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Journal Intégration

Catégorie : DOSSIER

  • Comité de Compétitivité : L’urgence d’une onde de choc !

    Comité de Compétitivité : L’urgence d’une onde de choc !

    Pour réaliser le choc de compétitivité dont l’économie camerounaise a besoin, l’outil d’intelligence économique du gouvernement doit sortir de son hibernation.

    Les indicateurs de compétitivité du Cameroun sont peu flatteurs. L’édition 2019 du rapport de compétitivité du forum économique mondial classe l’économie camerounaise 123ème sur 141 avec un score annuel moyen de 46,0/100. Sur les 4 catégories de l’indice d’évaluation, le Cameroun obtient 46/100 pour la catégorie environnement des affaires (institutions, les infrastructures, le niveau de digitalisation, la stabilité macroéconomique) ; 46,5 pour la catégorie capital humain (santé et niveau de compétences des populations) ; 48,25 pour la catégorie structure économique (niveau de production, marché du travail, système financier et taille du marché) ; et 41,5 pour la catégorie dynamisme des entreprises et leur capacité d’innovation (voir figure 1).

    Une observation minutieuse des différents indicateurs fait ressortir que l’économie camerounaise ne réalise que trois bonnes performances (75/100 pour la stabilité macroéconomique, 52/100 pour le marché du travail et 52/100 pour le dynamisme des entreprises). En Afrique, le Cameroun est classé au 23ème rang.
    Dans l’édition 2020 du rapport Doing Business de la banque mondiale, le Cameroun est classé 167ème sur 190 avec une note de 46,1/100. Le Cameroun perd une place par rapport au classement 2019 et se retrouve derrière le Burundi. En réalité, le rapport suggère aux opérateurs économiques qu’il est mieux d’investir au Burundi qu’au Cameroun.

    Au niveau local, le secteur privé camerounais souligne le niveau insatisfaisant de l’implémentation qualitative des recommandations du Cameroon Business Forum (CBF) : la plus grande instance nationale du partenariat public-privé.

    Chemin de croix
    Pour adresser ces difficultés, le gouvernement a créé un comité de compétitivité logé au ministère de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat). Le patron de ce département ministériel en assure la présidence. Au-delà de son positionnement administratif de cadre permanent de concertation de haut niveau entre les secteurs publics et privé, mais aussi d’interface entre les pouvoirs publics et les acteurs de l’économie productive en vue de rechercher des solutions aux problèmes de compétitivité de l’économie et des entreprises, le comité de compétitivité est un outil d’intelligence économique.

    Mais la structure tente de se relever d’une longue hibernation de plusieurs années. L’organisation en février 2020 du secrétariat technique a permis à la structure d’afficher de nouvelles ambitions. Elle envisage désormais de publier annuellement un rapport national de la compétitivité. En février et octobre 2019, la structure a été dotée de nouvelles ressources humaines pour sa redynamisation. Il faudrait ensuite que les ressources financières suivent. Au sein du comité, on indique que 25 milliards fcfa minimum sur 5 années sont nécessaires pour créer l’onde de choc. On brandit l’expérience chinoise.

    Sur un budget initial de plus 500 millions de Fcfa pour l’année 2020, 300 millions ont finalement été validés par le secrétariat technique présidé par Protais Ayangma, leader d’une organisation patronale Ecam. Dans cette enveloppe retenue, seul 100 millions Fcfa sont disponibles et 200 millions sont à rechercher.

    Remy Biniou

    Intelligence économique

    Un potentiel inexploité

     

    Créé par décret présidentiel N°1997/235 du 31 décembre 1997 et réorganisé par décret 2014/053 du président de la République du 07février 2014, le comité de compétitivité est le dépositaire des mutations qualitatives de l’économie du Cameroun. L’article 2 de ce second décret charge le comité de proposer au ministre de l’économie, et par extension au gouvernement, les solutions les plus pertinentes aux défis de compétitivité. Voilà pourquoi il est une plateforme composée du secteur public, du secteur privé et de la société civile afin d’adopter les solutions les plus concertées.

    Bien plus, le décret n°2015/1377 du 10 juin 2015 du premier ministre portant organisation du secrétariat technique et du secrétariat permanent démontre le périmètre d’intelligence économique du comité. Il est organisé autour de trois pôles stratégiques : modernisation, compétitivité de l’appareil productif et appui au secteur privé ; amélioration de l’environnement des investissements, climat des affaires et abaissement des coûts des facteurs et de transactions ; et veille stratégique, observatoire de la compétitivité.

    De fait, l’unique observatoire de la compétitivité est logé au Comité et piloter par un expert. Il est en outre en charge de la veille stratégique. A la vérité, c’est le référent des baromètres internationaux qui établissent des ranking annuels de la compétitivité dans le monde et en Afrique.

    C’est en vertu de ce rôle stratégique du comité de compétitivité qu’il joue un rôle déterminant dans l’implémentation de l’accord de partenariat économique. Notamment en concourant à la compétitivité des produits camerounais sur le marché européen. Avec l’avènement de la zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), le comité de compétitivité a été très impliqué dans l’élaboration de la stratégie nationale de mise en œuvre. En cohérence avec la stratégie des exportations, il faudra très bien tirer profit des marchés propices aux fruits de l’économie camerounaise.

    RB

    Climat des affaires

    Dépression nerveuse des opérateurs économiques

    Au Cameroun, trois indicateurs permettent de mesurer la rudesse de l’environnement des affaires : l’espérance de vie d’une PME, le poids de l’administration et le stress infrastructurel.

     

    Selon l’économiste camerounais Jean-Pierre Evou (Durée de vie et chances de survie des pme au Cameroun), l’âge moyen d’une PME camerounaise est de 18 ans 8 mois. Plus précisément encore, 10 ans après leur création, tout juste moins de 4 entreprises sur 10 sont encore en activité. 5 ans plus tard (à 15 ans de vie), c’est près d’une entreprise sur 4 qui reste en activité. Cette situation est dû à plusieurs facteurs : outre le profil du créateur de la PME, les autres facteurs sont liés à l’environnement des affaires. Il s’agit le régime d’imposition (pression fiscale), corruption (versements des dessous de table) et les lourdeurs administratives.

    En matière de poids de l’administration, l’environnement des affaires est plombé par la taille, le délai et la complexité des procédures.

    Enfin, pour ce qui est du stress infrastructurel, il faut voir la fourniture, la régularité, la qualité et le coût de l’eau, de l’électricité et d’internet.

    Parmi les messages clés de l’édition 2020 du doing business de la banque mondiale, on retient qu’en matière de bonnes pratiques, les 20 premières économies du classement sont toutes dotées de systèmes en ligne pour la création d’une société, la déclaration des revenus et les procédures liées aux transferts de propriété. De même, il revient avec insistance que simplifier les règles et d’accélérer les procédures pour faciliter les affaires, libérer l’esprit d’entreprise et permettre à l’activité économique d’atteindre son plein potentiel.
    27ème destination africaine et 133ème en matière d’environnement des affaires, le Cameroun stagne dans le classement 2019 du magazine américain forbes. Pour la banque mondiale, ce classement est plutôt élogieux. Son rapport doing business classe le Cameroun 167ème au niveau mondial et 36ème au niveau africain.

    Rémy Biniou

  • Modernisation de l’appareil productif : Imbroglio dans la compétitivité des filières

    Modernisation de l’appareil productif : Imbroglio dans la compétitivité des filières

    Insuffisamment organisées et structurées, les filières de production demeurent l’une des plus grandes plaies de la modernisation de l’appareil de production du Cameroun. Plusieurs stratégies, plans et dispositifs se chevauchent sans s’accorder sur la démarche, les filières prioritaires encore moins les financements.

    Pour la compétitivité des produits camerounais sur les marchés d’exportation, une meilleure organisation des filières

    En matière de compétitivité de l’économie, des filières de production, de positionnement des secteurs au Cameroun, il vaut mieux se référer à la coopération avec l’Union européenne plutôt qu’aux documents d’orientation: la stratégie nationale de l’Ape, la stratégie nationale des exportations, le programme d’appui à la compétitivité (Pacom) ancêtre du dispositif d’appui à la compétitivité du Cameroun (Dacc), le plan directeur industriel. À cette multitude de documents, il faut ajouter l’action des agropoles, les stratégies sectorielles sur les différentes filières de production du ministère de l’Agriculture: manioc, anacarde…

    Imbroglio
    Depuis le document de stratégie pour la croissance et l’emploi, les mesures d’accompagnement du gouvernement au développement des filières visent à renforcer les maillons de la chaine de valeur. Les actions portent sur le soutien à la production, à la transformation et à la commercialisation. Or, en matière de développement des filières, il n’y a pas de consensus, ni sur l’approche ni sur les filières prioritaires. Pour ce qu’il est de la démarche, en parcourant la documentation nationale sur la question, on se rend compte que le ministère de l’Économie, le ministère de l’Agriculture, le ministère du Commerce, le ministère des PME et le ministère des Postes et Télécommunications conduisent plusieurs stratégies sur les filières de croissance. Il y a ainsi une multiplication des filières.

    En matière de priorisation, on n’est pas mieux servi. La Chambre d’agriculture, le Comité de compétitivité du ministère de l’Économie, le ministère de l’Agriculture, le Programme agropole et le bureau de mise à niveau ont identifié des filières considérées comme prioritaires.

    Au ministère de l’Économie, on priorise les secteurs bois, aviculture, céréales (maïs, riz, mil/sorgo, haricot et soja), textile (coton, textile, confection), tourisme, palmier à huile, banane plantain, ananas, poisson, cacao/café, sucre, caoutchouc. Lors de l’élaboration de la stratégie nationale des exportations en 2015 (rénovée en 2019), les représentants du secteur privé ont été favorables au choix d’un petit nombre de filières/secteurs pour plus d’efficacité, à savoir: le binôme café-cacao, la filière élevage bétail-viande, la filière coton – textiles – habillement, la filière fruits tropicaux et horticulture destinés aux marchés internationaux, la filière bois et le numérique.

    Par Décision nº 01024/MINADER/SG/DEPC/CAPPA du 17 avril 2019, le ministre de l’Agriculture retient comme priorité les groupes céréales (riz, maïs/sorgo), racines et tubercules (manioc, pomme de terre), produits industriels (cacao/café, coton, huile de palme, banane plantain), fruits et produits dérivés (ananas), produit de niche (anacarde). Il est à noter que le Minader prend appui sur la stratégie de développement du secteur rural (SDSR) et sur le plan national d’investissement agricole (PNIA).

    Au ministère de l’Industrie, on n’est pas mieux servi. Le plan directeur d’industrialisation (PDI), en cours de révision après l’appui du bureau sous-régional de la CEA, restructure le paysage industriel camerounais en complexifiant davantage la problématique des filières de production ou de croissance au Cameroun. Le PDI définit 3 sanctuaires industriels nationaux: l’agro-industrie, l’énergie et le numérique. Il adopte 5 piliers industriels structurants: foret/bois, textile/confection/cuir, mines/métallurgie/sidérurgie, hydrocarbures/pétrochimie/raffinage, chimie/pharmacie.

    Structuration
    Le rapport sur la compétitivité du World Economic Forum 2019 attribue la note de 46,0/100 au Cameroun qui se classe au 23e rang en Afrique et 123e rang mondial des économies compétitives.

    Dans l’optique de l’amélioration de sa compétitivité, le Cameroun a comme principal partenaire l’Union européenne. La stratégie nationale de l’accord de partenariat économique bilatéral Cameroun-Union européenne (Apeb), évaluée à 566,7 milliards FCFA, suggère une nouvelle approche: organisation des filières en interprofessions ou clusters. Il s’agira d’organiser les opérateurs économiques au sein d’interprofessions. L’objectif est de renforcer l’efficacité de la chaine de valeur.

    Bobo Ousmanou

     

    Structuration des filières : Le coup de pouce des APE

    La stratégie nationale Apeb se donne pour objectif de développer 4 à 5 filières prioritaires sans toutefois les identifier. Elle se propose de soutenir dans la durée le fonctionnement des interprofessions et des clusters (appui pour l’animation économique, mais également prise en charge d’une partie des frais de fonctionnement en coûts partagés avec le secteur privé, au moins pendant les 5 premières années); mettre en place des mesures permettant aux entreprises d’accroitre et de diversifier les exportations pour atteindre davantage de marchés sous régionaux, des pays voisins et internationaux; identifier des champions nationaux et sous régionaux émergents dans des domaines à fort potentiel; mener une étude d’orientation et de pérennisation de la démarche de mise à niveau des entreprises; mettre en place des fonds d’appui à la compétitivité des entreprises pour accompagner les investissements matériels et immatériels.

    À priori, il faudra réaliser une étude présentant de manière synthétique les différentes filières ou chaines de valeur existantes au Cameroun avec leurs atouts et leurs contraintes, leurs potentiels de développement sur les marchés nationaux, régionaux, internationaux; réaliser une analyse approfondie de chacune des filières sélectionnées afin d’identifier les principaux obstacles à leur développement ainsi que les maillons faibles; établir une stratégie de développement de chacune de ces chaines de valeur en proposant de manière participative au secteur privé de s’organiser sous forme d’interprofession ou de cluster; appuyer la constitution ou le renforcement d’interprofessions et associations professionnelles et appui à la constitution de clusters; renforcer les capacités de production des entreprises relevant des filières ou chaines de valeurs prioritaires.

    Périmètre
    La stratégie nationale APE a quatre objectifs stratégiques: la diversification et l’augmentation qualitative et quantitative des exportations du Cameroun vers l’UE; l’insertion de 4 à 5 produits des filières prioritaires dans les chaines de valeur mondiales; la diversification et l’amélioration de la compétitivité du secteur privé camerounais; la mise en place des mesures d’accompagnement, de mise en œuvre et de suivi de l’APE.

    Bobo Ousmanou

     

    Du Pacom au DACC : contribution de l’Union européenne à la compétitivité de l’économie camerounaise  

    En vue de la mise en œuvre de l’accord de partenariat économique bilatéral Cameroun-Union européenne, le Cameroun a obtenu l’implémentation du volet développement de l’accord qui prend en charge la mise à niveau de l’appareil de production et des entreprises. Plusieurs programmes et structures d’appui ou d’encadrement des entreprises ont été mis en place.

    Trois principaux programmes ont été mis en œuvre. Le dernier en date c’est le dispositif d’appui à la compétitivité du Cameroun (DACC), qui «répond à la nouvelle approche de développement de l’UE qui met l’accent sur le secteur privé comme acteur central du développement et à l’engagement de l’UE d’accompagner la mise en œuvre de l’Accord de partenariat économique (APE) au Cameroun entré en vigueur depuis aout 2014» indique l’UE. Doté de 6,5 milliards FCFA (10 millions euros), il s’appuie sur 3 composantes: l’appui aux entreprises; l’amélioration du climat des affaires; la normalisation et l’efficacité énergétique. Il est mis en œuvre dans les 10 régions du Cameroun.

    L’ancêtre du DACC, le Programme d’appui à la compétitivité du Cameroun (Pacom) était lui aussi doté de 6,5 milliards de FCFA (10 millions d’euros). Mis en œuvre par l’ONUDI pendant 48 mois (2013-2017), il comportait 3 volets: la mise à niveau des entreprises et le renforcement de la compétitivité des filières; l’accompagnement des entreprises à la certification et le développement des systèmes de normalisation et de qualité; l’amélioration du climat des affaires. Le Bureau de mise à niveau (BMN), la Bourse de sous-traitance et de partenariat (BSTP), l’Agence de normalisation et de qualité (Anor) et le Cameroon Business Forum (CBF) ont bénéficié de l’appui de ce programme dans leurs phases de consolidation avec l’assistance technique de l’ONUDI.

    Bien avant, entre 2008 à 2012, le Programme d’appui et de soutien à l’APE (PASAPE) avait appuyé l’amélioration des capacités nationales de négociations et de suivi de l’APE; le renforcement de la compétitivité, de l’environnement des affaires et de la mise à niveau (PPMAN) et le renforcement du système de normalisation et de la qualité (PPANQ). Il était doté d’une capacité financière de 3,6 milliards FCFA, soit 5,5 millions d’euros.

    Le BMN, la BSTP, l’Anor et le CBF ont bénéficié de l’appui de ce programme dans leurs phases pilotes avec l’assistance technique de l’ONUDI.

    BO

  • Conclusion de l’Accord post-Cotonou entre l’UE et les Etats membres de l’Organisation des Etats ACP : Les négociations entrent dans une phase décisive

    Conclusion de l’Accord post-Cotonou entre l’UE et les Etats membres de l’Organisation des Etats ACP : Les négociations entrent dans une phase décisive

    En raison des contraintes liées à la crise sanitaire, les Négociateurs en chef de l’Union Européenne et de l’Organisation des Etats ACP ont tenu leur septième réunion, cette fois-ci par visio-conférence, le 12 juin 2020.

    Jutta Urpilainen, commissaire au xpartenariats internationaux

    L’objectif était de faire le point des avancées obtenues au niveau technique depuis leur dernière rencontre en février 2020, d’échanger sur les sujets techniques et politiques en suspens et de convenir du calendrier pour la suite, sachant que le nouvel Accord doit entrer en vigueur le 1er janvier 2021 au plus tard.

    Les négociations du 12 juin ont été conduites côté européen par la Commissaire aux partenariats internationaux Jutta Urpilainen (qui succède à Neven Mimica depuis la mise en place de la nouvelle Commission européenne en décembre 2019) et par le Ministre Togolais des Affaires Etrangères, Robert DUSSEY, pour le compte de l’Organisation des Etats ACP.

    Débutées en septembre 2018, les négociations entre les deux partenaires entrent en effet dans la phase la plus complexe qui leur permettra, entre autres, de s’accorder sur des questions politiques sensibles et de convenir des moyens et institutions de mise en œuvre du futur Accord. Le rythme des discussions a été ralenti par la crise due au coronavirus. Avant cela, les parties avaient fait des progrès importants sur les sujets plus consensuels, notamment la coopération internationale et puis une grande partie des priorités stratégiques de l’accord.

    Les questions abordées dans ce cycle de négociation sont liées à la cour pénale internationale, la peine de mort, l’orientation, l’identité et l’éducation sexuelles, l’ingérence dans les processus électoraux, le financement de la société civile, le lien avec les APE, ou encore le financement par l’Union européenne des organisations de société civile dans les Etats ACP.

    Les négociateurs ont, au niveau technique, avancé sur l’essentiel du texte de l’Accord. Pratiquement les aspects majeurs de l’Accord général ont été convenues et les textes y relatifs ont été adoptés. Il en est de même pour ce qui est des trois Protocoles régionaux (Afrique, Asie, Pacifique).

    Le mandat de négociation de chaque partie avait déjà révélé des divergences sur certaines questions. Les européens ont proposé un nouveau partenariat fondé sur un «socle commun» et trois «protocoles régionaux», afin de tenir compte des nouveaux intérêts stratégiques de l’UE et de l’évolution différenciée des trois composantes du groupe ACP. Ceci a été entériné dans ses directives de négociation adoptées par le Conseil des Affaires Etrangères le 21 juin 2018.

    Le Groupe ACP quant à lui, dans une réflexion commencée dès la réunion de Sipopo, s’était engagé à rester unis en tant que groupe et à développer les relations sud-sud. Il a adopté son mandat de négociation en mai 2018. Sur de nombreux points, les deux mandats de négociation convergent. Ils contrastent cependant sur deux aspects : sur la forme, le mandat ACP propose un accord unique comportant trois piliers.

    Sur le fond, en ce qui concerne la gestion des migrations notamment, le mandat de négociation du groupe ACP souhaite une meilleure prise en compte des migrations intra-ACP et une inscription dans le futur accord du caractère volontaire des retours vers le pays d’origine et l’interdiction d’utiliser l’aide au développement comme moyen de négocier des contrôles aux frontières. Il exprime également son attachement à un financement dédié, bénéficiant de dotations pluriannuelles. Il souhaite, globalement, le maintient des acquis de Cotonou et la prise en compte de l’agenda 2030 et des ODD.

    Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères

    En ce qui concerne les questions politiques, les pays ACP maintiennent les positions précédemment défendues sur la justice pénale internationale et les droits sexuels et reproductifs. Il s’agirait là, d’une ligne rouge qu’ils ne peuvent franchir. La place, le rôle et le financement de la société civile sont également sujet à débat. Pendant le processus d’élaboration du mandat de négociation de l’UE, la société civile européenne avait fait pression afin que des dispositions précises et contraignantes concernant la participation de la société civile soient adoptées dans le futur Accord.

    Elle considérait alors que les positions de l’Accord de Cotonou sur ce sujet n’ont pas eu de résultat probant. Pour les Etats ACP, il est par contre important de réaffirmer le principe du respect de la loi de l’Etat dans lequel ces organisations exercent leurs activités et de les soumettre à ce cadre légal. De même, La question de la migration, clairement renforcée dans la proposition européenne, met l’accent sur le retour et la réadmission. Le nouveau code des visas européen a d’ailleurs entériné cette tendance, en prévoyant des processus restrictifs pour les pays qui ne coopèrent pas en matière de réadmission.

    Pour les pays ACP, qui privilégient en la matière la coopération bilatérale, les nouvelles conditions posées ignorent les négociations en cours sur la manière et les conditions dans lesquelles la coopération sur les retours et les réadmissions peut être réalisée avec les pays africains. Elles ne répondent pas non plus aux préoccupations des pays africains sur la réintégration.

    Le rôle respectif des institutions existantes reste à préciser, qu’il s’agisse des institutions conjointes UE-ACP, de celles de l’Organisation des Etats ACP, ou des institutions régionales telles que l’Union Africaine. L’UE considère en effet le cadre institutionnel conjoint ACP-UE comme «utile pour partager les expériences», mais «trop lourd et trop contraignant» ; son mandat de négociation favorise clairement la prise de décision et la mise en œuvre au niveau régional.

    L’avenir du Fonds européen de développement, dont le 11ème cycle prend fin en 2020, fait également débat. Sa budgétisation étant pratiquement actée, les échanges portent sur le prochain instrument de la coopération internationale et du voisinage (NDICI), dont les contours ne sont cependant pas encore clairs.

    Pour ce qui est des APE, les parties recherchent une formulation consensuelle qui établit le lien avec le nouvel Accord. En effet, les APE sont à des stades très différents d’avancement : plusieurs sont des Accords bilatéraux appliqués à titre provisoire ; seuls deux sont des Accord définitifs (CARIFORUM ET SADC). En théorie, les APE sont des accords autonomes.

    Cependant, un système de références croisées est mis en place entre eux et l’Accord de Cotonou jusqu’à ce qu’ils deviennent des accords complets. Cela signifie que les APE devront s’appuyer sur l’Accord de Cotonou jusqu’à ce qu’ils soient signés par toutes les parties et entrent en vigueur. Les APE bilatéraux (Côte d’Ivoire, Cameroun, Ghana) contiennent d’ailleurs tous des dispositions sur la prévalence de l’Accord de Cotonou en cas de conflit. Par conséquent, en l’état actuel de leur développement, les APE devraient être intégrés dans l’Accord post-Cotonou.

    Les dissensions sur les questions politiques existent également au sein même des Etats européens. En effet au moment où les négociations achoppent sur les questions ci-dessus rappelées, plusieurs de ses Etats membres s’emploient à adopter des législations qui mettent à mal la cohérence d’ensemble de la position européenne. La Hongrie vient d’adopter une loi restreignant les droits des personnes transgenres, tandis qu’en Pologne, le parlement débat d’une loi qui vise à faire de l’enseignement ou même de la promotion de l’éducation à la sexualité auprès de personnes âgées de moins de 18 ans une infraction pénale. S’agissant du financement des organisations de la société civile, il faut se souvenir que la Hongrie a adopté une législation imposant des restrictions au financement des organisations civiles par les étrangers, arguant qu’elle accroît la transparence et contribue à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

    Sur un autre plan, l’UE se propose de créer une commission sur l’ingérence étrangère dans tous les processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation. Elle veut adopter une approche commune, globale et à long terme pour traiter l’ingérence étrangère dans les institutions et processus démocratiques de l’UE et de ses États membres, et pas seulement à l’approche des grandes élections nationales et européennes, mais de manière durable dans toute l’UE, sous une multitude de formes, y compris des campagnes de désinformation sur les médias traditionnels et sociaux pour façonner l’opinion publique, des cyberattaques ciblant les infrastructures critiques, un soutien financier direct et indirect ainsi que la coercition économique des acteurs politiques et la subversion de la société civile.

    Même si les initiatives controversées sur l’Etat de droit dans certains Etats européens sont considérées par beaucoup comme un recul majeur, et que la cour de Justice des Communautés européennes a, dans une décision rendue le 18 juin dernier, déclaré les restrictions imposées par la Hongrie au financement des ONG discriminatoires et injustifiées, il reste que ces développements rendent compte de l’importance du débat et de la relativité qui entourent encore ces réalités, au sein même de l’UE.

    Du coup, les arguments avancés par les Etats ACP, qui ont d’ailleurs tous intégré les principe démocratiques et l’état de droit dans leurs corpus constitutionnels, prennent tout leur sens et appellent à un approfondissement de la réflexion entre les partenaires européens et ACP. Ceci nécessite une approche plus politique, pour déboucher sur des compromis satisfaisants pour tous, afin de respecter le calendrier de négociation initialement adopté.

    A titre de rappel, les relations entre les États membres de l’Union européenne (UE) et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) sont gérées dans le cadre de l’Accord de partenariat de Cotonou, signé le 23 juin 2000 par les 15 États membres de la Communauté européenne et 77 pays ACP ; il a été révisé en 2005 et 2010. Selon son Article 95, il devait expirer le 29 février 2020. Il a cependant été prolongé jusqu’au 31 décembre 2020 au plus tard – ou jusqu’à la conclusion d’un nouvel accord si elle intervient avant fin 2020.

    Les négociations ont été officiellement ouvertes le 28 septembre 2018. Plusieurs sessions de négociations techniques ont eu lieu. Si les détails sur les points d’accord et les écueils des négociations ne sont pas publics, les négociateurs en chef ont communiqué sur les résultats entérinés au niveau politique les 14 décembre 2018, les 4 avril, 23 mai et 28 septembre 2019, et le 14 février 2020. Le premier cycle de négociations ouvert en octobre 2018 avait permis de s’accorder sur la méthodologie des négociations, le statut du futur accord et sa structure générale : le principe d’un socle commun et de protocoles régionaux a été retenu par les deux parties.

    Un deuxième cycle de négociations techniques s’est ouvert le 25 janvier 2019 et porte sur le contenu du socle commun et sur certaines des priorités stratégiques. En septembre 2019, les négociateurs en chef ont approuvé les priorités économiques du futur accord. Les négociations au niveau des trois composantes régionales ont été officiellement lancées le 4 avril 2019. Des dialogues de haut niveau entre les négociateurs de l’UE et, respectivement, du Pacifique (le 26 février 2019), des Caraïbes (le 15 avril 2019), et d’Afrique (le 3 mai 2019) ont préalablement permis de discuter des possibles priorités de chaque protocole régional.

    Les négociations vont s’accélérer dans les semaines qui vont suivre, si les parties veulent éviter un vide juridique après l’échéance du 31 décembre 2020.

    Par Kenhago Tazo Olivier, Ministre Plénipotentiaire
    Bruxelles, le 18 juin 2020

  • Olanguina : Le maire aux avant-postes de la croisade contre le Covid-19

    Olanguina : Le maire aux avant-postes de la croisade contre le Covid-19

    Alphonse Didier Bikoula Bekono, l’édile de la localité, inaugure son mandat par le combat contre la pandémie.

    Instant de remise de kits

    Des centaines de cache-nez, des dizaines de seaux à robinets, d’innombrables cartons de savons et solutions hydroalcooliques. Pour un package de lutte contre le coronavirus dans la municipalité d’Olanguina (à une soixantaine de kilomètres à l’Est de Yaoundé), celui posé par Alphonse Didier Bikoula Bekono est à la hauteur de son ambition: «barrer la voie à cette maladie avant qu’il ne soit trop tard». Ce 16 avril 2020, dans la salle des actes de la commune, le maire, féru de statistiques, se sert des données compilées par le ministère de la Santé publique (Minsanté) pour dissuader les incrédules. «Voyez-vous, dit-il aux représentants des populations, cette affaire est d’autant plus sérieuse qu’elle mérite que tout le monde fasse preuve de bon sens en respectant scrupuleusement les mesures édictées par le gouvernement».

    Prévention
    À Olanguina où tout est encore contrôlable (pas de cas de covid-19 signalé à cette date), le principe de la prévention n’est pas de trop. Selon le chef de l’exécutif municipal, les kits de protection apportés ce jour dépassent largement le simple instinct politique. «C’est une question de vie pour tous par l’action de tous», appuie-t-il. Par cette approche qui fait de la participation communautaire l’un des piliers de la lutte contre la pandémie, Alphonse Didier Bikoula Bekono tient son carnet de bord: «aller dans tous les 17 villages du groupement Edouma pour sensibiliser afin d’éviter une nouvelle forme de danger sur la vie des habitants». Et pour un avant-goût, il encourage ses congénères à s’informer auprès du personnel de santé du coin. Son propos aborde des questions telles que l’utilisation efficiente des masques et des gels hydroalcooliques, le lavage des mains et les symptômes du coronavirus. Dans la foulée, il annonce qu’en dehors du matériel gracieusement remis ce jour, des masques seront mis en vente «au prix d’amis» dans les centres de santé éparpillés dans le giron la municipalité.

    Attention
    Bien que ce soit une complexe maladie et que, nourris par des récits de panique, des inquiétudes collectives ne cessent de croître, le maire d’Olanguina voudrait y voir un «accident» qui ne durera pas au Cameroun, «si et seulement si les mesures gouvernementales sont scrupuleusement respectées». C’est d’ailleurs sur la même veine qu’évolue Arcène Théophile Aupong, le sous-préfet d’Assamba. «Le respect de toutes ces mesures, exhorte-t-il, c’est la seule voie pour dire non à cette maladie». Le chef de terre ne manque pas d’attirer l’attention des populations sur la bonne utilisation des kits sanitaires reçus et la nécessité d’alerter les autorités pour tout cas suspect. D’ailleurs séance tenante, il annonce des contrôles stricts à l’entrée de la commune d’Olanguina. «Sous l’autorité du commandant de brigade, un poste fixe sera installé à Ntop à cet effet», avertit-il.

    Tout en le remerciant, Sa Majesté Mvondo, porte-parole des chefs traditionnels des villages, invoque l’onction des ancêtres sur le maire, afin que ce dernier trouve toujours les moyens et la force pour mener les actions en faveur des populations d’Oalnguina. «Nous ne nous y attendions pas, reconnait le dignitaire traditionnel. Et parce que c’est une surprise agréable, nous bénissons le maire et son équipe ce premier geste».

     

    E-learning

    L’IUEs-INSAM au diapason

    Impacté par le Coronavirus, l’Institut Universitaire a revu ses modes et méthodes de fonctionnement en renforçant la digitalisation.

    Dans un contexte de pandémie du Covid-19, le groupe Institut Universitaire et Stratégique de l’Estuaire-Institut Supérieur des Affaires et de Management (IUEs-INSAM), s’est résolument arrimé à l’enseignement à distance. Depuis quelques semaines, les cours et évaluations se font en ligne. Depuis une quinzaine d’années, ce groupe universitaire est l’un des pionniers dans l’enseignement à distance au Cameroun. «Nous y sommes grâce à l’université virtuelle africaine (UVA).

    Jacques Bonjawo, l’un des tout premiers cadres camerounais de Microsoft nous a contacté et nous avons ouvert une antenne de l’UVA dans notre école avec beaucoup d’étudiants venant de partout» se souvient Dr Ignace Foyet. Chemin faisant, explique le promoteur de l’IUEs-INSAM, «l’école a grandi et nous avons signé les conventions avec les firmes américaines Microsoft et Sisco qui délivrent des certifications ici et depuis l’année dernière, nous faisons dans la télémédecine et le Homecare (soin à domicile) soit à domicile avec les universités indiennes».

