et le tourisme seront également priorisés dans le financement des projets. Afin de rendre l’environnement d’investissement incitatif, un code panafricain des investissements verra le jour lors de la seconde phase des négociations de la Zone de libre-échange continentale. Avec le lancement du Marché unique pour le transport aérien en Afrique, la Chine s’engage à investir dans le développement et l’exploitation de l’infrastructure liée au transport aérien. Un open sky agreement entre les deux parties est également en préparation pour offrir aux opérateurs aériens des deux côtés un plus large accès à leurs marchés respectifs et favorisera l’augmentation du nombre de touristes chinois visitant l’Afrique.
Zacharie Roger Mbarga
Abang-Minko’o: le marché de moins en moins mondial le samedi
Le « Marché Mondial », place commerciale très réputée de la zone des trois frontières, obéit à la fois aux injonctions anonymes et visibles propres aux économies frontalières.
En voyage d’études à Abang – Minko’o, cinq étudiants de l’Institut sous – régional de statistique et d’économie appliquée (ISSEA) de Yaoundé sont face à une situation plutôt réjouissante. «Contrairement à nos craintes, l’ambiance nous a permis d’avoir le maximum d’informations et de confirmer nos hypothèses de travail», se réjouit Ali Yaméo. Le Tchadien, qui coordonne sur place ce groupe de jeunes ingénieurs statisticiens économistes depuis deux semaines, dit que ses camarades et lui-même n’ont pas usé d’une quelconque hardiesse intellectuelle au cours de leur collecte au «Marché Mondial».
Ce 10 février 2018, leurs yeux de statisticiens et leur méthode empirique donnent une force impressionnante à un sombre verdict. «Dans ce marché, l’inflation frémit. Depuis que nous sommes là, l’indice des prix à la consommation a bondi de 0, 8% ; c’est le niveau médian, si on ne tient pas compte des prix volatiles du transport. Et si tout cela est combiné, la hausse des prix se situe autour de 1%, soit près de 0,6 point comparativement à octobre 2017 lorsque nous étions ici. L’élasticité (rapport entre la variation des quantités demandées en pourcentage et la variation des prix en pourcentage) est de 0,3 à partir de la même période en ce qui concerne seulement les denrées alimentaires», évalue Ali Yaméo. Pour une meilleure compréhension, Gladys Ngobo Belle, l’unique fille du groupe, flashe quelques détails. Ceux-ci font la part belle aux prix définis à la fois comme indicateurs de rareté, signaux sur la situation du marché, mécanismes incitatifs ou processus de rationnement. «A la date d’aujourd’hui, le Marché Mondial est le théâtre de convergence de tout cela», conclut la Camerounaise.
Interprétation
Au «Marché Mondial», pas besoin d’appel à candidatures pour une lecture simplifiée de la hausse des prix. Clients et vendeurs se livrent volontairement à l’exercice avec une langue aiguisée. L’ensemble baigne dans de saintes colères, de nobles fulminations et de fulgurances intermittentes. «Le marché est cher parce que les produits sont là, mais en petite quantité», aborde Isabelle Mendomo. Pour légitimer cette approche (qui rejoint celle évoquée plus haut sur les prix comme indicateurs de la rareté), cette revendeuse camerounaise invite à un travelling sur les étals et les entrepôts. «Regardez, il n’y a rien !», assume-t-elle, accompagnant d’ailleurs ses dires d’un geste des deux mains. A côté, une autre voix féminine déchiffre les misères des commerçants : «Les bonnes choses n’arrivent plus ici comme avant ; tout est acheté à 10 kilomètres d’ici sur la route Ambam-Ebolowa et acheminé directement au Gabon ou stocké chez des trafiquants qui guettent la moindre ouverture de la frontière équato ; ici nous n’avons que les invendus». Pour tout couronner, la même voix déroule un vaste lexique incriminant les Gabonais, accusés (à tort ou à raison) de tenir les réseaux de spéculation. «C’est eux !», pointe-t-elle.
Dès lors, la véhémence et l’exécration finissent par l’emporter. Les mots et les chiffres innervent son propos. La réalité du terrain submerge la conversation lorsque quelqu’un évoque une dizaine de camionnettes chargées de bâtons de manioc en route pour Libreville, il y a deux jours. «Voyez, quand le marché doit être mondial le samedi, c’est à ce moment que les gens viennent tout prendre, surtout le bâton de manioc ; c’est comme çà !», peste un homme. «A cause de cela, les rares clients que nous avons subissent», tranche, sans appel, un autre.
De là, la pertinence de l’idée des prix comme signaux sur la situation d’un marché est étalée. «Un prix élevé signale que l’activité est rentable. Cela encourage d’autres acteurs à rejoindre le secteur. C’est une logique effroyable, implacable, d’une brutalité et d’une soudaineté souvent sans pareille», chuchote Ali Yaméo. Eclairé par ce raisonnement, la tentation est de croire qu’en plus des Gabonais, les Equato-guinéens ont flairé le filon. «Ils achètent chez les paysans loin d’ici. Quand ils le veulent, ils nous revendent le bâton de manioc à 200 francs CFA et nous, nous détaillons à 250 francs contre 200 avant», lâche Isabelle Mendomo.
Encore…
La voix peu chaleureuse et le souffle précipité, elle raconte que le contexte d’ultra sécurité en Guinée Equatoriale joue un rôle nocif autour des prix des denrées, surtout des tubercules. Parce que les clients venus de ce pays sont devenus rares, ceux qui réussissent à avoir une «piste» viennent ici proposer des prix pour le moins copieux. «A eux, se gargarise Mbi Hermanus, commerçant camerounais, je vends le filet de 100 bâtons de manioc à 50 000 francs. Et j’ai au moins 06 à 10 clients comme çà chaque samedi depuis que la frontière est fermée. Je préfère çà que de vendre aux gens qui me proposent la moitié de ce montant. Cela m’encourage à aller chercher plus de bâtons de manioc même dans la Lékié. La demande est forte depuis qu’on a fermé la frontière».
Tout pour comprendre le mécanisme incitatif : «si la demande pour un bien augmente, le prix va donc augmenter incitant les vendeurs à s’en procurer coûte que vaille», abrège Gladys Ngobo Belle. L’étudiante en statistique en profite pour s’étendre sur le processus de rationnement: «si la demande pour un bien augmente, le prix va donc augmenter et la quantité demandée va être réduite dans certains marchés et c’est le cas ici», enjoint-elle, prenant soin de ne pas évoquer la pénurie. A son avis, comme tout lieu de confrontation entre l’offre et la demande d’un ou de plusieurs biens, le «Marché Mondial» d’Abang-Minko’o est un espace où se déterminent les quantités échangées et le prix de leur cession.
Si la preuve de cette assertion ne s’affiche pas d’emblée, Gladys Ngobo Belle tient le «secteur vin» du «Marché Mondial» pour témoin. Ici, les étals semblent dire que «l’Operacion Seguridad» agit comme une mécanique de tri permanent sous l’effet de la forte demande en vins de table, canettes de bière et spiritueux. Venue de tous les pays de la zone Cemac, cette demande a favorisé la hausse des prix. «Le moindre vin qu’on prenait ici à 700 francs, nous l’achetons maintenant à 1 300 francs CFA pour le revendre à 1 500», débite Ymeli Amadou, président du Collectif des grossistes et semi-grossistes de vins du «Marché Mondial» depuis 2016. Du haut de ce profil, il ne peut opposer les actualités peu réjouissantes à la frontière et les quantités, la qualité et les prix actuels des vins et liqueurs. «Tout çà se tient», soutient-il. Par peur de vrais mots, ce Camerounais se contente de fournir des éléments comparatifs. En fin 2015, le prix le plus élevé d’une palette de vin rouge (12 briques) venue de Guinée Equatoriale via Kyé-Ossi caracolait à 7 000 francs Cfa. Avec le léger «relâchement» survenu à la frontière en fin 2017, le même produit a atteint, en mi-janvier 2018, le pic de 11 000 francs CFA. «La fermeture de la frontière amène les gens (les passeurs, NDLR) à sous-traiter et à proposer leurs produits à qui ils veulent. Pour fructifier leur capital dans un tel contexte, ces gens évoquent de nombreux risques. Et parce qu’il n’existe pas d’institutions internationales à caractère politique, économique ou juridique en mesure de réglementer efficacement leur comportement, ils font tourner le marché à leur guise. En fait, la hausse des prix ici a des facteurs qui sont connus et d’autres non», polémique une cadre de la délégation régionale du Commerce du Sud. Pour les jeunes statisticiens, «le Marché Mondial obéit à la fois aux injonctions anonymes et visibles propres aux économies frontalières».
Evolution des prix au « Marché Mondial »
Ebebiyin: la « seguridad »… à tout va
Teodoro Obiang Nguema, l’homme fort de Malabo. Convaincues de l’idée que, pour attenter au pouvoir actuel de Malabo, des oiseaux de mauvais augure entrent par cette ville de la province de Kié – Ntem via Kyé – Ossi, les autorités ont choisi de militariser la localité située dans le Nord-est de la région continentale de Guinée équatoriale.
Textos. Messages vocaux. Le poste frontalier équato-guinéen a subi pendant une demi-journée un intense pilonnage par nos soins afin de comprendre si oui ou non, il serait possible de voir le commandant Danielo. Finalement, quelqu’un a décroché (par mégarde ?) son téléphone, annonçant durement que «imposible!» Pas plus. Dans ce genre de cas de figure, on ne peut donc pas l’approcher. Au mieux, on peut l’observer à partir du Cameroun. A près de 200 mètres au loin, on voit juste un homme apparemment investi d’un pouvoir et d’une compétence supérieurs. Ceux qui, ici à Kyé – Ossi, prétendent le connaître, murmurent qu’il serait investi d’une intuition mystique dopée à la folie militaire. Il n’écoute personne, sauf peut-être sa hiérarchie au bout du fil. Il ne parle à personne, sauf peut-être quand il tonne face à sa constellation de subalternes.
Ce 11 février 2018, le «Comandante Danielo» tient un escadron d’environ 300 hommes et deux blindés. Ce dispositif a pris ses quartiers en face de Kyé – Ossi très tôt. «Depuis une heure du matin précisément», renseigne le capitaine Walter Anyouzoa. Rompu à ce type de manœuvres, cet officier de l’armée camerounaise présume que «la fête de la jeunesse côté camerounais serait à l’origine de ce déploiement sans précédent». Dans le périmètre frontalier de la Guinée Equatoriale, Danielo fait des allers et retours le long d’une grosse barre de métal. C’est ici l’un des points névralgiques de l’ «Operacion Seguridad» («Opération Sécurité»), décrétée au lendemain du putsch avorté dans la nuit du 27 au 28 décembre 2017.Batterie
A gratter un peu, l’on apprend que, depuis la découverte du complot contre son pouvoir, Malabo a choisi, de manière unilatérale et asymétrique, de «contrôler autrement» la frontière avec le Cameroun. La nouvelle démarche des autorités équato-guinéennes s’appuie sur la convergence du civil et du militaire. Le fait est que, dans le cadre de l’«Operacion Seguridad», des liens entre soldats et citoyens anonymes ont été institutionnalisés à tous les niveaux d’intervention. Quelques quidams soulignent d’ailleurs que la symbiose est parfaite. «Cela s’appelle combiner projection militaire et activités civiles dans les zones sensibles», décrypte Walter Anyouzoa, scrutant les mouvements à partir de ses jumelles. Pour lui, cette combinaison place le civil en priorité pour des rôles de témoignage et de dénonciation des hommes jugés dangereux, ou encore des situations illégales ou en dérogation aux directives du haut-commandement équato-guinéen. Une sorte de chasse à l’homme permanente. Une sorte de spectacle qui se joue sans relâche. Une sorte de cirque où la passion du commentaire suspicieux remplace parfois la soif de vérité. Après tout, l’«Operacion Seguridad» se trouve des proies. Des témoignages assurent que c’est un fumier sur lequel prospèrent des arrestations de migrants téméraires. En début janvier dernier, allègue-t-on, deux Maliens ont été capturés. Quelques minutes après l’interpellation des infortunés, le grotesque l’a disputé à l’ignoble au moindre soupçon de collusion avec les putschistes présumés.
Et si la suspicion est forte, c’est parce qu’ici à la frontière avec le Cameroun, l’armée de Guinée Equatoriale est coutumière de ce genre de manœuvres. Sauf que ces derniers temps, Malabo brandit tous les spectres tout en assurant «seulement répondre à un éventail d’objectifs : sécuriser, fermer et surtout bien contrôler la frontière avec le Cameroun», tel que le relaie La Gazetta, un quotidien privé proche du pouvoir de Malabo. Aussi nobles qu’elles puissent paraître, ces visées dessinent une autre réalité. «Là, on est passé à une dimension complètement différente», souligne une bonne source militaire camerounaise. Si l’éventualité d’un remake du putsch est bien envisagée par les hauts responsables de l’armée équato-guinéenne, l’ampleur des moyens mis en œuvre a surpris ici à Kyé-Ossi. «Il n’y a pas eu de gradation, ils ont d’emblée employé l’arsenal lourd», explique la même source.Technologie
Depuis sa mise en place, l’«Operacion Seguridad» a provoqué un «bouclage» optimal et militarisé de la frontière. Les jeeps se relaient jour et nuit, les hélicoptères survolent la forêt environnante. On s’est même lancé dans une surenchère technologique, considérant probablement qu’il est devenu indispensable de doubler cette démarche d’un ensemble de systèmes plus sophistiqués, plus élaborés et plus complexes. Un jeune Congolais, expulsé de Guinée Equatoriale et réfugié à Kyé -Ossi, raconte: «grâce à des appareils, des militaires traquent les étrangers suspects sur leurs écrans comme dans un jeu vidéo. Ces informations sont transmises à des policiers sur le terrain, équipés de radios et leur permettent de localiser les clandestins». Sans trop flâner sur des détails, Timothée Dooh Elamé (un Camerounais expulsé de Mongomo il y a juste trois jours) dit qu’à son «retour» au pays, il a vu des appareils fixés dans des buissons. «C’est comme des appareils photos», balance-t-il candidement. Plus aguerri, un haut-gradé des forces camerounaises soupçonne des caméras thermiques de haute sensibilité, capables de faire le point à quelques kilomètres de distance. A côté, un autre parle de détecteurs sismiques permettant de déceler les moindres mouvements.