    Une innovation dont se réjouit le promoteur de cet institut universitaire, tant «ces certifications ont permis aux étudiants de compléter leur cursus universitaire pour être compétitifs sur le marché international», se satisfait Dr Ignace Foyet.

    C’est qu’à la base, explique Armand Kodjo Azafack le «E-learning est une plateforme conçue pour échanger avec les étudiants qui travaillent dans les entreprises et qui n’ont pas la possibilité d’assister aux cours en présentiel». Pour le directeur des affaires académiques et de la coopération du groupe universitaire, l’enseignement en ligne se passe plutôt pas mal au sein du groupe.

    A en croire cet ingénieur concepteur des systèmes d’information, chaque école du groupe universitaire est inscrit sur la plateforme dont l’administrateur a créé des spécialités, des filières et des cycles en fonction des inscriptions des étudiants. Lorsqu’un étudiant sollicite suivre ses cours par E-learning, «nous créons sa classe, son compte et ses paramètres de travail qui lui permettront de se connecter à la plateforme», explique Armand Kodjo Azafack.

    Un mode d’acquisition sollicité en cette période de crise du Covid-19 où la mode est au confinement et à la priorisation de la digitalisation. Mais d’autres préfèrent des solutions beaucoup plus simplifiées et pratiques. «Actuellement nous expérimentons un nouveau concept qui consiste d’abord à donner aux étudiants le fichier numérique du cours par whatsapp», explique Norbert Nadjie.

    L’enseignant de psychologie sociologie recherche, indique que les groupes whatsapp sont créés par salle de classe et chaque enseignant peut expliquer son cours et échanger avec les étudiants à travers des voices ou des messages écrits. «J’ai eu à faire quelques cours comme dans l’accoutumée. C’est vrai que le ton ou encore le concept est nouveau au point où les étudiants ont du mal à se familiariser.

    Sinon le fait d’être resté pour longtemps à la maison a poussé beaucoup à s’y intéresser de telle sorte qu’actuellement une fois qu’ils ont les supports de cours, les programmes sont prévus comme s’ils étaient en salle de classe et chaque enseignant a son espace horaire où il intervient dans le groupe», se réjouit l’enseignant.

    Norbert Nadjie explique qu’à la fin de son intervention, il y a la phase interaction qui consiste pour les étudiants qui ont des questions à les poser soit par écrit ou audio. «Beaucoup ne sont pas assimilables de manière audio, décrit-il. J’explique et je renvoie par voice ou par écrit certaines questions qui n’ont pas été bien précises dans l’audio ». Il poursuit : «au regard des jours de cours que j’ai eu, des échanges avec les étudiants, je pense que le message passe plutôt bien et les étudiants se familiarisent à cela.

    Désormais ils ont le support même s’ils ne sont pas connectés au moment où le cours est dispensé, ils peuvent venir le télécharger, l’écouter et poser des questions à leurs camarades ou à l’enseignant ou même écouter les réponses aux questions que l’enseignant a eu à poser aux étudiants». L’évaluation des étudiants quant à elle n’est pas complexe, relativise Norbert Nadjie, qui pense que «si le cours a été compris, l’évaluation consistera tout simplement à donner quelques thèmes ou quelques exercices aux étudiants qui sont censés les retourner aux enseignants à travers un fichier word dans lequel ils auront répondu et envoyé dans les boites électroniques des enseignants». C’est dire que le Covid-19 ne chamboule pas totalement le fonctionnement dans cet institut universitaire qui était déjà paré à toutes les éventualités.

    Alain Biyong

     

    La première victoire pour le sport sera la maîtrise du Covid-19

    Ne nous y trompons pas, le devoir de résultats et l’appétit de performances encore meilleures confinent les professionnels de ces différentes disciplines dans des préparations adaptées et individualisées en attendant le retour de ces compétitions, en bon état de santé physique et moral sous la supervision de leurs encadreurs en télé travail et en réseau.

    Le manager des projets sportifs et directeur associé du Cabinet BETREU & Co parle des enjeux de l’après Covid-19 pour le sport.

    Willy Alaga Nbenga

    Le Covid 19 a chamboulé le monde du sport. De grands événements tels que les Jeux olympiques sont renvoyés à l’année prochaine. Les championnats dans les différentes disciplines sont à l’arrêt. Les pratiquants dans les différentes disciplines sportives ne peuvent pas s’entrainer convenablement. Qu’est-ce que ce tableau inspire comme commentaire ou analyse ?
    L’Histoire nous renseigne assez sur la fréquence, avec une régularité quasi parfaite à quelques exceptions près, la survenance des désastres sanitaires planétaires. Plus précisément, cette maladie élevée à juste titre en pandémie au même rang que ses illustres aînées, nous questionne au regard de la gravité pourtant documentée qui aurait pu, avec la démocratisation des moyens actuels des TIC, contribuer à sa prévision afin de d’éviter les très fâcheuses conséquences qui n’ épargnent en effet aucun domaine sans exception, de l’économie à la géostratégie en passant naturellement par les sports, plus fortement impactés du fait de leur plus grande popularité et de leur rôle social.

    Le sport de haut niveau s’accommode mal du tableau ci-dessus. Doit-on craindre pour les performances des sportifs?
    Le sport de haut niveau ne s’accommode ni de ce tableau, ni d’autres distractions périphériques. Les clubs sont des centres de profit avec des objectifs stratégiques et financiers précis. Ayant déjà énormément perdu de l’argent, alors que l’on aurait pu imaginer, dans ce contexte d’arrêt total d’activités publiques et de confinement, que les joueurs, du fait de l’absence de rigueur dans la gestion de leurs agendas quotidiens respectifs organisés par les staffs techniques de leurs employeurs, les clubs, se laissent aller à la démobilisation et vaquent à d’autres activités.

    Ne nous y trompons pas, le devoir de résultats et l’appétit de performances encore meilleures confinent les professionnels de ces différentes disciplines dans des préparations adaptées et individualisées en attendant le retour de ces compétitions, en bon état de santé physique et moral sous la supervision de leurs encadreurs en télé travail et en réseau.

    Les événements sportifs charrient de gros enjeux financiers. On peut déjà imaginer de grosses pertes et de grands manque-à-gagner sur l’ensemble des chaines organisationnelles. Pourrait-on un jour se relever de ce désastre financier ?
    En effet les événements sportifs populaires charrient de gros enjeux financiers. Les revenus des clubs ou organisations sportives proviennent essentiellement de la billetterie, des droits TV, des droits d’image, des spectacles qu’ils organisent et /ou de ceux auxquels ils prennent part, des contrats publicitaires, des objets dérivés ainsi que des transactions issues des transferts des joueurs en ce qui concerne les sports collectifs.
    Dès lors que les compétitions sont arrêtées et que le spectacle n’est ni produit, ni vendu, ni diffusé, toutes ces sources de recettes s’évanouissent cependant que diverses charges, dont la masse salariale des joueurs constitue l’essentiel, continuent à courir.

    On peut donc craindre d’assister au dépôt de bilan de certaines organisations sportives moins bien préparées si la situation perdure. Un pessimiste croirait à l’humilité tirée de cette pandémie pour mette un holà à la poursuite effrénée de bénéfices toujours faramineux. Mais, il est plus raisonnable de faire confiance à l’ingéniosité de l’Homme et à sa capacité à se sublimer et à se relever d’un drame pour célébrer sa victoire. Les performances sont faites pour être battues.

    En observateur averti, avez-vous des propositions concrètes pour sortir la tête de l’eau ?
    Bien malin ou prétentieux qui seul, donnera les clés de relance de l’ensemble des disciplines sportives et leurs différents impacts sur le reste de l’économie. Mais la première victoire sera la maîtrise du Covid 19. A cet effet, j’observe, comme vous, les diverses stratégies de riposte mises en place par chaque pays dont le Cameroun. A ce sujet, il convient de saluer l’extraordinaire conduite par M. le Ministre de la Santé, sous la ferme et attentive supervision de M. le Premier Ministre, Chef de Gouvernement de notre pays, de la riposte camerounaise face au Covid 19

    Notre pays n’a pas paniqué et a offert avec maturité le know-how made in Cameroun à l’opinion nationale et internationale malgré l’inconscience des populations toutes catégories confondues.

    C’est dans ce contexte qu’alors que toutes les compétitions ou presque ont été repoussées à des dates non encore dévoilées, la France vient d‘obtenir la confirmation de l’organisation d’Août à septembre 2020 de son tour Cycliste, qui n’est rien d’autre que le 3e événement le plus médiatisé au monde.

    Le Cameroun avait quant à lui déjà obtenu que ne soit pas annulées, mais simplement reprogrammées les compétitions qu’il a si longuement préparées et dont l’une devrait battre son plein actuellement.

    Le Covid-19 peut-il provoquer ou sera-t-il à l’origine d’un nouvel ordre mondial dans le sport?
    Vu la mobilisation mondiale générale constatée qui a drainé, en les dévoilant, certaines stratégies obscures, certains constats historiques que qualifieront certains de conspirationnistes, on aura découvert la faiblesse de géants aux pieds d’argile face à ce mal planétaire.

    Au plan national, la maturité politique de ceux qui ont en charge la responsabilité d’apporter des solutions adéquates aux camerounais face aux défis qui les accablent, d’autres, nourris par d’incompréhensibles calculs, dans une stratégie individualiste sans fondement patriotique, ont raté l’unique occasion d’emprunter avec leurs sœurs et frères de sang, le train de la solidarité nationale.

    L’on a déjà assisté aux libérations de prisonniers, aux appels de cesser le feu ici et ailleurs, aux réaménagements de dettes de certains états aidés par leurs «bourreaux de hier», assisté à la mise à nu de la personnalité de certains responsables politiques à l’instar du Pdt américain qui mal ou peu informé menace de frapper le monde entier d’une amende en se retirant de l’OMS, on a assisté à l’aide apportée par des pays dits « pauvres » aux pays riches à travers l’envoi de médecins cubains et tunisiens en Italie, on a découvert l’aliénation des populations par certaines religions, aux vols d’organes par des institutions médicales des dépouilles de leurs malades, aux assassinats de personnes détestées, à la fabrication de faux médicaments par des citoyens qui par ces actes odieux exposent leurs propres frères en violant les lois de leur pays, aux indélicatesses de certains médecins envers leurs malades, mais aussi à la condamnation d’autres qui ne voulaient accepter de laisser mourir les leurs, à la prise de conscience que les virus franchissent des frontière sans visa, et que les sans domicile fixe du monde entier avaient eux aussi droit à la santé… La liste des enseignements du Covid 19 est longue, extrêmement longue et édifiante

    Le CHAN et la CAN dans ce chamboulement inattendu et l’incertitude des lendemains s’organiseront dans un contexte de crise économique consécutive à la crise sanitaire du Coronavirus. Ne va-t-on pas vers des événements au rabais ? Quelles sont vos prévisions par rapport à la qualité de ces deux grands rendez-vous sportifs majeurs pour le continent et le Cameroun?

    Vous me permettrez de ne pas partager cet avis pessimiste. Il n’est pas besoin de convaincre vos lecteurs, qui savent parfaitement que : «Après la pluie, vient le beau temps ?»

    Que l’on soit clair, les exigences de la CAF du point des infrastructures nécessaires à l’organisation du CHAN querellé au Cameroun sont les mêmes que celles requises pour la CAN féminine qu’a accueilli notre pays en 2016 ; Seize nations africaines réparties en quatre poules disposant chacune d’un stade de Compétition et d’au moins un stade d’entrainement munis tous d’une pelouse naturelle.

    Signalons à nos compatriotes, pour leur fierté que nos stades annexes sont de bien meilleure qualité que certains stades de compétition de la CAN féminine qu’ont accueilli d’autres pays africains avant le Cameroun.
    En effet, la quasi-totalité de nos stades annexes sont dotés d’au moins une tribune de 1000 ou 2000 places assises, de vestiaires équipés et de pelouses naturelles. Le Cameroun pouvait donc sans moindre ajout organiser le CHAN 2020 sans infrastructures sportives supplémentaires.

    Mais, dans son souci de toujours mieux faire pour relever ses défis, le Cameroun, sous l’impulsion de notre chef d’État toujours à la recherche de l’excellence, a opté d’offrir à sa jeunesse, au mouvement sportif tout entier et la plupart de nos régions enfin des infrastructures sportives futuristes que nous envient, à en croire le 1er Vice-Président de la CAF.

    Quant à la CAN proprement dite, vingt-quatre nations africaines, réparties en six poules dont des stades de compétition pouvant recevoir entre quinze et cinquante mille places assises.

    Notre pays, avec bravoure a accepté en cours de construction de ses infrastructures, la modification des règles de jeu d’une CAF ambitieuse. CeTte modification nous exigeait une augmentation de 30% de nos capacités d’accueil et d’organisation par rapport à l’édition (2018) sollicitée et obtenue ; C’était en effet sans compter avec un certain manque de confiance des camerounais en eux-mêmes pour relever ce défi national.
    Le Cameroun a courageusement produit des efforts prodigieux pour atteindre cet objectif et engagé d’énormes sacrifices financiers pour relever ce défi dans le temps qui lui était imparti, jusqu’à l’engagement personnel du Chef de l’Etat.

    Tout laisse donc à penser que le Cameroun organisera ces compétitions dans un climat de réconciliation entre camerounais.

    Mon père spirituel, W. BAHEGANA, paix à son âme, m’apprenait que lorsque l’on a le sentiment d’avoir tout essayé sans le succès escompté, laisser Dieu faire l’impossible. Il l’illustrait de la pensée suivante : «…lorsque tu as trop cherché sans trouver, tu finiras par trouver sans chercher. » La chance ne souriant qu’à ceux qui la méritent, ne voyez-vous pas qu’avec l’annulation par la Fifa la semaine dernière du Championnat du Monde des Club prévu en 2021 en Chine, qui laissait planer un danger sur l’organisation de la TOTAL CAN Cameroun 2021, notre pays, leader depuis 30 ans de la scène africaine de football organisera après le Covid 19 tous ces événements dans cet agenda qui lui est une fois de plus favorable après un glissement initié par la CAF.

    De plus, il ne vous pas échappé à vous non plus que mercredi 15 avril dernier, en visite au Complexe Sportif Paul BIYA d’OLEMBE, le Ministre Narcissse MOUELLE KOMBI a témoigné qu’aussi bien sur les stades annexes que sur l’aire de jeu du Stade Principal, la pelouse promise poussait avant d’ajouter que celle-ci serait opérationnelle dans trois mois.

    Pour les croyants, les deux événements projetés auront bel et bien lieu après avoir bénéficié des conditions les meilleures d’achèvement de leur préparation, par la grâce divine accordée à tout le peuple camerounais qui les aura tant attendus et si chèrement financés pour la postérité.

  • Yaoundé : La vie dans les «Corona-hôtels»

    Yaoundé : La vie dans les «Corona-hôtels»

    La mise en quarantaine des voyageurs en provenance d’Europe consacre paradoxalement, et à la fois, quatre clichés : la naissance d’un nouveau vocabulaire au sein de l’opinion publique, la volupté et le mal-être parmi les personnes, ainsi que l’acharnement sur les réelles intentions des pouvoirs publics.

     

    Un meeting politique, forte concentration humaine à éviter.

    Quartier Mbog-Abang, à la sortie sud de Yaoundé, quelqu’un emprunte à l’ironie pour nous indiquer l’hôtel dans lequel sont confinés 22 passagers du vol international SN Brussels 369 arrivé au Cameroun dans la nuit du 17 mars 2020. «Ici, on appelle ça le Corona-hôtel. Voilà ça!», montre-t-il du doigt. Des marges de cette indication aux allures cavalières, une voix féminine enrobe l’affaire dans une couche de mépris: «Du vrai n’importe quoi!».

    Mal-être
    Cette nuit, l’entrée principale de l’établissement hôtelier grouille d’allées et venues. À l’angle, armes au poing, quatre agents de police s’avachissent sur des chaises basses. À la réception, l’ambiance n’a rien d’exceptionnel. En poste, une préposée au charme ensorcelant. Comme pour venir à bout de cette hébétude, l’on évoque le coronavirus et les dispositions prises ici pour contrer la pandémie. «Tenez votre masque, s’il vous plaît ; mettez-le et filez droit là-bas. Vous pourrez discuter avec le directeur d’exploitation dans son bureau», nous suggère la jeune dame.

    Dans la pièce qui talonne le hall, c’est le bar. Ici, une dame à la carrure dessinée dans une robe pincée à la taille déambule. Elle est au téléphone. Elle prononce un étrange serment : «Je ne quitterai pas d’ici tant qu’on n’a pas encore formellement établi que je suis malade du coronavirus! Terminé!». Puis, arrive un inspecteur de police principal. Sans masque, il tente d’encadrer cette dame chauffée à blanc afin d’infléchir sa colère dans le sens d’une plus grande maîtrise. La bruyante se mure dans un silence lourd, perdue dans ses pensées, dans une sorte de rage muette.

    Le regard acéré, elle rebondit faisant part de ses rondeurs qui ont disparu, laissant place à une maigreur révélant des rides. «À cause de cette satanée histoire de confinement!», ponctue-t-elle véhément, question de mettre en relief l’émouvante tournure que prend son séjour au Cameroun depuis le 17 mars dernier. Plongée dans l’épaisseur tragique de ce qui arrive aux personnes confinées dans les différents hôtels de la capitale, elle éprouve le sentiment de se perdre dans la suite qui leur est réservée.

    Acharnement
    Sur le coup, un homme à la voix de stentor monte à la charge: «On nous a pris ici pour aller effectuer des tests au Palais des sports. Bien curieux qu’il n’y ait pas de kits disponibles. Dans ce bordel, on est dans un grand trou noir où la contagion du coronavirus peut se jouer à tout moment». La suite de cette enflure verbale s’acharne sur les langueurs sereines des pouvoirs publics. Là encore, le phrasé de cet homme est plus profond, tant la signification des mots débouche sur la juxtaposition d’une chose et de son contraire. «On nous dit que tout est mis en œuvre pour circonscrire la maladie.

    Mais en même temps, on laisse des gens entrer ici n’importe comment. On ne communique pas assez ! Qu’on nous dise qu’on veut juste nous espionner!», peste-t-il. La vérité, selon lui, est à lire dans l’escorte militaire dont bénéficient tous les confinés. Pour cela, l’homme signale une surveillance renforcée et ne se prêtant pas aux requêtes. «C’est un spectacle qui se joue sans relâche!», assène sa puissante voix. À l’épreuve du décryptage, parmi les «confinés», la situation nourrit quelques suspicions sur les intentions réelles des pouvoirs publics.

    Sur place ici, un policier essaye de conférer une nouvelle résonnance au black-out décrié. «Cette mesure, dit-il, vise non seulement à contrôler la situation, mais aussi et surtout, elle doit être considérée comme protectrice que comme espionne». Et pour mieux lessiver les mots, le fonctionnaire de police explique que «c’est le désir de liberté et la psychose d’une éventuelle contagion». À son avis, ces deux variables additionnent leurs effets pour donner de la consistance à la colère.

    «Je carbure»
    Près du lieu-dit Carrefour Mvog-Mbi, toujours dans la capitale, en cette soirée du 21 mars 2020, quelques passagers du vol international SN Brussels 369 sont dans un autre hôtel. Sans masques, quelques-uns sont assis à l’entrée. Ici, la vie se gère au gré d’une hypothèse bricolée autour de la situation: «Si de nouveaux cas ne se signalent pas d’ici peu, on pourrait nous laisser aller dans nos familles», entend-on. À promener la vue et l’ouïe au fond du bar, une l’ambiance visiblement générée par l’imposante tournée alcoolique de ce soir s’impose. Des hommes et des femmes offrent d’eux-mêmes une image bien vaporeuse. Parfois, ils distillent à la fois une allure sévère et cool. Parfois aussi, imitant les accents français et italiens, ils adaptent leurs voix en roulant les «r» ou en roucoulant. On comprend vite que c’est un cercle de «Mbenguistes».

    Face au reporter, certains s’efforcent de s’auto-réguler dans le sens d’une ormeta bien tempérée. D’autres se protègent derrière une définition extensive de la notion de vie privée et une parfaite connaissance des enjeux du temps. Ceux qui acceptent de se faire «malmener» par des questions de journaliste versent immédiatement dans l’éloge de la mesure de confinement de tous les voyageurs en provenance d’Europe. «D’après ce que nous avons vu là-bas, il y a lieu de féliciter le gouvernement pour avoir pris cette décision», confesse un homme entre deux gorgées de scotch whisky.

    Il souhaite que prospèrent les préceptes sanitaires les plus rudes dans les prochains jours. À côté, le visage d’une femme s’éclaire de sourire lorsqu’elle nous confie que, «individuellement et quotidiennement, Paul Biya nous envoie 15 500 FCFA pour nos besoins en plus d’être bien logés et nourris». Peut-être, cela donne un nouveau ton à la vie ici et disqualifie un message qui devient banal au fil du temps: «ce sont les Mbenguistes qui viennent avec le coronavirus ici».

    Parodiant une chanteuse camerounaise, quelqu’un dans ce cercle de «Mbenguistes» dit qu’il «carbure» malgré le confinement. Et pour montrer qu’il respire l’opulence, il présente une liasse d’argent. Le geste est orné d’une question: «quelle fille peut me refuser avec ça même si j’ai le coronavirus?». Toutefois, cette interrogation sert d’amorce à la description d’un autre phénomène : celui de la stigmatisation forgée depuis peu. Dans leurs propos, les uns et les autres relèvent le déclin d’affection qu’ils vivent. «Depuis que nous sommes ici, personne ne nous appelle plus, même dans nos propres familles», regrette une dame revendiquant le statut d’aînée d’une fratrie de 8 enfants.

    Celle-ci souligne l’ignominie des attaques de quelques lutins ayant choisi contre elle un vocabulaire de haine et de mort. En tout cas, elle prétend comprendre «cette sorte de cirque où la passion du commentaire suspicieux progresse dans un contexte souillé par les fake-news et finit par remplacer toute soif de vérité». Et de conclure : «le coronavirus, c’est aussi une grande école de la vie. À l’aide de ce qui m’arrive, j’ai compris que la vie est tracée en deux cercles : celui de ceux qui vous aiment quand vous vous portez bien et celui de ceux qui vous rejettent au moindre soupçon».

    Jean-René Meva’a Amougou

    Zone anglophone

    Pas de cas de Covid-19 dans le Nord-ouest

    Contrairement aux annonces faites sur les réseaux sociaux, aucun cas n’a été recensé dans cette partie du pays.

     

    Dr Kingsley Che Soh est formel: «il n’y a jusqu’ici aucun cas confirmé de coronavirus infecté dans la région». C’est la ligne de force que le délégué régional du ministère de la Santé publique pour le Nord-ouest a signé le 20 mars 2020. Par cette note, le fonctionnaire rame à contre-courant des informations distillées sur les réseaux sociaux à propos des supposés cas de coronavirus infectés derrière St Agnes et à l’hôpital régional de Bamenda. «Tout cela est faux», martèle Dr Kingsley Che Soh.

    Dans un autre communiqué, il dévoile également quelques mesures prises pour parer à toute éventualité. «Une équipe médicale et une ambulance seront stationnées au poste de péage à Matazen (frontière Ouest et Nord-ouest Ndlr) par Santa à partir de samedi 21 mars 2020 pour des dépistages systématiques de tous les voyageurs qui entreront dans la région du Nord-ouest pour éviter tout risque potentiel de la maladie du Covid-19», y lit-on. Aussi indique-t-il que des solutions hydro-alcooliques suffisamment subventionnées par le gouvernement seront mises à la disposition des structures sanitaires publiques à partir de mardi 24 mars 2020.

    Dr Dénis Nsame Nforniwe, directeur de l’hôpital régional de Bamenda a quant à lui aménagé un centre d’isolement équipé dans cette formation hospitalière. A en croire Fung John, économe à l’hôpital régional, un comité de veille qui fonctionne 24h/24 a été mis en place ici. Aussi des outils de lavage des mains ont été placés au niveau de toutes les entrées principales de l’hôpital régional de Bamenda. Un communiqué a été commis par le directeur invitant le public à réduire à 10 le nombre de personnes devant assister à la levée de corps à la morgue, d’un membre de famille décédé. Le 19 mars, Dr Dénis Nsame Nforniwe a organisé une réunion de sensibilisation du personnel médical. Il a également proscrit les regroupements de plus de 50 personnes à l’hôpital. Il envisage un point presse mercredi prochain 25 mars avec les journalistes de Camasej ( Cameroon association of english speaking journalists).

    Il est à noter que mercredi dernier 18 mars, le gouverneur Adolphe Lélé Lafrique Deben Tchoffo a organisé une réunion de crise sur la pandémie. Il a laissé entendre que seules les réunions d’urgence seront autorisées dans la région. Il a proscrit les réunions ou regroupements de plus de 50 personnes. Aussi conseille-t-il à ceux ayant programmé les obsèques et cérémonies de mariage de les reporter à une date ultérieure. Le délégué régional de la santé publique a saisi cette perche pour rassurer quant aux mesures mises en place pour prendre soins des cas suspects de Covid-19 dans le Nord-ouest.

    Il a demandé à la population de respecter les mesures d’hygiène ( lavage constant des mains, utilisation du gel hydro alcoolique, éviter les salutations, embrassades, tousser dans un mouchoir ou au creux du coude, observer au moins un mètre d’écart face à un interlocuteur etc.). Le gouverneur a instruit le maire de la ville de Bamenda a prendre des dispositions avec ses services techniques afin de réduire le flux de personnes dans les marchés de la cité capitale. Le responsable d’Elecam a pris langue avec le numéro un de la région pour éviter le regroupement des foules devant les bureaux de vote. Les audiences ont été suspendues pour une durée d’un mois devant les tribunaux et cour d’appel dans le Nord-ouest.

    Le 19 mars 2020, lors de l’installation du maire de la commune d’arrondissement de Bamenda 1er, le préfet Simon Émile MOOH a prié les personnes venues assister à cette cérémonie de libérer la salle des actes. Une manière pour lui de respecter la prescription de 50 personnes au maximum dans toute réunion. Seuls les 32 conseillers municipaux et quelques membres de son encourage ont pris par à cette cérémonie. L’église n’est pas en reste. En plus des mesures d’hygiène soulignées plus haut, l’évêque de Kumbo et l’archevêque de Bamenda ont proscrit la réception de la communion par la bouche. Les chrétiens doivent désormais recevoir le corps du Christ dans la pomme de la main. Suspension du geste de paix du Christ (salutation avec les mains) pendant la célébration eucharistique etc.

    Zéphirin Fotso Kamga

    Covid 19

    Les chancelleries s’imposent une ligne de vie

    Autrefois figés à d’autres contrôles, les services de sécurité s’appliquent désormais les qualificatifs de «très haute sécurité» face à la maladie.

    L’ambassade des Etats-Unis à Yaoundé.

    On savait déjà qu’elles sont des forteresses pas facilement pénétrables. Ces derniers temps, à cause du coronavirus, cette image se raconte mieux aux entrées principales de toutes les chancelleries étrangères et organismes internationaux basés à Yaoundé. Pour l’essentiel, le spectre monstrueux de la maladie constitue un argument de poids parmi les personnels en faction.

    Ce 20 mars 2020, devant l’ambassade du Sénégal à Yaoundé, le flot convivial n’est presque plus le même. L’ambiance met sous les yeux des rires mécaniques, pendant que les paroles des agents de sécurité manient la palette de mesures. Plus draconiennes que par le passé, une voix assure que «tout mouvement en groupe est formellement interdit ici».

    Toujours ce 20 mars 2020, à la Rue Rosa Parks au quartier Bastos, l’angle sous lequel l’ambassade des États-Unis se révèle est à contre-fil du laisser-aller. Dans le langage précautionneux qui sied à la circonstance, un agent de sécurité nomme cela «un contexte grave». Ici, s’il est un débat qui n’arrive ni trop tôt ni trop tard, c’est bien celui sur les modes de transmissions du coronavirus. Selon le lieu où il se déroule, le contrôle des pièces se distingue du test de coronavirus. En fait, ce dernier est privilégié au premier.

    C’est également le cas à la représentation Afrique centrale de la CEA (Commission économique pour l’Afrique). Dès le perron, une note instruit l’application stricte des mesures édictées par le service de sécurité. Celui-ci, renseigne une dame de service, a d’ailleurs accru le nombre de check-points. Au milieu d’un récit amer, notre interlocutrice raconte des séquences incandescentes avec certains usagers. «Ils disent que le coronavirus se passe du tout à la sécurité; alors ils sont ramenés à l’ordre quand ils tentent de nous imposer une démarche contraire à celle prescrite par l’OMS», relate-t-elle.

    Devant l’ambassade de Chine, toujours au quartier Bastos, «pas d’affluence ici depuis deux semaines», confie un agent d’une société de gardiennage. Concentré et actif pour contrer le bruit tapageur et ravageur faisant des ressortissants chinois les «importateurs du coronavirus», l’ambassadeur a signé une note. Affichée sur la barrière, celle-ci rappelle que «sans exception, toute entrée est conditionnée par l’obtention d’un quitus du responsable de la sécurité». En approchant ce dernier, il détaille les étapes: lavage des mains, passage au test de température et contrôle des pièces personnelles.

    Bobo Ousmanou

    Des mots et… des Africains

    Au sein des communautés étrangères basées à Yaoundé, des réflexions pointues sur le bilan du coronavirus dans leurs pays respectifs succèdent aux réponses parfois paniquées.

    Quelques ressortissants étrangers à Yaoundé.

    Au milieu de quelques Ivoiriens basés à Yaoundé, c’est le brouhaha de la critique. En tout cas, sans les nommer, les critiques visent surtout les autorités d’Abidjan: «On n’a pas su anticiper!», fulmine Serge Diakété. Selon cet homme d’affaires, l’arrivée du coronavirus en Côte d’Ivoire résonne comme un brutal retour de manivelle dans le déroulé historique des relations avec certains pays occidentaux. «Ces gens-là nous avaient promis de nous exterminer et voilà», dit-il avec conviction.

    Au quartier Ékié, dans le 4e arrondissement de Yaoundé, une compilation des récentes actualités sur les mesures de confinement instaurées par les autorités de Kigali est au centre des commentaires entre Rwandais. Par le biais d’un langage convivial, mais mesuré, le satisfecit se lit en arrière-fond d’une petite évaluation faite par Gaston Buleli, le chef de la communauté. «Il faut cela pour que tout ne bascule pas après tant d’années d’efforts et de sang», avance-t-il confiant.

    Sa confiance est d’autant plus perceptible qu’elle valorise la fermeture des frontières du Rwanda avec ses voisins, réputés «apporteurs de tous les malheurs». «Nous avons connu le génocide, cela a été planifié à partir des officines à l’étranger. Je pense que pour le coronavirus, c’est presque la même chose, quand on sait que c’est un espion étranger qui est venu avec chez nous», assume Gaston Buleli. Instruit par l’expérience camerounaise du confinement des personnes suspectées de porter le coronavirus, Gaston Buleli se réserve le droit d’apprécier la mesure. «Cela est contraignant, mais le jeu vaut bien la chandelle ici comme dans d’autres pays africains», évalue-t-il, en plus de montrer combien il est actif pour encourager ses compatriotes au respect des mesures prises localement.

    Ce 19 mars 2020, Ali Hindraogo apprécie le quotient de détermination des autorités de Ouagadougou. À en croire le Burkinabè rencontré au quartier Tsinga (Yaoundé II), tel que relayé par les médias, le schéma de circonscription du coronavirus est à applaudir. «Notre président a bien vu», se réjouit-il, non sans mentionner que l’expérience actuelle est édifiante pour l’Afrique. En ces termes, il se lance sur une réflexion sur l’usure des anciennes politiques sanitaires ayant signé leur échec sur le VIH Sida, notamment au Burkina Faso. «Si on fermait les frontières comme cette fois, on n’allait pas avoir de nombreux cas chez nous», croit-il.

    De son côté, le Gabonais Christian Bamgoudou évite d’ériger les Africains en champions de l’excuse et de l’innocence originelle. Au contraire, il dit avoir observé «l’incrédulité continentale». «Voyez-vous, il n’est plus aisé, partout sur le continent, de reprendre la main sur une maladie autour de laquelle nous avons été tous prévenus», regrette-t-il. D’ailleurs, notre interlocuteur ne s’interdit pas de discerner les conséquences de tout cela: «au Gabon, chez moi, les gens ont passé leur temps à dire que c’est une affaire des autres; et voilà!». D’après lui, les justificatifs plus ou moins forcés ont entraîné une grande confusion, puisque les gouvernants ont actuellement du mal à répondre aux exigences optimales de la situation.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Plateforme de cours en ligne

    Entre économies et dépenses

    Solution miracle pour les uns, l’avènement d’un espace d’enseignement virtuel à l’Université de Yaoundé I est une charge contraignante pour d’autres étudiants.

     

    Parmi les mesures barrières prises contre le coronavirus le 16 mars 2020 par Maurice Aurélien Sosso, recteur de l’Université de Yaoundé I, on a la suspension des cours en “présentiel” dans les amphithéâtres. À la suite de cette décision, et pour éviter l’interruption des enseignements, le patron de cette institution publique a prescrit «la création au Centre universitaire des technologies de l’information (CUTI), d’une plateforme dédiée à la mise en ligne des cours». Ce qui, d’une façon comme d’une autre, impacte fortement sur le vécu des étudiants.

    Sur le plan économique, l’instauration de cette méthode de transmission des savoirs est très avantageuse. C’est du moins ce qu’ont laissé entendre certains apprenants rencontrés dans la ville de Yaoundé. «Avec cette plateforme, je vais réduire mes dépenses de façon considérable. J’habite le quartier Nkoabang et je dépense près de 900 FCFA de taxi par jour pour me rendre au campus. Il me suffira d’acheter un forfait internet de 500 FCFA, pour rester connecté pendant une semaine», indique Landry, régulièrement inscrit en Licence 2 en Lettres modernes françaises (LMF) à la Faculté des Arts, Lettres et Sciences humaines. Même tendance chez Jean J. Cet étudiant de la Faculté des sciences de l’éducation estime qu’en deux semaines, il n’aura à débourser que 1000 FCFA pour avoir accès aux cours de tous ses enseignants.

    Comme ses deux camarades, Franklin voit en cette plateforme une aubaine. «Grâce à cette méthode, on ne sera plus obligé de se hâter pour nous rendre au campus. Il me suffira de me connecter à partir de mon lieu de service pour obtenir les cours et poser mes préoccupations à l’enseignant», explique l’étudiant en Master I LMF, et attaché commercial dans une structure de la place.

    Investissement
    Pour d’autres pensionnaires de cette institution universitaire, la plateforme des cours en ligne est plus une équation difficile qu’un avantage. «Pour prétendre à cette plateforme, je dois disposer d’un smartphone. Or, je n’en ai pas. Et pour avoir un bon smartphone, il faut dépenser au moins 50 000 FCFA. Cette somme représente un gros investissement, dans la mesure où il m’est déjà difficile de payer mes droits universitaires d’un trait, sans oublier le loyer et autres», explique Alain, étudiant en première année Philosophie. Pour Julien, si l’équation de la plateforme des cours en ligne est difficile à résoudre, elle n’est pas inaccessible. Bien qu’il n’ait pas de smartphone, il dit pouvoir compter sur la générosité de ses camarades et voisins de chambre. «J’ai convenu avec mes camarades d’utiliser leurs smartphones. À défaut de cela, j’irai dans un cybercafé. Je n’ai pas le choix», conclut-il.

    Joseph Julien Ondoua Owona (Stagiaire)

    Coronavirus

    Coût pour coup sur l’économie

    Depuis la survenue de la pandémie Covid-19 dans le pays, les milieux d’affaires payent un lourd tribut. Situation aggravée avec l’instauration, le 17 mars dernier, de 13 mesures barrières par le gouvernement.

    1-Transports affaiblis
    Le secteur des transports est enrhumé par le coronavirus. Les chiffres ne sont pas encore connus, mais selon les acteurs, «le coronavirus fait mal aux affaires». Et ce ne sont pas les agences de compagnies aériennes qui démentiront cette version. Elles déplorent plusieurs pertes financières dues à cette pandémie. «Des vols sont annulés chaque jour; des clients décommandent leurs billets d’avion, sur instructions de leurs entreprises ou du fait d’événements internationaux annulés. Ça crée un manque à gagner énorme», confie le responsable d’une compagnie aérienne dont la destination dominante depuis le Cameroun est la Chine.

    Agences de voyages
    Les agences de voyages elles aussi sont victimes du Covid-19. «L’un de nos plus gros clients a annulé 80% des billets réservés. Au sein de cette firme internationale, la consigne des dirigeants est de privilégier les vidéoconférences aux déplacements hors des zones de résidences», révèle une source qu’a approchée le confrère du quotidien national Cameroon Tribune.

    Taxis
    À cause du coronavirus, le transport urbain va mal. Désormais interdits d’admettre deux passagers à la cabine avant de leurs véhicules, les chauffeurs de taxi disent souffrir le martyre. C’est que les conditions sont devenues ardues. «Il n’y a ni élèves ni étudiants à transporter le matin. On dirait que les gens ont vraiment réduit leur déplacement. Et dans l’après-midi, quelques rares fonctionnaires se déplacent. Et comme si cela ne suffisait pas, on nous demande d’éviter de surcharger», explique François, chauffeur de taxi. L’impact, explique le quinquagénaire, est mesurable au niveau de la recette. «Il est prévu que je verse 50 000 FCFA de recettes chaque semaine.

    Mais à l’allure où vont les choses, je doute de pouvoir atteindre 40 000 FCFA de recettes», regrette-t-il. Sur le même sujet, Jacques réclame au gouvernement la baisse des impôts. Christian, lui aussi conducteur, souhaite pour que les propriétaires de ces véhicules réduisent le montant de la recette. Et, conclut un autre, dans un contexte pareil, «il serait plus judicieux de ne plus travailler du tout, au lieu de faire des dépenses pour acquérir du carburant, sans toutefois rentrer dans ses frais».

    2-Commerce
    Du fait de la suspension des importations de divers produits en provenance de la Chine et d’autres pays touchés par le COVID-19, une psychose s’est installée. Dans les marchés, on assiste à une flambée des prix des objets importés.

    Depuis février 2020, les prix des motos ont augmenté de façon considérable. Un commerçant rencontré à quelques encablures du quartier Briqueterie, haut lieu de vente de ces machines mobiles, s’explique. “Les importateurs ont augmenté les prix des motos. On est passé de 420 000 à 470 000. Pour celles de 460 000, le prix oscille désormais entre 520 000 et 530 000”, lance-t-il. D’une boutique à l’autre, le constat est le même: le coronavirus a enrhumé les prix. Et la raison, évoque un acteur du secteur, est “la suspension des importations de ces outils”. Les consommateurs n’ont donc d’autre choix que de se conformer à la nouvelle donne.

    Les bars au régime
    Dans le secteur des débits de boisson, les choses ne vont pas mieux. Le gouvernement camerounais a exigé que dès 18 heures précises, tous les bars soient fermés. Cela, apprend-on, concourt à limiter la propagation de la maladie. Si la mesure affecte les disciples de Bacchus, elle a aussi un impact néfaste sur les recettes des entrepreneurs, propriétaires de ces hauts lieux de jouissance.

    C’est la situation que vit Paul au quartier Carrière (Yaoundé II). “C’est dans la nuit que j’enregistre le plus grand nombre de clients. Et depuis pratiquement deux jours, je suis obligé de fermer. À cause de cela, j’ai perdu énormément d’argent”, confesse-t-il, au bord de l’indignation. Mêmes cris dans le bistrot de Jérémie, non loin du lieudit Chapelle Ngousso. “Mon chiffre d’affaires a baissé de 80 %”, explique-t-il, sans décliner les chiffres exacts. Un autre acteur de ce secteur demande au gouvernement de “voir dans quelle mesure juguler les pertes économiques” dues à ces mesures. Et il n’est pas le seul à penser ainsi.

    Commerce dans les établissements
    Pour les commerçants installés dans les établissements scolaires et universitaires, rien ne va plus. Avec la fermeture temporaire (mais non délimitée dans le temps) de ces lieux d’apprentissage, ils sont astreints aux congés forcés. Un vrai “cauchemar”, d’après une vendeuse dans un lycée de Yaoundé. “Depuis que l’école est fermée, je ne sais pas quoi faire. Je n’ai pas d’autre endroit où vendre mes beignets. Dans mon quartier, il y a déjà des femmes qui le font”, décrit-elle. Chez Hermine, vendeuse au Lycée de Ngoulmekong (Yaoundé IV), c’est le noir : «L’interruption de nos commerces a été brusque. Et ce n’est pas du tout facile pour nous qui sommes habituées à interrompre nos activités en juin, après les examens officiels”, dit-elle, avant d’ajouter: “sans cette activité, on survit seulement».

    Même situation à l’Université de Yaoundé I. Boutiques et restaurants sont hermétiquement fermés. Astreint au service minimum, le seul café ouvert peine à maintenir son chiffre d’affaires. “Je travaille habituellement avec quatre personnes, mais aujourd’hui, et jusqu’à nouvel ordre, je ne travaillerai qu’avec une seule personne”, explique M. Abé, propriétaire des lieux. Dans ce contexte, difficile d’engranger des bénéfices. La preuve, brandit-il, “mon chiffre d’affaires a chuté de 98 %”. Malgré cela, l’homme n’est pas prêt à prendre congé, puisqu’il faut satisfaire sa clientèle, désormais réduite aux seuls personnels administratifs et assimilés.

    Cosmétiques et autres
    À un taxi de là, précisément au Marché central, la situation semble stable, pour le moment. Mais les dires des uns et des autres présagent une flambée des prix dans les prochains mois. C’est le cas des produits cosmétiques, des jouets d’enfants, des vêtements, etc. Sur le même sujet, des commerçants rencontrés au marché Mokolo entrevoient, eux aussi, une inflation. “La situation est compliquée, et je pense que si ça continue ainsi, les prix vont augmenter. Et ça risque d’être encore plus difficile, dans un contexte où il n’y a même pas déjà assez d’argent en circulation”, confie Éric, vendeur des produits de beauté.

    Pourtant, lors d’une concertation entre Luc Magloire Mbarga Atangana, ministre du Commerce, et les acteurs de l’import-export et de la grande distribution, on a appris qu’il n’y a pas de raison que naisse une spéculation. Parce que, ont brandi les exportateurs, les différents stocks peuvent permettre l’approvisionnement du marché camerounais pendant quatre mois encore. Et pour s’en convaincre, le Mincommerce s’invite dans les magasins et boutiques pour déjouer les tours des inflationnistes.

    L’agroalimentaire bien portant
    De tous les secteurs, seul l’agroalimentaire peut se targuer de tenir le coup. Il en a pour un bon moment encore. À ce titre, “le coronavirus n’est pas une menace au Cameroun”, affirme Luc Magloire Mbarga Atangana, ce 11 mars 2020 à Yaoundé, aux côtés des importateurs qui s’en vantent. À contrario, le ministre camerounais du Commerce présente la situation comme une opportunité pour son pays. En effet, explique-t-il, “cette épidémie peut faire baisser les prix de certains produits parce que la demande dans les pays producteurs est faible”.

    Entre le 1er janvier et le 3 mars 2020, on a enregistré près de 41 000 tonnes de poissons importés et plus de 100 000 tonnes de riz qui comptent parmi les produits les plus consommés au Cameroun.

    Joseph Julien Ondoua Owona (Stagiaire)

     

    Lutte contre le coronavirus

    La Banque mondiale prescrit une synergie d’actions

    Avec des milliers de morts à son actif à travers le monde, le Covid19 est désormais l’épée de Damoclès qui plane sur l’économie mondiale. La situation est inquiétante. Ce d’autant plus que, «personne ne peut dire avec certitude quel sera l’impact économique réel de cette flambée épidémique. Il y a encore trop d’inconnues : durée de l’épidémie, nombre de pays touchés et capacité des pays à se mobiliser durablement pour apporter une réponse coordonnée et concertée rapide» indique Ceyla Pazabasioglu. Dans un billet publié le 09 mars 2020 sur le site de la Banque mondiale, la vice-présidente pour le pôle Croissance équitable, Finance et Institutions (EFI), de cette institution financière, fait une analyse de la situation qui prévaut dans le globe depuis décembre dernier.

    A l’en croire, il faut mettre un terme à la propagation de la maladie le plus tôt possible. Auquel cas, l’économie mondiale va s’écrouler. «Les chaînes de valeur mondiales, qui représentent près de la moitié des échanges mondiaux, commencent à pâtir de la fermeture d’usines et du redémarrage tardif de l’activité. Viennent ensuite les flux financiers étrangers, qui pourraient fuir les pays touchés par le coronavirus.

    Puis le capital humain et financier national, de plus en plus sous-utilisé avec l’arrêt des usines et le confinement des travailleurs chez eux. Il s’agit ensuite du secteur touristique et du voyage, touché de plein fouet par la baisse de la demande et des restrictions de déplacement toujours plus contraignantes, alors qu’il constitue pour de nombreux pays en développement une source importante de revenu. Et, pour finir, l’effondrement des cours des matières premières, qui va pénaliser les pays en développement tributaires de ces recettes essentielles», énumère le haut cadre de l’a société internationale.

    Dans ce contexte de haute tension, seule une réponse rapide, coordonnée et ambitieuse peut permettre de préserver les vies humaines et d’atténuer les préjudices économiques, écrit l’économiste turque. Ouvertement, l’institution de Bretton Woods appelle les gouvernements à travailler ensemble pour éradiquer cette menace commune. «Les gouvernements doivent se garder de toute tentation protectionniste, qui ne fera qu’exacerber les perturbations dans les chaînes de valeur mondiales et accentuer une incertitude déjà grande. Surtout, ils doivent éviter de restreindre les exportations de denrées alimentaires et de produits médicaux vitaux pour, au contraire, rechercher ensemble des solutions visant à accroître la production et la satisfaction des besoins là où ils sont les plus critiques», lit-on.

    Dans cette lancée, les pays développés doivent commencer à apporter leur aide bienfaisante aux pays de l’Afrique noire frappés de plein fouet par le mal.

    De son côté, la Banque mondiale rassure. Selon Ceyla Pazabasioglu, «Les pays en développement peuvent compter sur le Groupe de la Banque mondiale pour les aider à prendre les mesures nécessaires». D’ailleurs, l’institution internationale a déjà débloqué 12 milliards. Et elle ne compte pas s’arrêter à ce niveau, si les gouvernements sont favorables à son appel à la mutualisation des forces.

    Pour rappel, cette pandémie intervient dans un contexte où, l’économie mondiale commençait juste à redémarrer après la troublante crise financière de 2009.

    Joseph Julien Ondoua Owona (Stagiaire)

  • BVMAC : Une opportunité pour l’économie sous régionale

    BVMAC : Une opportunité pour l’économie sous régionale

    La culture boursière s’incruste en zone Cemac

    L’unification des marchés financiers de la Cemac ne suffira pas à faire de la sous-région un espace économiquement dynamique. En effet, les pays de l’Afrique centrale ont encore du chemin à faire en la matière. C’est du moins, ce que laisse entendre Charles Etoundi.

    Selon cet analyste financier, très peu de personnes parviennent réellement à cerner les enjeux de la bourse des valeurs dans cet espace communautaire. «Nous n’avons pas encore une culture de patrimoine, une culture boursière, une culture de gestion des actifs». Cela, ajoute-t-il, se justifie davantage par la présence d’entreprises «familiales» dans les pays de la communauté.

    Réticence
    Parce qu’elles sont des entreprises familiales, très peu d’entre elles sont prêtes à s’engager sur le marché financier sous-régional. En réalité, explique l’écrivain les entrepreneurs de la sous-région maitrisent très mal la cotation en bourse. À ce sujet, indique Dr Alban Lukang de la faculté des Sciences juridiques et politiques de l’université de Yaoundé II, «une étude menée sur 1000 entrepreneurs locaux démontre que 80 % d’entre eux sont au courant de l’existence de la Bvmac, mais ignorent en quoi elle consiste et quels peuvent être ses apports à leurs activités». Par conséquent, ils craignent de perdre leurs entreprises si jamais ils entrent en bourse. Pour tout dire, l’Afrique centrale est caractérisée par le manque de la culture boursière.

    Formation en bourse
    Et pour pallier ce gap, l’essayiste camerounais recommande que soient formés les différents acteurs intervenants dans la chaine boursière. Il s’agit notamment des consommateurs, des entreprises et des administrations. Dans le même élan, Charles Etoundi pense qu’il faut former les citoyens de la Cemac sur la culture boursière. Et cela, précise-t-il, doit commencer par les écoles. «Je pense que les universités et les grandes écoles devraient intégrer ce volet formation pour tous les étudiants».

    Joseph Julien Ondoua Owona (stagiaire)

    L’auteur en pleine dédicace spéciale.

    À Yaoundé, le 26 février 2020, lors de la dédicace de son livre, Charles Etoundi, analyste financier, a démontré le réel enjeu de l’unification des bourses de l’Afrique centrale.

    L’unification de la Douala Stock Exchange et de la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale sonne le glas de l’économie de la Communauté. On le retient des explications de Charles Etoundi. Face au public le, 26 février dernier à Yaoundé, l’auteur du livre «Fusion des bourses de valeurs mobilières en Afrique centrale, enjeux et opportunités» a présenté la thèse qu’il soutient dans cet essai, paru il y a quelques semaines.

    Entreprises
    Dans son ouvrage, l’analyste des marchés financiers présente et explique les mécanismes de la bourse des valeurs de la sous-région. D’ailleurs, l’expert brandit la bourse comme un modèle économique futuriste à même de combler les difficultés de financement des entreprises. «L’entrepreneur ou le propriétaire d’une PME qui a besoin de financement va résoudre son problème grâce à la bourse. Son entrée en bourse lui permet d’obtenir des financements. Et il les obtient en augmentant son capital. Parce que, plus il augmente son capital, plus il alimente son entreprise avec les fonds propres. Parce qu’il fait une émission d’actions, et les gens viennent acheter ces actions. L’argent qu’il recueille devient le capital de l’entreprise, c’est-à-dire les fonds propres que l’entreprise peut investir dans ses plans de fonctionnement. Voilà exactement ce que le propriétaire d’une PME obtient», explique-t-il.

    Affranchissements des États
    Dans le même sens, Charles Etoundi explique que la BVMAC de Douala va permettre aux États membres de la Cemac (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) de s’affranchir des financements extérieurs souvent conditionnés. «La fusion des bourses vient concrétiser la libre circulation des capitaux, tout en affranchissant les États et les acteurs des multiples conditionnalités souvent liées aux financements bilatéraux et multilatéraux», soutient-il.
    Parce que son œuvre vient démystifier le principe de bourse de valeur très mal connu, l’essai de Charles Etoundi marque un point.

    Dans sa posture de critique, Protais Ayangma Amang, auteur de la préface de cet ouvrage à caractère pédagogique, ne dit pas le contraire.

    Pour lui, le livre intervient «… au moment où les lignes commencent enfin à bouger avec la décision de fusionner les deux bourses de l’Afrique centrale (…)». Même si, pense-t-il, il faut prolonger la pensée de l’auteur.

    Déclinée en trois grandes parties, l’œuvre publiée aux éditions Les Presses de l’Ucac s’étend sur 237 pages. Dans la première partie, il retrace la marche de la Cemac vers le marché financier. Dans la deuxième, Charles présente le modèle de marché et de financement alors que dans la dernière partie, le natif d’Awae propose quelques solutions salutaires à la bonne appropriation des mécanismes du marché financier.

    Joseph Julien Ondoua Owona (stagiaire)

     

    Les bonnes feuilles

    «Après une observation de la scène sous-régionale ces dix dernières années, tant sur la structure que l’origine et la qualité du financement de l’activité économique, nous sommes encouragés par la position de plus en plus claire de la volonté politique relative à la situation des Bourses des valeurs en Afrique centrale. Un désir d’unification est exprimé par les acteurs institutionnels du système financier et les États. La décision des politiques a, après de longues tergiversations, aboutie à un consensus sur le fonctionnement d’un seul marché financier dans la sous-région.

    La fusion des bourses de Libreville et de Douala prise comme prétexte, il est permis sans que cela soit un optimisme béat, de croire que l’économie et le marché financier vont permettre à l’Afrique centrale de faire sa mue vers la construction d’une nation sous régionale objective et d’une Afrique centrale financièrement libérée. La question étant d’une grande importance, les bourses de Douala et de Libreville pouvaient-elles véritablement coexister dans une logique concurrentielle ou mieux fusionner dans une synergie d’actions et d’opérations, pour faire usage de leur potentiel commun, générateur de financements à long terme?»

    «… en matière de financement, il se poursuit un travail de coaching technique et financier international, malheureusement source de pesanteur exogène, pour les pays de la sous-région Afrique centrale en particulier. Cette démarche confine ces derniers à de médiocres performances. Il était tant que toute la zone se constitue en un bloc et formule un ensemble de politiques de convergences suffisamment sincères, gage de capitalisation de cette puissance économique participative célébrée dans le discours. L’on ne peut s’empêcher de relever quelques avancées à travers des actes concrets, non seulement du point de vue de la libre circulation des personnes et des biens, mais aussi par l’unification des marchés financiers.

    La fusion des bourses vient concrétiser la libre circulation des capitaux, tout en affranchissant les États et les acteurs des multiples conditionnalités souvent liées aux accords bilatéraux et multilatéraux. Le marché financier est donc la place où l’on vend des sociétés, lesquelles sont, avant toute autre considération, un capital social réunissant les actionnaires. Il n’y a pas de société sans capital social. Ainsi, la zone se doit d’utiliser ses pleines capacités de financement disponible dans les États de la Cemac, avec une projection vers la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Ceeac), les investissements directs étrangers et ceux de la diaspora. Ce qui fera de la bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale une plateforme à travers laquelle l’épargne et les investissements des particuliers sont canalisés dans les propositions d’investissement productif permettant la formation du capital…»

    Résumé: «l’avènement du marché financier communautaire en Afrique centrale est une bonne nouvelle et donne à croire au potentiel économique de la Cemac, longtemps ignoré par les acteurs internes et externes. L’ouverture bien tardive de la sous-région au marché financier comme outils modernes de financement des entreprises et de l’État offre de réelles opportunités pour les acteurs. Mais tout accouchement se faisant avec douleur, l’avènement d’une bourse commune s’est faite dans un contexte de rivalité et égos nationaux ayant conduit à la création de deux bourses: une à Douala au Cameroun et l’autre à Libreville au Gabon.

    La Douala Stock Exchange (DSX) et la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (BVMAC) ont révélé des limites dans l’animation du marché par un nombre limité d’introduction des valeurs d’entreprises, et enregistré de bons points en termes d’appels publics à l’épargne, plusieurs emprunts ayant été expérimentés avec succès. Le besoin de financement étant constant, le secteur privé en particulier et le Cameroun, leader de la Cemac, aspirent à un actionnariat qui permettra aux citoyens de participer à la construction de la croissance et d’en partager les fruits par la valorisation boursière des actifs. Le marché peut offrir un financement direct à l’économie pour laquelle la bourse constitue un moyen efficace. Les premiers pas de ce marché constituent donc un enjeu important. Car, son appropriation nationale au niveau de chaque État membre n’est pas chose acquise. La volonté politique expressive doit impérativement se traduire en actes, pour ainsi transformer le potentiel de la Cemac en opportunités.»

     

    Charles Etoundi

    Mais, il y a un véritable travail d’éducation à faire, parce que la culture boursière n’existe pas en Afrique centrale. Il faut bien qu’on y arrive.

    Analyste financier et auteur du livre Fusion des bourses de valeurs mobilières en Afrique centrale, enjeux et opportunités décrypte la situation actuelle marquée par l’unification de l’Afrique centrale.

     

     

    «Il faut que l’entrepreneur soit formé»

    Au-delà de tout ce qui a été dit au sujet de la BVMAC, proposez-vous une nouvelle grille de lecture de sa fusion?
    De mon point de vue, la fusion des deux bourses devrait être abordée, pour être mieux comprise, à deux niveaux. D’abord, il faut savoir que s’il y a eu retard, le retard ne peut pas être dans le processus en tant que processus de fusion. Mais c’est davantage le retard des politiques à pouvoir se décider à aller à la fusion. Je pense que dès le départ, on n’aurait pas dû créer deux bourses parce que lorsque la Douala Stock Exchange nait en 2001, il y avait déjà problème. Mais sur le plan technique, on avait décidé que le siège de la bourse serait au Cameroun, précisément à Douala.

    Mais le Cameroun a décidé, une fois la réunion de Libreville terminée, de créer une bourse au Cameroun. On peut observer que les mêmes problèmes qui ont conduit à la création de deux bourses en Afrique centrale ont constitué ce qu’on peut considérer comme un retard des politiques. Parce qu’en fait, le politique avait un rôle essentiel à jouer à ce niveau. Sur ce plan-là, il s’agissait d’arriver à la décision qui était déjà appuyée par tous les experts. Il me souvient qu’en 2006, la Banque mondiale avait déjà demandé qu’on puisse commencer à intégrer les deux marchés financiers, parce c’était une ambigüité qu’on trouve deux marchés financiers dans un espace économique aussi réduit.

    À cette époque, cela a créé ce que ça a créé, et aujourd’hui, après moult tergiversations on est parvenu à la décision de créer une bourse communautaire, et c’est cela que je peux considérer comme un retard. Mais le processus en lui-même en tant qu’opération de fusion c’est un processus à mon sens qui a réussi. Parce qu’elle a tenu compte des instances qui étaient en jeu. Et je rappelle qu’il y avait trois entités qui étaient en jeu. D’abord les institutions de service public, qui était la Commission des marchés financiers du Cameroun et la Cosumaf.

    À un autre niveau, c’étaient les institutions financières, c’est-à-dire, le dépositaire central et au troisième niveau, les entreprises de marché qui étaient la Douala Stock Exchange et la BVMAC. Je dois dire que pour ces deux entreprises de marché, la fusion était plus complexe. Compte tenu des délais qui avaient été donnés à l’équipe chargée de mener les opérations de fusion au plan technique, je dirais que cette opération a été réussie, vu que les délais ont été tenus. Sauf qu’il y avait plusieurs possibilités de parvenir à une seule entreprise de marché.

    En effet, au niveau des institutions, ça ne posait pas trop de problèmes à tout remettre à la Cosumaf, qui avait la primeur sur les activités au niveau de la Cemac. Mais au niveau de l’entreprise de marché, il y avait plusieurs possibilités de fusion. Mais celle qui a été choisie n’est pas mauvaise. Parce qu’il y a eu absorption par la société qui avait une dimension communautaire, c’est-à-dire la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale.

    Cette absorption a été faite avec une reconfiguration du capital qui permettait de réunir à la fois le capital de la Douala Stock Exchange et celui de la BVMAC. Et il y a eu augmentation du capital avec une émission d’un certain nombre d’actions. Mais ce que je déplore, et je pense que ça aurait dû être un cas d’école, c’est-à-dire une action qui devait avoir un sens pédagogique pour le marché en lui-même, c’est qu’on aurait dû faire une ouverture du capital en lançant une souscription publique.

    En effet, dans la mesure où les décisions communautaires sont applicables de manière directe, s’imposent aux États et donc au niveau de la Cosumaf et de la Commission des marchés financiers, la Cosumaf avait une primeur sur la Commission des marchés financiers. Encore que la Cosumaf était issue de la décision communautaire d’intégration. Elle s’imposait donc totalement à l’État. Ce qui veut dire qu’il n’y avait pas de problème à ce niveau. On a simplement annulé la CMF au Cameroun et coté l’entreprise de marché qui est installée et qui devait donner une autre dimension à cette opération. Peut-être avec les délais, l’équipe chargée de la fusion n’a pas jugé vraiment nécessaire de lancer ladite opération. Je pense que le processus n’est pas encore achevé, et à ce niveau, il y a encore des attentes.

    Ne pensez-vous pas que finalement il se pose un problème de pédagogie qu’il faut mettre en œuvre pour que la bourse soit véritablement opérationnelle?
    Il y a effectivement un travail à la fois de sensibilisation d’éducation, de formation à faire à tous les niveaux. En effet, si en Afrique centrale, on découvre le marché financier à partir des années 2000, puisque la Douala Stock Exchange nait en 2001 et la BVMAC en 2003, leur activité commence effectivement dans les années 2006. Alors que dans des zones comme l’Afrique de l’Ouest, c’était dans les années 1971.

    Il y a véritablement un travail d’éducation et de formation à faire, et cela constitue un problème, parce que ça n’a pas encore commencé. Normalement, il était dit qu’à partir du 30 juin 2019, un certain nombre d’opérations devaient être entreprises. Mais étant donné que le marché est nouveau et que les services mêmes du marché sont encore en train de s’installer, on espère que les gens chargés d’assurer les volets communication, formation et promotion du marché feront effectivement leur travail. Mais, il y a un véritable travail d’éducation à faire, parce que la culture boursière n’existe pas en Afrique centrale.

    Il faut bien qu’on y arrive. Le marché financier est un lieu stratégique à la fois pour les États et pour les entreprises et même monsieur tout le monde. Nous n’avons pas encore une culture de patrimoine, une culture boursière, une culture de gestion des actifs. Je pense que les universités et les grandes écoles devraient intégrer ce volet formation pour tous les étudiants. Chaque entreprise devrait avoir un personnel formé sur les activités du marché financier, car toute entreprise qui veut grandir a une voix au niveau de la bourse. Si l’entrepreneur introduit sa société en bourse, il faut que ledit entrepreneur lui-même soit formé.

    Au niveau de la mise en œuvre, la faute ne revient-il pas aux dirigeants qui n’appliquent pas véritablement cette disposition de l’Acte additionnel de 2018 dont vous parlez?
    Effectivement, à ce niveau, il y a quelque chose à déplorer. Parce que normalement, dès la publication de l’Acte additionnel, les États avaient un délai de 24 mois. Ce délai a expiré. Donc, aujourd’hui, les États sont dans une situation complexe. Mais au moins, dans la constitution du capital de l’entreprise des marchés qui est la BVMAC, les États ont souscrit effectivement à leur 30%. Chaque État devait souscrire à un volume de 5% du capital, et donc, pour six États, on a 30%, ce qui a été fait. Mais il y a cette instruction qui demande aux États de mettre en place des actifs réglementaires qui permettent à toutes les entreprises qui ont une certaine envergure de s’introduire dans le marché financier. Rien n’a été entrepris jusque-là, car aucun État n’a voté une loi qui, justement, détermine le cadre ou alors le niveau des entreprises qui doivent faire leur introduction en bourse.

    Est-ce que vous avez l’impression que la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale pourra, un jour, atteindre le niveau des autres bourses dont nous avons connaissance de par le monde?
    Effectivement, toute activité a besoin d’être soutenue. La bourse de l’Afrique centrale a face à elle un potentiel énorme. Je déplore qu’on n’émette pas beaucoup, qu’on ne crée pas assez. Dans la création monétaire, par exemple, il y a ce qu’on appelle la contrepartie. Vous ne pouvez pas créer de la monnaie sans la contrepartie. Et en Afrique centrale, on ne crée pas beaucoup. Je prends le cas de la dernière loi sur les zones économiques au Cameroun, qui date de quelque temps. Je constate qu’aucune zone économique n’a véritablement été créée au Cameroun. Pourtant c’est un potentiel.

    Si vous prenez le cas du Gabon, lorsqu’il y a eu la loi de création de la Zone économique, cette entité, qui est cotée en bourse, a fait un emprunt obligataire de cette zone économique du Gabon. Donc, si on crée au Cameroun, deux, trois ou quatre zones économiques, ça peut se créer davantage. Voilà un potentiel. Il y a le nombre d’entreprises qui est là, il y a même l’exploitation des ressources naturelles au Cameroun et en Afrique centrale. Tout cela devrait intéresser le marché financier. Et c’est de là que viennent les fonds et les financements qui donnent une attractivité à un marché financier. Lorsqu’on veut atteindre un certain niveau dans un marché financier, il faut qu’il y ait une volonté à la fois politique et même législative.