Arrière-plan
«Surtout pas se fier à ce que vous voyez à partir du Cameroun», avise un Timothée Dooh Elamé. A l’en croire, les soldats en faction ici à la frontière sont appuyés par une brigade d’ingénierie interarmées et des mansardes réservées aux services spéciaux. Rapidement, on le comprend, la mission de surveillance s’est transformée en appui militaire direct aux troupes vues à partir du Cameroun. «Dans un contexte de grosse fébrilité, ces unités en retrait appuient de facto celles qu’on voit ; il est logique que l’objectif de la sécurité frontalière les rassemble», tente d’éclaircir un officier de l’armée camerounaise. «Depuis que le projet d’attentat contre le président Obiang Nguema a été déjoué, on suspecte tout maintenant… Même les voisins», ajoute-t-il.
Malabo se dit menacé. Selon des informations recoupées par le pouvoir local, des individus mal intentionnés ambitionnent de renverser le régime chapeauté par Teodoro Obiang Nguema Mbasogo. Le branle-bas des rumeurs et contre-rumeurs nées de cette situation survenue en fin d’année dernière, amène les autorités équato-guinéennes à glisser -sans retenue- vers leur penchant d’antan: restreindre au maximum les entrées des personnes et des biens dans leur pays. Cette fois-ci, on ne s’est plus caché sous la moquette diplomatique. Désormais, toute personne désireuse de fouler le sol équato-guinéen doit passer un contrôle militaire (et non plus présenter une simple carte d’identité ou un passeport en cours de validité). Elle ne peut plus s’y installer pour plus d’un mois, sauf si elle est «hautement qualifiée». Sous le manteau, on parle d’un nouveau projet de «plan de libre circulation». Pour le moment, Malabo se garde bien de le confirmer.
A ce jour, sous le compas de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, la Guinée Equatoriale dessine son schéma par rapport à la libre-circulation qu’elle avait pourtant fait fleurir au cours du dernier trimestre de l’année dernière. A travers l’«Operacion Seguridad» entrée en vigueur en début de cette année, cela est étouffé. Comme pour obscurcir la clarté. Conséquence: le «Marché Mondial», qui a connu une croissance extraordinaire, suscitant bien des espérances en matière de mouvements des biens et des personnes en zone Cémac, est retombé. Plombé par le sort très commun qui le lie aux actualités sur la libre-circulation, cet espace commercial, enfoui à la confluence de trois pays (Cameroun, Gabon et Guinée Equatoriale) joue son destin au ralenti. On pensait que la situation n’était que de simples éclairs d’orage. On se surprend à entendre le tonnerre de la hausse des prix et diverses spéculations. Les faits sur le terrain tendent à montrer que c’est à cause d’un pays cadenassé dans ses frontières que cela est arrivé. C’est l’objet du présent zoom.Huit incitations pour booster le marché financier dans la Cemac
Afin de permettre à la Bourse régionale des valeurs mobilières d’Afrique centrale (BRVMAC) d’intégrer l’indice MSCI (Modern Index Strategy Indexes), un groupe de travail du comité de pilotage du Pref-Cemac sur le futur marché financier unique de la sous-région propose 8 mesures dont l’objectif sera de générer de la liquidité pour les investisseurs. Ces mesures, pour être appliquées, nécessitent une volonté politique forte de la part des Etats membres de la Cemac. Ils sont en effet invités à favoriser les arrivées en bourse des sociétés partiellement ou totalement contrôlées par des capitaux publics.
Il est suggéré de mener des privatisations à travers des offres publiques initiales et de réaliser des ouvertures de capital pour des entreprises dont l’actionnariat est partagé entre le public et le privé, généralement étranger; contraindre des sociétés comme les banques et les assurances, qui collectent déjà de l’épargne publique, à ouvrir leur capital en bourse; fixer un seuil de capital à partir duquel les entreprises seront obligées de se lister sur le marché financier; inciter les multinationales opérant dans la sous-région à mobiliser leurs financements sur le marché régional; susciter des opérateurs miniers et téléphoniques ayant nouvellement reçu leurs licences qu’ils ouvrent 10% de leurs capitaux par offre publique sur le marché financier; inviter les Etats à mobiliser plus de ressources financières à travers des emprunts obligataires effectués sur le marché des capitaux de la Cemac; la mise en place d’un fonds de financement des introductions boursières. Il aidera à soutenir l’acquisition, par des investisseurs locaux, des actions qui auront été émises par les sociétés.
Ces recommandations sont portées à l’attention des ministres de l’Economie et des Finances de la Cemac. Parmi les défis majeurs qu’implique l’ouverture du capital des sociétés à des fonds publics sur le marché financier, on peut évoquer la mise en place d’une gouvernance et d’une communication financière aux standards internationaux.
Pour l’heure, aucun détail n’a été fourni sur la manière dont pourrait se mettre en place un fonds de soutien au financement des introductions en bourse. Les points d’ombre concernent les apports et la gestion de ce fonds, alors que plusieurs pays membres ont déjà du mal à se tenir à jour de leurs cotisations.ZRM
Des forces spéciales russes en RCA
Consécutivement à la résolution du Conseil de paix et de sécurité de l’Onu de confier un pan de formation et d’armement des Forces armées centrafricaines (Faca) à la Russie, près de 200 instructeurs des forces spéciales russes se sont installés à Bangui.
Selon plusieurs sources, ce contingent représente la première vague d’une troupe qui pourrait s’élever à 5000 hommes. Précisément, un accord de renforcement de la coopération diplomatique, économique et militaire aurait été signé entre Moscou et Bangui en 2017.
Dans son versant militaire, cet accord postulait la fourniture des armes, des équipements et des matériels militaires aux forces armées centrafricaines. Pour ce faire, la Russie, l’un des cinq (5) membres du Conseil de sécurité, se serait engagée à demander et obtenir la levée partielle de l’embargo imposé sur les armes à destination de la République centrafricaine. Chose promise, chose due ! Puisque la dernière résolution du Conseil de paix et de sécurité de l’Onu porte bien mention de cette exemption.
Une première livraison d’armes aurait déjà eu lieu en décembre. Deux autres livraisons devraient intervenir courant des mois de février et avril. Deux bataillons totalisant 1300 hommes seraient équipés, avec notamment 900 pistolets Makarov, 5200 fusils d’assaut AKM, 140 armes de précision, 840 fusils mitrailleurs Kalachnikov, 270 lance-roquettes RPG et 20 armes anti-aériennes. Les livraisons comprendraient aussi des munitions. La Russie a en outre proposé d’entrainer l’armée centrafricaine à l’utilisation de ces armes, un projet qui doit encore recevoir le feu vert de l’Onu. L’initiative russe ne semble pas recevoir l’enthousiasme de l’ensemble des membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu qui, pour d’aucuns, scrutent le déploiement des russes en Centrafrique.
Le réarmement des Faca et la levée de l’embargo sur les armes imposé au pays depuis 2013 sont des demandes anciennes des autorités de Bangui. Dès 2014, Catherine Samba-Panza, alors présidente du pays, plaidait en ce sens. Il a fallu attendre près de trois ans pour que les Faca reçoivent de nouveaux équipements. Ces livraisons sont devenues possibles au soir du 14 décembre 2017. Mais, l’Onu n’a pas formellement donné son feu-vert à la levée de l’embargo sur les armes. La demande de dérogation présentée par la Russie devant le Conseil de sécurité des Nations unies était en effet entrée en « procédure de silence ». En clair, si personne au sein de cette instance ne s’y opposait avant 20 h GMT, ce fameux 14 décembre 2017, la demande était acceptée. La réaction de la Cémac reste attendue. Le sommet des chefs d’Etats du Copax de mars prochain en sera certainement l’opportunité d’expression.511 millions de francs CFA pour la réforme de la CEEAC
Avec une note de 83,78/100 points et une proposition financière à 644,09 millions francs CFA (hors douanes), la firme française Sofreco vient d’être retenue comme l’entreprise adjudicataire de la réforme institutionnelle de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC). C’est une résolution du Comité de pilotage de la réforme institutionnelle de ladite communauté tenu les 5 et 6 février à Libreville (Gabon). Mais, indique la CEEAC, étant donné que la provision prévue pour le projet de la réforme s’élève à 498,9 millions francs CFA, le Comité a demandé au secrétariat technique de se rapprocher de Sofreco, en vue d’obtenir la réduction de son offre financière.
Cette démarche a permis d’obtenir de la firme une nouvelle proposition de 511,07 millions FCFA qui servira de base de négociations. La prochaine phase consiste en la négociation d’un contrat de prestation de services et la tenue d’un calendrier de la feuille de route de la réforme institutionnelle de l’organisation regroupant 11 Etats (Angola, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, RD Congo, Rwanda, Sao Tome et Principe, Tchad).
Pour mémoire, c’est au cours des assises de la CEEAC, en novembre 2016, à Yaoundé, au Cameroun, que les experts avaient relevé l’obsolescence des textes de l’institution communautaire datant du 18 octobre 1983. Bien plus, il avait été suggéré de revoir le règlement financier de la CEEAC, du 28 juin 2005, le statut du personnel du secrétariat général du 28 août 1987, le règlement intérieur du secrétariat général du 20 juillet 2006 et les manuels de procédures.
Les Termes de références indiquent que l’objectif de la réforme est de contribuer à faire de la CEEAC une communauté économique régionale forte, avec une architecture institutionnelle en harmonie avec celle de l’Union Africaine et des autres communautés économiques régionales, en vue de rendre plus efficient le fonctionnement de son exécutif. En d’autres termes, il s’agira pour le consultant de procéder à la refonte de l’architecture institutionnelle et organisationnelle de la CEEAC afin d’assurer une meilleure répartition des rôles et des responsabilités entre les organes politiques et techniques de la Communauté ; d’organiser un audit du cadre légal et réglementaire de la CEEAC et l’adapter aux normes et standards internationaux dans le but de réaliser un saut qualitatif majeur dans la gouvernance des institutions, organes et organismes spécialisés de la Communauté. Une retraite de la quasi-totalité du personnel du secrétariat général de la CEEAC sera organisée, afin de susciter l’appropriation par tous du processus.ZRM
Cemac : bientôt un passeport biométrique harmonisé
A en croire le président de la Commission de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cémac), des progrès sont effectués vers la définition des spécificités du passeport biométrique Cemac. «Aujourd’hui, nous sommes en train de faire que tous les pays aient un passeport Cemac biométrique. Nous avions une petite dette vis-à-vis d’Interpol, parce que c’est Interpol qui est habilité à le faire. Nous sommes en train de payer cette dette. Le gouverneur de la BEAC et le président de la BDEAC ont réussi à trouver 1,7 milliard FCFA pour pouvoir payer cette dette pour qu’Interpol donne les spécificités du passeport biométrique», indique Daniel Ona Ondo.
Pour rappel, la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement avait, lors du dernier sommet extraordinaire de Ndjamena, instruit la BDEAC de prélever 1,7 milliard de francs CFA aux ressources du Fonds de développement de la communauté (FODEC). Elle a également instruit la Commission de la Cemac de prendre toutes les dispositions pour la création des postes sécurisés aux frontières, afin de réserver le bénéfice exclusif de la libre circulation aux ressortissants de la communauté. En outre, la Conférence a exhorté les Etats membres, qui n’ont pas encore produit leur passeport Cemac, à le faire dans les meilleurs délais.
En février 2017, la Commission de la Cemac, avec l’appui d’Interpol, avait engagé la mise en place des dispositifs permettant d’accéder à la mémoire du passeport et d’y vérifier la conformité des normes par rapport aux normes sécuritaires prescrites par l’Organisation de l’aviation civile internationale. Le passeport biométrique vise à réduire les problèmes de sécurité présentés comme le ventre mou de l’instauration d’une libre circulation intégrale et complète dans la communauté.Zacharie Roger Mbarga
Mobilisation des recettes fiscales : échec programmé des pays de la Cemac
Dans un ouvrage, qui vient de paraitre aux éditions du Panthéon à Paris, l’inspecteur des impôts Symphorien Alain Ndzana Biloa démontre qu’une mobilisation optimale des recettes fiscales dans les pays du Sud est impossible en l’absence d’une réforme du système fiscal international.
Alain Symphorien Ndzana Biloa, auteur de « Sauvons l’impôt pour préserver l’Etat ». Vous venez de publier aux éditions du Panthéon, « Sauvons l’impôt pour préserver l’Etat ». Y-a-t-il vraiment péril en la demeure ?
Vu la multiplication des révélations relatives aux scandales de fraude et d’évasion fiscale internationales et la qualité des acteurs impliqués (hommes d’Etat, citoyens fortunés, grandes banques, entreprises multinationales, etc.), vu le foisonnement des ennemis et bourreaux de l’impôt et l’ingéniosité dont ils font preuve, vu les développements de l’industrie de l’évitement de l’impôt et les moyens et instruments de plus en plus sophistiqués mis en œuvre, vu les montants colossaux en jeu, vu les conséquences dramatiques de cette hémorragie fiscale sur les économies des pays pauvres ou en voie développement, vu les atermoiements et tergiversations de la communauté internationale, oui, il y a péril en la demeure.
Je ne suis d’ailleurs pas le seul à le penser. Dans son discours prononcé à Davos le 24 janvier 2018 lors du dernier Forum Economique Mondial, le Président français Emmanuel Macron a dit deux choses importantes dans ce sens : s’adressant aux dirigeants des autres pays, il a indiqué qu’il faut que les Etats cessent la concurrence fiscale et sociale ; il a ensuite interpelé les dirigeants des grands groupes présents dans la salle en ces termes: «Vous ne pouvez pas faire de l’optimisation fiscale comme vous le faites aujourd’hui». Le nouveau contrat mondial qu’il a proposé rejoint ma suggestion.