    Parce que l’État qui fait les lois à la possibilité d’orienter l’activité économique d’un pays. Il y a le potentiel, il faut seulement donner à ce potentiel une chance d’être véritablement exploité. Et le marché financier aura tout son sens parce qu’il est adossé à une activité économique. Si l’activité économique se porte mal, le marché aussi se portera mal. Si elle est robuste, le marché aussi le sera. Mais, quand vous jetez un regard sur la dématérialisation des valeurs mobilières, vous voyez qu’elle a un objectif qui est celui de permettre à l’État de déterminer le volume du capital qui est investi dans les entreprises au Cameroun.

    Aujourd’hui, pour créer une entreprise, il faut aller voir un notaire qui vous dresse un acte de création qu’on publie dans le journal d’annonces officielles. Et tout cela n’entre dans aucun fichier global. La dématérialisation a pour objectif de recréer toute l’information dans la constitution du capital, pour le volume du capital investi dans les entreprises. Et cela permet à l’État de déterminer la capacité de financement interne d’un pays, de dire quel est l’apport direct dans la constitution du capital au Cameroun. Aujourd’hui, tous les marchés financiers se digitalisent pour la cotation.

    La cotation est même désormais électronique; la bourse est désormais en ligne, tout comme les ordres, les transactions, le crédit. La bourse en ligne prend de plus en plus d’ampleur dans toutes les places financières. Par conséquent, si la bourse est en ligne et les valeurs mobilières sont physiques, cela n’aura aucun sens. Donc il faut bien que la dématérialisation soit effective pour mieux alimenter le marché, parce que le marché se développe dans les transactions dématérialisées qui sont faites en ligne.

    Alors, s’il fallait s’adresser à l’entrepreneur le plus bas, qu’est-ce qu’il gagne en entrant en bourse?
    L’entrepreneur ou le propriétaire d’une PME qui a besoin de financement va résoudre son problème grâce à la bourse. Son entrée en bourse lui permet d’obtenir des financements. Il les obtient en augmentant son capital. Parce que, plus il augmente son capital, plus il alimente son entreprise avec les fonds propres. Parce qu’il fait une émission d’actions, et les gens viennent acheter ces actions. L’argent qu’il recueille devient le capital de l’entreprise, c’est-à-dire les fonds propres que l’entreprise peut investir dans ses plans de fonctionnement. Voilà exactement ce que le propriétaire d’une PME obtient.

    Il faut toutefois relever que la bourse c’est la crème de l’entreprise. Ce sont les meilleures entreprises qui sont cotées en bourse. Et lorsque vous êtes coté en bourse, vous avez une valeur aux yeux de vos partenaires, parce que lorsqu’on traite avec votre entreprise, on ne la cherche pas. Pour la retrouver, il suffit de faire une recherche sur le web en tapant «bourse de l’Afrique centrale» pour que votre entreprise apparaisse. Et là, on peut vous faire confiance. Donc il y a cette valorisation de l’entreprise par le marché financier et cette valorisation est à deux niveaux: la valorisation en termes de valeur économique, puisque que si vous êtes bien coté et que vos actions augmentent tous les jours. Cela aura des conséquences pour votre entreprise.

    Elle sera désormais crédible auprès de ceux qui souhaitent vous accorder des financements. Même lorsque vous allez demander du crédit à la banque, le fait que vos actions aient une valeur croissante de l’ordre de 15, 20 % par an peut amener le banquier à vous accorder le crédit. Quel que soit le bailleur de fonds que vous sollicitez, il va vous accorder le crédit. Donc la bourse attribue une valeur économique à l’entreprise. Mais aussi, il y a la visibilité pour la promotion de votre entreprise. Parce qu’on la verra partout, parce que la bourse constitue également une vitrine pour l’entreprise. Voilà à trois niveaux, ce que peut gagner un entrepreneur.

    Mais comme je le disais, il faut que le concerné soit suffisamment formé sur les mécanismes de la bourse pour qu’à chaque fois, lui-même soit capable de maitriser les activités de ce marché et ne pas courir le risque de perdre son entreprise. Parce que si d’autres personnes viennent mettre plus d’argent que lui dans son entreprise, forcément il sera minoritaire, voire même dépossédé de son entreprise.

    Doit-on s’attendre à des extensions de ce document?
    J’avoue que lorsque j’ai terminé cette publication, je me suis rendu compte que je n’avais fait que commencer quelque chose qui devrait se poursuivre. D’abord le marché financier en lui est très dynamique. Ce qui veut dire que ce qui a été dit aujourd’hui peut évoluer demain. Parce que le marché financier exige des adaptations et lorsque le nôtre va évoluer, il faudra bien expliquer aux gens ce qui a évolué. Et le travail va continuer certainement.

    Propos recueillis par
    Jean René Meva’a Amougou

  • En Afrique centrale : 53 milliards FCFA pour protéger la biodiversité

    En Afrique centrale : 53 milliards FCFA pour protéger la biodiversité

    Esprit de Rio

    La première session du comité de suivi national du Programme d’appui pour la préservation de la biodiversité des écosystèmes fragiles en Afrique centrale (Ecofac 6) pour le Cameroun s’est tenue à Yaoundé les 13 et 14 février 2020. Elle rentre dans le nouveau système de gestion du projet aux niveaux local et national dans les sept pays concernés (Cameroun, Congo, Gabon, République centrafricaine, République Démocratique du Congo, Sao Tomé-et-Principe et Tchad).

    Inscrite dans le cadre du Programme de l’économie des aires protégées, la rencontre a donné le privilège aux parties prenantes de prendre conscience du rôle qui est le leur dans l’implémentation du projet Ecofac dans le pays. L’on a vu les participants travailler à identifier les zones et des mécanismes clés sur lesquels les pouvoirs publics devront porter tous leurs efforts afin d’éviter une chute considérable, bien que difficilement mesurable, de la biodiversité nationale à plus ou moins brève échéance.
    Initié en 2010 à la suite de la Conférence de Rio sur la diversité biologique, le programme Ecofac a été approuvé par les chefs d’État, le 25 mai 2015 à N’Djamena, lors de leur sixième conférence.

    Tel que conçu, il va permettre de préserver l’écosystème de la région, en vue de lutter contre les changements climatiques dans le monde. La première phase du programme Ecofac 1 a été lancée en 1992. L’UE a investi plusieurs millions d’euros dans la région, à travers les 5 premières phases de ce programme phare visant la protection du second poumon vert de la planète après l’Amazonie. Il s’agit d’un programme d’intégration sous-régional signé entre les États d’Afrique centrale, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et l’Union européenne, dans le cadre du 11e Fonds européen de développement (FED, 2014-2020). Le projet englobe le Réseau des institutions de formation forestière et environnementale de l’Afrique centrale (RIFFEAC) et les populations de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Il s’étend jusqu’en 2023.

     

    L’appui financier vient des caisses de l’Union européenne (UE) dans le cadre de la mise en place de la 6e phase du Programme régional d’appui pour la préservation de la biodiversité et des écosystèmes fragiles en Afrique centrale (Ecofac 6).

    Les participants au premier comité national de suivi du programme Ecofac

    C’est connu depuis décembre 2019. 80,5 millions de dollars (soit 53 milliards FCFA) vont être injectés en guise de soutien à la mise en œuvre de Ecofac IV. Selon l’UE, l’argent est orienté vers 2 volets du programme. D’une part, il y a la préservation de la biodiversité, avec l’appui de 12 aires protégées répertoriées dans les sept pays ciblés par le programme: le Cameroun, la République centrafricaine (RCA), le Congo, la République démocratique du Congo (RDC), le Gabon, le Tchad et Sao Tomé-et-Principe.

    D’autre part, il est question d’appuyer l’Observatoire des forêts d’Afrique centrale (Ofac), un organe de la Commission des forêts d’Afrique centrale (Comifac), notamment concernant sa publication intitulée État des forêts.
    L’autre partie du financement d’Ecofac 6 est destinée à soutenir des projets de résilience au changement climatique en soutenant un développement économique qui prend en compte les questions environnementales. Depuis 1992, l’UE a investi plus de 137 millions d’euros pour les cinq premières phases d’Ecofac.

    Au Cameroun, le financement ira à la protection de la réserve du Dja (située dans le sud-est du pays et inscrite par l’Unesco sur la liste du Patrimoine mondial de l’humanité) et au Parc national du Faro, situé dans la région septentrionale du pays. L’UE appuiera également le ministère camerounais des Forêts et de la Faune dans la lutte contre le braconnage et le commerce illicite d’ivoire.

    Comités nationaux
    Au cours des cinq premières phases, les experts ont établi une rupture totale entre les différentes parties impliquées dans le programme au niveau national. Il s’agit entre autres des ministères et des opérateurs. Et pour une meilleure implémentation du projet Ecofac phase 6, la CEEAC, maitre d’ouvrage, a mis sur pied des comités de suivi nationaux dans les pays. Ceux-ci sont constitués de plusieurs instances: les ordonnateurs nationaux, qui sont les ministères de l’Économie; les opérateurs ou des ONG; les directions des Aires protégées, représentées par les ministères en charge de l’Écosystème, auxquels, s’ajoute l’assistance technique régionale du consortium Landell Mills/Eptisa.

    Désormais bras séculiers du Comité de pilotage régional (Copil), ils vont contribuer à une meilleure prise de décision au niveau régional. Parce qu’ils devront formuler les recommandations à inscrire à l’ordre du jour du comité de pilotage, les membres sont chargés des questions transversales de l’ensemble des États de l’Afrique centrale pour mieux solutionner les problèmes et prendre les initiatives nécessaires. L’objectif est d’instaurer une synergie avec d’autres initiatives menées dans les pays bénéficiaires par les instruments financiers de l’Union européenne et les autres bailleurs de fonds.

     

    Cameroun

    Cameroun l’économie verte au développement local

    Avec Ecofac 6, le pays doit valoriser les ressources naturelles pour permettre aux populations d’en tirer profit et de susciter leur adhésion.

     

    L’atelier de Yaoundé a permis de mieux cerner les contours du programme Ecofac au Cameroun. À en croire les experts de la CEEAC dans le domaine, la protection des écosystèmes n’intègre plus seulement la conservation des patrimoines forestiers et fauniques, mais également leur valorisation pour susciter l’adhésion des populations riveraines. Cela passe par des politiques et mesures y afférentes. Faisant partie du patrimoine mondial, l’écosystème de l’Afrique centrale est lui aussi menacé d’extinction. Au moment où les changements climatiques causent des ravages, il est urgent pour l’Afrique centrale de maintenir le cap.

    Enjeu ultime
    Pour mieux préserver les zones à forte concentration en faune, en flore et en ressources minières, l’implication des populations riveraines est une nécessité. Manfed Aimé Epanda en fait d’ailleurs le défi majeur dans la préservation de l’écosystème en Afrique centrale. Dans ce sens le coordonnateur d’Africa Wildlife Foundation au Cameroun sait déjà comment procéder. Et sans ambages, il l’explique: «Il s’agit pour nous d’évaluer les ressources des populations environnantes, pour voir dans quelle mesure on peut les valoriser. Il y a beaucoup de produits forestiers non ligneux, le Ndjansang, le moabi, l’okok, etc. Comment est-ce qu’on peut ajouter de la qualité à ces produits? Et en travaillant avec ces communautés, on se base sur deux choses: la qualité et le marché. Le but est de permettre que la valeur soit ajoutée à ces produits qui seront vendus, pour qu’il y ait un retour en termes de moyens de subsistance. Cela a un effet de structuration et d’amélioration des conditions de vie des populations».

    Emplois
    Un autre moyen de susciter l’adhésion des populations riveraines des zones «protégées» réside dans la création des emplois. Compte tenu du contexte actuel marqué par le sous-emploi au Cameroun, le projet d’économie verte de la CEEAC représente une niche d’emplois pour les populations riveraines. Selon le Dr Delblondet Bleu, «Il y a plusieurs emplois qui sont créés dans le cadre de ce programme. Ça commence par les écogardes. Puisqu’ils sont payés par le financement de l’Union européenne, bien qu’ils soient des fonctionnaires de l’État, ils sont détachés auprès de ces aires protégées». Au-delà, explique l’assistant technique régional du projet Ecofac 6, il y a des métiers de pisteur, la création des plantations agricoles et autres activités génératrices de revenus financés par le bailleur de fonds.

    JJOO

  • Cemac :Du chœur à l’ouvrage

    Cemac :Du chœur à l’ouvrage

    Yaoundé, capitale de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) ce 22 novembre 2019. Les dirigeants des six pays de la sous-région y sont pour prendre part au sommet extraordinaire initié par Paul Biya, président en exercice de cette institution.

     

    Contexte et chocs exogènes
    Pour les analystes, cette session de la Conférence des présidents des pays de la CEMAC intervient à un moment où la sous-région se retrouve prise entre plusieurs feux. Notamment tensions sécuritaires dans le bassin du lac Tchad et autres conflits qui occasionnent d’importantes dépenses financières. Il y a également la conjoncture économique qui continue de sévir, dans la sous-région, du fait de la chute des cours des matières premières. C’est le cas du pétrole, principale source de revenue de la majorité desdits pays de la sous-région. À cela, s’ajoutent les changements climatiques, entre autres.

    Enjeux et défis
    En vue de pallier ces problèmes, les présidents des pays de la sous-région ont entrepris un certain nombre d’actions, avec l’appui de leurs partenaires techniques et financiers internationaux, dont le Fonds monétaire international (FMI). Et les fruits ont l’air d’avoir tenu la promesse des fleurs. À ce sujet, nous apprend le dossier de presse soumis à notre étude, le taux de croissance dans la sous-région devrait s’établir autour de 3,2 % en 2019 et 3,5 % en 2020 et 2021, contre 1,5 % en 2018, – 0,2% en 2017 et – 0,1% en 2016.Mais le plus gros challenge demeure.

    Préserver les acquis
    Au cours de leurs débats, les présidents desdits pays vont tabler sur les moyens de garder le cap. «Il s’agit à présent de préserver ces acquis, pérenniser et booster cette performance de manière à faire oublier au plus vite les deux années successives de récession. Consolider la croissance enregistrée depuis 2018 dans la sous-région est un défi parmi tant d’autres que devra relever les État membres de le Cemac. Ces derniers doivent renforcer la dynamique des réformes pour relancer fortement la croissance et offrir de bien meilleures perspectives à leurs populations notamment les jeunes et les femmes», lit-on dans le document.

    Trouver des financements
    Dans la panoplie de dossiers à retrouver sur la table des chefs d’État, il y a celui du financement de la Communauté. En effet, indique notre source, les performances attendues des institutions communautaires dans leurs missions régaliennes sont hypothéquées par le faible recouvrement des ressources de la Communauté à travers le mécanisme de la Taxe Communautaire d’Intégration (TCI).Aussi, Paul Biya et ses pairs devront trouver des moyens d’obtenir des ressources conséquentes, à même d’accompagner les États dans la mise en place des projets de développement.

    Impératifs sécuritaires
    Autre défi, le maintien de la paix. Parce que la sécurité constitue un enjeu majeur dans la sous-région, les assises de Yaoundé constituent une opportunité pour les chefs d’État de panser les impératifs sécuritaires dont souffrent les États membres de la Cemac. Il sera donc question de réfléchir sur les moyens de vaincre définitivement la secte Boko Haram qui sévit dans le bassin du Lac Tchad. Sans oublier que d’importants foyers de tensions sommeillent encore au cœur de la Centrafrique, en marge des Accords de Paix de Khartoum entre le Gouvernement Centrafricain et 14 groupes armés centrafricains.
    La question de la libre circulation n’est pas en reste. Parce que la libre circulation matérialise d’avantage l’intégration sous régionale, les dirigeants des pays de la Cemac devront mener des réflexions sur des moyens d’améliorer la circulation des personnes et des biens au sein de la communauté.

    Dans leurs débats, les chefs d’États comptent également éplucher la question brûlante de la monnaie coloniale à laquelle sont assujettis lesdits pays depuis les «indépendances». «La question de l’avenir du Franc CFA pourrait éventuellement également être abordée lors du Sommet Extraordinaire de Yaoundé. La monnaie héritée de la colonisation divise les économistes et les Chefs d’État de la zone Franc. Elle est présentée par de nombreux experts en finances comme un frein au développement. Ceux qui sont pour le maintien du Franc CFA, avancent l’argument de la stabilité qu’offre cette monnaie face aux spéculations», indique le document d’une vingtaine de pages.

    Joseph Julien Ondoua Owona

  • Mototaxis : Le road show de la défiance et de la loi

    Mototaxis : Le road show de la défiance et de la loi

    Devant les corps constitués et autres citoyens anonymes, les benskineurs disent n’avoir peur de personne. En face, l’autorité n’hésite pas à reprendre le dessus.

    Une caravane politique menée par les “bendskineurs”

    À coups de klaxon, les conducteurs de mototaxis de Yaoundé ont donné de la voix, le 9 novembre dernier. Avec véhémence et détermination, ils ont voulu battre le pavé afin de protester contre le refus du gouverneur de la région du Centre de leur «ouvrir» le centre-ville et d’autres hautes places de la capitale. Dès le début de la matinée, la ville s’est enflammée. Très tôt, très vite, un dispositif policier s’est installé à certains endroits «interdits, protégés et contrôlés». Envoie tes gaz, mon gars; ça pique les yeux, mais ça pique tous les jours!» a hurlé, au lieu-dit «Carrefour Mecc», un «bendskineur» devant les policiers médusés. À Nsam, Elig-Edzoa ou à Mendong, des bandes ont vidé les taxis et les bus de leurs passagers. Les services du gouverneur ont également failli être envahis; l’ambassade de France au Cameroun a été mise sous haute protection.

    Sans le dire, dans les esprits et les guidons, le scénario du pire est souhaité: les violences, le blocage et, au bout, l’impasse politique. Face à l’ampleur de l’affaire, et voyant que le mouvement leur échappait très largement, hommes politiques et vedettes locales sont progressivement montés au créneau afin de tenter d’enrayer la gronde sociale à coups de mesurettes qui ne trompent évidemment personne. «Laissez les benskineurs se débrouiller dit donc; vous qui avez les grosses voitures, vous savez même comment on fait pour sortir du quartier à 5 heures pour aller travailler quand il n’y a pas de route?

    Comment il faut se faufiler dans les embouteillages (encore parce qu’il n’y a pas de route) pour que les élèves (pour la plupart des enfants de pauvres) arrivent à l’heure à l’école où mêm pour qu’un malade arrive à l’hôpital?

    Sachez que les benskineurs ne sont pas là par hasard; s’ils sont là c’est parce qu’il y a une forte DEMANDE et ils créent L’OFFRE pour la satisfaire. Au lieu même de dire merci aux benskineurs vous voulez plutôt les interdire?», a tempêté le rappeur Maahlox sur les réseaux sociaux.

    En tout cas, les conducteurs de ces engins sont revenus à l’ordre pour respecter la décision de l’autorité administrative. La preuve, les barricades érigées sur les routes lundi ont été levées. Au décompte final, il s’est passé quelque chose. Martial Penda Eyoum évoque, de façon positive, «une forme de résilience très forte, c’est-à-dire la capacité d’un système à absorber des chocs sans que cela débouche sur un chaos total». C’est ainsi que le sociologue apprécie la démarche des autorités publiques.

    Frictions
    Seulement, il fait vite de remarquer que les rapports entre ces dernières et les mototaxis relèvent d’«une connexion balbutiante». En réalité, appuie-t-il, «il existe des doutes sur leur cohabitation pacifique». On se souvient des apartés musclés entre Gilbert Tsimi Evouna et un collège de mototaximen au sortir d’une réunion de concertation en novembre 2011 à Yaoundé. Le délégué du gouvernement avait alors essuyé quelques bousculades après avoir demandé à ses interlocuteurs de ne plus rouler à certains endroits de la ville (carrefour Mvog-Mbi, Olezoa, Boulevard de la Réunification, carrefour Emia, gare routière de Messa, sous-préfecture de Tsinga, Rond-point Bastos, carrefour Tongolo, Hôpital général, stade Omnisport, et le carrefour Mobil Essos).

    «Nous ne comprenons pas pourquoi ce type nous interdit là-bas», fulmine un jeune qui, depuis, outrepasse en compagnie de beaucoup d’autres, la mesure de Gilbert Tsimi Evouna. Il donne les raisons de leur envahissement de certains coins de la cité capitale. «Nous sommes ici depuis un certain moment par ce que, suite au drame que notre confrère a eu, le préfet du Mfoundi nous a dit que si quelqu’un a les pièces nécessaires, il peut conduire sans problèmes ici à la Poste. C’est pourquoi nous sommes là» martèle-t-il.

     

    Les conducteurs de mototaxis ont fait parler d’eux la semaine dernière. Ils ont annoncé un bras de fer avec les autorités de la capitale. Journée du mototaximan + manif pour revendiquer la possibilité de rouler partout à Yaoundé = samedi à haut risque. D’autant plus qu’à l’équation bien compliquée que posait la journée de samedi 9 novembre 2019 à Yaoundé, il a fallu ajouter encore une inconnue à cagoule, celle du contexte sociopolitique précaire au Cameroun. Multipliant des accrochages avec la police, toutes leurs tentatives d’investir le lieu-dit Poste centrale dans la matinée, par petits groupes, ont été contrecarrées par un dispositif policier massif, mais aussi très réactif.

    Selon les premières «remontées d’informations» enregistrées par la préfecture du Mfoundi, les conducteurs des engins à deux roues ont misé sur l’effet médiatique que leur mouvement aurait. Là, c’est raté. Après avoir fait les gros titres et les ouvertures des journaux télévisés pendant de nombreuses semaines, les «Bend Skin» sont sortis du radar de la presse.

    La mobilisation a baissé, mais pas la détermination. De nombreux mototaximen de Yaoundé ont continué à se rassembler pour tenter de faire plier le gouvernement sur leur revendication principale (faire le ramassage au Centre-ville). Puis, s’en est suivi un croisement de courbes. Quelques hommes politiques sont devenus favorables à un arrêt des actions des «bendskineurs». Néanmoins, ils ont gardé une sympathie pour le mouvement et ses revendications.

    Alors, que comprendre de tout cela? La question est traitée dans ce dossier.

     

    Le grand blues des politiques

    Lors des meetings et autres caravanes, les engins à deux roues sont sollicités avant d’être vomis par des hommes en quête de popularité.

     

    «Prenant l’exemple, l’an dernier, des mototaxis, qui ont un rôle social évident, j’avais souligné la nécessité de l’organisation de cette profession. Je suis heureux de constater que les services de l’État, après consultation avec les intéressés, ont mis au point un programme collectif d’encadrement. De la sorte, les mototaxis pourront s’impliquer davantage -et mieux- dans nos projets de développement national. Ce programme touche à différents aspects de l’exercice de cette profession, notamment à la formation, à la gestion et à l’organisation». Dixit Paul Biya dans son message à la jeunesse le 10 février 2014. Quelques jours après avoir entendu ces phrases présidentielles, les mototaximen ont couvert les pouvoirs publics des cris de joie. «On a gagné, on a gagné!», chantaient-ils, réunis sur une péniche au lieu-dit Carrefour du palais à Yaoundé.

    Face à l’affluence médiatique, quelques-uns parmi les dignitaires du sérail tentaient de retourner la dynamique à leur bénéfice. «C’est une pratique bien connue chez nous: les hommes politiques se servent des mototaxis pour battre campagne ou se mettre en valeur simplement», tranche Sylvain Mpai, spécialiste camerounais de la communication politique. «À l’opposé, observe-t-il paradoxalement, les mêmes hommes politiques leur vouent un satané dédain».

    Pistes
    Pour aider à comprendre, l’universitaire invite aux caravanes politiques à travers le pays. «Le signe le plus visible de l’utilité des benskineurs dans un show politique est l’usage totalement erratique des gyrophares, klaxon à deux tons et autres sirènes, qui s’accompagnent généralement de feux grillés, de circulation dans les couloirs interdits et de signes comminatoires aux automobilistes», décrit Sylvain Mpai.

    Pour sa part, Diane Yemele, la coordonnatrice de l’ONG Centre d’études et d’expertise sur la mobilité et l’aménagement (Ceema), n’est pas éloignée du même raisonnement. «Pour des signes extérieurs de puissance ou de popularité politique d’un leader, ce sont les mototaxis qui intiment aux manants de dégager la route!», fait-elle constater. Elle souligne par ailleurs qu’«en matière d’excès de vitesse et de désordre urbain, c’est comme si personne ne s’étonnait plus que le sommet politique donne le mauvais exemple et fasse le contraire de ce qu’il impose au citoyen».

    Pour aider à comprendre encore, un syndicaliste ayant requis l’anonymat, déballe: «Le mot est intraduisible, mais le concept est simple: les caravanes de motos d’accompagnement politique se construisent localement, au gré des envies et des disponibilités de chacun. Les hommes politiques savent que c’est la meilleure façon, la plus organique -en dehors des médias payants- d’atteindre un nouveau public et un nouveau groupe d’électeurs».

    Jean-René Meva’a Amougou

     

    C’est juste une manifestation de démocratie négative

    Martial Penda Eyoum

    Ce mouvement exprime une colère qui peine à se structurer. Ils entretiennent une forme de paradoxe, mêlant une critique radicale de ceux qui gouvernent et une attente d’un pouvoir plus actif. Ils forment une nébuleuse rassemblée autour d’une démocratie de rejet

    À partir de sa grille de lecture, le sociologue donne son avis sur le lien entre la politique et les mototaxis au Cameroun.

     

    Au Cameroun, ces derniers temps, le quotidien semble marqué par la montée des populismes. Le mouvement des mototaximen exerçant dans la capitale en est-il un exemple?
    Ce mouvement montre que se sont constituées, dans l’ombre, des communautés de souffrance et de rancœur. Ceux qui, ouvertement ou discrètement, revendiquent leur appartenance à cette communauté disent ne pas être écoutés ou représentés. Alors se crée un mouvement rassemblant des décrocheurs de la démocratie, animés par la défiance vis-à-vis des institutions.

    Pour définir leur action, le mot “révolution” a été utilisé par quelques conducteurs de mototaxis rencontrés à Yaoundé. Comment faut-il comprendre cela?
    Il ne s’agit pas de révolution. La prise du pouvoir n’est pas la revendication de ceux qui protestent aujourd’hui. Ils entretiennent une forme de paradoxe, mêlant une critique radicale de ceux qui gouvernent et une attente d’un pouvoir plus actif. Ils forment une nébuleuse rassemblée autour d’une démocratie de rejet. Celle-ci ne se préoccupe pas de cohérence, sinon elle ne demanderait pas à la fois plus d’États et moins d’impôts! Ce qu’il s’est passé à Yaoundé est juste une manifestation de démocratie négative, constituée simultanément d’une force dans la rue et d’une faiblesse pour formuler des propositions. Ce qui fonde leur unité ne repose pas sur une contagion purement physique des émotions, mais sur la découverte du partage de représentations communes. Cette unité ne conduit pas à une déshumanisation, mais à une jubilation. Il y a du plaisir et même, pourquoi pas, de la jouissance à partager des opinions et des émotions. Enfin, cette jubilation produit des sentiments de courage qui pourraient être qualifiés comme un surcroît de valeur morale.

    Ce qui fonde leur unité ne repose pas sur une contagion purement physique des émotions, mais sur la découverte du partage de représentations communes. Cette unité ne conduit pas à une déshumanisation, mais à une jubilation. Il y a du plaisir et même, pourquoi pas, de la jouissance à partager des opinions et des émotions. Enfin, cette jubilation produit des sentiments de courage qui pourraient être qualifiés comme un surcroît de valeur morale.

    Selon des informations puisées à bonne source, des hommes politiques seraient aux côtés des mototaximen. Va-t-on parler d’opportunisme politique au cas où cela est avéré?
    Quoi qu’on dise, au Cameroun, les partis sont en déclin tandis que les mouvements montent en puissance. Le propre d’un parti est de construire un projet sur une base sociale, culturelle et parfois territoriale. Il répercute des revendications du bas vers le haut. Le mouvement, à l’inverse, repose d’abord sur sa tête d’affiche. Il s’organise autour d’une personne et se satisfait de rudiments de démocratie interne. Nous sommes dans un moment historique où dominent les peurs, les impatiences, le désenchantement, à l’origine de communautés de répulsion. Alors, on pourrait qualifier d’opportunisme la capacité qu’ont certaines formations politiques locales à prendre en charge l’organisation d’une parole collective dans une société plus éclatée, qui n’est plus structurée en classes bien définissables. Seule la référence à une opposition entre le haut et le bas fait alors confusément image.

    Mais, on peut lire la situation autrement en la rapprochant de celles des années 90…
    Il peut y avoir une ressemblance dans l’atmosphère ambiante. Mais le contenu est très différent. Dans les années 1990, le régime gouvernant était la cible. Les opposants et la rue le maudissaient. Ce n’est pas le cas d’aujourd’hui. Nous sommes dans un modèle social, mélange d’étatisme et de corporatisme, qui compartimente la société, altère la cohésion sociale et aiguise les revendications particularistes dont se nourrit précisément le politique.

    Il peut y avoir une ressemblance dans l’atmosphère ambiante. Mais le contenu est très différent. Dans les années 1990, le régime gouvernant était la cible. Les opposants et la rue le maudissaient. Ce n’est pas le cas d’aujourd’hui. Nous sommes dans un modèle social, mélange d’étatisme et de corporatisme, qui compartimente la société, altère la cohésion sociale et aiguise les revendications particularistes dont se nourrit précisément le politique.

    Sur un autre média, vous avez parlé du phénomène de mototaxis comme le résultat d’une croissance des inégalités. Sont-elles la cause de ce mal-être que décrient les concernés?
    Elles ont, en tout cas, progressé partout à travers le pays, contribuant à effacer la notion de moyenne et à produire ce que je nommerai “une société d’éloignement”. Il ne s’agit pas seulement de l’écart entre des riches et des pauvres. Si certaines inégalités ne sont pas acceptées, d’autres sont d’ailleurs tolérées. Le sentiment critique est, par exemple, moins accentué quand la fortune sourit à des fonctionnaires ou à des hommes politiques. Plus largement, le problème vient du fait que la société camerounaise s’est ghettoïsée, ce qui a attisé les fantasmes, les préjugés, les stéréotypes. Or nous ne parviendrons à rien tant que nous ne ferons pas plus clairement société les uns avec les autres.

    Alors, ce qu’il se passe avec les mototaximen n’est-il pas d’abord une crise sociale portée par des revendications contre les inégalités?
    Oui, mais il s’agit d’un phénomène complexe, dont il faut saisir les ressorts et pas seulement la résultante. Or, elle est en attente. Il faut aller plus loin pour répondre aux effets de l’ouverture économique, qui a suscité certains mouvements à coloration plus ou moins politique où se superpose le sentiment qu’on fonctionne dorénavant dans une société à deux vitesses, en ce qui concerne les places autant que les chances.

    Propos recueillis par
    Ongoung Zong Bella

     

  • Recommandations du GDN: Interprétations diversifiées à Bamenda

    Recommandations du GDN: Interprétations diversifiées à Bamenda

    Sur fond double d’entière satisfaction et d’arrière-goût d’inachevé, les populations de la capitale régionale du Nord-Ouest ont leurs compréhensions des grandes décisions des travaux de Yaoundé.

    Que comprendre du GDN?

    «Grand dialogue national? Cela ressemble à la discussion de la dernière chance». Rencontré ce 5 octobre 2019 à Up Station, Sylvanus Ayang Fru insiste, à plusieurs reprises, sur le sens qu’il donne à l’expression «dernière chance». «Pour moi, c’est tout pour tout», dit-il. Comme lui, beaucoup bâtissent des raisonnements proches. Cela est perceptible lorsqu’ils s’étalent par exemple sur le «statut spécial» accordé aux régions anglophones du pays. «Une autre grande distraction», tranche Ambe Cletus. Pour le reprendre, Dingana Babila croit comprendre que «désormais le Nord-Ouest et le Sud- Ouest pourront enfin jouir d’une personnalité morale, de moyens et de compétences propres, donc d’une certaine autonomie locale». Vu sous ce prisme, Chongsi Joseph Ayeah résume le statut spécial en partage équitable du gâteau national: «je suis persuadé que si ce statut spécial est bien appliqué, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest y trouveront leur compte».

    Si cela leur paraît encore enchevêtré, c’est davantage à cause du temps que le gouvernement compte prendre et sur sa méthode d’implémentation. Là, Robert Nsom Ngam est direct: «Ayant évité de discuter le fédéralisme au Grand dialogue national, j’espère qu’une attention a été accordée à la dévolution rapide des pouvoirs et ressources aux régions et collectivités territoriales décentralisées». Et Nelson Tebo de s’interroger: «pourquoi ne peut pas choisir une fois le fédéralisme et arrêter la comédie?». Toutefois il a peur que ces recommandations ne servent que d’effet d’annonce: «ce pays a des manières pour contourner des choses», regrette-t-il. «Les recommandations ont reflété les attentes des modérateurs. Il revient au président de la République de prendre en main ses responsabilités pour que la paix retourne au Nord-ouest et au Sud-Ouest», abrège Chongsi Joseph Ayeah, activiste de la société civile. Pour lui, le Premier ministre Joseph Dion Ngute a conforté la méfiance légitime suscitée par sa nomination comme maître d’oeuvre du GDN, à travers le choix des personnalités et des organisations consultées. «Il a réduit ce qui devait être une consultation nationale en une simple concertation entre lui et ses camarades du Rdpc. La méthodologie qu’il a retenue pour ces consultations a elle aussi contribué à faire douter sérieusement de la capacité du GDN à être à la hauteur des attentes légitimes des populations camerounaises», peste Chongsi
    Joseph Ayeah. À l’en croire, l’espoir vient du fait que le GDN intervienne après une très longue période de déni de l’existence d’un problème anglophone, le choix irresponsable de la réponse militaire à une crise politique et la criminalisation de tout appel au dialogue.

    Jude Verinyi marque son inquiétude quant à l’après- GDN. «Les Ambazoniens n’ont pas de coeur. J’ai peur qu’ils n’intensifient les attaques pour frustrer l’implémentation des résolutions du Grand dialogue national. Ma préoccupation c’est porté sur les moyens de stopper ceux qui sponsorisent, depuis l’étranger, cette guerre ici», craint-il. Néanmoins, conclut-il, la responsabilité incombe au président de la République de veiller le plus tôt possible à l’implémentation des recommandations du Grand dialogue national, et ramener la paix dans les régions anglophones. Paul Biya est un président de la République qui fait ce qu’il dit, et dit ce qu’il fait. Il a promis de convoquer un dialogue national, ceci pour solutionner les problèmes des régions anglophones et ceux qui préoccupent tous les Camerounais.

    Zéphyrin Fotso Kamga

  • L’armée, grande muette du GDN

    L’armée, grande muette du GDN

    On n’a pas beaucoup vu ou entendu les bidasses s’exprimer dans les couloirs du palais des Congrès. Explications.

    La consigne, affirme un journaliste très au fait des actualités du sérail, est venue de l’état-major particulier
    de Paul Biya. «In and off the record, zéro prise de parole», appuie le confrère. Pourquoi cette interdiction?
    Contre assurance de rester anonyme, un officier supérieur de gendarmerie souffle, à la veille du début des travaux, que «l’espace du Grand dialogue national au Palais des Congrès est un véritable enjeu de sécurité nationale». Presque aux forceps, le haut gradé ajoute: «d’un côté, la maîtrise de la parole est indispensable pour le bon déroulement des assises, qui s’appuient sur les données recueillies par des militaires». «D’autre part, l’espace est un lieu de confrontation en soi»,ajoute notre interlocuteur. Minimum En cela, l’on peut lire les orientations stratégiques du haut commandement. «En ces temps de gravité sociopolitique, la parole rare est utile devant les civils assez bavards», glisse un autre officier de gendarmerie. Raison: «Nos concitoyens aujourd’hui veulent trois choses: qu’on les considère, qu’on les protège, qu’on leur apporte des solutions, et non pas des déclarations». Ainsi on a vu, pour une rare fois, le capitaine de frégate Cyrille Serge Atonfack prendre la parole. En compagnie du colonel Soney Ajang et du porte parole du GDN Georges Ewane, le chef de la division de la communication du ministère de la Défense (Mindef) a juste partagé ses expériences à travers des diapositives et des récits des actions sur le terrain des éléments de l’armée camerounaise. On aura donc vite compris: dans le dispositif stratégique mis en place par l’état major particulier du président de la République, il était davantage question de laisser parler les images; surtout dans un contexte où l’image de marque de l’armée est suffisamment écornée par certaines ONG de défense des droits de l’homme. Le mur d’images proposé à la presse se devait d’être conséquent. Le BIR (Bataillon d’intervention rapide) présent sur les terrains du Sud-Ouest et du Nord-Ouest s’illustrait positivement dans la reconstruction des ponts sabotés par les séparatistes terroristes. On voyait aussi l’armée prendre en charge les enfants malades, reconstruire les routes, distribuer des produits de première nécessité, et offrir des abris aux déplacées internes et des réfugiés. Il y avait également des clichés atroces. Des images sensibles ont pu être présentées à la presse nationale et internationale, montrant des corps sans vie des éléments des forces armées, des décapitations, des femmes éventrées et des messages de haine véhiculés par des hommes se réclamant ambazoniens. En guise de commentaire, Cyrille Serge Atonfack dira que «l’armée, qui est et restera toujours au service des populations, se veut rassurante et continuera toujours à mouiller le maillot pour le retour à la paix et à l’unité nationale».

  • Ce que veulent les anglophones du Cameroun : Fédération, confédération et… séparation

    Ce que veulent les anglophones du Cameroun : Fédération, confédération et… séparation

    Les modérés plaident pour les deux premières options. Les radicaux sont pour la troisième solution. Les gouvernants du pays ne veulent rien entendre. Le Grand dialogue national s’annonce riche en débats houleux.

    Un camion-citerne en feu à Bamenda samedi dernier

    Sortira-t-on, la tête haute, du Grand dialogue national annoncé à la fin de ce mois par le chef de l’État? Voilà la question qui taraude les esprits dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Une équation à plusieurs inconnues, au cœur des assises fixées du 30 septembre au 4 octobre prochain. D’emblée, Mgr Agapitus Nfon, du diocèse de Kumba, prêche la sincérité: «Que le dialogue soit sincère. Qu’il n’y ait pas de manipulation dans ce dialogue. Que le dialogue soit inclusif. Et s’il l’est, nous devons avoir une partie neutre qui joue le rôle de médiateur (sans quoi, je ne crois pas à un véritable succès) et les gens rentreront satisfaits». Pour Mgr Andrew Nkea du diocèse de Mamfe, «l’aspiration de la population de la Manyu est de voir la libération de ses enfants en détention».

    Les politiques
    Dans ces deux régions anglophones, la majorité prône la rupture d’avec la décentralisation, cette forme de l’État qui a montré ses insuffisances depuis son entrée en vigueur en 1996.

    Édith Kah Walla, présidente nationale du parti politique Cameroon People’s Party (CPP), réagissant à l’annonce du Grand dialogue national par le chef de l’État, laisse entendre: «il faut redéfinir la forme de l’État». Pour elle, «le souhait primordial des Camerounais est d’avoir plus d’autonomie (une autonomie décisionnelle et une autonomie des ressources) au niveau local pour gérer leur développement, sans pour autant remettre en cause celles des prérogatives qui ne peuvent revenir qu’à l’État central. Il est nécessaire de déterminer quelle forme prendra notre État, de manière à satisfaire cet impératif d’autonomie accrue au niveau local». À l’observation, l’ancienne candidate à l’élection présidentielle de 2011 penche pour le fédéralisme. Dans ses prises de position antérieures, elle s’est généralement montrée favorable à un système fédéral à dix États fédérés, pour respecter la configuration des régions actuelles.

    Le SDF, depuis des lustres, s’est toujours appesanti sur la formation d’un État fédéral, au départ à quatre États fédérés, et puis à dix Etats fédérés depuis la dernière élection présidentielle au Cameroun.

    Chongsi Joseph Ayeah, directeur exécutif de l’ONG de défense des droits de l’homme Chrapa, basée à Bamenda, milite pour la même configuration. Joint au téléphone, celui qui bénéficie d’un statut d’observateur auprès de l’Onu et de l’UA en matière de droits de l’homme suggère: «si on revient à la répartition de 1972, on va léser d’autres régions. Il serait mieux de transformer les dix régions en autant d’États fédérés». Pour lui, il faut calquer la forme de l’État du Cameroun sur le modèle suisse. Il explique: «la Suisse est formée de quatre peuples: les Français, les Italiens, les Allemands et les autochtones. Soit quatre États fédérés. Le gouvernement central joue un rôle presque résiduel et les États fédérés font tout et rendent compte à l’État fédéral».

    Les gardiens du temple
    Les chefs traditionnels du Sud-Ouest n’en disent pas moins. L’idéal, pour eux, serait la fédération à dix États fédérés. Ils ont, par la voix de Chief Henry Fonderson, président de l’antenne départementale de la South West Chief Conference (SWCC) du Fako, réitéré cette position au cours de la réunion consultative du pré-dialogue, mercredi 18 septembre 2019, chez le gouverneur Bernard Okalia Bilai, à Buea. À en croire chief Fonderson, les chefs traditionnels du Sud- Ouest «ont à plusieurs occasions fait savoir leur position sur la forme de l’État.

    Il s’agit du fédéralisme à 10 États fédérés. Ça fait partie des propositions que la délégation de SWCC a remises au Premier ministre Joseph Dion Ngute. Cette fédération à 10 États fédérés donnera plus de pouvoir aux communautés pour gérer leurs affaires». Et un autre chef d’ajouter: «pour n’avoir pas pu implémenter la décentralisation pendant plus de 20 ans, il sera impératif de saisir l’opportunité du Grand dialogue national pour réviser la constitution et instituer 10 États autonomes pour gérer nos affaires». Dans le même ordre d’idées, Me Félix Agbor Nkongo, Dr Neba Fotem et le magistrat Ayah Paul Abine prônent, depuis 2017, le retour au fédéralisme.

    Confédération
    Pour sa part, Dr Nick Ngwaniam, médecin et enseignant, par ailleurs membre de la société civile, suggère la confédération comme la meilleure forme de l’État. Pour lui, la confédération confère plus d’autonomie que la fédération. La confédération, à l’en croire, est un ensemble d’États indépendants qui se mettent ensemble pour former une nation. L’exemple que lui prête un de ses amis sur la toile est les États-Unis, une fédération de 50 États fédérés, qui bénéficie d’une seule place au niveau de la Fifa. Contrairement au Royaume-Uni, qui est une confédération à 4 États (l’Angleterre, le Pays de Galles, l’Écosse et l’Irlande du Nord) avec des administrations dévolues. Tous ces quatre États sont affiliés à la Fifa.

    La Confédération africaine de football (Caf) est une institution formée de plus d’une cinquantaine de fédérations sportives de football. Chaque fédération gère son football de façon autonome. Dans la confédération, poursuit Dr Nick Ngwanyam, les gouverneurs et les parlementaires sont élus et sont responsables devant le peuple qui les a élus. Par conséquent, ils peuvent être sanctionnés à tout moment par ce peuple-là.

    Ambazonie
    Au demeurant, les activistes de la République virtuelle d’Ambazonie, quant à eux, penchent pour la partition du pays en deux, consacrant, selon eux, «la restauration de l’indépendance de la Southern Cameroon». Milton Taka, présenté comme porte-parole du gouvernement intérimaire de la République imaginaire d’Ambazonie, dans un communiqué de presse daté du 20 septembre 2019 distillé sur les réseaux sociaux, indique: «sur la question des négociations ou du dialogue, notre leader révolutionnaire Sisiku Ayuk Tabe et compagnie sont en prison en République du Cameroun.

    Toute négociation doit commencer par eux. Tant que cela n’est pas fait, nous ne prendrons pas part au drame de négociation unilatérale conduite par Yaoundé». Il récuse également la médiation ou le présidium de ce dialogue par le Premier ministre, chef du gouvernement, Joseph Dion Ngute. «De bonnes négociations pouvaient commencer avec la libération sans condition de Sisiku Ayuk Tabe et compagnie». Il ajoute dans ledit communiqué: «l’invitation au dialogue est faite aux Camerounais, nous ne sommes pas Camerounais. Nous n’y prendrons pas part», conclut-il.

    Zéphirin Fotso Kamga

     

    Aboubakar Sidiki

    Bousculer les lignes, ne reculer devant aucun sujet

    Le Grand dialogue national préparé par le président du Mouvement patriotique du salut camerounais (MPSC), 3e vice-président de l’Alliance patriotique

    Nous ne pouvons pas nous permettre de manquer un rendez-vous comme le Grand dialogue national, où le Cameroun s’interroge sur son devenir. C’est une question cruciale qui interpelle tout Camerounais digne de ce nom, indépendamment du bord politique, idéologique, de la classe sociale, de l’obédience religieuse. Tout le monde sait que la région de l’Extrême-Nord souffre pratiquement des mêmes maux que les régions du Sud- Ouest et du Nord-Ouest, sinon plus. Même si on en parle de moins en moins, la nébuleuse terroriste Boko Haram frappe et sévit toujours en endeuillant des familles camerounaises au quotidien.

    Le sentiment de marginalisation n’est pas moindre par rapport aux autres régions. Face aux élites qui ont perdu toute légitimité vis-à-vis de la population, nous avons le sentiment d’être le dernier rempart. Nous entendons faire entendre la voix de ces millions de Camerounais qui ont presque perdu confiance en la République. Je m’engage ici, à porter aussi haut que possible la détresse que cette population murmure tout bas. Nous pouvons aider le président Biya à résoudre la crise anglophone. Je crois être, probablement, le seul Camerounais à avoir vécu dans le même quartier en prison avec les leaders de la cause anglophone comme Agbor Bala, Fontem, Ayuk Tabe, etc. Je peux donc me considérer comme le dépositaire des revendications anglophones.

    Cette proximité m’a permis de mieux comprendre les questions existentielles qui se posent dans ces régions. J’ai donc vu ce problème naitre, prendre de l’ampleur, s’aggraver et devenir presque insoluble aujourd’hui. En tant que membre de l’Alliance patriotique, nous sommes prêts à apporter notre expérience pour sortir de cette crise qui ne fait que tirer le Cameroun vers le bas.

    Nous nous efforcerons de bousculer les lignes; nous ne reculerons devant aucun sujet tabou comme, par exemple, la libération de tous les prisonniers politiques pour accroitre les chances de parvenir à un apaisement du climat social au Cameroun.

  • Grand dialogue : A fond dans la forme

    Grand dialogue : A fond dans la forme

    À bien des égards, décrypte une opinion, c’est le peuple qui a mis Paul Biya devant ses responsabilités. 

    Afin de désamorcer la crise sociopolitique dans la partie anglophone du Cameroun, Paul Biya a solennellement invité ses compatriotes à un «dialogue national inclusif». D’emblée, un commentaire: il faut veiller à bien rester sur ce qu’a dit le chef de l’Etat dans son adresse au peuple camerounais. «S’agissant du dialogue lui-même, la question s’est toujours posée de savoir, avec qui ?» dixit le président de la République. Sur le vif, une certaine classe intellectuelle estime que la valeur du point d’interrogation à la fin de ce segment du discours du 10 septembre 2019 constitue déjà, à elle seule, un enjeu décisif.
    Et là, les commentateurs politiques avisent qu’il n’était pas très utile de s’interroger de la sorte. Car, disent-ils, Paul Biya a en face de lui son peuple. «En tant que communauté politique, ce dernier, dans sa diversité, veut enfin dialoguer avec son chef.

    Dans les rangs, il n’y a pas que des conducteurs en colère, parfois extravagants dans leurs exigences et tournant en ridicule l’offre présidentielle. Il y a aussi ceux qui aspirent à une radicale transformation sociale et institutionnelle, culturelle aussi peut-être, de notre patrie commune. Il y a également ceux qui, attachés à une conception civilisée du débat public et détachées des appareils militants, ont de belles idées à faire valoir. Sans compter ceux qui ne se résignent pas à ce que leur pays coule ; et bien sûr ceux qui ne confondent pas la confrontation des opinions avec l’empilement de toutes les haines contradictoires. Il y a… Et il y a…», énumère le Pr Belinga Zambo.

    En tout cas, on parle ici de peuple simplement. Et si ce dernier a un génie, c’est bien celui de faire plier ses dirigeants, «en disant non de façon citoyenne, quand rien ne va plus, tel que le démontrent d’utiles leçons d’histoire politique et sociale», nuance le politologue. Ainsi, pour une opinion locale, Paul Biya avance à pas forcés vers le débat. «A l’arrière-fond de son discours du 10 septembre 2019 se dessine la main de tout un peuple», décrypte Jean-Marc Bikoko. Le syndicaliste ajoute : «Pris au piège d’avoir lui-même élevé le peuple camerounais au rang de souverain, Paul Biya ne pouvait plus rester dans son boudoir».

    Face à une situation devenue incontrôlable selon les photographies de terrain, la question qui se posait le peuple, c’est la question de l’attitude de Paul Biya par rapport à tout cela. «Lorsque ces contradictions (politiques, économiques, sociales, culturelles) ne sont pas traitées, elles se muent en un problème qui est un signal que le corps politique ne va pas bien, un signal qu’il y a quelque chose de nouveau à prendre en compte, un signal qu’il y a une situation qui appelle à l’attention et à la vigilance collective», résume l’universitaire Richard Makon sur sa page facebook.

    Bobo Ousmanou

    D’un grand spectacle vers un petit résultat ?

    Des yeux disent avoir vu une autre «pirouette» de Paul Biya, qui a depuis fait de la ruse l’un des chapitres essentiels de sa grammaire stratégique.

     

    Le voici, le chef de l’Etat, pris en flagrant délit, selon certains de mensonge politique. Leur ligne d’argumentation se fonde sur le casting fait unilatéralement par l’illustre concerné. «En donnant procuration à son Premier ministre de piloter le grand débat national, Paul Biya se muni encore d’une longue cuillère pour dîner sur la même table que son peuple», ironise Sylvain Mbani. Sous le scalpel de ce militant du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc), le président de la République avance masqué avec un vieux principe : «ce qui est à moi est à moi, ce qui est à vous est négociable».

    A l’aune de ce qui précède, le journaliste Jean-Bruno Tagne rabaisse le degré de sincérité de l’offre de dialogue officiellement forgée par Paul Biya le 10 septembre dernier. Selon l’homme de médias, il ne sortira pas grand-chose de ces assises. Le chef de l’Etat étant, avise-t-il, habitué à passer au dessous des tables. «Que ceux qui se préparent à aller avec enthousiasme au «grand dialogue» annoncé par le président de la République hier dans son discours à la nation n’oublient jamais que Paul Biya est dans la ruse permanente», écrit l’ancien employé de Canal 2 international sur sa page facebook.

    A l’interprétation, la session de dialogue qui débute fin septembre 2019 reste donc parfaitement inutile, un faux débat, étant donné que la décision sera définitivement prise par le pouvoir en place, c’est-à-dire finalement le programme déjà engagé par Paul Biya soucieux de garder le cap malgré tout. Comme pour conforter sa position sur le sujet, Jean-Bruno Tagne exhume quelques clichés. «Le 22 octobre 1991, les partis politiques reçoivent l’invitation à la tripartite et l’ordre du jour de celle-ci. Le gouvernement décide unilatéralement des personnalités invitées aux travaux et de l’ordre du jour (…) Pour faire bref, il est possible d’affirmer qu’aucune décision de la tripartite, de la plus grande à la plus petite, n’a été respectée à la fois dans sa lettre et son esprit», écrit-il.

    Une autre grille d’analyse pointe un Paul Biya «stratège rusé, toujours obstiné à faire passer les lois qui lui tiennent le plus à coeur », comme le souligne Yacouba Nji, un militant de l’Union démocratique du Cameroun (UDC).

    Jean-René Meva’a Amougou

    Discours

    Trois ans de dialogue et matraque

    De décembre 2016 au 10 septembre 2019, le verbatim présidentiel a été du modèle d’une main de fer dans un gang de velours. Extraits.

     

    «J’ai instruit le Gouvernement d’engager un dialogue franc avec les différentes parties concernées, pour trouver des réponses appropriées aux questions posées. Je les invite à participer, sans préjugés, aux différentes discussions».
    (Discours à la Nation du 31 décembre 2016)

    «Le dialogue, je le précise bien, a toujours été et restera toujours pour moi, la voie privilégiée de résolution des problèmes, pour autant qu’il s’inscrive strictement dans le cadre de la légalité républicaine (…)J’ai à cet égard, instruit que tous ceux qui ont pris les armes, qui exercent des violences ou qui incitent à la violence, soient combattus sans relâche et répondent de leurs crimes devant la justice.

    Les opérations de sécurisation engagées à cet égard ont donné d’excellents résultats. Elles vont se poursuivre sans faiblesse, mais sans excès ».

    (Discours à la Nation du 31 décembre 2017)

    «J’ai instruit qu’un dialogue constructif soit engagé entre le Gouvernement et les organisations syndicales concernées, afin de trouver des solutions consensuelles aux problèmes évoqués. Ces négociations, qui se sont déroulées dans le cadre de comités ad hoc créés à cet effet, ont permis de circonscrire lesdits problèmes et d’identifier les voies et moyens d’y remédier».
    (Discours à la jeunesse 10 février 2017)

    (…) «C’est le contexte qui prévaut dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui retiendra l’essentiel de mon attention.
    J’ai eu récemment l’occasion de m’exprimer sur les problèmes qui les concernent. J’ai dit et je le confirme que j’éprouve la plus grande sollicitude envers les populations de ces deux régions. Je suis très sensible à leurs inquiétudes concernant leur sécurité et à leurs aspirations touchant le retour au calme et à une vie sociale normale.
    Si l’appel à déposer les armes que j’ai lancé aux entrepreneurs de guerre reste sans réponse, les forces de défense et de sécurité recevront instruction de les neutraliser. Je suis bien conscient en effet de la désolation que ces insurgés infligent aux populations de ces régions. Cette situation ne peut plus durer ».

    (Discours à la Nation du 31 décembre 2018)

    Source : Site internet de la Présidence de la République

     

    Dialogue national politique: Bamenda se prononce

    Choses vues et entendues dans la capitale régionale du Nord-Ouest avant, pendant et après le discours à la nation du chef de l’État, le mardi 10 septembre 2019.

    Les séparatistes anglophones avec au premier plan Sisuku Tabe

    Amnistie générale en faveur des personnes interpellées dans le cadre de la crise dite anglophone, réforme constitutionnelle et débat sur la forme de l’État, cessez-le-feu, dialogue inclusif. Voilà autant d’attentes des populations de la région du Nord-Ouest au discours du chef de l’État Paul Biya. Au terme de l’adresse du chef de l’État à la nation, les populations des régions anglophones éprouvent un sentiment mitigé. À première vue, la satisfaction vient de l’annonce du dialogue. Paul Biya annonce «un grand dialogue national» d’ici la fin de ce mois de septembre.

    Dans ses explications, le grand dialogue est similaire au «dialogue inclusif» tant souhaité, même si le locataire d’Etoudi ne veut pas prononcer le terme « inclusif ». «Paul Biya a pris à contre-pied les faucons du régime qui disaient que le dialogue est en cours», lâche un citoyen de la cité capitale du Nord-Ouest, sous le couvert l’anonymat. La déception vient du refus de l’amnistie en faveur des personnes interpellées et incarcérées dans le cadre de cette crise. Pour Ngam Nsom Albert, «la séparation n’est pas à l’ordre du jour; ceux qui auront le privilège de prendre part au dialogue doivent être prêts à faire des concessions. Insister sur tout et sur rien serait une voie royale d’un exercice de frustration».

    Pour Divine Grace, «si le président de la République veut un dialogue franc et sincère, il doit déclarer le cessez-le-feu, accorder une amnistie générale aux prisonniers politiques et toute personne incarcérée dans le cadre de ce conflit, éviter d’instituer tout préalable au dialogue». Peter Tandap croit savoir que «le dialogue, pour être sincère, doit se tenir dans un endroit neutre, afin de donner l’opportunité aux participants de s’exprimer librement, sans aucune crainte de représailles. Le sujet doit se limiter à la crise anglophone, y compris la séparation, le fédéralisme, etc.».

    John FruNdi appelle tous à participer au grand dialogue national annoncé. Son parti politique, le Social Democratic Front, suggère que ledit dialogue national soit présidé par une personnalité neutre, et la forme de l’État doit être inscrite à l’ordre du jour. Le parti du 26 mai 1990 dénonce la présence des forces de l’ordre à ce dialogue national, qui devrait être essentiellement politique.

    Ambiance
    Pour une région du Nord-Ouest animée par le mot d’ordre de «ville morte», Bamenda n’a pas dérogé à la règle. Comme s’ils s’étaient passé le mot, les habitants de Bamenda ont préféré regagner leurs domiciles respectifs pour écouter le speech du président de la République. La peur de l’inconnu était à l’ordre du jour. Pas l’ombre d’un oiseau à Up Station. Même ceux qui logent dans des hôtels dans ce quartier administratif ont abandonné les bars des hôtels, préférant le calme de leur chambre d’hébergement pour écouter attentivement le président Paul Biya, renseignent certains gérants d’hôtels joints au téléphone.
    C’était le même calme de cimetière à Down-Town.

    Pendant que le chef de l’État prononce son allocution, une vingtaine de camions militaires fait leur entrée dans le chef-lieu de la région, certainement pour dissuader les éventuels manifestants. Tarkang Ebot espère que «le dialogue national annoncé par le président de la République va calmer les ardeurs des uns et des autres». Pour sa part, Christopher Negoubogam, habitant du quartier Abangoh, est d’avis que le chef de l’État a «bien parlé; il n’a pas heurté les consciences. Il a été apaisant».

    Même au quartier Chuoboh, qui a connu des soubresauts la semaine d’avant, tout est calme en ce soir d’après discours présidentiel, même si vers midi, on a entendu un coup de feu lors du passage d’un contingent des forces de l’ordre. Si Paul Biya tend la main aux séparatistes (en leur demandant de déposer les armes et rejoindre la CDDR), il n’en demeure pas moins qu’il met en garde ceux qui choisiront de rester dans la logique de la guérilla. Paul Biya rappelle également à la gouverne des Camerounais que la diaspora prônant l’insurrection a acquis une notre nationalité.

    Une lecture transcendantale de ce point démontre que ces ex-Camerounais ne feront pas partie du dialogue national annoncé. Ce sont ces derniers qui financent la déstabilisation du pays. Chris Anu, secrétaire à la communication du gouvernement intérimaire de la république virtuelle de l’Ambazonie, sur la toile, affirme mordicus: «M. Biya ne sait pas que le problème du Southern Cameroon est celui de la colonisation et de l’annexion. Ainsi, son dialogue national, sans reconnaître le problème des anglophones, est irrecevable».

    Pour lui, «ce dialogue national n’est qu’un camouflage pour éviter l’initiative internationale de la Suisse, qui a reçu l’aval de toutes les organisations internationales et pays importants. L’initiative suisse a dit qu’on doit retourner aux sources du problème… M. Biya garde nos leaders dans ses geôles comme objets de négociation de son plan de dialogue national». Et Mark Bareta d’ajouter: «nous ne sommes pas partis de si loin pour oublier les sacrifices de notre peuple. Nous voulons des négociations; appelez le dialogue si vous voulez; mais nous n’allons y aller que si ce sont deux entités avec des médiateurs neutres».

     

    Ce que propose la jeunesse camerounaise

    Tout faire pour rétablir la confiance entre le citoyen et sa Patrie par le jeu de la responsabilité et de la redevabilité des dirigeants à tous les niveaux.

     

    En convoquant le grand dialogue national, le Président Paul Biya a tenu ces propos comme un objectif spécifique mesurable à atteindre à court et moyen terme. Il a dit ceci: «… S’il est nécessaire de tenir compte de l’équilibre régional dans des pays neufs, à la structuration sociologique diverse tel que le nôtre, il est indispensable de rappeler que les ministres et autres responsables ne sont pas nommés seulement pour servir leurs régions, leurs villages ou leurs familles, mais, l’ensemble de la communauté nationale. Ils doivent être au service de l’intérêt général et non des intérêts particuliers».

    Ma contribution au dialogue national s’appuiera sur cette déclaration qui semble nous interpeller, citoyens de ce pays,
     à ne plus laisser les dirigeants nommés ne servir que les leurs ou leurs propres intérêts au détriment de l’intérêt général. Nous devons nous réarmer moralement pour devenir, chacun et chacune en ce qui le concerne, comme des objecteurs de conscience pour barrer la voie à toute imposture.

    À ce titre, le dialogue national pour lequel je participe doit pouvoir :
    1. mettre en place des conditions, des mécanismes et des institutions effectives et efficaces permettant à tout citoyen de demander des comptes aux dirigeants de ce pays sans être inquiétés. Pour être plus concret, le dialogue devrait aboutir à restaurer la confiance aux citoyens en interpellant la responsabilité des mis en cause dans l’échec du Cameroun à organiser et accueillir la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2019. Ce sera là un signal fort qui donnera au peuple de comprendre que ses cris et pleurs ont été entendus. Car le peuple camerounais profond a besoin d’être écouté. Les élites ne doivent plus se substituer au peuple.

    Le Dialogue devrait aussi aboutir à :
    2. l’adoption d’un plan de dialogue direct et structuré entre le Président de la République et certaines catégories d’acteurs représentatifs des pouvoirs et des populations, ainsi que des autorités exerçant des compétences techniques dans des secteurs susceptibles d’impulser un développement national sur la base des avantages comparatifs. Il s’agira des personnes et autorités qui, bien que maitrisant les réalités sociales et économiques, n’auront presque jamais l’occasion d’échanger en tête à tête avec le Président de la République qui détient seul aujourd’hui les clés de sortie du sentiment d’injustice généralisée qui gangrène la société camerounaise.

    3. la viabilisation ou l’opérationnalisation du Conseil Économique et Social (CES) pour qu’il joue pleinement son rôle de facilitation de la collaboration au sein de la société, et permettre au moins que les politiques publiques élaborées, les lois adoptées ne soient pas exclusivement du ressort de l’exécutif. L’administration camerounaise ne devrait plus se comporter comme ce factotum qui se situe au début et à l’arrivée de tout. Nous devons pouvoir avoir une lisibilité sur les pouvoirs et les contre-pouvoirs, dans l’optique d’amener chaque entité à assumer ses responsabilités sous le contrôle et l’arbitrage des autres.

     

    Dupleix Kuenzob Pedeme
    Secrétaire Exécutif
    Dynamique Mondiale des Jeunes (DMJ)

     

    Dialogue national 

    Les grandes manœuvres

    Acclamation des uns, véhémentes critiques des autres. L’annonce du dialogue national par le président de la République Paul Biya, le 10 septembre 2019, draine plusieurs réactions de la communauté nationale et internationale.

    Deux poids lourds du dialogue annoncé

    Partis politiques
    Plusieurs chapelles politiques ont fait entendre leurs voix à la suite du message de Paul Biya. Comme toujours le RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais) admire et soutien son champion. Le secrétaire général adjoint du parti au flambeau, Grégoire Owona l’a exprimé en des termes simples, mais particuliers. Dans le journal Mutations, édition 4936 du 11 septembre 2019 il dit : «Heureux d’avoir un chef d’État à l’écoute ! Quel don de Dieu pour le Cameroun, un et indivisible la porte du dialogue reste grande ouverte!». Très optimiste, il ajoute «Le dialogue est là. À nos marques prêts partons… avec toutes les propositions constructives». Pour Jean Baptiste Atemengue, son confrère de parti, le président Paul Biya a fait l’un des plus grands discours «d’homme d’État expérimenté qu’il est».