Lire aussi: « L’administration fiscale s’est fourvoyée » et Fiscalité : des perspectives peu reluisantes pour les pays africains
Votre livre tombe à point nommé. En effet, avec la chute des prix des matières premières notamment du pétrole, l’augmentation des recettes fiscales est actuellement la préoccupation de tous les Etats de la Cemac. Pensez-vous que les actions menées en ce moment vont dans le sens de ce qu’il faut faire pour atteindre cet objectif ?
Les actions menées dans la zone Cemac peuvent être appréciées au niveau de chaque Etat membre et au niveau de la coopération ou de l’intégration sous – régionale. N’ayant pas les détails des actions menées au niveau des Etats membres autres que le Cameroun, je vais me limiter à la coopération économique dans la zone Cemac dont je parle dans l’ouvrage et qui définit un cadre dont les Etats membres sont supposés s’inspirer pour définir et conduire leurs politiques fiscales. Au regard de la proposition de renforcement et d’élargissement de la coopération entre Etats que je soutiens dans mon ouvrage, je suis un peu gêné de continuer à parler de la Cemac alors qu’elle n’est pas reconnue comme une Communauté économique sous régionale par l’Union africaine.
L’institution chargée de la coopération internationale en matière de fiscalité dont je propose la mise en place ne sera efficace que si elle dispose de relais comme l’Union africaine au niveau régional et comme la CEEAC au niveau sous régional.
L’Afrique centrale compte à ce jour trois institutions de coopération économique : la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), la Communauté économique des pays du Grand Lac (CEPGL) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC). La coexistence de ces trois institutions dont les espaces, les politiques, les programmes et instruments se chevauchent, constitue un frein au processus d’intégration de l’Afrique centrale en général et en matière de fiscalité en particulier. Or, pour que la réforme du système fiscal international que je propose profite à tous les pays de cette sous-région, il est nécessaire qu’ils finalisent le processus d’intégration économique dans le cadre de la CEEAC tel que recommandé par l’Union africaine. Le Comité de pilotage de la rationalisation des Communautés économiques régionales dans la région Afrique centrale (Copil/Cer-AC) mis en place en 2009 a certes commencé ses travaux ; mais il tarde à produire les résultats escomptés. Il est important d’indiquer que l’institution chargée de la coopération internationale en matière de fiscalité dont je propose la mise en place ne sera efficace que si elle dispose de relais comme l’Union africaine au niveau régional et comme la CEEAC au niveau sous régional.
Dans votre ouvrage, vous postulez que sans une réforme du système fiscal international, les pays du sud ne parviendront jamais à mobiliser le volume de recettes fiscales nécessaires pour faire face à leurs problèmes de développement. A votre avis, à quel niveau de pression fiscale devrait se situer les pays de la Cemac aujourd’hui pour estimer leur mobilisation de recette optimale ?
Si on prend les données sur le Cameroun qui est la première et la plus diversifiée des économies de la Cemac, le taux de pression fiscale dans cette zone oscille entre 16% en 2015 et 15,1% en 2016. Or, tous les experts sont d’avis que la part des prélèvements obligatoires dans la richesse nationale doit atteindre au moins 25% pour être significative et engendrer un véritable développement. Il faut dont faire encore des efforts pour optimiser la collecte des impôts dans la zone Cemac.
S’inspirant des expériences et des avancées des institutions telles que l’Onu, l’OCDE, l’UE et bien d’autres, cette institution aura justement pour rôle d’assurer la coordination des actions de coopération internationale en matière d’économie en général et en matière de fiscalité en particulier.
Comment caractérisez-vous le système fiscal international actuel et dites-nous en quoi il illimite la collecte de recettes fiscales dans les pays de la Cemac ?
Le système fiscal international actuel, constitué des législations nationales qui se livrent une concurrence effrénée, et des instruments d’une coopération internationale en matière de fiscalité réduite jusque-là aux tentatives d’harmonisation, à l’assistance technique et à l’échange des renseignements, présente d’énormes failles mortifères pour l’impôt. Ces failles impactent négativement la collecte de l’impôt par les Etats de la Cemac comme pour tous les pays du monde.
Pour permettre de lutter contre la concurrence fiscale entre les Etats et l’évasion fiscale que vous présentez comme les «deux principaux maux» du système fiscale international actuel, vous plaidez pour « l’adaptation des règles (définition de nouveaux arrangements internationaux, définition d’un ordre public fiscal international…) et la mise en place d’une institution chargée de la coopération en matière de développement économique. Quel serait le rôle de cette institution et comment fonctionnerait-elle ?
S’inspirant des expériences et des avancées des institutions telles que l’Onu, l’OCDE, l’UE et bien d’autres, cette institution aura justement pour rôle d’assurer la coordination des actions de coopération internationale en matière d’économie en général et en matière de fiscalité en particulier. Elle sera chargée de réformer les règles existantes afin de les adapter aux nouveaux paradigmes de l’économie mondiale, et de définir un ordre public fiscal international que tous les Etats devraient respecter. Pour qu’elle soit efficace et pour qu’elle évite le syndrome de la CPI, elle devra être universelle tant dans son approche que dans sa portée, et fonctionner sur la base d’un Etat une voix.
Au regard des divergences entre Etats que vous-mêmes vous relevez sur la question, comment parvenir à une telle réforme ?
Tous les gouvernants du monde en sont conscients. Il reste à y mettre de la volonté politique au nom de la solidarité internationale qui transparait dans les Objectifs de développement durables, dont l’objectif est de transformer le monde sans laisser un pays, une sous-région ou une région en marge.
Les Etats-Unis et le Royaume Uni contrôlent chacun un réseau de juridictions fiscales considérées par certaines organisations gouvernementales et non gouvernementales comme des paradis fiscaux.
Vous dites que cette réforme devrait profiter à tous les Etats mêmes aux paradis fiscaux. Comment vous expliquez donc la réticence des pays comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Irlande, le Luxembourg, etc.?
Dans leur culture, ces pays qui sont partisans de la souveraineté et de la concurrence fiscale sont hostiles aux initiatives d’harmonisation et de règlementation. Les Etats-Unis et le Royaume Uni contrôlent chacun un réseau de juridictions fiscales considérées par certaines organisations gouvernementales et non gouvernementales comme des paradis fiscaux. Quant à l’Irlande et au Luxembourg, ils redoutent la remise en cause des cadeaux fiscaux qu’ils ont accordés aux multinationales installées sur leurs territoires et la délocalisation de ces dernières qui leur fera perdre des investissements, des emplois et des ressources budgétaires.
Malgré le contexte international que vous décrivez, on observe cependant que certains pays du sud s’en sortent mieux que d’autres. N’y-a-t-il pas des causes endogènes qui expliquent aussi la faible collecte des recettes fiscales?
Faire des propositions de réforme du système fiscal international ne signifie pas qu’il n’y a pas des causes endogènes qui expliquent les difficultés de mobilisation des recettes fiscales. La preuve est que certains pays du sud s’en sortent effectivement mieux que d’autres et réalisent des performances proches de celles des pays d’Amérique latine et des Caraïbes (ratio impôts/PIB de 22,8%). J’ai de l’admiration pour un pays comme le Togo qui a mené une réforme importante et dont les résultats parlent d’eux-mêmes. Ce pays a fusionné les administrations des douanes et des impôts au sein de l’Office Togolais des Recettes (OTR). Cette réforme lui a permis de porter son ratio impôts/PIB à 21,3% en 2015 (source : statistiques des recettes publiques en Afrique publiées en octobre 2017). Et ce n’est pas tout ; le Gouvernement togolais vient d’annoncer une profonde réforme de son code général des impôts en 2019.
Quand bien même le système fiscal international serait réformé, il ne sera pas possible aux pays en voie de développement d’en tirer profit si leurs propres dispositifs fiscaux ne sont pas mis à niveau.
Tous les experts affirment que les pays du sud sont ceux qui sont le plus victimes d’évasion fiscale. N’est-il pas curieux que ce soit dans ces pays qu’il y ait le moins de procès en rapport avec cette question ? Comment l’expliquez-vous ?
Déclencher la poursuite d’un contribuable pour fraude fiscale n’est ni une sinécure ni une partie de plaisir. Or, l’une des caractéristiques des pays du sud est qu’ils ne disposent pas d’administrations fiscales percutantes en mesure de franchir l’écueil de la commission des infractions fiscales et d’administrer la charge de la preuve devant le juge pénal. C’est la raison pour laquelle la répression pénale de la fraude fiscale n’est une réalité que dans les pays disposant des administrations fiscales redoutables. Et dans ces pays, l’agent du fisc est plus redouté que le juge.
Dans ces conditions, le plus important n’est-il pas de traiter d’abord les problèmes endogènes ?
Vous semblez oublier que cet ouvrage fait suite à mon premier ouvrage intitulé « La fiscalité levier pour l’émergence des pays africains de la zone franc : le cas du Cameroun », dans lequel j’ai relevé ces problèmes endogènes et suggéré des actions à mener. D’ailleurs, quand bien même le système fiscal international serait réformé, il ne sera pas possible aux pays en voie de développement d’en tirer profit si leurs propres dispositifs fiscaux ne sont pas mis à niveau. A titre d’exemple, sur les 27 pays africains membres du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales de l’OCDE, 22 n’ont pas encore fixé la date de leurs premiers échanges de renseignement parce qu’ils n’ont pas encore mené toutes les réformes nécessaires pour mettre leurs systèmes fiscaux en conformité avec les exigences de l’OCDE. La conséquence est qu’ils ne peuvent pas encore tirer les dividendes de la Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale qui est à ce jour l’instrument multilatéral le plus complet pour combattre l’évasion et la fraude fiscales internationales.
Interview réalisée par Aboudi Ottou
CEEAC : un sommet des chefs d’Etat annoncé pour mars
La rencontre va tabler sur les problèmes politico-sécuritaires que connait la sous-région.
Sommet de la Copax à Yaoundé en 2015. Selon le secrétariat général de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC), la capitale gabonaise abrite du 05 au 06 mars 2018 un sommet des chefs d’Etat du Conseil de paix et de sécurité (Copax). Ce sommet sera précédé du 03 au 04 mars d’un Conseil des ministres qui se tiendra lui-même après une réunion de la Commission de défense et de sécurité(CDS) prévue du 28 février au 01er mars 2018.
Le prince d’un sommet des chefs d’Etat de la communauté est acquis depuis le 29 janvier dernier. Ce jour-là, une concertation entre les chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de la CEEAC s’est tenue à Addis-Abeba en marge du 30e sommet de l’Union africaine. A l’issue de cette réunion convoquée par le président gabonais Ali Bongo, président en exercice de la CEEAC, «les chefs d’Etat et de gouvernement se sont accordés sur l’urgence de la convocation, courant février 2018, d’un sommet du Copax, précédé d’une réunion ministérielle, ainsi que sur l’opportunité de l’organisation de la 17e session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEEAC à Libreville dans la 3e semaine du mois de juin 2018», lit-on dans le communiqué sanctionnant la rencontre.
Comme l’ont reconnu les participants à la concertation, l’urgence d’un sommet de la Copax se justifie au regard des «problèmes multiformes, notamment d’ordre politico-sécuritaire, que connait la sous-région». L’Afrique centrale est en effet une zone en ébullition. La quasi-totalité des pays de la région sont confrontés chacun au moins à une crise sociopolitique. A cela, il faut ajouter la menace terroriste notamment du fait de la secte Boko Haram qui continue d’être active dans la zone du Lac Tchad. A ce sujet d’ailleurs, Ali Bongo a fait part à ses pairs de ce qu’il a convenu avec son homologue de la CEDEAO, Faure Gnassingbe Eyadema, d’organiser, à brève échéance le sommet conjoint CEEAC-CEDEAO planifié de longue date. C’est en effet au moins depuis le début de l’année 2015 qu’un sommet conjoint CEEAC- CEDEAO est évoqué sans pour autant se concrétiser.
Aboudi Ottou
CEEAC : la zone de libre-échange mise à mal par la RDC
Kinshasa refuse de respecter les agréments qui autorisent la libre circulation des marchandises en Afrique centrale.
Les exportateurs camerounais de savons dénoncent l’attitude de la RDC. Les exportateurs camerounais de savons sont en colère. Ils dénoncent le non-respect, par la République démocratique du Congo (RDC), des agréments CEEAC: «on ne peut pas comprendre que malgré les relances que nous avons faites qu’un pays comme le Congo-Kinshasa refuse d’appliquer les agréments que nous avons difficilement obtenus. Pour exporter au Congo-Kinshasa, on est obligé de passer par le Congo-Brazzaville et d’acheminer la marchandise par le fleuve Congo. Ce qui fait que les quantités sont moindres et les risques élevés», fulmine Jacquis Kemleu. Le secrétaire général de l’Association des raffineurs des oléagineux du Cameroun (ASROC) prenait part le 29 janvier dernier à la conférence annuelle du ministère camerounais de l’Economie organisé sur le thème «accélérer la diversification de l’économie pour une croissance forte et durable».
La cours de justice communautaire n’étant pas encore fonctionnelle, il ne reste plus qu’au Cameroun d’engager une procédure de règlement politique de la situation en saisissant formellement les instances exécutives statutaires (le Conseil des ministres ou la Conférence des chefs d’Etat).
L’agrément est le document qui atteste de l’origine CEEAC d’un produit et lui donne le droit de circuler en franchise de droits de douane, sans contingentement, restriction ou prohibition dans tous les 11 pays de la communauté du fait de la zone de libre-échange (ZLE) instaurée en 1983 par le traité créant la CEEAC. Le problème est qu’à ce jour, seul le Cameroun a entièrement créé les conditions de mise en œuvre de cette ZLE (tarif préférentiel CEEAC inséré dans la loi de finances, comité national d’agrément des produits au tarif préférentiel en place et fonctionnel…). C’est d’ailleurs le seul pays dont plusieurs entreprises procèdent le fameux agrément. Les décisions précisant les modalités de mise en œuvre de la ZLE ont pourtant été adoptées depuis 2004 par la Conférence des chefs d’Etat. Lors d’un autre sommet tenu en 2012, l’échéance de sa mise en œuvre effective avait été fixée en 2014.
Au secrétariat général de la CEEAC, le problème est bien connu. A la suite d’un engament pris en mai 2016 par les ministres en charge du commerce et des finances de rendre finalement opérationnel la ZLE en janvier 2017, l’institution avait mené dans les Etats des missions de sensibilisation et de plaidoyer. «Les autres pays sont en pleine violation du droit communautaire parce que les décisions de la conférence des chefs d’Etat sont applicables de plein droit dans tous les Etats 30 jours après leur publication au journal officiel de la communauté», y indique-t-on aujourd’hui, un brin agacé. La cours de justice communautaire n’étant pas encore fonctionnelle, il ne reste plus qu’au Cameroun d’engager une procédure de règlement politique de la situation en saisissant formellement les instances exécutives statutaires (le Conseil des ministres ou la Conférence des chefs d’Etat).
Aboudi Ottou
Union africaine : de la dépendance à l’interdépendance productive?
Zacharie Roger Mbarga, chercheur en Intégration Régionale. A bientôt 55 ans, l’organisation continentale a mal à sa légitimité. Déficiente dans l’impulsion d’une véritable communauté d’intérêts, dans l’institutionnalisation de sa prise en charge ou encore dans la réalisation des gains d’efficience résultant d’une intégration économique audacieuse, l’Union Africaine culmine des critiques sur le continent africain et au-delà. A la faveur du 30ème sommet de la structure supranationale, des mutations, en cours et à venir, laissent planer une once de dynamisation. Cette trajectoire constitue une rampe de lancement pour le positionnement stratégique de l’organisation et suscite des espoirs. Le chercheur camerounais en intégration régionale aide à comprendre !
Après l’Afrique de la décolonisation qu’incarnait l’Organisation de l’unité africaine (OUA), l’Afrique des idéologies y a succédé avec l’avènement de la mondialisation. La création de l’Union africaine (UA), marquant la recherche d’une intégration de développement, viendra clore ce chapitre. Vraisemblablement, l’ère de la renaissance articulée par la mise en œuvre de l’Agenda 2063 nous situe dans une mutation néolibérale. Incarnée par les réformes de l’organisation et une nouvelle génération de leaders africains, cette ère s’accompagne d’un vent d’une libéralisation assumée et de l’impératif de performance. La récente grand-messe d’Addis-Abeba vient de confirmer le vent de fraîcheur qui souffle sur l’UA. L’ordre du jour et les stratégies de contournement des points de discorde l’attestent.
Les dossiers
Placé sous le thème de la lutte contre la corruption, les échanges au cours du 30ème sommet de l’UA ont tourné autour de la pleine entrée en vigueur des textes cardinaux à savoir la convention de juillet 2003 sur la prévention et la lutte contre la corruption puis la charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance de juin 2007 (notamment son objectif N°9). Plus tard, les discussions les plus poussées et nourries se sont rapportées à l’essor de l’organisation et du continent.
Ainsi, à côté de la réforme institutionnelle, les projets intégrateurs de la première phase (décennale) de l’Agenda 2063 ont dominé les débats. L’Agenda 2063, devenu le document de référence de l’intégration continentale à l’horizon 2063, connait une première implémentation à travers le plan décennal 2015-2025. Nombre de ses projets concentrent les attentions : l’open sky africain (libéralisation de l’aviation civile en vue d’un marché unique du transport aérien en Afrique. Il prône 25% de réduction des frais de transport), la Zone de libre-échange continentale (marché unique des biens et des services), le passeport africain, la libre circulation des personnes…
Ces projets intégrateurs postulent l’instauration d’une zone préférentielle de mobilité où circulent biens, services, capitaux et personnes par voie terrestre et aérienne (pourquoi pas fluviale et ferroviaire bientôt ?). Ceci à l’effet de responsabiliser l’Afrique dans l’intensification de l’activité économique du continent et réaliser des économies d’échelle. Mais aussi intravertir la structure économique de l’Afrique par la géoéconomie régionale. Avec plus de deux milliards d’habitants en 2050 et un produit intérieur brut (PIB) cumulé actuel à près de 3000 milliards de dollars (BAD, 2017), le continent noir est un marché dynamique, attractif et en pleine modernisation.
Elu à la présidence de l’UA en 2004, l’ex président Nigérian Olesegun Obasanjo avait formulé une proposition allant dans le sens de l’autonomie financière. Celle-ci consistait pour les Etats à allouer 0,5% de leurs recettes brutes au fonctionnement de l’UA. En pleine Initiative PPTE, l’option avait fait pschitt.
Le second axe majeur qui s’est davantage fait publicité du fait de sa coloration politique demeure la réforme institutionnelle de l’organisation (organigramme et budget). Intitulée «l’impératif de renforcer notre union» et entamée depuis le sommet de Kigali (juillet 2016), la réforme de l’Union Africaine, mise en œuvre par le président Rwandais Paul Kagamé, repose sur trois piliers majeurs : le recentrement du déploiement de l’organisation, la rationalisation des compétences et des responsabilités, le financement autonome de l’organisation. En lien avec le premier pilier, l’UA se cantonnera désormais aux affaires politiques (i), à la préservation de la paix et de sécurité (ii), à l’intégration économique (iii) et la capacité de porter la voix du continent à l’international (iv).
Le second pilier envisage de rationaliser les compétences en procédant à la division du travail et la précision de la collaboration entre l’organe supranational, les communautés économiques régionales (CER) et les Etats. Il est en outre attendu la transformation du nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) en Agence de développement de l’UA. Dans un second temps, il s’agira de renforcer les prérogatives du président de la Commission en vue d’en faire une autorité exécutive avec davantage de capacités d’action. Enfin, il s’agira de réduire de moitié le nombre de sommets.
La taxe Kaberuka rencontre un accueil timide seulement 21 Etats y adhèrent et 14 l’ont inscrit dans leur loi de finance pour la collecter dès 2018. Certains mastodontes africains (Algérie, Afrique du Sud, Egypte) voient d’un mauvais œil cette taxe qui fragiliserait leur économie qu’ils reconnaissent extravertie (comme l’essentiel des économies africaines).
L’autofinancement de l’UA concerne le dernier et troisième pilier de la réforme. Il est question d’instaurer un prélèvement de 0,2% sur les produits d’importation hors Afrique, « éligibles » et non soumis aux règles de l’organisation mondiale du commerce (OMC). 75% de ce financement sera affecté au programme budgétaire et 25% au maintien de la paix. Les premières estimations démontrent que la «Taxe Kaberuka » rapporterait 1,2 milliard de dollars à l’UA tandis que le budget 2017 s’élevait à 569 millions de dollars. Préparé par un comité comprenant entre autres la Capverdienne Christina Duarte, les camerounais Acha Leke et Vera Songwe, le Bissau Guinéen Carlos Lopez, le Rwandais Donald Kaberuka, la réforme s’étale sur 2 ans maximum à compter de son adoption définitive. Elle est opérationnalisée par Pierre Moukoko Mbonjo, ancien ministre camerounais des Affaires étrangères. Il officie depuis septembre 2017 comme commissaire à la réforme de l’organisation.
D’autres questions telles que le phénomène migratoire en Libye et la stabilité de ce pays ont émaillé les travaux. Un chiffre a été évoqué « 13.000 » traduisant le nombre de rapatriés volontaires reconduits dans leur pays d’origine depuis décembre 2017. Les 54 centres de détention dont regorge le pays sont en voix de maitrise. Ceux étant sous le contrôle du ministère Libyen de l’intérieur sont considérés légaux. Ceux en situation d’illégalité, parce qu’aux mains des milices, sont en voie de fermeture. L’enquête africaine reste en attente tout comme les moyens de sensibilisation et de prévention des départs (résolutions du sommet UA-UE d’Abidjan).
Négociations
La réunion de haut niveau sur la stabilité et la sécurité en Libye autour du président Denis Sassou Nguesso (qui préside la médiation africaine) a été reportée sine die. On retiendra toutefois que l’Union africaine juge peu productive la tenue d’élections sans un tiédissement réel du conflit et un retour de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire national. En guise de soutien diplomatique, le pays présidera aux destinées de l’organisation en qualité de premier vice-président.
Fayez al-sarraj, chef du Conseil présidentiel du gouvernement libyen représentera le pays devant l’Afrique du Sud et le Congo Brazzaville élus respectivement deuxième et troisième vice-président. Evidemment, l’Union africaine n’est pas à sa première tentative d’envol. Elu à la présidence de l’UA en 2004, l’ex-président nigérian Olesegun Obasanjo avait formulé une proposition allant dans le sens de l’autonomie financière. Celle-ci consistait pour les Etats à allouer 0,5% de leurs recettes brutes au fonctionnement de l’UA. En pleine Initiative PPTE, l’option avait fait pschitt ! La taxe Kaberuka rencontre un accueil timide seulement 21 Etats y adhèrent et 14 l’ont inscrit dans leur loi de finance pour la collecter dès 2018. Certains mastodontes africains (Algérie, Afrique du Sud, Egypte) voient d’un mauvais œil cette taxe qui fragiliserait leur économie qu’ils reconnaissent extravertie (comme l’essentiel des économies africaines). Un autre groupe estime que 0,2% est onéreux pour leur petite économie, un groupe (plus idéologique) juge la logique maladroite et estime qu’imposer les importations c’est tuer la consommation des ménages. De leur point de vue, c’est les exportations qu’il aurait fallu prélever. Enfin, le groupe kagamebashing qui estime que l’homme fort de Kigali est réputé autoritaire et jouit d’une personnalité clivante. 4 niveaux de rapports de force entretenus par 24 Etats. L’Egypte a été désignée comme devant assumant la Présidence de l’UA au cours de l’année 2019. Un moyen de convertir le pays des pharaons à la cause de l’autonomie de l’Union Africaine.
Perspectives et prospectives
Sur la corruption et la gouvernance, il est éloquent de constater le sous-emploi de certains mécanismes Africains. C’est le cas de l’indice Mo Ibrahim sur la gouvernance et du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (Maep). Deux outils avec une capacité d’optimisation certaine des questions de gouvernance en
Afrique. La solution n’est donc pas toujours dans classement doing business ou dans l’indice de perception de la corruption de la banque mondiale. En l’état actuel, il est difficile d’envisager une adhésion totale aux réformes. Avec la méthode Kagamé faite de concertation permanente (téléphonique et diplomatique) et de mise en à jour concertée, la situation est susceptible d’évoluer. Une évolution dans le sens des aménagements. La réforme pourrait connaitre quelques ajustements mais la question du financement devrait quant à elle engendrer de discordes de fond notamment avec l’Algérie et l’Afrique du sud. Si l’avènement d’un nouveau régime dans la république arc en ciel laisse planer une incertitude (positive) du fait des convictions panafricanistes de Cyril Ramaphosa (dauphin politique/président de l’ANC), la position algérienne pourrait elle aussi évoluer si des arrangements diplomatiques «adéquats» sont mobilisés. L’intergouvernementalisme pesant de l’Union africaine ne fait-il pas plus de mal qu’il n’en résout ?
L’idéal panafricaniste
De manière fondamentale, les conservatismes observables et explicables devraient subir une remise en cause profonde. Questionnant ainsi la cause servie ! L’intégration régionale est un processus démocratique qui n’a de sens que lorsque les Etats cèdent des parts de souveraineté au profit d’une instance supranationale devant incarner et manœuvrer la communauté d’intérêts. La solidarité agissante, dans une optique d’interdépendance, recherche le bien commun. C’est dans ce sens, de notre humble point de vue, qu’il serait loisible de voir la taxe sur les importations de l’UA comme un moyen de débarrasser l’Afrique de sa réputation d’éternel assistée. Plus technique encore, dans une analyse prospective, il faudrait peut-être se situer dans un temps long. L’Afrique prépare son marché unique qui deviendra marché commun en passant par l’union douanière continentale. Il serait stratégique de taxer les produits externes et d’encourager la consommation locale. La concurrence qui en résulte incarnerait la préférence africaine.
Il est nécessaire de s’approprier l’héritage panafricaniste et de le défendre. L’Afrique est une construction psychologique, historique et donc identitaire. Aux revendications doivent succéder un certain pragmatisme socioculturel, économique, politique et diplomatique (Yves Valentin Mundimbe, l’invention de l’Afrique/Samir Amin, la déconnexion). L’offensive africaine dans la civilisation de l’universel ne devrait se faire non sans sa singularité (Léopold Sedar Senghor). Les valeurs africaines devraient présider dans la conception de l’Afrique comme identité singulière dans un monde globalisé. L’intégration économique ne saurait y échapper. Les évolutions encourageantes d’aujourd’hui sont donc à mettre à l’actif des présidents successifs de l’Union africaine. Ils ont su incarner et impulser un certain éveil stratégique tout en dynamisant le processus d’intégration. Sans être exhaustif, nous évoquerons : Olesegun Obasanjo (2004), Mouammar Kadhafi (2009), Obiang Nguema Mbatsogo (2011), Mohamed Ould Abdel (2014), Robert Mugabe (2015), Idriss Deby Itno (2016), Alpha Condé (2017), Paul Kagame (2018).
Tentatives de solutions
Le budget actuel de l’UA représente à peine 5% de celui de l’Union Européenne et pourtant la démographie européenne est deux fois moins que celle de l’Afrique (près de 512 millions d’habitants). Comment comprendre que 512 millions d’habitants pourraient investir et nourrir efficacement 1,2 milliard d’habitants ? Même si des considérations de plusieurs ordres pourraient discréditer cette mise en relation, il apparait utile d’apprécier le défi qui s’impose à nous africains. Le processus d’intégration connait véritablement un engorgement du fait de la lourdeur des interactions. Il faudrait peut-être aller à l’emploi de la symétrie variable comme dans le cas de l’UE. Un projet intégrateur ne s’applique qu’entre les Etats signataires. Les autres pourront rejoindre le groupe pour jouir des facilités et avantages qui en découlent.