    Le Social democratic front (SDF) qui salue l’initiative de Paul Biya vient de poser plusieurs conditions au régime. C’était lors des prémices des concertations relatives à la résolution de la crise. TV5monde qui relaie cette information indique que le principal parti de l’opposition «a demandé au pouvoir de déclarer un cessez-le-feu dans les deux régions anglophones et de garantir une amnistie générale pour tous les acteurs de la crise anglophone, alors que nombreux séparatistes sont en exil ou emprisonnés, certains condamnés à de longues peine».

    Par ailleurs, Le SDF demande que le dialogue qui doit se tenir fin septembre, « soit présidé par une personnalité neutre », non par le Premier ministre comme annoncé par Biya mardi, que les discussions sur la « forme de l’État » soient un élément central du dialogue, « en vue de l’adoption d’une nouvelle Constitution »».

    À cet égard, Youmo Koupit Adamou, ne cache pas sa satisfaction. Avec lui, l’Union démocratique du Cameroun (UDC) qu’il représente. «Nous sommes satisfait qu’enfin, le président ait donné l’impression d’avoir écouté le peuple, parce que dans son camp politique, il y a des personnes qui disaient qu’on ne peut pas dialoguer avec des gens qui ont pris des armes». Par ailleurs, le sénateur suppléant de cette chapelle politique recommande la tenue d’un dialogue «avec tout le monde».

    La diaspora
    Les Camerounais vivants à l’étranger, qui se réclament opposants du régime de Yaoundé posent leurs conditions pour participer audit dialogue. Dans ce sillage, s’inscrit la BAS, (Brigade anti-sardinards). Dans une vidéo anonyme réalisée à la suite du discours du 10 septembre dernier, ils critiquent le fait que Paul Biya ait «privilégié la démarche onéreuse de la guerre au détriment du développement humain», dans cette crise. Par ailleurs ils somment Paul Biya de libérer les prisonniers politiques. «Nous de la diaspora camerounaise, annonçons que dans les conditions actuelles, nous ne pouvons être associé dans un dialogue initié par Paul Biya, sans que les conditions préalables ne soient remplies, à savoir, la libération de tous les détenus politiques arrêtés dans le cadre de la crise anglophone sans exception, la libération de tous les prisonniers détenus dans le cadre des marches blanches du 6 janvier 2019, du 1er juin 2019 et du 8 juin 2019. La création d’un cadre de concertation préalable, constitué de toutes les parties prenantes dans lequel une feuille de route consensuelle devant guider les débats sera élaborée. La mise sur pied d’une commission constituée d’experts indépendants en charge du suivi des travaux», précise celui qui se réclame porte-parole de cette faction «du MRC (mouvement pour la renaissance du Cameroun) dont le président croupi en prison actuellement.

    Organisations et chancelleries internationales
    L’Organisation des nations unies (Onu) pour sa part, apprécie l’impulsion du président de la république à résoudre la crise anglophone par le dialogue. C’est ce que l’on retient de la déclaration faite par le porte-parole d’Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, sur le site web de cet organisme, peu après l’allocution de Paul Biya. «Le Secrétaire général se réjouit de l’annonce faite aujourd’hui par le Président Paul Biya sur le lancement d’un processus de dialogue national au Cameroun. Il encourage le Gouvernement camerounais à veiller à ce que le processus soit inclusif et réponde aux défis auxquels le pays est confronté. Il appelle toutes les parties prenantes camerounaises, y compris la diaspora, à participer à cet effort. Le Secrétaire général réitère la disponibilité des Nations Unies à apporter son soutien au processus de dialogue», lit-on sur le site https://www.un.org.

    L’organisation internationale de la francophonie rejoint le point de vue onusien. Elle encourage l’initiative à laquelle elle dit être disposée à apporter son accompagnement. C’est ce que dit le communiqué du secrétariat général de cette institution international du 12 septembre 2019. «La Secrétaire générale de la Francophonie, Louise Mushikiwabo, salue l’annonce par le Président de la République du Cameroun, Son Excellence Monsieur Paul Biya, de sa décision de convoquer un grand dialogue national, notamment sur la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du pays, dès la fin de ce mois de septembre» lit-on dans cette déclaration officielle.

    La même source indique que «Je souhaite que ce dialogue soit également un moment de consolidation de la cohésion nationale et du vivre-ensemble dans cet important État membre de la Francophonie». Ainsi, madame Louise Mushikiwabo encourage toutes les parties prenantes camerounaises, y compris la diaspora, à s’impliquer de manière constructive à toutes les étapes de ce dialogue. Par ailleurs, la Secrétaire générale de l’OIF réitère la disponibilité de la Francophonie à apporter son appui dans la préparation et le déroulement de ce dialogue, apprend-on de la déclaration.

    La France, elle aussi apprécie l’incitation du président Biya aux négociations en vue de pallier cette crise. «La France souhaite que ce dialogue, dont l’annonce est positive, permette une large concertation entre Camerounais et ouvre la voie à une résolution politique de la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Elle réitère sa condamnation du recours à toute forme de violence. La France souligne son attachement au dialogue et à la libre expression des différentes sensibilités politiques», a déclaré la porte-parole du gouvernement d’Emanuel Macron, chef de l’État français le 12 septembre dernier au cours d’un point de presse. Cependant, le grand ami du Cameroun ne s’est pas encore prononcé sur son apport dans le cadre de cette concertation nationale, remarque-t-on.

    Médias
    L’appel à participation au dialogue national n’a pas laissé les hommes de médias indifférents. Dans un tweet, le président national du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) écrit que «le pouvoir camerounais n’est pas demandeur de dialogue, il incarne les institutions et la souveraineté nationales bafouées par les groupuscules sécessionnistes. Ceux qui continuent dans l’insurrection et poursuivent les attaques armées sont les ennemis de la paix». Pour Sylvain Tah, président du collectif des journalistes d’investigation camerounais, qui s’est confié au quotidien national, Cameroon Tribune, «Trop de sang a coulé dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest». C’est la raison pour laquelle, il souhaite que son organisme collabore dans le grand débat national qui s’ouvre dans les prochains jours au Cameroun. «Le collectif des journalistes d’investigation pour sa part reste ouvert et nous souhaitons participer à ce dialogue, pour la construction de notre pay», déclare le journaliste Sylvain Tah.

    Les séparatistes
    Pour les séparatistes, cet appel au dialogue lancé par Paul Biya n’est qu’une poudre aux yeux. «Paul Biya can say what he wants, he’s not god. He better wake up 2 the real fact, this country was not one & indivisible, it was united by plebiscite, by the will of Southern Cameroons people. Freedom’s not gained by laying down for people to walk on you». C’est-à-dire en français : «Paul Biya peut dire ce qu’il veut, il n’est pas Dieu… il vaut mieux se réveiller car, en réalité, ce pays n’était pas un et indivisible, il était uni par un référendum, par la volonté du peuple du Sud-ouest Cameroun», lit-on sur dans le tweet de l’ambazonia redemption. Reste à savoir si toutes les parties accepteront de prendre part aux négociations pour le retour de la paix. Wait and see, en français facile attendons de voir.

    Joseph Julien Ondoua Owona, stagiaire

    Dialogue national

    La touche digitale pour ne laisser personne pour compte

    La convocation du «grand dialogue national» par le président de la République, Son Excellence Paul Biya, comme solution pour sortir de la crise dite anglophone qui paralyse le pays depuis 2016, est une initiative louable qui rencontre une adhésion populaire. Pour faire de ce dialogue une réussite totale, le défi est celui d’une participation massive des fils et filles de la nation. Là où l’approche des consultations et concertations traditionnelles montre des limites, le digital peut-il apporter des réponses?

    Ce qui se passe
    Les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest du Cameroun sont le théâtre d’un violent conflit armé depuis fin 2016. Des combat s’opposent régulièrement l’armée à des groupes épars de séparatistes. Cette crise est née des revendications corporatistes des avocats et des enseignants. Ces derniers réclamaient la traduction en langue anglaise des Actes uniformes OHADA et la préservation de la spécificité des systèmes judiciaire et éducatif anglo-saxons dans les deux régions. Les réponses aux revendications des avocats et enseignants ont été apportées. En dépit de cela, le conflit s’est enlisé. La crise s’est muée, fin 2017, en conflit armé.

    Le bilan de ces affrontements est déplorable sur le plan social et humanitaire. «En vingt mois, le conflit a fait 1850 morts, 530 000 déplacés internes avec une dizaine de milices armées qui comptent entre 2000 et 4000 combattants» . Selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), l’insécurité, qui se répand dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du pays, a forcé plus de 4 400 écoles à fermer. 21 291 Camerounais ont fui les violences et les combats entre sécessionnistes et l’armée, en direction du Nigeria, note le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

    Pire, «27 attaques terroristes ont été perpétrées contre le système éducatif dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, entre janvier et août 2019. Au courant de l’année académique, 19 enseignants et 58 étudiants ont été kidnappés dans les universités de Bamenda et de Buea», déclarait le ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi, au cours d’une conférence de presse tenue le lundi 26 août 2019 à Yaoundé. L’intransigeance des belligérants sur les conditions du retour à la paix à travers un dialogue inclusif risque de générer de nouvelles violences et de prolonger le conflit. Heureusement, le dialogue tant recherché et demandé est là. Mais, comment le rendre sans «exclusif»?

    Ce que le président Paul Biya veut
    Dans son annonce à la nation le 10 septembre 2019, le président de la République, Son Excellence Paul Biya, a présenté les enjeux, les concours et les acteurs du «grand dialogue national». «Un grand dialogue national qui nous permettra, dans le cadre de notre Constitution, d’examiner les voies et moyens de répondre aux aspirations profondes des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, mais aussi de toutes les autres composantes de notre nation», a déclaré Paul Biya. Sur le plan de la mobilisation des acteurs, objet de notre contribution, le chef de l’État précise: «Il aura donc vocation à réunir, sans exclusive, les filles et les fils de notre cher et beau pays, le Cameroun, autour de valeurs qui nous sont chères :la paix, la sécurité, la concorde nationale et le progrès[…] Présidé par le Premier ministre, chef du Gouvernement, ce dialogue réunira une palette diverse de personnalités: parlementaires, hommes politiques, leaders d’opinion, intellectuels, opérateurs économiques, autorités traditionnelles, autorités religieuses, membres de la diaspora, etc. Seront également invités des représentants des Forces de Défense et de Sécurité, des groupes armés et des victimes». Les Camerounais de tout bord veulent s’exprimer. Mais quelle stratégie mettre sur pied pour donner la parole au plus grand nombre?

    Ce que le digital peut apporter
    Longtemps sollicité, le dialogue national est enfin arrivé. Il aura lieu à la fin de ce mois si l’on s’en tient aux prescriptions du chef de l’État. Ce dialogue était tellement attendu que tout le monde veut y participer. Malheureusement, reconnaît Son Excellence Paul Biya, «tout le monde ne pourra, et c’est compréhensible, prendre effectivement part à ce dialogue, mais chacun aura l’occasion d’y contribuer». Une situation qui risque de compromettre les contours, si vertueux, de ce grand dialogue. Heureusement, les outils et canaux de communication numérique offrent la possibilité de donner la parole à tout le moment. Si les autorités veulent réussir cette consultation nationale en matière de taux de participation, l’approche digitale est indispensable. Dans la stratégie étatique de mise en œuvre du présent dialogue, il serait judicieux de mettre sur pied des dispositifs de consultation en ligne. Cela permettra d’ouvrir le dialogue à toutes les couches sociales (jeunes, adolescents, adultes, étudiants, chercheurs d’emplois, politiques, syndicalistes…). Il est vrai que les consultations lancées par le Premier ministre prennent en compte toutes les composantes de la Nation. Mais, il ne s’agira que des «leaders» de ces différentes instances. Le «bas» peuple, qui constitue la majorité, et qui a son mot à dire, risque être involontairement exclut. Si la masse populaire ne participe pas aux débats, il y a risque d’accentuation des frustrations déjà perceptibles au sein de notre société. Par contre, en mettant sur pied une stratégie de consultation online, la parole sera donnée à tous sans «exclusive». La grande interrogation que certains se posent déjà est de savoir: comment le fera-t-on, quand on connaît toutes les dérives et dangers des médias sociaux? Qui va encadrer les discussions?

    Pour y parvenir, l’on devrait sélectionner les outils et canaux de communication online à mettre sur pied. Par la suite, il s’agira d’élaborer une charte de participation. L’encadrement se fera par une équipe ad hoc, d’experts en social media management donc la mission sera de veiller au respect de la charte de participation et de faire le reporting des contributions. En ce qui concerne les outils à mettre sur pied, une plateforme web interactive à travers laquelle vont figurer tous les sujets du dialogue peut être implémentée. En complément, les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter peuvent venir en appui. Ainsi, en fonction de la thématique, les internautes pourront y contribuer. La modération des échanges est assurée par les social media managers. C’est un plaidoyer pour ne laisser personne pour compte dans le cadre du «grand dialogue national».

    Benjamin OMBE-journaliste/expert en Communication digitale
    Directeur exécutif du cabinet d’intelligence stratégique Knowledge Consulting
    ombebenjamin@hotmail.fr

     

    Bienvenu Bitom Tjomb

    «La bonne personne à la bonne place dans cette équipe du Premier ministre»

    Réaction d’un militant averti et engagé de la première heure du RDPC du Nyong et Kelle

    Qu’est-ce qui vous a marqué dans le message du Chef de l’État en votre qualité de militant averti ?
    Nous sommes satisfaits du discours du président de la République, président national du RDPC.
    Les points qui ont attiré mon attention sont :

    1)L’historique de la crise dans les régions du NORD-OUEST et SUD-OUEST, 2)Les solutions déjà apportées pour la résolution de cette crise, 3)l’annonce d’un dialogue national et particulièrement pour la crise des régions du NORD-OUEST et du SUD-OUEST, 4)le renouvellement de l’offre de la paix aux groupes armés et, 5)la ferme conviction du président de la république que lors du grand dialogue toutes les forces positives et constructives du pays à l’intérieur comme dans la diaspora permettent que le désire de la paix souhaitée par la majorité des camerounais devient une réalité.

    C’est un grand appel du président de la République, président national du RDPC lancé aussi à de notre parti, nous militants du RDPC responsables à tous les niveaux. Les militants de la base et l’élite gouvernante du parti doivent prendre conscience de la gravité de cette crise qui fragilise notre parti à tous les niveaux et menace la paix de notre pays. Cette situation complique la bonne marche de notre parti et du pays, donne plus de travail aux responsables de base du parti et nous embarrasse même. Le militant du RDPC doit œuvrer pour que le désir de la paix de la majorité des camerounais devient une réalité dans cette partie du pays. Nos camarades sont en difficulté, nos frères et sœurs sont en difficulté, ils souffrent et traversent des moments très difficiles de leur vie et compromet l’avenir de notre pays.

    Je saisi cette occasion pour présenter à toutes les familles qui ont déjà perdu les leurs dans cette crise, mes sincères condoléances, beaucoup de courage aux déplacés et pour ceux qui vivent la peur au quotidien dans ces régions et un espoir pour le retour de la paix dans cette partie de notre pays. Un encouragement total à nos forces de l’ordre et un soutien sans faille. Pour tout dire nous compatissons tous. C’est une situation que nous déplorons.

    Concernant l’aboutissement positif du grand dialogue annoncé par le président de la république, président national de notre Grand parti le RDPC, pour que l’objectif soit atteint, il est souhaitable que l’équipe du Premier Ministre soit réajustée avant l’ouverture du dialogue, car certains membres de l’équipe gouvernante trouvent leur intérêts dans l’alimentation de cette crise et cette situation risque compromettre le désire de la paix de la majorité des camerounais pour ces régions. Nous souhaitons aussi que la bonne personne soit à la bonne place dans cette équipe du premier ministre qui manifeste la bonne volonté et le courage de trouver la solution à cette crise, si le travail n’est pas fait on te dégage sans attendre.

    Concernant la demande des populations faites d’avoir les ministres, Directeurs Généraux,… dans chaque village, arrondissement, département,… la solution pourra être trouvée s’il y a la bonne personne à la bonne place et que lors des campagnes politiques, une élite militante gouvernante soit affectée par le parti pour battre campagne dans un département autre que son département d’origine. Il est souhaitable que le président de la république, président national de notre Grand Parti devrait tenir compte que la majorité et la qualité de l’élite gouvernante est ressortissante de sa région d’origine. Cette situation frustre des militants des autres régions. Il serait aussi important en matière du respect de l’équilibre régional, cette situation soit prise en considération.

    2020, sait-on, c’est une année électorale au Cameroun. L’homme politique que vous êtes a-t-il un agenda particulier ?
    Agenda particulier non ! Par contre agenda commun pour mon parti oui. Je reste à la disposition de mon parti. Si mon parti estime que je pourrai apporter quelque chose sa victoire à une consultation électorale, je ne pourrai pas trahir mon parti.
    Mais le grand dialogue annoncé par le président de la république, président national du RDPC me préoccupe plus pour le moment, car sans la paix aucune élection ne serait possible.

    Pour le grand dialogue annoncé est souhaitable que les propositions proviennent du bas peuple qui est la première victime dans toutes les crises qui peuvent survenir dans un pays.

    Le grand dialogue pourrait commencer au niveau des villages au tour des chefs de village qui transmet les résolutions au niveau de l’arrondissement avec les représentants désignés par le village, en suite autour du sous-préfet au niveau de l’arrondissement qui transmet des résolutions au département accompagné des représentants des arrondissements, en suite autour du préfet au niveau départemental avec les représentants des arrondissements qui transmet le rapport à la région accompagné des représentants du département, en suite autour du gouverneur de la région avec les représentants des départements désignés qui transmet le rapport au niveau national et les représentants des régions, en suite au niveau national autour du chef du gouvernement avec les représentants des régions désignés ainsi les trois pouvoirs représentés (L’exécutif, Législatif et judiciaire) et enfin le rapport général est transmis au Chef de l’État, président de la république pour prendre les décisions qui s’imposent pour la paix et la prospérité de notre pays.

    Cette manière pourra permettre la connaissance de tous les problèmes du pays, avoir l’adhésion du peuple et permettre au président de trouver les bonnes solutions pour que notre pays reste en paix et aspire à un développement meilleur.

    Un mot pour les militants de la sous-section de YABI I ?
    Chers camarades et sympathisants, restons fidèle au RDPC, le RDPC est aussi une famille. Nous attendons depuis 1997 la création de l’arrondissement de SONG-MBONG je suis conscient que le président de la république, président national du RDPC est aussi conscient de cette doléance qui est très loin d’un luxe, mais un soulagement aux souffrances des ressortissants du canton YABI dans le plus grand arrondissement du département du Nyong et Kelle qui MESSONDO. Soutenons toujours notre parti et notre Président National pour le développement du canton YABI et du Cameroun.

    Propos rassemblés par Rémy Biniou

  • Le gouvernement est-il à la hauteur de la crise ?

    Le gouvernement est-il à la hauteur de la crise ?

    Ô courant !
    Au moment où nous allons sous presse, une bonne partie de Yaoundé est toujours plongée dans le noir. «Il n’y a pas de courant électrique». On est au courant de la situation depuis la nuit du 7 août 2019. Après un incendie, l’énergie électrique est partie en courant. Et depuis, la vie roule à contre-courant dans certains quartiers de la capitale. On imagine bien des citoyens courant vers les méthodes d’éclairage anciennes ou recourant à d’autres solutions alternatives. Bref, ces derniers jours, ils vivent courant de précaire bonheur à ultime malheur. Au courant de la semaine dernière, les autorités ont jeté un courant d’explications plus ou moins enchevêtrées.

    Une habitude de langage courant bien de chez nous. Elle a eu l’obscur don de traverser l’opinion comme un courant électrique. Parce qu’on a voulu faire croire à une cessation d’une continuité, à une simple interruption de courant. Or il s’agit d’une panne grave qu’on a prise en discourant sur son faible impact. Chez nous, c’est le courant intérieur de la vie. Chez nous, ce péché courant est savamment entretenu, pour que le peuple ne soit pas au courant de ce qui se passe réellement avec le courant promis par les politiciens. Entre-temps, ces derniers vivent là où le courant est disponible et l’air bien frais. C’est ainsi que le petit citoyen avance vers l’émergence; en mendiant un courant qui le rejette sans cesse vers le passé; jamais dans le bon sens du courant.

    Dans ce dossier, votre rédaction se jette dans le courant. Il se situe dans le courant d’événements et d’idées de ces derniers jours dans notre pays.

     

    Autour du rétablissement du courant dans les plus brefs délais dans les quartiers impactés par l’incendie du 7 août 2019, le discours des autorités vire au mensonge.

    la salle des contrôles consummée à 80%

    Joseph Dion Ngute, le Premier ministre chef du Gouvernement, n’a pas eu le temps de souffler. Après s’être publiquement félicité de l’avancée du Projet d’alimentation en eau potable de Yaoundé à partir du fleuve Sanaga (Paepys) le 7 août 2019 à Batchenga (Haute-Sanaga), voici que le même jour le courant électrique est parti dans plusieurs quartiers de la capitale. «Les bonnes intentions portant sur la baisse des coûts d’électricité au Cameroun, émises lors du conseil de cabinet du 25 avril 2019 sont parties en fumée, suite à un gigantesque incendie», ironise Laurent Afanda, activiste de la société civile.

    La chronique retient que les installations techniques du poste électrique de Melen, dans le 3e arrondissement de Yaoundé, ont été détruites par les flammes. «A hauteur de 80%», selon un technicien en poste. Celui-ci précise que la salle des contrôles, constituée de 19 cellules servant à approvisionner 28% de la population de Yaoundé en énergie électrique, a été entièrement consumée. Officiellement, rien ne filtre des causes réelles de ce feu géant, en dépit de la lourde opération de communication gouvernementale visiblement occupée à colmater une polémique qui bat son plein.

    Sur ce chapitre, deux angles d’attaque ont principalement nourri la stratégie défensive du gouvernement: dire à sa façon ce qui s’est passé d’une part, et user d’un récit administratif visant à baliser le contrôle des événements d’autre part. A Yaoundé, le 14 août 2019, René Emmanuel Sadi et Gaston Eloundou Essomba sont venus sous le feu des caméras pour cela. Le ministre de la Communication (Mincom) et son homologue de l’Eau et de l’Energie (Minée) n’ont pas réussi à éponger tous les questionnements face aux journalistes cannibalisés par des soupçons de tentative de sauvetage en urgence de la situation. «Tout l’enjeu pour ce duo était de s’efforcer de sanctuariser un gouvernement en butte à des critiques nombreuses quant à sa capacité à offrir de l’énergie électrique de bonne qualité et en grande quantité aux citoyens», commente Jean-Marc Bikoko, point focal de l’ONG Dynamique citoyenne.

    «Glissement de délais»
    À l’observation, cette conférence de presse conjointe Mincom/Minée semble avoir prolongé l’incendie. Pire: elle est davantage venue enflammer une opinion locale, suffisamment incandescente. Cette fois, le carburant est lié au délai annoncé de 7 jours par Gaston Eloundou Essomba. «Sur ordre du chef de l’Etat, le ministère des Finances a débloqué un fonds spécial pour exécuter les travaux. Les pièces défectueuses ont déjà été achetées et sont en route pour Yaoundé. Les équipes de deux entreprises coptées pour cette situation ont une semaine pour les installer et rétablir le réseau électrique», dixit le Minée.
    Entre temps, les témoignages de quelques Yaoundéens interrogés par les chaînes d’infos tournent en boucle. Ils disent l’incompréhension, voire la confusion au regard de la série de communiqués publiés par Eneo Cameroon S.A., quelques heures plutôt. Surfant sur plusieurs paramètres techniques, l’opérateur de commercialisation de l’énergie électrique du pays a d’abord tablé sur une durée des travaux comprise entre 3 et 6 mois. Ensuite, la même entreprise a tablé sur deux semaines au moins. A ce stade, Jean-Marc Bikoko parle d’«embrouillamini».

    Bobo Ousmanou

    Melen

    Les nouvelles cellules sont là

    Après les avoirs réceptionnés, le Minée a acheminé lesdits équipements au lieu du sinistre le 16 août dernier.

    Lionel Omgba Oyono (en chemise) présentant les nouvelles cellules

    Au poste source électrique du BRGM ce vendredi 16 août 2019, le soulagement d’un officiel du Minée est splendide : «voilà !», s’écrie-t-il lorsqu’un gros porteur s’immobilise devant lui et quelques techniciens d’Eneo Cameroon S.A. Quelqu’un s’empresse de placer la presse au plus près de la scène de déchargement des 19 cellules Saint-Patrice, nouvellement acquises. Manifestement, au Minée, cette image-là va compter au royaume de l’opinion. L’instant se vit comme s’il est placé sous le diktat de la transparence.

    À l’autre bout, des ouvriers s’activent. Ils creusent. Ils déconnectent des fils des lamelles d’aluminium. Lionel Omgba Oyono, directeur de l’électricité au Minée, assure que c’est ainsi parti pour rétablir le courant «dans les plus brefs délais». Sur insistance de la presse, il lâche : «tout sera bon dans 7 jours». À terme, les 28% des ménages de la ville de Yaoundé seront à nouveau servis en énergie électrique stable. «Eneo a commis deux entreprises qui sont à pied d’œuvre pour ne serait-ce que installer ces 19 cellules», a appuyé Gaston Eloundou Essomba, le même jour sur les ondes de l’antenne radio de la CRTV.

    Sur le fil, il ressort un air du déjà entendu. En mars 2019, des coupures récurrentes avaient paralysé pratiquement toute la ville pendant plusieurs jours. Le gouvernement avait alors entrepris de remplacer 170 km de tronçons de lignes aériennes et souterraines moyenne tension pour doubler leur capacité de transit d’énergie et renforcer la sécurité des ouvrages. Afin «d’accroître la capacité d’alimentation et d’améliorer significativement la disponibilité de l’énergie électrique» dans les villes de Yaoundé et Douala. Ces travaux étaient prévus pour une période de cinq mois. En l’état actuel des choses, il est évident qu’à peine ce timing expiré, un autre incident est survenu. Celui-ci vient remettre au goût du jour la qualité des équipements. «Dans la réalité, nos barrages hydroélectriques de Songloulou et Edéa sont dans l’impossibilité de garantir un niveau de puissance pouvant satisfaire la demande actuelle en électricité», souffle un expert ayant requis l’anonymat.

    Ongoung Zong Bella

     

    Modestement, nous croyons que la réhabilitation en urgence de Song Loulou et Lagdo est une urgence. Il ne faut pas oublier la réhabilitation dans les brefs délais du réseau de transport et de distribution par la Sonatrel.

    Dans un regard sur la problématique de la fourniture de l’énergie électrique, le syndicaliste accuse les pouvoirs publics de laisser-faire.

    Jean-Yves Ngono Misso

     

    «C’est un problème de gouvernance»

    Une partie de Yaoundé est actuellement dans le noir. Les faits confirment-ils le crédo que vous défendez à travers le Syndicat national des travailleurs du secteur de développement des ouvrages de productions, de transport et de régulation de l’électricité (Syntdrope) ?

    Absolument ! La situation risque encore de s’aggraver si une deuxième panne survenait dans l’un des 3 postes de transformation restants. Yaoundé est alimentée par une boucle de 90KV reliant les postes de transformation d’Ahala, Kondengui, Ngousso, et Oyom-Abang. Cette boucle ouverte expose dangereusement Yaoundé dans une insécurité permanente d’alimentation en énergie électrique. Et pourtant, le coût estimatif des travaux pour relier les différents postes et prémunir les Yaoundéens de tout désagrément se situe entre 2 et 3 milliards FCFA seulement. On ne sait pas ce qui bloque et vous comprenez qu’il s’agit d’un problème de gouvernance.

    La situation est-elle si lamentable que cela ?
    Voyez-vous, les centrales de productions de Song Loulou et de Lagdo sont dans un état de vétusté très avancé, pendant que les réseaux interconnectés sud et nord ne sont pas toujours reliés à ce jour. C’est grave, mais c’est vrai !

    Quels commentaires vous inspire la mise en service de nouveaux barrages pour pallier le déficit d’énergie au Cameroun ?

    Il faut dire que je réfléchis davantage en termes de scandales. Les projets de barrages de Mekin, Memve’ele et Lom Pangar ont enregistré des surcoûts allant de 2 voire 3 fois au-delà des normes internationales raisonnables, soit un investissement de l’ordre de 1 à 1 milliard 600 millions pour produire 1 MW d’électricité. Ces surcoûts se justifiant par la non maturation desdits projets, les surfacturations, les avenants hors normes allant au-delà de 30% de l’enveloppe globale du marché, des délits d’initiés et la corruption.

    La situation risque encore de s’aggraver si une deuxième panne survenait dans l’un des 3 postes de transformation restants. Yaoundé est alimentée par une boucle de 90KV reliant les postes de transformation d’Ahala, Kondengui, Ngousso, et Oyom-Abang. Cette boucle ouverte expose dangereusement Yaoundé dans une insécurité permanente d’alimentation en énergie électrique.

    Il faut aussi dire que les délais n’ont été respectés nulle part. Les calendriers préalablement établis qui prévoyaient 36 mois pour Lom Pangar à compter du 3 août 2012, 36 mois pour Mekin à compter du 4 mai 2012 et 36 mois pour Memve’ele ont largement été dépassés.

    Que proposez-vous ?
    Modestement, nous croyons que la réhabilitation en urgence de Song Loulou et Lagdo est une urgence. Il ne faut pas oublier la réhabilitation dans les brefs délais du réseau de transport et de distribution par la Sonatrel.

     

  • Intelligence économique : L’essor est enclenché en Afrique

    Intelligence économique : L’essor est enclenché en Afrique

    En discutant des enjeux liés à la marche du monde, le public africain prend conscience de l’utilité de la veille stratégique dans tous les secteurs de la vie courante. 

    Les participants à un panel lors de la 2e édition du Javie à Yaoundé

    En inaugurant son mois d’août par la 2e édition des Journées africaines de veille et d’intelligence économique (Javie), le Centre africain de veille et d’intelligence économique (Cavie) s’est drapé dans une double symbolique : «des victoires à portée de main» et «tout faire savoir à tous». À Yaoundé, ces 2 et 3 août 2019, l’événement procède d’un souci d’éducation du public.

    C’est bien cet aspect qu’il faudrait retenir et mettre en exergue», suggère Guy Gwet. En posture d’invité du 13 heures sur les ondes de l’antenne radio de la Crtv, le président du Cavie décline toute la mécanique de l’intelligence économique. À en croire cet expert, celle-ci s’orchestre autour d’une triple partition: «l’histoire, l’immédiat et la perspective». Le tout, dit-il, se développe autour de cette idée qu’il n’existe pas de pause pour les besoins d’image et de rentabilité, tant au niveau géopolitique que commercial, avec une énergie visant à alimenter toujours plus les moteurs de la machine de veille.

    À ceux qui sont venus l’écouter, Guy Gwet et son équipe transmettent les résolutions prises lors des états généraux économiques de Dakar, les 29 et 30 avril 2019. Le package est assorti de modalités pratiques de mises en œuvre au niveau des collectivités locales décentralisées. Il s’agit des outils nécessaires pour la mise en place des cinq surveillances de base et des dispositifs d’intelligence économique.

    S’attachant à des comparaisons visibles et lisibles à l’aune des actualités, le président du Cavie souligne que les États africains doivent s’arrimer à l’intelligence économique pour être plus compétitifs sur le plan international. Parce que la scène mondiale est régie par des humeurs et des rapports de forces, Guy Gwet montre comment l’intelligence économique agit. «Elle permet de défendre le patrimoine national et informationnel des décideurs, et d’aller à la conquête des marchés internationaux». Par ailleurs, poursuit le président du Knowdys Consulting Group, elle représente un moyen pour les pays africains de faire face à l’influence étrangère.