Ainsi, l’UE à 28 pays, 22 implémentent mutuellement les accords de shengen sur la libre circulation, 19 ont en partagent la monnaie commune l’Euro. Dans un cas de figure africain, avec 55 pays membres, la zone de libre-échange continentale pourrait avoir 30 membres, le marché unique du transport aérien (open sky) pourrait contenir 30 pays, la monnaie commune africaine serait mise en application par 27 pays. Ramené à la question du financement, on pourrait instituer une fiscalité d’intégration. Plus cohérente, elle serait adossée sur la capacité de création des richesses (industrie locale) afin d’asseoir le financement de nos organisations d’intégration sur la structure de production africaine. En outre, l’instauration d’une préférence fiscale africaine qui ferait que les entreprises étrangères, voulant profiter du marché commun africain, paient un billet d’entrée. Une structure panafricaine autonome se chargerait de la collecte et du dispatching à l’ensemble des organisations reconnues (UA et CER).
Dans un tout autre versant, l’Afrique et son organisation continentale ont mal à leur légitimité du fait du leadership et de sa déconnexion à ses citoyens africains. Le rapport kagame l’exprime ainsi « nous avons une organisation dysfonctionnelle, dont la valeur pour nos Etats membres est limitée, qui a peu de crédibilité auprès de nos partenaires internationaux, et en laquelle nos citoyens n’ont pas confiance » (Rapport Kagame, p8).
Dans un tout autre versant, l’Afrique et son organisation continentale ont mal à leur légitimité du fait du leadership et de sa déconnexion à ses citoyens africains. Le rapport Kagamé l’exprime ainsi « nous avons une organisation dysfonctionnelle, dont la valeur pour nos Etats membres est limitée, qui a peu de crédibilité auprès de nos partenaires internationaux, et en laquelle nos citoyens n’ont pas confiance » (Rapport Kagame, p8). L’absence d’ancrage populaire de l’organisation continentale puise dans le leadership. Essentiellement étatique, le leadership africain n’a-t-il pas urgemment besoin d’être diversifié afin de s’oxygéner ? La diaspora, la société civile et le parlement panafricain sont autant de corps susceptibles d’assurer le relais et permettre aux citoyens de s’identifier à leur organisation fédératrice. A l’origine, le panafricanisme est une création de la diaspora africaine en captivité aux Etats Unis. C’est la descendance de celle-ci qui donnera une profondeur intellectuelle au mouvement. Le premier congrès panafricaniste (Manchester) et les premières institutions de la cause noire sont opérés à l’extérieur (Toussaint Louverture/Edition pensée africaine). La société civile est un vecteur d’inclusion, un partenaire de développement pour l’équilibre des lois et actes de gouvernance. La société civile la plus populaire et la plus puissante au monde demeure les altermondialistes. Leur capacité de déploiement pour la défense des minorités et des exclus de la gouvernance mondiale est saisissant.
Enfin, le parlement panafricain, organe consultatif non consulté, devrait être ce véritable organe élu à compétences législatives, budgétaires et de surveillance. Composé de 265 représentants pour 1,2 milliard d’habitants, le parlement demeure sous exploité et inconnu. Plusieurs Africains ne sont pas en mesure de désigner leurs représentants continentaux. L’UA représentative de sa démographie devrait abroger la baronnie technocratique du leadership africain. Davantage d’inclusion dans le leadership africain à l’effet de susciter une véritable adhésion aux projets intégrateurs (ZLEC, Open Sky africain, passeport panafricain, libre circulation). La question de la citoyenneté devrait également être agressée. Le passeport panafricain et la libre circulation pourraient aider. Un zimbabwéen au Cameroun ou un libyen en Afrique du Sud sont d’abord des africains en Afrique avant d’être des migrants. Les projets de la première phase décennale de l’agenda 2063 ci-haut énumérés constituent un trampoline, mieux un test grandeur nature sur la capacité de conduite de ce programme. La rationalité africaine est un gage de succès nécessaire. Mais très peu d’africains peuvent en parler.Une perte !
Revenons à l’analyse technique des projets, une ZLEC démantelée à 90% et opérationnelle sur la base de la nation la plus favorisée (NPF) pourrait effectivement induire les gains attendus. Face au risque de détournement de commerce animé par les accords commerciaux méga régionaux (ACMR) externes (TIPP, AECG) et d’érosion incarnés par les ACMR internes (APE/AGOA), il est urgent que l’Afrique ait son marché unique de biens, de services et de capitaux. Il en est de même de l’open sky africain. Le marché unique du transport aérien se veut une véritable aubaine. L’Afrique pèse pour 3% dans l’aviation civile internationale.
Une ZLEC démantelée à 90% et opérationnelle sur la base de la nation la plus favorisée (NPF) pourrait effectivement induire les gains attendus. Face au risque de détournement de commerce animé par les accords commerciaux méga régionaux (ACMR) externes (TIPP, AECG) et d’érosion incarnés par les ACMR internes (APE/AGOA), il est urgent que l’Afrique ait son marché unique de biens, de services et de capitaux.
Le trafic aérien sur le continent est détenu à 80% par les compagnies étrangères. Pire certains pays tel que la Tunisie ont des accords d’open sky avec des entités externes notamment l’UE. En prélude à la libre circulation et à l’effectivité du passeport africain, l’intégration par voie aérienne est un facteur important, essentiel de mobilité. Il faudrait peut-être aller encore plus vite dans la mise en œuvre effective. La confirmation d’un sommet extraordinaire le 21 mars 2018 pour lancer la ZLEC est un signe encourageant.
En définitive, il est pertinent de reprendre le questionnement de Laurent Zang qui est de savoir si l’UA veut passer de «force fragile à force tranquille » ? Les rapports de forces internationaux l’ont ravalé au rang de faire valoir. Ceci rendu fertile par une organisation stratégiquement peu armée. Aujourd’hui, la place de l’Afrique dans la gouvernance mondiale devrait se poser autrement. En finir avec la « merdisation » de nos pays par l’occident, la tentation de la méditerrané a pour dénominateur commun l’efficience de notre processus d’intégration. Il y va de notre honneur…
La constance, l’audace et la conviction des réformes de l’UA sont un pallier de piédestal. Le 30ème, au milieu des récents, s’apparentent à un acte fondateur. Cette mutation néolibérale devrait mieux embrasser l’héritage panafricain.
Zacharie Roger Mbarga,
Chercheur en Intégration Régionale
Cemac: la stratégie anti-crise en évaluation
La quatrième session ordinaire du comité de pilotage du Programme des reformes économiques et financières de la sous-région se tient cette semaine à Douala.
Ouverture des travaux ce 29 janvier 2018 à Douala. ©Intégration/Didier Ndengue Prendre des mesures urgentes et adopter le programme de travail et le budget de fonctionnement pour l’année en cours. Voilà les objectifs que se sont fixés les participants à la quatrième session ordinaire du comité de pilotage (Copil) du Programme des reformes économiques et financières de la Cemac (Pref-Cemac), qui se tiendra le 02 février 2018 à Douala.
Pour l’exercice 2017, le budget de fonctionnement de la structure s’élevait à 1 567 80 15 00 FCFA. Pour permettre à l’institution d’atteindre les missions qui lui sont assignées, le secrétariat permanent pense que la même enveloppe devrait être maintenue pour le compte de l’année en cours. Ces fonds sont puisés dans les ressources du Fonds de développement de la communauté (Fodec). Ils contribuent à atteindre l’objectif du Pref-Cemac, qui est de « concevoir et de mettre en œuvre des actions rapides, vigoureuses et coordonnées, aussi bien au niveau national que sous-régional pour la stabilisation du cadre macroéconomique et une transformation structurelle et profonde des économies de la sous-région, afin d’en renforcer la résilience et de les placer sur le chemin de l’émergence ».
Plusieurs ministres et la quasi-totalité des chefs des institutions spécialisées des six pays de la Cemac sont annoncés aux travaux de la métropole économique camerounaise.
Mandat
Le Pref-Cemac a été mis sur pied en 2016 à Malabo, par les chefs d’Etat membres. Son rôle est d’apporter une réponse appropriée au choc subi par leurs Etats, suite à l’effondrement des prix des matières premières sur le marché international. Après avoir donc défini ses missions citées supra, le Copil avait également adopté la version finale de la matrice des actions du Pref-Cemac pour la période 2017-2021, qui constituera un cadre de reformes pour l’élaboration des programmes-pays que chacun des Etats membres devra négocier avec les institutions de Bretton-Woods.
La quatrième session ordinaire du Pref-Cemac sera précédée successivement par les réunions de la cellule de suivi de l’organisme, de son secrétariat technique et des experts du groupe de travail sur l’approfondissement du marché financier de la Cemac. Il sera surtout question, au terme des travaux, de mettre en œuvre les décisions de la conférence des chefs d’Etat et des sessions du conseil des ministres, qui relèvent de la compétence de l’institution, du fonctionnement courant annuel du secrétariat technique et de l’organisation des réunions des divers statuaires.
Didier Ndengue
Cemac : le dispositif d’apport de liquidité d’urgence aux banques fonctionnel
Le 19 décembre dernier, à la sortie de sa quatrième et dernière réunion de l’année, le Comité de politique monétaire (CPM) de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) a adopté le cadre général d’apport de liquidé d’urgence pour les établissements de crédit de la Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique centrale (Cemac).
Selon les explications d’Abbas MahamatTolly, le gouverneur de la Beac et président du CPM, «l’apport de liquidité en urgence consiste à fournir, de façon discrétionnaire et exceptionnelle, de la liquidité à une institution financière solvable, mais souffrant de tensions de liquidité sérieuses pouvant entrainer un risque financier majeur pour toute la sous-région». Ce nouvel instrument de politique monétaire «vise essentiellement les banques qui ont une situation prudentielle solide (pas de problèmes de fonds propres, de rentabilité encore moins de solvabilité) mais qui se trouvent confrontées à des problèmes ponctuels de liquidité et qui, en plus, n’auraient pas des collatéraux de bonne qualité pour venir au marché monétaire se faire financer».
«On peut par exemple prescrire qu’une banque ne distribuent pas de bénéfices le temps de régler définitivement ses problèmes de liquidité», détaille le gouverneur de la Beac.
Selon le cadre adopté, la banque centrale de concert avec la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) appréciera si la situation de la banque est réellement un problème de liquidité d’urgence. Il prévoit également la signature d’un accord spécifique avec la banque demandeuse. Cet accord «est plus contraignant», explique Abbas MahamatTolli. Le Tchadien ajoute qu’il vise «des aspects plus ciblés : les questions liées à la gouvernance de la banque, à ses engagements, un reporting et des missions de contrôle et d’inspection très fréquents et des directives». «On peut par exemple prescrire qu’une banque ne distribuent pas de bénéfices le temps de régler définitivement ses problèmes de liquidité», détaille le gouverneur de la Beac.
Le 22 mai déjà, lors d’une session extraordinaire, le CPM avait autorité le gouvernement de la Beac à apporter de la liquidité d’urgence aux établissements de crédits en difficulté en attendant la mise en place du dispositif dédié pour toute la communauté. Une seule banque en a bénéficié. Il s’agit de la Comercial Bank of Cameroon (CBC). Selon gouverneur de la banque centrale, cet établissement de crédit a été renfloué à hauteur de 11 milliards de francs CFA pour faire face à ses tensions de trésorerie ponctuelle.
Aboudi Ottou
Conjoncture : la Cemac sort de la récession
Le FMI et la Beac tablent tous sur une reprise de la croissance en 2018. Mais les perspectives restent fragiles.
Siège de la Communauté, à Bangui. © Vincent Fournier/Jeune Afrique «La phase aigüe de la crise s’est quelque peu atténuée». L’évaluation est du conseil d’administration du Fonds monétaire internationale (FMI). Verdict tombé à l’issue des entretiens annuels avec la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Ces entretiens qui se sont achevés le 15 décembre dernier portaient sur les politiques communes des pays membres et les politiques communes à l’appui des programmes de réforme des pays membres. Ces programmes ont été décidés le 23 décembre 2016 au cours d’un sommet extraordinaire des chefs d’Etats de la Cemac pour éviter une dévaluation du franc CFA, la monnaie commune.
Un an après, «les réserves extérieures se sont stabilisées puis se sont redressées au troisième trimestre 2017, du fait à la fois des décaissements du FMI et de l’ajustement budgétaire sous-jacent des pays membres», indique le FMI. En effet, le taux de couverture extérieur de la monnaie tombé de 77,1% en 2015 à 56,8% en 2016, s’est stabilisé à 59% en fin 2017. Ce qui équivaut à 2,6 mois d’importation des biens et services. De 5,8 mois d’importations à la fin de 2014, le niveau des avoirs extérieurs est descendu à 2,2 mois à la fin de 2016. Même si la situation s’est inversée, le francs CFA est loin d’être tiré d’affaire. Pour éloigner le spectre de la dévaluation, la Cemac doit porter son niveau de réserves à cinq mois d’importations, niveau jugé «approprié pour une union monétaire» par le FMI.
Lire aussi: Regard du FMI sur les économies de la Cemac
Or pour 2018, la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) projette un taux de couverture extérieure de la monnaie à 66,1% pour des avoirs extérieurs évalués à 3,1 mois d’importation. A cette allure, pour atteindre 4 mois d’importation de réserves, les politiques d’ajustement devraient se poursuivre jusqu’en 2021, prévient le Fonds.
Croissance fragile
Le Comité de politique monétaire (CPM) de la Beac estime que «la situation économique demeure difficile». Le FMI n’en dit pas moins : «les perspectives à court terme de la région demeurent faibles puisqu’il est prévu que la croissance reste négative à 0,5 % en 2017, en raison de la réduction des dépenses publiques et de la poursuite de la baisse de la production de pétrole», évalue l’institution de Bretton Woods. C’est à peine mieux que le taux de croissance estimé par le Fonds en 2016 (voir tableau). Néanmoins indique le FMI, la Cemac devrait sortir de la récession en 2018. L’institution financière internationale prévoit un accroissement de l’activité au rythme de 2%. Une perspective que la sous-région doit au Cameroun. «Seule une forte croissance du PIB hors pétrole au Cameroun permet à la région de continuer d’afficher des taux positifs», observe l’institution financière internationale.
Plus optimiste, le CPM table sur un taux de croissance de 3% en 2018. Cet optimisme, Abbas Mahamat Tolli, président du CPM, le justifie par la conjoncture internationale, la remontée des cours des matières premières et l’entrée sous programme avec le FMI des pays de la Cemac. «Si tous les six pays de la communauté étaient entrés en programme avec le FMI au même moment, l’analyse qu’on présenterait ne serait pas la même», avoue celui qui est par ailleurs gouverneur de la Beac. L’avenir de la communauté se joue donc en partie sur l’issue des négociations en cours entre les bailleurs de fonds internationaux conduits par le FMI et le Congo et la Guinée Equatoriale.
Prévisions de croissance par pays
2016 2017 2018 Cameroun 4,7 4,0 4,6 Congo -2,8 -3,6 2,8 Gabon 2,1 1,0 2,7 Guinée Equatoriale -9,7 -7,4 -7,8 RCA 4,5 4,7 5,0 Tchad -6,4 0,6 2,4 Cemac -0,6 0,3* 2,1 Source : projection du FMI d’octobre 2017. *Le Fonds a revu son estimation à la baisse en fin décembre. Il table désormais sur un taux de croissance de -0,5 en 2017.
Les administrateurs du FMI soulignent par ailleurs qu’il sera essentiel que «les institutions régionales et les Etats membres de la Cemac tiennent pleinement leurs engagements pour favoriser une amélioration progressive de la situation économique et financière de la région à moyen terme». Ils se félicitent d’ailleurs de l’engagement de la Beac à envisager un nouveau durcissement de la politique monétaire si l’accumulation des réserves n’atteint pas les objectifs de la Beac.
Aboudi Ottou
Regard du FMI sur les économies de la Cemac
En fin d’année 2017, après avoir passé en revue les économies de la sous-région, des responsables du Fonds monétaire international ont donné leurs avis. Verbatim.
Christine Lagarde, DG FMI. CAMEROUN
«La performance du Cameroun dans le cadre de la Facilité élargie de crédit (FEC) a été globalement satisfaisante. Les autorités restent pleinement attachées à l’assainissement budgétaire, et le budget 2018 est conforme aux objectifs du programme. Cependant, atteindre les objectifs de déficit peut être difficile dans le contexte de recettes plus faibles que prévu et de pressions sur les dépenses en 2018 et 2019. Pour atteindre les objectifs du programme, des efforts accrus pour élargir la base des recettes non pétrolières et mieux hiérarchiser les dépenses seront essentiels tout en préservant les dépenses sociales», Mitsuhiro Furusawa, directeur général adjoint du FMI.
CONGO
« L’économie du Congo continue de subir les contrecoups de la baisse des prix du pétrole, d’une dette insoutenable et des faiblesses dans la gouvernance. Une récession plus profonde de l’économie non pétrolière en 2017 – avec une baisse de 9,2% – nuit aux segments les plus vulnérables de la population. L’ajustement budgétaire soutenu entrepris depuis 2015 a réduit les déséquilibres économiques, mais ces derniers restent toutefois importants du fait que les marges budgétaires du gouvernement sont presque épuisées. L’accumulation d’arriérés de l’État met en péril l’activité du secteur privé, contribuant aux pénuries de liquidités bancaires et compromettant la provision des services sociaux. La faiblesse des organismes de lutte contre la corruption et des statistiques limite la mise en œuvre des lois et règlements, et augmentent les vulnérabilités économiques », Abdoul Aziz Wane, chef de mission du FMI au Congo.
Lire aussi: Conjoncture : la Cemac sort de la récession
GABON
«Les résultats obtenus par le Gabon dans le cadre du programme ont été globalement satisfaisants. Bien que situation économique demeure délicate, certains signes laissent entrevoir un retournement de la tendance descendante. En 2017, la production pétrolière sera vraisemblablement inférieure aux prévisions, d’où une légère révision à la baisse du taux de croissance, de 1 % à 0,8 %. Cependant l’activité dans les autres secteurs de l’économie se stabilise. La croissance devrait connaître un rebond en 2018 grâce au redressement des cours du pétrole, à la vigueur des autres matières premières et au renforcement de la confiance du secteur privé. », Tao Zhang, directeur général adjoint du FMI.
CENTRAFRIQUE
«La politique budgétaire suit globalement les objectifs fixés. Le budget de 2018 reste ancré sur l’objectif de solde primaire tout en prévoyant une augmentation des dépenses sociales et des investissements. Afin de pouvoir contribuer à cette augmentation, il sera essentiel de redoubler d’efforts dans la mobilisation de recettes intérieures, qui restent faibles. Compte tenu du risque élevé de surendettement que connaît le pays, il est primordial de continuer à faire appel aux dons et de limiter les emprunts, même à des conditions fortement concessionnelles. L’assistance disponible doit être efficacement mise au service de projets prioritaires capables de doper la croissance économique, de créer des emplois et de réduire la pauvreté. La solide mise en œuvre du programme d’investissement et du Plan national de relèvement et de consolidation de la paix permettra d’élargir les perspectives économiques.», Mitsuhiro Furusawa, directeur général adjoint du FMI.
Propos rassemblés par Aboudi Ottou
Jean-Claude Juncker : plan d’investissement extérieur en cinq questions
Pour une meilleure compréhension du Plan d’investissement extérieur de l’UE, la Commission européenne, présidée par le Jean-Claude Juncker, a préparé des réponses aux cinq principales questions qui se posent autour de ce projet.
Comment fonctionne le Plan d’investissement extérieur (PIE)?
Le Plan d’investissement extérieur fera appel à des investisseurs privés, lorsque des propositions commerciales viables répondent à des besoins sociaux, et lorsqu’une quantité limitée de fonds publics peut attirer des fonds privés.
Le PIE constitue un nouvel instrument intégré qui repose sur trois piliers interdépendants. Afin de favoriser le développement durable, le premier pilier comprendra la mise en place d’une nouvelle génération d’instruments financiers tels que des garanties, des instruments de partage des risques, ainsi que la combinaison de subventions et de prêts. L’Union européenne contribuera ainsi à augmenter l’impact de chaque euro dépensé par les contribuables. Le deuxième pilier comportera une assistance technique plus importante, ce qui aidera les bénéficiaires à accélérer le développement d’entreprises et de projets financièrement viables, prêts à être soutenus par les nouveaux instruments financiers. Dans le cadre du troisième pilier, l’UE renforcera son dialogue avec les pays partenaires, conjugué à un dialogue structuré avec le secteur privé en vue d’améliorer le climat d’investissement et l’environnement des entreprises dans les pays partenaires respectifs.
L’approche novatrice et globale du PIE s’appuie sur les instruments de financement mixte de la Commission, réunissant les enseignements tirés de dix années d’activités de financement mixte.
Le plan d’investissement extérieur, auquel la Commission européenne contribue à hauteur de 4,1 milliards d’euros, devrait permettre de mobiliser plus de 44 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2020.
Qui peut demander à bénéficier d’une garantie dans le cadre du PIE, auprès de quels pays et comment une entreprise peut-elle présenter un projet à titre individuel?
Le financement direct de la Commission ne peut être effectué qu’en faveur des institutions financières éligibles ayant fait l’objet d’une évaluation par la Commission (BEI, BERD, AFD, KFW, etc.)
Les entreprises sont invitées à prendre contact avec les institutions financières qui gèrent les volets d’investissement, à s’informer au sujet des instruments disponibles pour leur projet ou à indiquer si elles envisagent d’investir. Tous les projets devront être centrés sur le développement durable dans les deux régions visées par le PIE/l’EFSD: le voisinage de l’UE et l’Afrique.
Un portail web et un secrétariat dédiés au PIE seront opérationnels dès le début de la mise en œuvre et un «guichet unique» sera prévu pour tous ceux qui souhaitent collaborer au PIE. Cela signifie que les entreprises pourront également demander l’accès à un financement et à une garantie pour un projet d’investissement directement auprès du secrétariat du PIE, qui les mettra en contact avec une institution financière éligible, laquelle évaluera, développera et financera le projet de sorte qu’il puisse bénéficier de la garantie.
Dans l’hypothèse où le projet ne pourrait bénéficier du soutien de l’EFSD, le secrétariat soumettra à l’entreprise en question une liste d’institutions financières compétentes dans la région concernée.
Comment les entreprises d’Afrique et des pays du voisinage peuvent-elles en bénéficier? Comment les entreprises européennes peuvent-elles en bénéficier?
Le soutien de l’EFSD sera mis en œuvre par l’intermédiaire d’institutions financières partenaires telles que la Banque européenne d’investissement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement et les institutions financières européennes bilatérales.
La Commission européenne envisagera la conclusion de partenariats «par projets» avec des acteurs du secteur privé en Europe et dans les pays partenaires. Une plus grande visibilité des possibilités d’investissement en dehors de l’UE, en coopération avec les pays partenaires, sera également bénéfique aux acteurs tant en Europe que dans les pays partenaires.
Davantage d’investissements seront combinés à une action ciblée pour améliorer l’environnement des entreprises et le climat des investissements dans les pays partenaires ainsi qu’à une assistance technique accrue. Cela donnera naissance à une situation où chacun trouvera son compte, que ce soit le secteur privé local, qui deviendra plus actif, ou les entreprises de l’UE qui souhaitent développer leurs activités en direction des pays en développement et des pays du voisinage.
Une interaction directe avec les entreprises et leurs associations sera également recherchée au travers d’un dialogue pour encourager une plus grande participation du secteur privé et des solutions fondées sur le marché dans le domaine de l’agriculture et de l’agroalimentaire durables, de l’énergie durable, des infrastructures et du secteur social.
Quels types de projets seront financés dans le cadre du PIE? Pouvez-vous donner des exemples?
La garantie EFSD peut couvrir des risques spécifiques inhérents à des projets d’investissement et ainsi encourager la participation des investisseurs. Par exemple, dans le cas des projets d’énergie renouvelable, la garantie EFSD peut contribuer à atténuer les problèmes de liquidités à court terme et, de ce fait, encourager les investisseurs à y participer.
Un exemple de réussite d’un projet précédemment soutenu par la Commission dans le secteur de l’énergie est l’initiative de financement de l’électrification (ElectriFI). En remédiant à l’absence d’accès au capital d’amorçage et aux capitaux à moyen et à long terme, le projet vise à aider les populations vivant dans des zones rurales mal desservies à accéder à des services électriques et énergétiques durables, fiables et abordables.
Un projet similaire dans le secteur des petites et moyennes entreprises est le fonds SANAD, qui fournit un financement par l’emprunt ou sur fonds propres aux institutions financières partenaires au niveau local, lesquelles redistribuent les prêts à des micro entreprises et des petites et moyennes entreprises, contribuant ainsi à leur croissance au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Étant donné que ces entreprises représentent 60 % du PIB et 70 % de l’emploi, elles sont essentielles pour le dynamisme de l’économie et du marché du travail. Le fonds SANAD fournit des instruments financiers tels que des prêts, des dettes subordonnées, des garanties et des capitaux propres aux institutions financières qui sont ses partenaires au niveau local, mais il ne se borne pas à apporter une assistance financière. Il existe en outre une facilité d’assistance technique, cofinancée par l’UE à hauteur de 2 millions d’euros, qui vise à soutenir les initiatives de financement privé et à renforcer leurs capacités, autrement dit à accroître la viabilité de l’approche dans son ensemble.
L’initiative Boost Africa reposera sur le recours à des instruments d’investissement mixtes, une assistance technique et la formation des entrepreneurs en vue d’attirer les investisseurs et de mettre en place une infrastructure entrepreneuriale efficace en optimisant le soutien aux micro-entreprises et aux petites et moyennes entreprises au stade le plus précoce et le plus risqué de leur développement.
Le projet EURIZ aidera les micro- entreprises et les petites et moyennes entreprises délaissées financièrement (secteur vert, agriculture, entreprises gérées par des femmes, jeunes pousses et autres) à obtenir des prêts pour se développer et créer des emplois durables, en leur fournissant des garanties.
La Commission européenne s’appuiera sur ces exemples positifs de projets réalisés avec le soutien du PIE pour les reproduire. Les projets menés dans le cadre du PIE seront centrés sur des domaines clés identifiés comme essentiels en termes de création d’emplois décents et durables, de développement des économies des pays partenaires et d’intégration de ces économies dans l’économie mondiale. À titre d’exemples de ces domaines, citons notamment les énergies renouvelables, les projets de lutte contre le changement climatique et le soutien des micro entreprises et des petites et moyennes entreprises locales. D’autres domaines tels que l’agriculture pourraient également être concernés.
Comment ferez-vous pour garantir que cela se traduira en définitive par une croissance durable et des emplois décents?
La Commission européenne suivra de près les progrès du Plan d’investissement extérieur et rendra compte annuellement au Parlement européen et au Conseil des opérations de financement et d’investissement couvertes par le PIE. Un rapport sera également présenté au public afin de permettre à toutes les parties intéressées, y compris la société civile, d’exprimer leur avis.
Conformément aux politiques de l’UE en matière de transparence, les contreparties éligibles publieront pro activement et systématiquement sur leurs sites web les informations relatives à toutes les opérations de financement et d’investissement couvertes par le PIE, en tenant compte de la protection des données confidentielles et commercialement sensibles. Sur son site web, ainsi que sur sa page web consacrée au PIE et par tout autre moyen, la Commission communiquera aussi bien avec les citoyens qu’avec les parties intéressées, en publiant des informations sur les aspects essentiels de ses activités.
Investissement : l’ambitieux plan de l’Union européenne pour l’Afrique
En trois ans, Bruxelles ambitionne d’attirer sur le continent africain des milliers de milliards de francs CFA d’investissement. Objectif : attaquer les causes profondes de la migration irrégulière.
Les décisions prises lors du cinquième sommet Union africaine (UA) – Union européenne (UE) tenu les 29 et 30 novembre 2017 à Abidjan en Côte d’Ivoire sont déjà implémentées. L’UA, l’UE et le groupe de travail mixte des Nations unies viennent d’adopter une feuille de route pour l’évacuation par voie aérienne des migrants séquestrés en Libye. Dans la foulée de la lutte contre les migrations irrégulières, il y a le lancement du plan d’investissement extérieur (PIE) de l’UE. Doter d’un budget de 4,1 milliards d’euros (près de 2700 milliards de francs CFA), le PIE aspire à encourager l’investissement en Afrique et dans les pays voisins de l’UE. L’objectif est de mobiliser 44 milliards d’euros (près de 29.000 milliards de francs CFA) d’investissement d’ici 2020. Le but ultime est de créer de nouvelles possibilités d’emploi pour les jeunes sur l’ensemble du continent africain. Dans ce dossier, le journal Intégration vous présente les contours de ce plan. Il explore aussi l’avenir des relations entre l’Afrique et l’Europe après l’accord de Cotonou. Cet accord qui encadre la coopération entre les deux parties arrive à échéance en juin 2020.