    Ainsi, les participants à ces ateliers ont pu comprendre les enjeux de l’intelligence économique. «Nous avons beaucoup appris sur les stratégies de guerre économique et nous repartons très satisfaits. Cet évènement nous a permis de comprendre un peu mieux que l’intelligence économique est un outil de compétitivité à l’échelle nationale et internationale», affirme Ulrich Jonso, président fondateur du club intelligence économique à l’Essec.

    Pour le Dr Jacques Etoundi Ateba, l’intelligence économique est un moyen de rendre les apprenants plus compétitifs. «Avec l’intelligence économique, il ne sera plus question d’acquérir des savoirs savants. Il sera question de faire face aux enjeux et défis planétaires qui nous commandent de nous arrimer pour que chaque Camerounais qui sort de notre système éducatif soit capable de participer à la résolution des problèmes concrets et actuels qui se posent à nous», indique fièrement le spécialiste des questions de l’éducation et science de l’éducation.

    De fait, le Cavie peut se glorifier d’avoir atteint son pari: informer sur la nécessité d’utiliser l’intelligence économique pour améliorer la compétitivité.

    Créé en 2015, le Cavie est présent dans 37 pays à travers le monde. Cette organisation offre plusieurs formations en intelligence économique sur les marchés africains.

    Joseph Julien Ondoua Owona, stagiaire

     

    Une opportunité pour le made in Cameroon 

    En empruntant à l’intelligence économique, les produits locaux pourraient mieux conquérir de vastes marchés.

    «Collecte d’un certain nombre de données. Par exemple, une industrie brassicole pourra dire pourquoi la consommation de la bière baisse, etc. À la fin, elle peut créer un réseau lui permettant de collecter cette information en vue d’agir sur son système de production et peut-être de changer l’étiquette de la bière, la bouteille ou de changer la teneur en alcool et tout le reste». De manière caricaturale, Pierre-Michel Nguimbi, ancien ambassadeur du Congo au Sénégal, parle de l’incidence de l’intelligence économique sur la vie d’une entreprise. Tel que proposé, le schéma peut être dupliqué ailleurs, notamment sur les produits « Made in Cameroon ».

    Georgette, promotrice de produits locaux voit en ce nouvel outil de compétitivité, un moyen de ravir le marché local, voire international. La jeune entrepreneure estime que la veille concurrentielle qui fournit des informations clées sur le marché représente un atout majeur pour son secteur d’activité. De «Grâce à la veille, je pourrais m’informer sur ce que font les concurrents, comment ils réfléchissent, pourquoi ils font plus de chiffres d’affaires que moi et surtout ce que je dois faire pour gagner le marché local», précise la promotrice du Made in Cameroon.

    JJOO

    Réactions

    Pierre-Michel Nguimbi, ancien ministre congolais, président exécutif du groupe d’expertise sur les réformes institutionnelles en Afrique (Geria)

    « C’est important pour améliorer la compétitivité »

    Pierre-Michel Nguimbi

    Nous sommes là d’abord pour améliorer le corpus de tous ceux qui considèrent que l’intelligence économique a une importance en Afrique. C’est important pour améliorer la compétitivité. Ce n’est pas encore quelque chose que l’on appréhende avec toute son acuité et notamment au niveau des organisations publiques. Les grandes firmes ont compris, il y a longtemps, l’intérêt de l’intelligence économique, ne fût-ce que pour des besoins de concurrence, pour capter des marchés, améliorer leurs prestations.
    Pour les États, la compétitivité se joue souvent en termes d’influence. Quelle est l’influence que le pays a dans un secteur donné, mais aussi quelle est la nature de l’influence que le pays ne veut pas subir ? Il s’agit de collecter des informations utiles à ce sujet, de savoir les analyser et de construire des outils d’aide à la décision. Ces outils seront mis à la disposition notamment du Premier ministre, du président de la République et même des parlementaires, afin qu’ils votent des lois qui peuvent freiner l’aliénation du patrimoine.

     

    Jean Louis Atangana, enseignant de droit

    « Une richesse sur laquelle nos gouvernements devraient s’appuyer »

    Jean Louis Atangana

    Mes impressions sont bonnes. L’atelier auquel j’ai pris part a porté sur l’intérêt de l’État dans les négociations internationales. Je dois dire que par le niveau des intervenants, la qualité des participants et les questions qui ont été discutées, on ne peut qu’en sortir plus grandi. Ce questionnement est en effet important dans la gestion de l’intelligence économique comme problématique majeure de notre société du XXIe siècle. La quasi-totalité des États considérés comme des États développés ont mis en place des structures en charge de la veille intelligente et nos États n’y avaient pas encore pensé. Le fait qu’un certain nombre de jeunes Camerounais, de jeunes Africains aient mis en place ce centre de veille et d’intelligence économique constitue vraiment une richesse sur laquelle nos gouvernements devraient s’appuyer.

     

    Serge Bertrand Bolo, cadre à la cellule de communication de l’Université de Yaoundé I

    « Un facteur très important pour l’université »

    Serge Bertrand Bolo

    Au sortir de ces échanges, je me suis rendu compte que l’intelligence économique est un facteur très important pour l’université. Elle va nous permettre d’avoir un feedback des savoirs dispensés aux étudiants, de mesurer la satisfaction dans le milieu de l’emploi, afin de savoir si les produits que nous avons mis sur pied sont compétitifs. C’est donc cette veille qui permet de collecter ces informations, dans le but d’améliorer les contenus et mieux former les jeunes. L’intelligence économique participe à améliorer les contenus de formation.

     

  • Le livre écrit sous la plume des affairistes

    Le livre écrit sous la plume des affairistes

    Il se trouve que dans quelques écoles et collèges privés, le marché du manuel scolaire a ouvert une autre page mafieuse.

    FCPE Vosges

    «Seuls les livres figurant sur les listes officielles seront exigibles dans les établissements scolaires publics et privés du Cameroun». En le martelant lors d’une conférence de presse donnée à Yaoundé le 17 juillet 2019, Jean-Paul Komon trahit le sentiment d’avoir un problème. Selon des informations du président du Conseil national d’agrément des manuels scolaires et des matériels didactiques (CNAMSMD), un sérieux péril plane sur la respectabilité des listes officielles des manuels scolaires et des différents prix y afférents pour l’année 2019/2020. «Certains établissements continuent de violer l’obligation de respecter les listes officielles», confie-t-il aux journalistes.

    Business
    Si cette affirmation ne localise pas clairement lesdits établissements, la réalité du terrain souligne néanmoins un business animé par les promoteurs privés et agents commerciaux de certaines maisons d’édition locales ou étrangères. «Il se trouve que dans quelques écoles et collèges privés, le marché du livre scolaire a ouvert une autre page mafieuse», s’alarmait le Syndicat national des librairies et papeteries du Cameroun, au cours de son assemblée générale tenue à Yaoundé le 11 juillet 2019. À cette occasion, Apollinaire Ngassa, le président de ladite instance, décrivait une force de vente de plusieurs commerciaux et des équipes logistiques chargées de gérer les commandes. «Ce dispositif humain constitue une rente de situation pour certains éditeurs : il leur assure la présence d’au moins un de leurs titres dans les programmes scolaires», affirme Natacha Ngakou. «Grâce à cette redoutable équipe qui échappe à toute traçabilité fiscale, ajoute la libraire basée à Yaoundé, les éditeurs malveillants veillent à alimenter le tuyau et trouvent continuellement de nouveaux prétextes pour convaincre les chefs d’établissements privés à inscrire des ouvrages non homologués à leurs programmes».

    « Justif »
    À percer un peu chez quelques responsables d’établissements à Yaoundé et ses environs, ce business a l’avantage de mettre des «livres faciles» à la disposition des parents et élèves. Un certain nombre d’avis glanés mettent en avant la nécessité de proposer des «ouvrages soft». «Ceux qui permettent de réfléchir, de mémoriser rapidement et de progresser avec le monde», selon la formule d’un fondateur de collège basé à Kondengui (Yaoundé IV). Selon ce dernier, «c’est le ressort secret du succès des établissements privés aux examens officiels».

    Ailleurs, une directrice d’un collège privé bilingue avoue qu’à hauteur de 10 % seulement, les livres du programme officiel sont imposés à ses apprenants et enseignants. Notre interlocutrice montre d’ailleurs comment «depuis les années 90, les contenus des programmes retenus chaque année par le gouvernement mettent en évidence la coexistence de deux objectifs contradictoires : une formation égalitaire d’une part, et de l’autre, des emplois inégaux à la sortie».

    Pour dire les choses très autrement, Grégoire Alima, préfet des études dans un collège privé à Nkoabang (banlieue de Yaoundé), voit «des schémas didactiques difficiles» dans les livres homologués par les pouvoirs publics. «Nos manuels ne permettent ni à l’élève ni à l’enseignant d’acquérir facilement les savoirs», dit-il. Plus loin, il confesse avoir compris l’intérêt de développer des relations privilégiées avec les éditeurs, «pour un enseignement de qualité». Bien absente ici, l’idée d’un quelconque quota de retours négocié à l’amiable.

    Jean-René Meva’a Amougou

     

    Livre scolaire au Cameroun: Chapitre 2019/2020

    Dans un mois, au Cameroun, les cloches de la rentrée retentiront à nouveau dans les établissements relevant des enseignements de base et des enseignements secondaires. Avant même le chahut des élèves et le fracas de la récré, le monde du livre scolaire a déjà fait sa rentrée au sein de l’espace public national. Et comme toujours, la chronique fait la part belle à la disponibilité, aux contenus et aux prix des manuels homologués. Pour l’année scolaire 2019/2020, on n’a visiblement pas fait table rase du passé. L’acte II qu’on dit avoir inauguré, comme dans une pièce sans intrigue, prolonge en fait l’acte I. Le «nouveau monde» n’est plus nouveau. En fait, on l’a bien compris : le grotesque a refait surface, plongeant dans l’embarras parents et élèves.

    Avec la publication, à temps des listes des manuels homologués, on croyait avoir touché le fond du problème. Pourtant, l’affaire est plus complexe qu’on pourrait le croire. D’un côté, celle-ci met en scène des hommes attachés à démontrer que toute la faute retombe sur les ennemis de la bonne gouvernance. De l’autre s’activent des Ponce Pilate militant tantôt pour un changement radical, tantôt pour des réformes prudentes du marché. On n’oublie pas quelques tigres dont le rôle est d’ajouter une bonne part d’irrationnel à des pratiques scandaleuses, contestables, illicites. Le marché est tellement concurrentiel que le casier d’un seul enseignant est souvent submergé par une dizaine d’ouvrages différents pour chaque niveau scolaire.

    C’est que l’enjeu n’est pas mince. Comme tous les marchés, celui du livre scolaire au Cameroun raisonne en termes strictement comptables et non humains. « En réalité, le vrai challenge dans cette affaire, c’est premièrement celui de la transparence », établit Marcellin Vounda Etoa, le secrétaire permanent du Conseil de l’agrément du Manuel scolaire. Et là, des voix s’élèvent pour dire non. À côté, un embrouillamini diablement entretenu.

    Le présent dossier s’emploie donc, à la lumière des dernières actualités, à décrire les rapports de force et les acteurs en présence.

     

    Livre unique

    Un dessein abîmé

    Malgré ses attrayants atours, l’idée d’un manuel par matière ne contente pas tout le monde.

    Le livre unique: pas si simple à adopter

    «Dans le respect des spécificités de chaque sous-système éducatif, toute discipline inscrite au programme officiel doit être dispensée sur toute l’étendue du territoire national, au moyen d’un seul manuel scolaire pour chaque matière. Seul cet ouvrage doit être utilisé par les apprenants pour la matière considérée». On peut aisément le lire sur la circulaire du 10 juillet 2017, rédigée sous la plume de Jean Ernest Ngalle Bibehe Massena. Alors ministre des Enseignements secondaires (Minesec), ce dernier avait marqué l’opinion publique nationale.

    Pour une raison : avoir contenté les parents d’élèves et autres membres de la communauté éducative par rapport à la réduction des frais d’achat de plusieurs livres dans une même discipline. «C’est important, car cela a un enjeu pédagogique. Il faut avoir, dans les programmes, des livres de qualité pour garantir la formation des élèves, de la maternelle à la fin du secondaire. Avoir des livres en quantité suffisante, parce que ce sera un seul livre sur l’ensemble du territoire national. L’enjeu est donc économique, tant pour les éditeurs que pour les parents», vantait Marcellin Vounda Etoa sur le site internet de la CRTV, le 10 avril 2018.

    « Saccage »
    Malheureusement, malgré ses attrayants atours, la circulaire du Minesec ne convient pas à tous, dans les établissements publics ou privés. «L’idée d’un manuel unique ou d’un petit nombre de manuels adoptés par l’État est une chimère», clame Aloys Essokè. L’explication qu’en donne cet enseignant de français à la retraite tient sur une phrase : «Tant que les intérêts des uns et des autres ne sont pas assouvis, la guerre des manuels aura toujours ses lieutenants».

    Le tout est à comprendre en termes de bataille entre les partisans d’un livre par discipline et les dévots de la liberté pédagogique et de la prise en compte des intérêts des marchands de manuels scolaires au Cameroun. À ce jour, la polémique est loin d’être dissipée. À Yaoundé, le 11 juillet 2019, le Syndicat national des librairies et papeteries du Cameroun s’indignait des lourdes pertes. En clair, «le portefeuille financier des libraires est affecté par une mesure qui ne couvre pas grand-chose, car de nombreux exemplaires n’ont pas trouvé preneur», à en croire Apollinaire Ngassa. «Et dans ce cas, le marché est en train de foncer dans le mur», renchérit Natacha Ngakou.

    S’ils prennent en compte l’impact social de l’instauration du «livre unique», des enseignants continuent de penser qu’«une offre diversifiée des manuels participe de l’ouverture au monde». À l’interprétation, cette situation donne la réponse à une interrogation : pourquoi certains établissements tiennent-ils leurs listes de livres, en marge des directives gouvernementales ? Pour l’année scolaire 2019/2020, un chef d’établissement à Yaoundé dit assumer «deux livres par matière». «Certains enseignants donnent des cours avec des manuels anciens et les élèves s’en sortent bien», fait-il remarquer.

    Ongoung Zong Bella

    Polémiques

    Quand les contenus lèvent de mauvais lièvres

    En cette veille de rentrée scolaire, les controverses autour du contenu de certains livres scolaires se multiplient. Preuves d’enjeux idéologiques lourds.

    Le Pr. Kum’a Ndumbé III

    On dirait qu’à chaque page des manuels se nichent bien des controverses. Portée par le Pr Kum’a Ndumbé III, la dernière en date passe sous son scalpel une séquence de l’histoire du Cameroun. «Que ceux qui écrivent dans les livres scolaires « traité germano-douala » m’apportent le document, que ce soient ces inspecteurs pédagogiques, que ce soient les professeurs d’université, qu’ils m’apportent où c’est écrit « Deutsche-duala Vertrag », fulmine l’historien émérite sur les antennes de Radio Balafon (émettant sur 90,3 FM à Douala) ce 12 juillet 2019. On l’imagine, le prince du canton Bele Bele (Douala IV) suggère le retrait pur et simple de cette « aberration » des livres d’histoire utilisés dans les écoles, lycées et collèges camerounais.

    «Cela peut sembler anodin, mais vu à partir d’un autre angle, tout montre que le livre scolaire au Cameroun est devenu le terrain de batailles idéologiques et intellectuelles», murmure Dimitri Tagne. De l’avis de ce spécialiste camerounais de l’histoire des manuels, il devient possible de dégager une tendance de fond, tant les soubresauts commencent à se faire sentir. L’année dernière, le livre de Sciences de 5e, édité par la maison bilingue «Nmi Education», avait défrayé la chronique. Ses coauteurs (Charles Ebang Ehole, Joseph Hessel, Patrick Yves Ango et Martin Ndzana Bella) avaient été pilonnés par l’opinion.

    Les parents, les syndicats et certains groupes comme la communauté musulmane leur reprochaient d’avoir imposé «un livre contenant des enseignements trop poussés en sexualité et trop crus pour les enfants des classes de 5e». Il faut dire qu’en effet, dans son module 4 portant sur la santé de reproduction, des comportements émergents néfastes à la santé de reproduction tels que la zoophilie, la fellation, et la sodomie y étaient présentés. Pour 2019/2020, cet ouvrage est de retour. Mieux, il n’a pas été retiré du programme, parce que Nalova Lyonga, la ministre des Enseignements secondaires, n’a pas donné son accord pour cela, insiste Jean Paul Komon.

    Ailleurs, il est validé que parce qu’ils ont une autre visée. Peu d’enseignants s’appuient sur ces «livres à problèmes». Leur utilisation n’étant pas obligatoire, certains d’entre eux font même parfois l’impasse. Delphine, professeur de sciences dans un lycée yaoundéen, estime que «les manuels sont pour les fainéants». «Il y a tout dedans, les questions, les réponses, et il est très difficile d’intéresser les élèves en suivant le livre uniquement tel qu’il a été validé». De là à comprendre pourquoi «Les génies en Allemand», des éditions ACIPEC, ont été remplacés par «Ihr und Wir», des éditions Hueber. Ce changement est dû aux «imperfections relevées dans le livre», reconnait Jean Paul Komon.

     

    Prix des manuels scolaires

    Un brin de sourire

    Avant d’aborder l’année scolaire 2019-2020, les parents d’élèves saluent l’initiative et la vision des pouvoirs publics.

     

    Au niveau du secondaire général, «aucun manuel ni aucun prix ne change de la 6e en terminale francophone et anglophone, à l’exception des classes de Seconde de l’enseignement général et la Terminale A», clame Jean Paul Komon. Il poursuit : «Aucun manuel ni aucun prix de manuel des cycles primaire et maternel ne change. Le coût du cartable, en ce qui concerne l’achat des manuels scolaires, demeure donc le même». De quoi rassurer les parents en cette veille de rentrée scolaire 2019/2020. Dans la ville de Yaoundé, beaucoup saluent l’initiative du Conseil national d’agrément du manuel scolaire qui a reconduit les programmes de l’année antérieure, à l’exception de quelques-uns, notamment ceux des classes de Seconde et de Terminale du sous-système francophone de l’enseignement général.

    Tendances
    Un tour dans quelques librairies de la capitale justifie la satisfaction observée. Le livre de physique de la classe de Seconde C est passé de 7 000 FCFA à 5 000 FCFA cette année. Pour la même classe (séries A), le livre de mathématique passe de 5 000 FCFA à 3 500 FCFA. Le livre d’allemand de Terminale A («Ihr und wir») coûte quant à lui 6 000 FCFA, contre 8000 FCFA l’année passée.

    «C’est avantageux pour nous parce qu’avant on était contraint d’acheter de nouveaux manuels chaque année. On pourra faire des économies parce que l’on connait les prix des livres», indique Blandine O. Version confirmée par Julie, mère de deux élèves en classes de CE1 et CE2, section francophone. «Cette année, je dois par exemple dépenser 14 000 F pour acheter les manuels du CE2 à ma fille ainée. L’année prochaine, je sais que je devrais dépenser presque la même somme pour les manuels du CM1 et 14 400 F pour le CM2», explique-t-elle.

    Les parents d’élèves du secondaire ne s’en réjouissent pas moins. Pour Éric G., la politique du tarif unique est la plus adaptée au contexte économique difficile. Pour ce chef de famille, la situation n’était guère facile à gérer. «Avec trois enfants, dont deux au secondaire et un à l’école primaire, les charges devenaient presque insupportables», confesse-t-il. Faute de moyens, ses enfants n’avaient pas parfois tous les livres. Il se contentait de leur offrir l’essentiel des livres, lorsque ceux vendus «au poteau» (lieu de vente des livres usés au prix de pacotille) n’étaient pas disponibles.

    Joseph Julien Ondoua Owona, stagiaire

  • Bamenda : Egypte 2019 vue d’une ville en guerre

    Bamenda : Egypte 2019 vue d’une ville en guerre

    Chassé-croisé dialectique d’une population aux abois qui a vécu le plus grand événement sportif du continent avec un arrière-goût d’insatisfaction.

    La ville n’a pas vibré au rythme de la Can 2019

     

    1-Le match perdu de l’engouement populaire
    Déception pour certains, sentiment mitigé pour d’autres, voilà l’état d’esprit des populations de la cité capitale du Nord-ouest à la fin de la coupe d’Afrique des nations de football au pays des pharaons. «Je n’ai pas regardé un seul match de la Can» indique Nicodemus Nde. La faute à l’énergie électrique, jamais disponible. Rémy Cinti ne dit pas autre chose : «on a raté plusieurs matches, même ceux des Lions indomptables du Cameroun, à cause des coupures intempestives de l’énergie électrique. On ne peut pas affirmer ici à Bamenda qu’on a bien suivi la Can achevée vendredi en Egypte». Pour contourner l’obstacle, les nantis ont acquis un groupe électrogène et d’autres ont suivi les matchs sur YouTube ou d’autres applications mobiles.

    Affluence au stade
    Pierre Anoufack marque sa déception quant à l’affluence des spectateurs dans les stades en Egypte. «Les stades accueillant les matchs de l’Egypte étaient bondés de monde. Après la sortie prématurée du pays organisateur de la compétition, on a vu des gradins carrément vides», regrette-t-il. Un avis partagé par Elvis Ndi Tsembom, secrétaire général à la ligue régionale de la Fecafoot Nord-ouest : «C’est une leçon pour la Caf qui doit revoir les tarifs de la billetterie, parce que le prix du ticket d’accès au stade est exorbitant. Ceux qui aiment le football n’ont pas les moyens d’accès au stade». Rémy Cinti soulève la controverse de la Var, un autre point interpellant la Caf et la Fifa. «Parce que ayant apporté beaucoup de polémique autour des cartons distribués aux joueurs».

    Sortie regrettée des Lions indomptables
    L’une des plus grandes déceptions des populations de Bamenda au cours de cette Can 2019 est la sortie prématurée de l’équipe nationale de football du Cameroun. «En tant que Camerounais, j’ai été déçu de la prestation des Lions indomptables, surtout lors du match qui les élimine contre le Nigeria. On a eu l’impression que le sélectionneur a passé le temps à tester les joueurs au cours de la compétition» fustige Pierre Anoufack. Il est suivi par Mbah Zico Nwati: «l’élimination des Lions indomptables nous a donné un mauvais goût». Lot de consolation pour Pierre Anoufack: la finale de la Can 2019 arbitrée par un trio camerounais.

    Révélations
    La Can qui s’est achevée vendredi a mis sur orbite des supposés «petites nations de football». Ce qui ne laisse pas indifférent les amoureux du ballon rond à Bamenda. «La compétition a permis d’avoir des révélations en terme d’équipe nationale, celles de Madagascar et du Bénin, des talents aussi» remarque Pierre A. Pour le Sg de la Fecafoot Nord-ouest, cette Can a «révélé un football africain émergent, avec des pays moins capés comme le Bénin qui élimine une grande nation comme le Maroc ; ou Madagascar qui, pour sa première participation, a impressionné. Je crois que l’Afrique sort de l’ornière et nous fait découvrir des talents comme ce fût le cas dans les années 80-90. Les petites nations investissent dans le sport en général et le football en particulier. Dans les cinq prochaines éditions, on aura une Can dont on ne pourra pas prédire à l’avance de vainqueur ou de favori».

    2-Le match perdu du business économique
    La coupe d’Afrique des nations a souvent été l’occasion pour certains opérateurs économiques de se faire du beurre dans la cité capitale du Nord-ouest. Marcus S. tient un commerce en face du marché central de Bamenda. Une boutique de vente des gadgets sportifs et singulièrement des maillots de différents pays participant à Egypte 2019. Le business ne marche pas en cette édition 2019 de la Can. «A cause de la crise sociopolitique dans le Nord-ouest, Bamenda s’est vidée de sa population. Je n’ai pas pris le risque d’investir comme par le passé, car très peu s’intéressait à la Can. En plus, les délestages ont sevré de nombreux citoyens de la ville des matchs à la télévision», indique-t-il.

    A contrario, Pierre A, Directeur d’un établissement hôtelier à Up Station Bamenda, se frotte les mains surtout lors des rencontres des Lions indomptables, même si ses concurrents de Down-Town n’ont cessé de se plaindre des mauvaises affaires pendant la Can. «Je dois avouer que jusqu’à la fin du premier tour, la structure hôtelière située à Up Station que je gère faisait de très belles affaires. Les salles, snack-bar, restaurant et même l’esplanade avec ses tentes faisaient son plein d’œuf; et même jusqu’en 8e de finale avec la participation des Lions indomptables qui poussaient leurs fans à affluer ici. Après l’élimination des Lions, la pression a baissé, l’intérêt aussi». Les vendeurs des écrans de téléviseurs plasma et autres n’ont pas également fait recette.

    3- Le match à gagner de la Can 2021
    Egypte 2019 est désormais dans le rétroviseur. Les regards et les énergies sont maintenant focalisés sur la Can 2021 au pays de Roger Milla. Pour ne plus tomber sous le coup du glissement de dates, autrement appelé retrait de l’organisation de la fête footballistique au Cameroun, des citoyens de Bamenda suggèrent aux pouvoirs publics de mettre les bouchées doubles. «Il faut penser aux infrastructures. On a l’impression que 2021 c’est trop loin. Non. On avait eu la chance d’avoir plusieurs années devant nous (de 2014 à 2019).

    On a échoué. 2021 c’est proche, il faut déjà enlever 2019. On a plus que 2020. Il ne faut pas attendre la dernière minute pour faire des visites de terrain irréalistes (on parle de 95% de taux de réalisation alors que rien n’est fait absolument). Avec le retrait de la Can, il semble que beaucoup ont pris du recul et qu’il faudra attendre la dernière minute. C’est le moment de gérer la question des infrastructures avant 2020 parce qu’on est déjà en juillet» précise Pierre A. Et Elvis Ndi Tsembom de renchérir: «le Cameroun doit tout mettre en oeuvre pour éviter la précipitation de dernière minute. Concernant le ralentissent de la construction des infrastructures sportives, j’espère qu’avec le nouveau ministre des sports et de l’éducation physique, Narcisse Mouelle Kombi et le président actuel de la Fecafoot Seidou Mbombo Njoya, nous ne ferons pas l’objet d’un second embarras aux yeux du continent africain. La CAF va tester certaines de ces infrastructures en janvier 2020 avec le Chan. C’est en ce moment là qu’on saura si le Cameroun va organiser la Can».

    Quid des infrastructures hôtelières, hospitalières avec le relèvement ou la mise à niveau du plateau technique et surtout routières et aéroportuaires ? La situation sécuritaire n’échappe pas à l’attention des populations de la cité capitale du Nord-ouest. «Il faut déjà penser à la sécurité puisque ça pourra être un autre motif de retrait de la Can. Est-ce qu’en 2021, on peut être sûr que les matchs se jouant par exemple dans le Sud-ouest (Limbe) auront lieu sans problème? Quelle en est la garantie ? Qu’est-ce qui est fait pour ce dialogue inclusif qu’on attend?» interroge Pierre A. Pour Elvis Ndi Tsembom, «l’Egypte n’était pas mieux sur ce domaine avec le décès de l’ex président Morsi. Mais nous avons deux ans au Cameroun pour résoudre nos différends afin que la Can se déroule sans anicroche sur le plan sécuritaire. Avec les premiers pas de la médiation que nous avons observés en Suisse, je crois qu’on s’achemine vers la tenue du dialogue. Cette crise peut prendre fin à tout moment».

    La relève
    Sur le plan purement sportif Pierre A est d’avis qu’il faut éviter la chasse aux sorcières. «Seedorf et Kluivert auraient péché, c’est vrai, mais qu’est-ce que le Cameroun a fait depuis longtemps pour assurer la relève ? Où est la pépinière du football camerounais ? Où est le football jeune tant promis alors que la CAF et la FIFA ont tout un programme de sponsoring du football jeune?». Il ajoute : «s’il y a une pépinière, il faut penser à des coaches qui vont travailler sur la durée». Et de proposer : «on vient de se séparer des entraineurs expatriés, n’est-il pas temps de penser à des coaches nationaux?» La finale de la Can 2019 doit inspirer le Cameroun. Les deux pays finalistes, Sénégal et Algérie, étaient entraînés par les enfants du pays.

    Zéphirin Fotso Kamga

    Selon les Sénégalais

    Le «mauvais arbitrage a payé»

    Clichets de la finale de la Can au carrefour Tsinga Elobi, à Yaoundé.

     

    Il a suffi d’une frappe au parcours rocambolesque à la 2e minute, pour assombrir le ciel des compatriotes de Sadio Mané. Jugé inoffensif un peu hâtivement, le tir de Baghdad Bounedjah contré par Sané trompe la vigilance de Gomis (gardien) puis pénètre dans ses filets. Un silence assourdissant se fait retentir: le Sénégal est mené par 1-0.

    Les répliques de Sadio Mané et ses coéquipiers redonnent espoir aux supporters des Lions de la Terranga. «Le match c’est 90 min, nous ne sommes qu’au début de la rencontre, donc il y a encore du temps» lance Aboubakar très confiant. Cependant, les contre-attaques des poulains d’Aliou Cissé s’avèrent vaines au cours des 45 premières minutes. L’arbitre, sonne la fin de la période. Malgré tout, les supporters gardent espoir. «Le Sénégal va remonter le score pendant la deuxième mi-temps inch Allah», déclare Diallo.

    A la 60e, Adlane Guedioura manie le cuir de la main dans sa surface de réparation. «Pénalty !» s’écrient les supporters. Malheureusement, leur élan est stoppé par l’assistance vidéo: Aliou Alioum annule le pénalty et la balle est remise en jeu. « Ils veulent à tout prix nous faire perdre ce match » vocifère Diallo. Les minutes s’égrènent et l’équipe sénégalaise ne parvient pas à mettre une balle dans les filets du portier algérien. Le coup de sifflet final résonne et met fin au rêve sénégalais de remporter la Can 2019.

    Déçus les supporters se disloquent. «Je suis mécontent et triste parce que mon pays n’a pas gagné, mais je sais que nos joueurs ont fait de leur mieux», confie Aboubakar d’un air abattu. Il vient de perdre son pari de 10 000 francs. Il ne manque pas d’accuser l’arbitrage. Diallo, son compatriote, est aussi en colère : «c’est le Sénégal qui devait gagner ce match. Vous avez vu, on nous a refusé un pénalty ce n’est pas juste. Le mauvais arbitrage a payé».

    Joseph Julien Ondoua Owona, Stagiaire

  • Le foot ressoude le monde arabe

    Le foot ressoude le monde arabe

    De Tunis à Rabat, en passant par Tripoli et Nouakchott, ils ont été nombreux à supporter les Fennecs face aux Lions de la Téranga.

    Union maghreb arabe … du football

    L’image n’a pas échappé aux médias. «Alger est devenue la capitale de l’Afrique du Nord», écrit le Figaro dans une description des scènes de liesse en Mauritanie, au Maroc, en Libye et en Tunisie. «Un vrai élan transnational», constate l’Équipe. «Maghreb arabe, une union cousue par le foot», renchérit le magazine Onze Mondial. À comprendre qu’avec la victoire des Fennecs, ils sont tous devenus un, tous maghrébins, tous Algériens, tous arabes, tous unis, tous supporters de «Un, deux, trois, Viva l’Algérie». «Qu’ils soient membres de la diaspora ou nationaux, qu’ils soient tunisiens ou marocains, ils vibreront pour les Fennecs, étendard d’un soir d’une région qui va de Nouakchott à Tripoli. Et les images de ces foules en liesse prouveront qu’un destin commun existe. Il n’y aura plus de frontières ce soir. L’Union du Maghreb existera, sera un espace public commun, prouvant que les sociétés sont souvent en avance sur leurs dirigeants», projette Abdel Zoualihu, un politologue tunisien sur la chaîne Canal +.