Il ne suscite pas autant de commentaires que la déclaration commune sur la situation des migrants en Libye. Mais le nouveau plan d’investissement extérieur (PIE) de l’Union européenne (UE) fait partie des grandes annonces du 5ème sommet Union africaine (UA) – UE du 29 – 30 novembre dernier à Abidjan en Côte d’Ivoire. De la présentation faite aux chefs d’Etat africains, on retient qu’avec le PIE, les 27 Etats membres de l’UE ambitionnent de mobiliser pour le continent et certains pays au voisinage de l’UE, 44 milliards d’euros (près de 29.000 milliards de francs CFA) d’investissement en trois ans (2018-2020). En stimulant l’investissement public et privé, l’UE espère «venir à bout des obstacles à la croissance dans nos pays partenaires, créer de nouvelles possibilités d’emploi pour les jeunes sur l’ensemble du continent africain» et partant, lutter contre le chômage, l’une des causes profondes de la migration irrégulière.
Lors du sommet et des forums organisés en marge des travaux, il est apparu qu’investir dans la création d’emplois pour les jeunes est une priorité absolue pour l’Afrique comme pour l’UE. En effet, 60 % de la population africaine a moins de 25 ans. Le sixième forum d’affaires UE – Afrique, qui a rassemblé le 27 novembre 2017 au Palais de la culture d’Abidjan les représentants des secteurs public et privé des deux continents sur «la création d’emplois pour les jeunes», a montré l’ampleur de la tâche: «Le chômage des jeunes constitue une question de développement pressante pour l’Europe et l’Afrique : d’ici à 2050, la population des jeunes du continent africain devrait doubler, mais pour les 10 à 12 millions de personnes qui, selon les estimations, intègrent le marché du travail chaque année, seuls 3 millions d’emplois dans l’économie formelle seront créés», lit-on dans le rapport dressé à l’issue de cette rencontre.
Ensemble, l’UE et ses Etats membres sont les premiers donateurs mondiaux d’aide au développement. Ils ont fourni pour 75 milliards d’euros d’aide en 2016, soit près de 60% de l’aide totale. Mais avec le temps, les 27 se sont rendus compte que «l’aide traditionnelle au développement ne peut à elle seule relever le défi de parvenir à un développement durable. Elle doit être complétée par d’autres instruments pour mieux utiliser et optimiser les fonds publics de plus en plus limités».
A travers le PIE, l’Union européenne veut donner l’exemple en développant des partenariats plus efficaces, allant au-delà de l’aide traditionnelle au développement. Comment les 4,1 milliards d’euros (près de 2700 milliards de francs CFA) de la Commission européenne seront-ils utilisés ? Concrètement, cet argent servira par exemple de garantie auprès des banques, pour qu’elles financent les PME. Une partie de l’argent servira aussi à apporter l’assistance technique (Conseils, tutorat…) à ceux qui entreprennent sur le continent, de préférence dans les énergies renouvelables et la connectivité, l’agriculture, l’agro-industrie et le numérique.
Mais tous les pays ne bénéficieront pas du même volume de financements. Car le PIE est soumis au principe de la concurrence, avec des ressources limitées par rapport aux besoins globaux de l’Afrique. Les premiers venus avec des projets respectant les critères de bancarisation seront les premiers servis. Les Etats africains devraient donc prévoir un accompagnement étroit du secteur privé dans l’ensemble du processus. Une opportunité pour le programme de promotion des champions nationaux que met par exemple en place en ce moment un pays comme le Cameroun.
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Ils ont dit
Federica Mogherini, vice-présidente de la Commission européenne
«C’est le plan dont l’Afrique a besoin»
Moins de 10 pour cent des investissements directs étrangers en Afrique sont réalisés dans des régions fragiles, alors que ce sont elles qui en ont le plus besoin. Nous voulons faire de notre Plan d’investissement extérieur le puissant moteur d’une croissance plus inclusive et durable, pour créer une énergie verte, donner de nouvelles possibilités aux entrepreneurs, également dans l’Union européenne, aux jeunes et aux femmes pour les rendre autonomes. C’est le plan dont l’Afrique a besoin; il répond aux demandes de nos partenaires africains et exprime tout le potentiel du partenariat européen.
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Neven Mimica, commissaire chargé de la coopération internationale et du développement
«Une nouvelle approche pour éradiquer la pauvreté»
Notre Plan d’investissement extérieur instaure une nouvelle approche pour éradiquer la pauvreté et parvenir à un développement inclusif et durable. En faisant appel notamment au financement privé, notre contribution de 4,1 milliards d’euros mobilisera jusqu’à 44 milliards d’euros d’investissement qui ne seraient pas réalisés autrement. Il revient maintenant à tous les acteurs clés du secteur privé en Europe et dans nos pays partenaires d’unir leurs efforts aux nôtres pour instaurer une croissance durable et créer des emplois décents au bénéfice de tous.
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Johannes Hahn, commissaire pour la politique européenne de voisinage et les négociations d’élargissement
«De nouvelles possibilités commerciales aux entreprises de l’UE»
L’Europe doit faire face à de nombreux défis, tant à l’intérieur de ses frontières qu’à l’extérieur, qui devraient s’amplifier dans le futur avec l’intensification de la pression démographique, de la mobilité, des conséquences du changement climatique et à cause des conflits régionaux en cours. Elle a tout intérêt à ce que nous œuvrions tous en faveur d’une croissance économique durable et équilibrée dans nos pays partenaires. La participation du secteur privé et l’instauration de l’environnement le plus propice à son épanouissement étaieront ces efforts. En stimulant la croissance durable chez nos partenaires d’Europe et d’Afrique, nous offrons également de nouvelles possibilités commerciales et d’investissement aux entreprises et investisseurs de l’UE.
Haro sur la libre circulation en zone Cemac ?
Le Gabon s’inquiète pour le dispositif sécuritaire accompagnant la libre circulation au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac).
Le chef de l’Etat gabonais Ali Bongo Ondimba a exprimé son inquiétude en ces mots: «Oui à la libre circulation des personnes et oui à la sécurité également». En visite en Guinée Equatoriale les 02 et 03 décembre dernier, le dirigeant gabonais a fortement plaidé pour une «intégration sécurisée», après la mesure de suppression de visa pour les Etats membres de la Cemac. Il argue à cet effet: «les décisions prises ne doivent pas mettre en danger et en péril la stabilité de nos pays».
Lors du sommet extraordinaire de N’djamena, les Etats de la Cemac, en vue d’accompagner la mise en œuvre de la liberté de séjour, ont décidé «d’autoriser la Bdeac à prélever, sur les ressources du Fonds de développement de la Communauté (Fodec), le montant de 1,7 milliard de francs CFA pour le paiement du reliquat dû à Interpol au titre de la sécurisation des frontières de la Cemac. Elle [la conférence des chefs d’Etat de la Cémac] a également instruit la Commission de la Cemac de prendre toutes les dispositions pour la création des postes sécurisés aux frontières, afin de réserver le bénéfice exclusif de la libre circulation aux ressortissants de la Communauté. En outre, la Conférence a exhorté les Etats membres, qui n’ont pas encore produit leur passeport Cemac, à le faire dans les meilleurs délais». C’est dire que la sécurisation des frontières et le contrôle des flux de mouvement est une préoccupation communément partagée.
La Cemac dispose, depuis janvier 2004, d’un accord d’extradition et d’un accord de coopération judiciaire. La déclaration du président gabonais, qui semble ne pas être partagée par son homologue hôte, illustre bien les inquiétudes qui continuent de retarder la mise en place d’une libre-circulation optimale dans la zone Cemac. Le 29 juin 2005, les Etats de la Cemac avaient dessiné les contours de la libre circulation intégrale et optimale. Plus de douze années plus tard, ni le passeport Cemac, ni les conditions d’établissement, encore moin la liberté de service ne sont ancrés.
ZRM
Monnaie électronique : les transactions en hausse de près 300% dans la Cemac
Dans son rapport sur l’«état des systèmes de paiements par monnaie électronique dans la Cemac 2011-2016», la Banque des Etats d’Afrique centrale (Beac) révèle qu’en décembre 2016, les transactions de monnaie électronique dans la Cemac s’élevaient à un peu plus de 1 631, 7 milliards de francs CFA. En décembre 2015, ces mêmes transactions se situaient à 574, 3 milliards, soit une progression annuelle de plus de 284%.
Le rapport indique que 97 836 317 transactions ont été effectuées en 2016 pour 12 652 965 utilisateurs la même année. De manière concrète, les interactions monétaires électroniques s’articulent en recharges (735 160 735 601 francs CFA), transfert d’argent (305 215 677 038 francs CFA), retraits automatiques (29 139 734 519 francs CFA), retraits au guichet (441 116 707 997 francs CFA), paiements (121 071 529 512 francs CFA).
Dans ce package, le mobile money représente 94% de sa valeur. Soit 1 533,14 milliards franc CFA. Le leadership est partagé entre le Cameroun et le Gabon. Ces deux pays représentent 90% de l’activité, soit respectivement 49% et 41%.
Les forêts à la merci des chantiers infrastructurels
Le couvert forestier de l’Afrique centrale est grandement menacé par la dynamique des grands projets d’investissement.
Essentiellement non-forestiers, ces grands projets ont causé en dix ans la disparition de plus de 10 millions d’hectares de forêts dans la région, selon l’étude intitulée : «Analyses des conversions des forêts par les grands investissements en Afrique centrale». Une étude réalisée par quatre organisations non gouvermentales de la région. Il s’agit du Centre pour l’environnement et le développement (Ced) au Cameroun, l’Observatoire congolais des droits de l’Homme (Ocdh) au Congo, Brainforest au Gabon et la Maison de l’enfant et de la femme pygmée (Mefp) en République Centrafricaine.
Deuxième plus grand massif forestier au monde après l’Amazonie, les forêts d’Afrique centrale sont une source d’approvisionnement en biens et services pour les communautés locales ou les peuples autochtones qui en dépendent pour leur survie. Très riches en ressources naturelles variées, elles font l’objet depuis toujours de nombreuses convoitises d’acteurs tant nationaux qu’internationaux. Elles subissent d’importantes pressions exogènes et endogènes, véritables entraves à leur gestion durable. Les grands investissements non forestiers, en l’occurrence l’exploitation minière, les plantations agro-industrielles et les infrastructures (routes, chemin de fer, barrages, etc.) font également partie des procédés qui entravent la gestion durable des forêts.
Il serait donc judicieux, de l’avis des auteurs du rapport d’étude : de renforcer les instruments légaux de conversion forestière, notamment les Accords de partenariat volontaire (APV) ; d’encourager l’attribution objective et juste des terres stimulant le développement de l’aménagement du territoire dans le pays; d’inviter et d’accompagner les Etats à une gestion intégrée, optimale et avant-gardiste de leur parc forestier ; de faire respecter aux investisseurs leurs engagements contractuels envers la palette de bénéficiaires ; de veiller à la prise en compte des droits et intérêts des communautés locales et peuples autochtones…
ZRM
Système financier : la Beac recommande la vigilance
Lors des dernières assises du Comité de stabilité financière en Afrique centrale (CSF-AC), tenues le 21 novembre dernier au siège de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) à Yaoundé, une photographie de l’état des lieux du secteur financier a été faite.
Au premier semestre 2017, «en dépit d’un environnement économique, monétaire et financier peu favorable, les différentes composantes du système financier sous-régional ont fait preuve de résilience grâce aux efforts combinés des Etats membres, de la banque centrale, de la Commission de la Cemac, des superviseurs et des régulateurs», rassure cette instance présidée par Abbas Mahamat Tolli, gouverneur de la Beac.
Analysant les risques et vulnérabilités pesant sur le système financier sous-régional, «le Comité a constaté que nombre de défis relevés sont liés à l’évolution du cadre macroéconomique». En effet, explique CSF-AC, «ce dernier continue de subir les effets défavorables de la faiblesse des cours des matières premières, avec pour conséquence la persistance de difficultés financières pour les différentes contreparties du système financier, en particulier les Etats membres». D’autant plus que la baisse des recettes pétrolières, représentant entre 25 et 85% des recettes publiques des pays de la Cemac (exception faite de la République Centrafricaine), continue de peser sur ces derniers. Dans ce contexte, «le Comité a souligné l’importance d’une vigilance accrue de tous les acteurs».
Si les initiatives prises par les Etats de la Cemac en vue de consolider les finances publiques sont à encourager, le CSF-AC a prescrit une matrice d’actions spécifiques dans le sillage des différentes actions engagées. L’unification du marché financier sous-régional est, selon lui, une opportunité efficiente à capitaliser. Aucune projection sur l’état du secteur financier sous-régional n’a été donnée au sortir de ces assises.
Identifié comme risque de (re)chute de premier niveau, le secteur financier est très étroitement scruté par le Fonds Monétaire International. L’une des épines demeurant l’amélioration du respect des règles prudentielles relatives aux principaux risques bancaires. Notamment les prêts entre parties liées, la concentration des risques, les règles d’honorabilité professionnelle des administrateurs de banque, le provisionnement des créances improductives, la modération du risque lié à l’exposition vis-à-vis des Etats membres de la Cemac.
ZRM
Traite des migrants en Libye : la réponse UA – UE est lancée !
L’action commune contre ce fléau, issue de la rencontre bi-continentale de d’Abidjan, est déjà à son opérationnalisation.
L’Union africaine (UA), l’Union européenne (UE) et le groupe de travail mixte des Nations unies viennent d’adopter une feuille de route pour l’évacuation par voie aérienne des migrants détenus en Libye. Elle s’étendra sur une période de six mois. Pour l’heure, 20.000 migrants identifiés dans des centres de détention contrôlés par le gouvernement seront évacués par pont aérien dans six semaines. Concernant des actions concrètes, le 6 décembre dernier, 500 migrants nigériens rapatriés de Libye sont arrivés à Niamey avec le concours de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Par la suite, le 8 décembre, le Maroc a ramené au bercail 235 de ses ressortissants, qui ont été par la suite transportés dans leurs villes d’origine. La liste des rapatriements des migrants n’est pas exhaustive.
Nous sommes bien-là dans la matérialisation de l’une des trois décisions contenues dans la déclaration commune sur la situation des migrants en Libye. Cette déclaration commune, rendue publique à l’issue du 5ème sommet UA-UE, porte sur la mise en branle d’une opération d’évacuation d’urgence des migrants et l’institution d’une commission d’enquête de l’Union africaine. La création d’un groupe de travail (Task Force) UA-UE de police et de renseignement chargée de démanteler les réseaux de trafiquants ou de passeurs et l’institution d’une commission d’enquête de l’Union africaine ne devraient pas tarder à suivre.
ZRM
Post 2020 : l’UE propose un partenariat régional à l’Afrique
Avec l’expiration de l’Accord de Cotonou en juin 2020, les relations entre l’Union européenne, les pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) se cherchent d’ores et déjà un nouveau bail avec des rounds de négociations dès septembre 2018.
Quelle relation entre l’Afrique et l’Union européenne après l’Accord de Cotonou? Même si la question n’était pas officiellement à l’ordre du jour du cinquième sommet Union africaine (UA) – Union européenne (UE), elle est déjà dans tous les esprits. L’Accord de Cotonou conclu en 2000 régit actuellement les relations entre l’UE et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Mais il arrive à expiration en 2020. En Afrique, aucune orientation officielle relative à cette question pour l’instant.
Le groupe ACP, à travers sa nouvelle vision rendue publique en mars 2016, appelle à «réagir de façon anticipative aux évolutions du contexte mondial en vue de s’y adapter, de maintenir sa pertinence et de répondre aux besoins de ses Etats membres et des parties prenantes». Auparavant, précisément dans la déclaration de Sipopo adoptée au terme du 7e sommet des chefs d’État et de gouvernement ACP tenu à Malabo, en Guinée équatoriale, en décembre 2012, le groupe a affirmé qu’il y a encore une place et des perspectives pour un véritable partenariat ACP-UE post 2020, capable d’apporter une contribution et une réponse concrète et efficace aux objectifs de l’agenda 2030.
Côté européen, «une refonte en profondeur des structures actuelles du partenariat ACP-UE s’impose pour assurer la primauté des dynamiques régionales». A en croire l’UE, la coopération deviendrait plus régionale du fait «de la différenciation des tendances économiques, politiques et sociales entre les pays à revenus intermédiaires en plein essor et les États fragiles et les moins développés». «Il n’y a plus de Sud homogène partageant les mêmes intérêts communs, et les alliances au niveau mondial ne sont plus basées sur les mêmes considérations qu’en période de Guerre Froide» affirme la direction générale de la coopération internationale et du développement de la Commission européenne (DG DEVCO) et le Service européen pour l’action extérieure (SEAE).
Mais, en guise de compromis, l’UE propose le scénario de l’accord-cadre. Dans cette nouvelle configuration, les relations UE-ACP prendraient la forme d’un seul et unique accord juridiquement contraignant avec les pays partenaires concernés, autour de quelques grands axes: un cadre qui s’appliquerait à l’UE et à tous les pays ACP, trois partenariats régionaux distincts (Afrique-UE, Caraïbes-UE, Pacifique-UE), une extension au-delà des pays ACP, une architecture institutionnelle flexible et à plusieurs niveaux et de nouveaux moyens de mise en œuvre.
Avec cette approche, estime-t-on à DG DEVCO, la préservation du cadre global ACP-UE «évite le coût d’abandon de l’actuel partenariat avec le groupe ACP et sauvegarde les acquis de l’Accord de partenariat de Cotonou». Par ailleurs, il est davantage question de l’approfondissement de la régionalisation, qui consiste à «aligner l’action extérieure de l’UE sur les dynamiques de terrain en Afrique et ainsi améliorer sa cohérence et son efficacité globales». Mais dans les milieux diplomatiques sur le continent, certains estiment que le scénario de l’Accord-cadre «n’opère pas de choix politique clair et cohérent». Il serait plutôt une réforme ambiguë qui d’un côté, tente effectivement de moderniser l’action extérieure de l’UE avec l’Afrique, les Caraïbes et le Pacifique, d’approfondir les relations politiques régionales et de poursuivre l’intérêt mutuel, mais qui dans le même temps appuie sur la pédale de frein en se repliant sur un cadre ACP-UE postcolonial.
Certains changements de politique au sein de l’UE pointent la nécessité pour le Groupe ACP de reconnaître qu’il convient de modifier les accords de coopération unissant les deux parties. Selon de nombreuses personnes interrogées, les stratégies séparées de l’UE pour l’Afrique, les Caraïbes et le Pacifique -bien qu’approuvées ultérieurement par les régions Afrique et Caraïbes- et les Accords de partenariat économique sont susceptibles de miner la solidarité du groupe ACP.
De plus, l’élargissement de l’UE, les changements institutionnels apportés par le Traité de Lisbonne, les impacts de la récession mondiale, la crise financière et la crise de la zone Euro conduisent à des politiques communautaires plus centrées sur elles-mêmes. Les grandes communications politiques récentes, telles que le «Programme pour le changement» et «Le commerce pour tous», qui visent apparemment à renforcer l’impact de l’aide européenne au développement, pourraient également avoir des répercussions directes sur un certain nombre d’États ACP, en particulier ceux classés dans les catégories des revenus moyens et supérieurs.
Depuis 2008, la Commission européenne a conclu des Accords de libre-échange (ALE) avec neuf pays non-ACP et est actuellement engagée dans des ALE et d’autres négociations commerciales avec vingt autres pays et deux blocs régionaux. En outre, elle mène des négociations commerciales avec des partenaires commerciaux de premier plan tels que le Canada, le Japon, le Mercosur (communauté économique qui regroupe l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay, le Venezuela) et les États-Unis. Les méga-accords commerciaux régionaux en cours de négociation avec les États-Unis et le Canada envisagent couvrir un plus large éventail de disciplines commerciales, assorties d’engagements plus ambitieux que jamais vu auparavant. Ces nouveaux méga-ACR établiront vraisemblablement un précédent pour les futures relations du Groupe ACP avec ces partenaires potentiels.
Zacharie Roger Mbarga
La fusion n’est pas pour demain
CEEAC-Cemac- CEPGL
Une dizaine d’années après son lancement, le processus de construction d’une Communauté économique régionale unique en Afrique centrale n’a que très peu avancé.
A quand la fin du processus de rationalisation des communautés économiques régionales (CER) d’Afrique centrale ? Dix ans après la création du Comité de pilotage de la rationalisation des Communautés économiques régionales d’Afrique centrale (Copil/CER-AC), la réponse à cette question reste peu évidente. Le 27 novembre dernier à l’ouverture de la 4e réunion de ce comité, son président, Louis Paul Motaze, a été, lui-même, incapable de donner une date butoir: «l’Union africaine a fixé des échéances. Nous, notre rôle est d’être prêt. Nous n’allons pas forcement attendre la fin des échéances. C’est-à-dire que si nous nous pouvons aboutir à la création d’une seule communauté demain, nous n’allons pas nous en plaindre», a esquivé le ministre camerounais de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire. «De toute façon avec les ministres venant de ces Etats (les Etats d’Afrique centrale) nous travaillons aujourd’hui à faire en sorte que progressivement nous allions à une seule communauté économique», a-t-il tranché.
Actuellement, trois CER coexistences en Afrique centrale : la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et la Communauté économique des pays des Grands Lacs (CEPGL). Pour les mêmes objectifs d’intégration, chacune est régie par des traités internationaux. «Et cela a des conséquences non seulement sur le plan du travail (parce que c’est le même travail qui est fait de manière dupliquée) mais cela a également des conséquences budgétaires (parce qu’il faut bien faire fonctionner chacune des communautés)», explique Louis Paul Motaze pour justifier la décision de la rationaliser les CER d’Afrique centrale prise en 2007 les chefs d’Etat de la sous-région.
Avec la crise économique actuelle, la question de la construction d’une CER unique se pose avec plus d’acuité car les Etats ont moins d’argent pour répondre à toutes les sollicitations financières nécessaires au fonctionnement des institutions communautaires. Pour donc faire avancer le processus, quatre préoccupations majeures étaient sur la table des ministres à l’occasion de cette 4e réunion du Copil/CER-AC : la généralisation de la libre circulation des personnes, l’unification des zones de libre-échange (Zle), le rapprochement institutionnel et l’intégration monétaire.
Accord à minima
Mais au regard du communiqué final, la principale avancée a été enregistrée sur l’unification des zones de libre-échange (Zle). Sur cette question en effet, le projet de décision conjoint portant harmonisation de quatre instruments de la zone de libre-échange CEEAC-Cemac (certificat d’origine, dossier d’agrément au tarif préférentiel, formulaire de vérification de l’origine du produit et schéma type d’agrément au tarif préférentiel). Pour le reste, les décisions ont été remises à plus tard. La question de l’intégration monétaire semble même avoir été évitée par les ministres. «Concernant la note d’information sur l’intégration monétaire, les membres du Copil/CER-AC en ont pris acte et demandé au Copil/CER-AC de se concentrer sur l’objectif de création d’une CER unique en Afrique Centrale», lit-on dans le communiqué final. Une façon de dissocier l’intégration monétaire au processus de rationalisation actuelle.
La réunion de la cellule des experts, tenue du 23 au 25 novembre 2017, augurait déjà un tel résultat au regard des positions exprimées par les représentants de certains Etats. La délégation burundaise a, par exemple, posé une réserve quant à la validation d’un ensemble de questions notamment le rapprochement des cadres institutionnels. «Les chefs d’Etat de la CEPGL devraient acter sa disparition avant toute fusion avec les autres entités. Le Burundi y adhèrera complètement et sans restriction à cette condition-là», a indiqué un de ses membres.
Pour le Gabon et le Congo Brazzaville, la crise économique qui a fait planer l’ombre d’une dévaluation du francs CFA en Afrique centrale devrait provoquer une certaine rationalité. Puisque la diminution drastique des réserves monétaires (devises) fut la cause, elle devrait guider la méthodologie de choix de l’expertise consultance. Il serait donc, de leur point de vue, bénéfique pour les pays de faire plus appel à l’expertise régionale pour l’élaboration des études. Le Gabon insiste que cela devrait dorénavant faire l’objet d’un appel régional à manifestation de candidature car «le Gabon détient des compétences en la matière».
L’argent fait défaut
Jusqu’ici, le processus de rationalisation est principalement financé par le Cameroun. La CEEAC et la Cemac tentent sporadiquement de venir en appoint.
Depuis sa création en 2007, le Comité de pilotage de la rationalisation des Communautés économiques régionales d’Afrique centrale (Copil/CER-AC) fonctionne avec un budget a minima. En avril 2015, la troisième réunion du Copil, constatant une inquiétante insuffisance en ressource financière, avait décidé de joindre ses décisions de 2010 et de 2013. C’est-à-dire que le budget de la rationalisation se financera par les Etats et les CER à concurrence égale de 30 000 000 (trente millions) de francs CFA par an pour les Etas et 150 000 000 (cent cinquante millions) pour les CER. Ainsi, depuis 2010, le Copil aurait dû bénéficier de 3 420 000 000 (trois milliards quatre cent vingt millions) de francs CFA.
La note présentée par le secrétariat technique expose une dotation exacte de 1 251 000 000 (un milliard deux cent cinquante et un millions) de francs CFA soit 30,48% de couverture. On peut évoquer en plus, un appui (non chiffré) en matériel informatique de la CEEAC au travers de son Programme d’appui au renforcement des capacités institutionnelles (PARCI/CEEAC). De manière précise, l’Etat du Cameroun a fourni 821 000 000 (huit cent vingt et un millions) de francs CFA soit 110 000 000 (cent dix millions) francs CFA de contributions financières, la mise en disponibilité gracieuse des locaux, le mobilier de bureau et le matériel informatique. La CEEAC a offert 190 000 000 (Cent quatre-vingt-dix millions) de francs CFA et la Cemac 240 000 000 (deux cent quarante millions). Cette situation est le premier plomb dans l’aile de la rationalisation qui ne peut financer son opérationnalisation avec les points de vue critiques des Etats membres.
Douloureuse
2 169 000 000 (deux milliards cent soixante-neuf millions) francs CFA sont soit à rembourser (pour les insolvables), soit à trouver. Afin de doter la machine de la rationalisation du maximum de ressources primaires dont elle a besoin. Aujourd’hui cette institution opérationnelle est en sous-effectif et dans l’exiguïté en attente de la livraison du bâtiment siège offert par l’Etat du Cameroun. Le lead de la rationalisation semble avoir été octroyé au Cameroun par filiation. L’harmonisation des politiques, programmes et instruments d’intégration de la Cemac, de la CEEAC et de la CEPGL pour aboutir à terme à une seule CER dans la région tel que dévolue au Copil dans ses missions organiques parait non prioritaire. Pour le président de la Commission de la Cemac, Pr Daniel Ona Ondo «la grandeur des nations se mesure à l’aune des sacrifices et dynamiques qu’elles consentent à induire».
Deux attitudes ont suivi la présentation de ce tableau sombre. Au premier chef, les félicitations au Cameroun de la part de l’ensemble des Etats. Ensuite, une absence de solutions sur l’amélioration de la situation. Entre annulation d’une partie des arriérés, adoption d’une contrainte et stimulation de l’élan de solidarité les experts ont dû se résoudre à un appel à davantage de volonté venant du Président de séance. Car les motivateurs de décisions des chefs d’Etat sont ces mêmes experts.
Il est donc clair qu’aucune proposition structurelle n’a été concrètement envisagée. L’Angola, pays hors zone francs CFA, a souhaité que le montant soit converti en dollars. La proposition de la Cemac de réfléchir avec la CEEAC sur une inscription de cette demande au 11ème FED a été purement et simplement balayée. Indépendance et orgueil d’Africains oblige.
ZRM