    Grâce au football donc, un sentiment de fraternité souffle en Afrique du Nord. Au point où, souligne le site du journal Le Monde, deux autres pays étaient à fond derrière l’Algérie : la Tunisie et le Maroc (éliminé en huitièmes). «C’est Maghreb United ! se réjouit Sofiane. C’est trop beau. Ça donne de la force. Marocains, Tunisiens, Algériens, tous ensemble. Oh lala ! Si on gagne, ça va être chaud sur les Champs-Élysées chez vous. Ça sera la bouillabaisse maghrébine», rapporte le journal français.
    Pour Merry Krimau, ancien international marocain et consultant à Radio Mars, «il y a une complicité et une amitié entre nos deux pays. C’est logique de soutenir l’Algérie», a-t-il expliqué, non surpris de l’engouement à la frontière maroco-algérienne.
    Les supporters des deux pays se sont retrouvés pour faire la fête et réclamer la réouverture de cette frontière, alors que les deux nations sont brouillées depuis 1994. «C’est ça le sport, c’est ça le foot. Ça crée un lien entre les peuples», a-t-il résumé.

    Parce que le parcours des Fennecs a resserré ce lien, la classe intellectuelle s’en félicite. «Le Maghreb, c’est le même peuple qui a été découpé de façon bizarre par les colons, a noté le sociologue algérien Nacer Djabi sur Radio France internationale (RFI). C’est la même tradition, la même culture, la même religion». Il rappelle également que, dans les années 1920, le mouvement nationaliste algérien qui exigeait l’indépendance s’appelait L’Étoile nord-africaine. Ainsi, cette ferveur maghrébine à laquelle on assiste actuellement, «c’est la continuité de l’histoire. Les peuples sont très proches et expriment ce sentiment dans des moments de joie ou de difficulté», a ajouté Djabi.

    Ongoung Zong Bella

     

    CAN des peuples

    L’Afrique a communié

    Internet est la seule plateforme qui a offert un brassage des populations actif à l’occasion de cette CAN.

    La Can regardée à Kye Ossi par les festivaliers de la foire Cemac

    Loin des stades, les réseaux sociaux ont permis un brassage des nations. Entre rivalité, respect et congratulations, la vibration fut digne des gradins de Can. L’une des plus belles rivalités fut entre Sénégalais et Camerounais. Malgré l’absence d’une confrontation comme en 2017, les déclarations de Habib Beye, consultant de la chaine Canal plus sport, ont servi de prétexte à la rivalité. Sur un plateau de l’émission Talents d’Afrique de la chaine, l’ancien international français d’origine sénégalaise avait déclaré que le Cameroun avait gagné la plus faible Can de l’histoire (2017), oubliant peut-être que le Cameroun avait éliminé le Sénégal en quart de finale. Après l’élimination du Cameroun par le Nigéria, il avait rajouté une couche en provoquant sur Twitter son collègue consultant et ancienne gloire des Lions indomptables Patrick Mboma. Entre Camerounais et Sénégalais, ça a chahuté jusqu’à la défaite des Lions de la Teranga en finale.

    Sur le réel
    La Can a permis de voir des chefs d’État se féliciter. C’est le cas, après le match Mali-Côte d’Ivoire ou Bénin-Nigeria. Au soir de la finale, le Roi Mohammed VI du Maroc a salué « la victoire méritée » de l’Algérie sur le pays de son frère le président Macky Sall. En faisant fi des relations froides entre Alger et Rabat, notamment sur le dossier de l’indépendance de la RASD, le Roi du Maroc tente peut-être une normalisation.

    L’Union africaine, même absente en finale, a tenu à féliciter les finalistes et l’organisation. Le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, l’a exprimé dans un tweet une fois la finale terminée. Président en exercice de l’organisation continentale et président de la République Arabe d’Égypte, le général Al Sissi s’est fait représenter.

    Zacharie Roger Mbarga

    Les potins

    « Buteurs »
    À la Can 2019, quatre joueurs ont marqué contre leur camp. Une statistique ironique, mais cela a eu des répercussions sur l’aventure de ces équipes. Parmi ces « buteurs », il y a le Namibien Itamunua Keimuine. Contre sa sélection, il a marqué face au Maroc. Alors que le match de la première journée du groupe D se dirigeait vers un match nul, Itamunua Keimuine « ouvre le score » à la 93e minute et offre une victoire inespérée aux Lions de l’Atlas.

    Le Tunisien Rami Bedoui marque un CSC à la 91e minute face au Ghana en 8e de finale. Même si la Tunisie a fini par gagner après la séance de tirs au but, ce but a permis aux Ghanéens de revenir dans le match. Dylan Bronn, un autre Tunisien marque un CSC dans les prolongations face au Sénégal en demi-finale. C’est ce but qui prive les Aigles de Carthage de la finale.
    Le Nigérian William Troost-Ekong inscrit un CSC face à l’Algérie en demi-finale. C’est le but de l’ouverture du score.

    Distinctions
    Ismaël Bennacer a ainsi été élu meilleur joueur. Le titre de meilleur gardien a été remis à l’Algérien Raïs M’bolhi, tout comme celui d’Homme du match pour la finale. Le Sénégalais Krépin Diatta, quant à, lui, a reçu le titre de meilleur jeune de la Can 2019. Enfin, l’équipe entière du Sénégal est repartie avec le Prix fair-play.

    Cissé et Belmadi
    Le Sénégalais et l’Algérien ont été les deux premiers coaches africains à s’affronter en finale depuis 1998. Au-delà de leurs points communs -même âge (43 ans), même ville d’enfance, même carrière de joueur en France-, ils incarnent la nouvelle vague des talentueux techniciens issus du cru.

    Ahmad
    La question du transfert du siège de la Caf de l’Égypte vers une autre capitale africaine refait surface. En Égypte, Ahmad Ahmad s’est prononcé sur ce sujet, lors de son point de presse : «La Caf n’a pas de statut juridique, en l’absence d’un document de propriété. Nous vivons dans une situation très grave. Tant que l’Égypte ne nous donnera pas d’accord de siège, tout peut arriver et je suis inquiet. Ce qui m’est arrivé en France est normal. C’est la conséquence du vide juridique dans lequel nous sommes qui a conduit à cette situation. Je n’en veux à personne. Je lance un appel à tous pour que nous allions à la normalisation de cette situation», a expliqué le Malgache.

    Synthèse OZB

    Vestiaires

    CAN 2019

    La guerre des étoiles n’a pas eu lieu !

    Malgré quelques découvertes, les meilleures sélections africaines de football et leurs stars n’ont pas enflammé la compétition.

     

    L’Algérie est un beau champion. C’est l’équipe ayant pratiqué le meilleur football du tournoi. Les fennecs nous ont réconciliés avec le football. Mais c’est une compétition sérieuse qui s’est achevée au Caire vendredi dernier. À l’image de la finale, la qualité de jeux de l’édition 2019 de la Coupe d’Afrique des Nations n’a pas été à la hauteur des attentes. Avec une moyenne de 1,98 but par match, c’est moins bien que toutes les précédentes éditions depuis 2010, où on a toujours été supérieur à 2 buts de moyenne. La tendance est donc à la baisse. On est loin des 2,45 buts par match de la CAN 2010. C’est globalement une stratégie de neutralisation qu’ont adoptée plusieurs sélections.

    Tactique contre tactique
    Lorsqu’on a regardé la finale de la Can 2019, on a un gout d’inachevé. Deux équipes méfiantes et craintives qui n’ont pas pris le match à leur compte. Avis partagé par Martial Yéo, ancien sélectionneur de la Côte d’Ivoire, championne d’Afrique en 1992. Sur le site de Jeune Afrique, il dit : « nous n’avons pas assisté à un beau match. Ça a été haché, tendu, physique. Peut-être que l’arbitre a mis un peu trop de temps pour sortir son premier carton ». Et c’est le sentiment qui ressort de l’ensemble de la compétition.

    Les équipes ont essentiellement évolué très bas, adoptant des stratégies défensives. Quelques rares équipes telles que l’Algérie n’ont pas refusé le jeu en pratiquant un jeu porté vers l’avant. L’une des surprises dans ce registre fut sans doute le Maroc d’Hervé Renard. Se reposant sur ses véloces joueurs des côtés, les lions de l’atlas ont pratiqué un jeu plus offensif, contrairement au système de jeu souvent proposé par le technicien français. Par contre, une affiche telle que Ghana-Cameroun en phase de poule restera sans doute l’une des déceptions. Le remake de la demi-finale de l’édition 2017 s’est soldé sur un triste 0 but partout. L’on a vu un champion en titre dans un schéma expérimental qui a refusé le jeu pendant les 3 quarts de la rencontre.

    Globalement, ce fut une compétition de contre-attaque, où les actions ont souvent été très peu préparées. Le ballon a peu circulé. On a tenté moins de dribbles. Pour indicateur, rares sont les milieux de terrain qui ont dominé la compétition. Les têtes d’affiche ont-elles fondu dans le système ? On aura finalement moins vu Salah, Ziyech et même Mahrez ou Mane. En fin de saison, il fallait aussi s’y attendre !

    Belles surprises
    Conséquence du passage à 24 équipes, la Mauritanie, Madagascar, le Burundi et le Bénin ont été les belles curiosités de la compétition. Si la Mauritanie et le Burundi n’ont pas connu une longue aventure, elles ont fait sensation par leur audace et la qualité du jeu pratiqué. Confirmant, par le fait même, que le clivage grande/petite équipe est d’une autre époque. On retiendra sans doute l’épopée de Madagascar et du Bénin. Pour les premiers, tout a commencé avec la défaite infligée aux Eagles du Nigéria. Leur parcours s’achèvera par un merveilleux quart de finale pour une toute première participation. La suite nous dira si ce fut la chance du débutant. Le Bénin a lui aussi déjoué les pronostics. Après avoir historiquement enregistré son premier point dans la compétition, le quart de finale fut l’asymptote de cette odyssée.

    Ambiance de monastère
    La fête du football africain a connu un gros point d’ombre au tableau. L’ambiance dans les stades était digne des retraites de prélats, avec des gradins déserts mis à part les matches du pays hôte et la finale. Les tensions sécuritaires semblent avoir eu raison de l’ambiance festive que revêtent toujours les matches de la Can. S’ajoute également le prix des places, jugé trop cher. L’élimination précoce des Pharaons a aussi plombé l’ambiance au Caire. Le président de la CAF, Ahmad Ahmad, a déclaré qu’il préférait voir des tribunes vides plutôt que déroger au plan de sécurité des autorités.

     

    Zacharie Roger Mbarga

     

    Après la victoire des Fennecs

    Le roi du Maroc Mohammed VI exprime sa « fierté »

    Même si elle survient après 29 ans d’attente et d’espoirs, la victoire de l’Algérie a été chaudement saluée par le monarque chérifien.

    Dans un message adressé au président par intérim algérien Abdelkader Bensalah, le souverain chérifien a félicité le «peuple algérien frère» pour la «victoire bien méritée» des Fennecs en finale de la CAN, au soir du 19 juillet 2019. Mohammed VI salue un «exploit footballistique continental» et exprime ses «sentiments de fierté» ainsi que ses «sincères expressions d’estime […]». Il ajoute: «Suite à cette grande distinction sportive, je ne peux qu’exprimer au peuple algérien frère, et à travers lui, à l’ensemble des composantes de sa sélection nationale-joueurs, staff technique, médical et administratif, les sincères expressions d’estime et de considération pour cette performance technique de haut niveau et l’esprit de compétition élevé dont a fait montre cette sélection, ambitieuse tout au long des matches de ce championnat africain distingué».

    Pour une partie de la presse marocaine, c’est un soutien fraternel et sincère dont les racines plongent dans l’histoire partagée entre les deux peuples, notamment durant la guerre d’indépendance.

    Ce n’est donc pas étonnant si le Roi Mohammed VI a tenu à souligner dans son message : «En cette occasion historique, il m’est agréable de partager, en mon nom propre et au nom de l’ensemble du peuple marocain, les sentiments de fierté pour cet exploit mérité avec le peuple algérien frère, surtout qu’il s’agit de la victoire d’un pays maghrébin voisin et frère dont la consécration est celle du Maroc»

    Les peuples marocain et algérien sont très proches culturellement, malgré les relations conflictuelles qu’entretiennent leurs pays respectifs, séparés par une longue frontière de 1 500 km, fermée depuis 1994.

    Depuis plus de 40 ans, les rapports entre les deux poids lourds du Maghreb sont plombés par la question du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole, revendiquée par Rabat -qui en contrôle la majeure partie- et par le Polisario, soutenu par l’Algérie, qui réclame un référendum d’autodétermination.

     

    Jean-René Meva’a Amougou

    CAN à 24

    Une expérience à enrichir

    Si l’on retient l’ouverture de la compétition à plus de talents, l’arrimage technologique et la mobilisation demeurent des défis.

     

    24 équipes, 6 sites de compétition, 101 buts marqués, deux coachs africains en finale, la Can 2019 vient de livrer son épilogue. De l’inédit à plus d’un titre. Il est évident que la compétition a franchi un palier. Elle se rapproche de plus en plus du standard de son ambition. Toutefois, plusieurs réglages s’imposent.

    Le pari du nivellement
    Les bons points de l’élargissement à 24 équipes ont été perçus. Plusieurs nations ont pu prendre part à la compétition et démontrer leur savoir-faire. Désormais, elles pourront avoir des prétentions. Ainsi, la Can s’est un peu plus connectée au continent. Pour le développement du football africain, c’est une opportunité d’exposer plus de talents. Plusieurs fédérations pourront avoir des prétentions afin d’amorcer un certain développement socioéconomique.

    VAR
    L’arbitrage n’a pas été très critiqué, à l’exception de quelques cas. Mais pour une compétition internationale aussi suivie que la Can, l’arrivée de l’arbitrage vidéo au stade des quarts de final sonne faux. Est-ce à dire que les précédentes phases de la compétition sont d’un intérêt secondaire ? Il faudra corriger cela pour ne pas renvoyer le sentiment d’une compétition à deux vitesses.

    Une fête pas courue
    Le football est un spectacle populaire et la Can c’est la fête du football africain. Depuis l’édition 2017 au Gabon, la récurrence des stades vides entache considérablement l’image de la compétition. Le manque de ferveur dans les stades glace les acteurs, les empêchant quelque peu d’emballer les matches. Le témoignage du rappeur Youssoupha en dit long : « Les stades sonnent creux, très très creux même. Je pense qu’on en est arrivé là à cause de l’organisation et du déplacement au dernier moment du Cameroun vers l’Égypte. Ça change toute la logistique et tout le monde sait que sur le continent c’est très difficile de se déplacer. Ce que je déplore c’est que, de l’extérieur, les gens peuvent penser que personne ne s’intéresse à cette compétition, alors que c’est plus passionnant que l’Euro. La terre s’arrête quand il y a la CAN et je suis très déçu des images que je vois, car l’Égypte est un grand pays de football. Il faut que la CAF trouve un moyen d’y remédier ».

    Zacharie Roger Mbarga

     

  • Lions indomptables, encore une enquête…

    Lions indomptables, encore une enquête…

    Suite à la débâcle de l’équipe de football fanion du Cameroun à la dernière Coupe d’Afrique des nations (Can), Paul Biya remet une ancienne formule pour en savoir davantage.

    Les Lions indomptables à la Can 2019

    C’est officiel depuis le 15 juillet 2019. À la tête des Lions indomptables depuis août 2018, Clarence Seedorf et Patrick Kluivert n’ont pas pu mener leur sélection vers un deuxième sacre consécutif lors de la dernière édition de la Can. En plus de satisfaire de nombreux supporters camerounais, la publication de cette information semble avoir pris un autre tournant à Etoudi. Du «Supplément confidentiel Afrique Media», l’on apprend que Paul Biya, le chef de l’État camerounais, a instruit des enquêtes sur le contrat des deux Néerlandais.

    Ces investigations, initiées depuis la présidence de la République, viennent davantage donner un sens aux déclarations de Narcisse MouelleKombi sur l’antenne TV de la CRTV. Présent sur ce média à capitaux publics, le ministre des Sports et de l’Éducation physique (Minsep) s’était alors montré très amer à l’égard des deux techniciens. «Son taux de victoire avec les champions d’Afrique 2017 est seulement de 33 %. Seedorf et son adjoint n’ont remporté que quatre de leurs douze matches à la tête du Cameroun», évaluait le Minsep.

    Il n’aura pas fallu attendre bien longtemps pour voir la Fédération camerounaise de football réagir. Par le biais d’un communiqué, la Fecafoot a officialisé le départ du duo Clarence Seedorf-Patrick Kluivert, qui était arrivé à la tête des Lions indomptables le 4 août 2018. «La Fédération camerounaise de football a, conformément aux stipulations des clauses résolutoires de leurs contrats de travail respectifs, décidé de mettre fin aux fonctions de l’entraîneur-sélectionneur Clarence Clyde Seedorf, et de l’entraîneur adjoint Patrick Stephan Kluivert, à compter de ce jour». Les deux hommes quittent le Cameroun sur un bilan de 4 nuls, 3 défaites et 3 victoires en 10 matches.

    Flou
    Selon une certaine opinion, ce bilan est suffisant pour susciter une vive colère à Etoudi. Dans ce haut-lieu, révèle le «Supplément confidentiel Afrique Media», l’on s’intéresse aux coulisses du recrutement du duo néerlandais. Derrière une galaxie de profils internationaux, des histoires de transferts toutes plus rocambolesques les unes que les autres : commissions farfelues, manœuvres fiscales, banquier occulte, pots-de-vin…

    Pour l’instant, rien ne filtre sur le visage des personnes chargées de ladite enquête ; même s’il se murmure que celle-ci sera coordonnée à partir du premier ministère. Comme en juin 2014. À cette époque-là, Paul Biya, avait confié à Philémon Yang (alors Premier ministre) le soin de mener des «investigations» sur les mauvais résultats (3 défaites, 9 buts encaissés et 1 seul inscrit) qui ont abouti à l’élimination précoce des Lions indomptables au Mondial brésilien. Dans un communiqué, la présidence de la République indiquait que la commission mise sur pied disposait d’un mois pour lui remettre les conclusions de son enquête, ainsi que des «propositions en vue d’une restructuration profonde et urgente du football camerounais».

    L’on se souvient que cette expédition foireuse avait également délié les langues dans les rangs des joueurs et de certains encadreurs. Pour la Can 2019, le scénario semble le même. Les révélations «audios» de l’international camerounais Boumal ces derniers jours en disent long. Ce dernier ne manque pas d’accuser l’influence d’Eto’o sur les choix de Clarence Seedorf. À côté de cela, c’est un éditorialiste camerounais qui fait de fracassantes révélations sur la non-titularisation de Zambo Anguissa, pour le compte du match Cameroun-Nigéria. Selon ce dernier, cela était dû aux caprices d’un « individu » -Eto’o- qui a estimé que «Zambo Anguissa ne l’a pas salué avec beaucoup de déférence et d’élégance».

    Jean-René Meva’a Amougou

    Clap pour les sélectionneurs locaux

    Djamel Belmadi, le coach algérien, a conduit les Fennecs vers leur deuxième sacre. D’aucuns y voient un beau signal pour le foot du continent.

     

    La finale 2019 de la Can a eu une saveur toute particulière, puisqu’elle mettait aux prises deux effectifs ayant à leur tête deux entraîneurs locaux: Djamel Belmadi et Aliou Cissé. Les deux hommes ont réussi le pari de mener leur équipe respective jusqu’en finale de la compétition, confirmant ainsi la tendance portée sur les entraîneurs locaux. Il faut remonter à 1998 au Burkina Faso et à la rencontre opposant l’Afrique du Sud à l’Égypte pour retrouver la trace de deux entraîneurs nationaux sur les bancs d’une finale (le Sud-Africain Jomo Sono et l’Égyptien El-Gohary).

    L’extinction des «sorciers blancs»
    Depuis la création de la Can en 1957, les coachs non africains ont longtemps été privilégiés par les fédérations. Sur les 24 équipes qui ont disputé le tournoi en Égypte, près des deux tiers comptaient à leur tête un sélectionneur étranger (14 sur 24). Une tradition du «sorcier blanc» qui perdurait malgré l’émergence des sélectionneurs locaux. Pourtant, si l’on jette un coup d’œil aux statistiques, les marabouts africains comptent quasiment autant de victoires que leurs homologues sorciers blancs: 15 contre 16 lors des 31 précédentes éditions de la Can. Et cette année, ceux qui avaient préféré miser sur des compétences extérieures ont complètement manqué leur pari.

    De quatre entraîneurs locaux à la Can au Gabon en 2017, le nombre de techniciens du cru est passé à 10 lors de la présente édition en Égypte, soit plus d’un tiers des coachs de la compétition. De plus en plus, les fédérations africaines font confiance aux entraîneurs africains, de mieux en mieux formés et de plus en plus performants. Cameroun, Maroc, Égypte, Tunisie, Nigéria, voilà autant de grandes nations du football africain qui avaient décidé d’opter pour des entraîneurs «non africains» cette année. Et aux vues de leurs résultats s’en mordent les doigts aujourd’hui. On est encore plus confus à l’idée qu’ils touchaient, selon nos confrères de Jeune Afrique, plusieurs millions par mois. De la part des autorités égyptiennes, le choix est d’autant plus incompréhensible que cinq des sept trophées africains remportés par les Pharaons l’ont été avec des techniciens locaux.

    D’ailleurs, en incluant cette édition 2019, il faut préciser que les entraîneurs locaux et ceux de l’étranger sont à égalité parfaite en ce qui concerne la Can. Chaque groupe aura eu 16 victoires. C’est à se demander sur quels critères les responsables des fédérations africaines reposent leur penchant trop prononcé pour les sorciers blancs.

    Ongoung Zong Bella

    Emportés par la Can 2019

    Pour « résultats décevants et autres scandales, quelques sélectionneurs ont perdu leurs places sur les bancs de touche. Liste exhaustive.

     

    Paul Put (Guinée)
    Éliminés en 8e de finale de la Can par les Fennecs (3-0), le Syli national (Guinée) s’est séparé de son sélectionneur depuis 16 mois, le Belge de 63 ans Paul Put, également impliqué dans une affaire de corruptions au sein de la sélection nationale.

    Emmanuel Amunike (Tanzanie)
    D’origine nigériane, l’ex-footballeur Emmanuel Amunike a été nommé sélectionneur de la Tanzanie le 6 août 2018. Ses performances n’ont pas séduit, il a été renvoyé peu après la sortie prématurée des Taifas Stars en phase de poule.

    Javier Aguirre (Égypte)
    D’août 2018 à juillet 2019, Javier Aguirre Onandia a tenté de se montrer digne des attentes placées en lui, mais ça n’a pas véritablement payé. L’élimination de l’Égypte en 8e de finale de la Can 2019 face à l’Afrique du Sud, l’a poussé à la sortie.

    Sébastien Desarbres (Ouganda)
    Le Français de 42 ans a servi l’équipe ougandaise de 2017 à 2019. S’il a réussi l’exploit de mener l’Ouganda au deuxième tour de la présente Can, un fait rare depuis 1978, il a été remercié suite à l’élimination en huitième de finale de l’équipe face au Sénégal.

    Source : Afrik Foot

  • Spectacle sans spectateurs

    Spectacle sans spectateurs

    Jusqu’ici, à l’exception des matches de l’Egypte, le pays hôte, les affiches de la Can se sont tenues devant des affluences dérisoires.

    Egypte 2019: le public clairsemé dans les tribunes

    Le 22 juin dernier, ils n’étaient que 1 083 spectateurs présents dans l’immense stade international du Caire (74 000 places) pour assister à la rencontre entre le Congo et l’Ouganda. «Une affluence ridicule et inférieure à celle des matches du dimanche en National, le troisième échelon en France», commente Gilles Festor, le reporter du Figaro à Egypte 2019. Il ajoute : «le phénomène des tribunes tristement vides à la Can 2019 en Egypte n’est pas un cas isolé. Il est même devenu la norme. Depuis l’ouverture du tournoi le 21 juin, la majorité des rencontres se sont tenues devant moins de 10 000 spectateurs». Il a raison. Sur la foi des statistiques disponibles sur le site officiel de la Confédération africaine de football (Caf), quelques exemples du premier tour l’indiquent en tout cas. 4 364 pour Zimbabwe-Togo, 3 192 pour Nigéria-Burundi, 4 961 pour Côte d’Ivoire-Afrique du sud ou encore 5 983 pour la rentrée dans la compétition du Cameroun, tenant du titre face à Guinée Bissau. Seules les affiches avec le pays organisateur ont ramené à chaque fois plus de 70 000 spectateurs. Et ce n’est pas l’élimination des Egyptiens en 8es de finale qui a contribué à ramener du monde dans les enceintes.

    Un mal structurel
    Le manque de supporters est un vrai problème pour les organisateurs alertés sur le sujet. «Tout le monde aimerait jouer dans un stade plein mais ce n’est pas le cas malheureusement», a déploré sur BeinSport Djamel Belmadi, le coach algérien. Selon Canal +, il y a deux ans, le pays hôte, le Gabon, avait réussi à sauver les apparences en distribuant de façon massive des billets gratuits mais certains matches s’étaient disputés devant moins de 2 000 spectateurs en phase de groupes (1 800 pour un Tunisie-Zimbabwe par exemple). Le taux de remplissage des stades pour les Can se situe en général bien en dessous de 50%.

    Plusieurs raisons conjoncturelles expliquent l’absence du public en Egypte. La première concerne les prix des billets jugés prohibitifs allant de 100 à 500 livres égyptiennes ( environ 17 000 francs CFA). La grille tarifaire avait provoqué la colère des supporters locaux et étrangers. Le spectre des tensions sécuritaires, qui accompagne la Can depuis le début de la compétition a probablement contribué à dissuader certains de faire le voyage jusqu’en Égypte. La haute surveillance policière n’autorise aucun écart de conduite. Les autorités ont même expulsé un fan pour avoir brandi une pancarte pro-contestation lors du premier match… Enfin l’attribution très tardive du tournoi à l’Egypte, en janvier dernier seulement après le retrait du Cameroun en novembre dernier, n’a facilité l’accueil des supporters étrangers.

    Des associations en renfort
    Est-on condamné, alors, à assister à des rencontres dans des stades fantômes jusqu’en finale, le 19 juillet. Les Égyptiens se sont désintéressés de l’événement. La veille de la sortie des Pharaons cette désillusion, le secrétaire général de la Caf, Mouad Hajji, avait annoncé que les organisateurs allaient faire appel aux associations caritatives pour remplir les stades en invitant «des enfants, des personnes âgées et des personnes à mobilité réduite.» Mais, selon la Caf, il n’y avait que 6 950 spectateurs pour le 8es de finale Ouganda-Sénégal, 7 500 pour Maroc-Bénin et 10 000 seulement pour l’affiche Nigéria-Cameroun.

    Bobo Ousmanou

    Assistance vidéo à l’arbitrage (VAR)

    La high-tech en procès

    Utilisée au cours de la Can 2019, chacun parmi les spécialistes et simples adeptes du football l’accueille à sa manière.

    Depuis son adoption par la Fédération internationale de football (FIFA), la VAR n’a pas toujours fait bon ménage avec le foot africain. Durant la dernière Coupe du monde masculine, certaines sélections, Maroc en tête, ont critiqué avec virulence son usage, jugé partial et malhonnête. De fait, il y en a qui sont foncièrement sceptiques. Le Sénégalais Sanif Sané qui a déjà connu ce système durant la coupe du monde 2018, l’est particulièrement. «Je ne suis pas trop fan. Ça peut nous aider comme ça peut nous pénaliser. De toutes les façons, on n’a pas le choix. On va faire avec. Mais on ne va pas se fier à la VAR», a-t-il déclaré le 14 juillet 2019 sur RFI (Radio France internationale).

    Le sélectionneur adverse, Michel Dussuyer, se montre plus réceptif: «Je dirais que l’utilisation de la VAR est un plus pour le football. Ça vient corriger des injustices, par moment. Je le vois comme un effet positif. Après, un jour ça peut vous servir, et un autre jour ça peut vous desservir… Mais, fondamentalement, je pense que c’est une bonne avancée. J’espère jute que ça va fonctionner jusqu’au bout et qu’il n’y aura pas de problèmes techniques.»

    «Nous avons pris le risque de l’utiliser et ça avait très très bien fonctionné jusqu’à que nous rencontrions certaines difficultés», estimait pourtant Anthony Baffoe, le Secrétaire général adjoint de la Caf en change du développement du football.

    La Caf se veut rassurante
    Le sujet reste sensible. La Caf s’est donc montrée rassurante tout au long de la Can 2019. «Nous avons pris toutes les mesures nécessaires, pour que cela fonctionne et que nous ayons un support, a assuré Baffoe, lors d’une conférence de presse au début de la compétition. C’est très important. Les arbitres qui travaillent dans le groupe sur la VAR sont déjà au boulot depuis un certain temps».

    «Au départ, la VAR était destinée à la finale, a récemment rappelé le Secrétaire général de la Caf, Mouad Hajji. Mais le Comité exécutif a décidé que le dispositif devait être utilisé à partir des ¼ de finale. C’est déjà un pas important. Car l’utilisation de la VAR nécessite du matériel mais aussi de l’expertise. Nous sommes en train de mettre en place des formations pour que les arbitres puissent être homologués VAR».

    Le chef de l’administration a conclu : «Je peux vous assurer que tout se passe bien. Tout le matériel a été réceptionné. Des essais ont été effectués. […] Des solutions de rechange sont prévues au cas où il y aurait une déficience de l’un des systèmes. Mais tout est en place. Les autorisations de l’IFAB sont là. Donc, pour l’instant, rien à signaler. Tout se passe dans les meilleures conditions».

    Bobo Ousmanou

    Baba Cissouma, le «Can trotter»

    En collaboration avec l’Association Internationale de la Presse Sportive Afrique et l’Association Egyptienne de la Presse Sportive, a honoré certains hommes de médias le 13 juillet 2019 en Egypte. Cette année, le Malien Baba Cissouma a été récompensé le seul journaliste répondant au critère de «couverture de 10 Can au moins». L’heureux récipiendaire est titulaire de plusieurs casquettes : vice-président de l’Association des journalistes sportifs du Mali (AJSM), journaliste sportif à la radio Maliba FM et directeur et promoteur du journal Match.

    Sa récompense consiste en un trophée original et en un prix de 8 000 USD; le deuxième recevra 3 000 USD et le troisième, 2 000 USD, dans les catégories Photographie («Action sportive» et «Portefolio»), Ecriture («Meilleure chronique» et «Meilleur article de reportage»), Audio et Vidéo («Profil de l’athlète»), Documentaire et Court métrage. Les gagnants de la catégorie «Jeune reporter» en Photographie, écriture et radiodiffusion) se verront offrir une opportunité de carrière: une bourse dans un grand événement sportif international. La catégorie «Jeune reporter» n’inclut pas de deuxième et de troisième places.

    Les «prix spéciaux» ne sont pas ouverts aux candidatures. Les gagnants seront récompensés avec un trophée, sans argent. La catégorie «Prix spéciaux» n’inclue pas de deuxième et troisième places.

     

    Dans les communautés : Kyé-Ossi

    La Can… en terre ceinte par le noir

    La ville frontalière vit le tournoi dans l’obscurité. Les populations frisent le craquage nerveux et l’asphyxie.

    Kyé-Ossi… la Can autrement

    À Kyé Ossi, le 25 juin 2019, des jeunes, frustrés de ne pas pouvoir assister au match Cameroun-Guinée Bissau comptant pour la première journée de la poule F, tant attendu, se sont saisi de pneus. Scandant des mots d’ordre hostiles à Yaoundé, ils ont tenté de bloquer la chaussée menant à la sous -préfecture. L’incident est passé. « Heureusement ! », affiche bruyamment un jeune. Selon la chronique locale, le courant est revenu, quelques minutes avant le début de la rencontre opposant les Lions indomptables aux Djurtus.

    Stratégie
    Près du grand carrefour qui jouxte le poste frontalier Cameroun-Guinée Equatoriale, ce 27 juin 2019, les gens se gaussent et ironisent sur les horaires du courant, «qui repart en courant». Ici à Kyé Ossi, ce jeu de mots est à la fois facile et fréquent. «L’électricité est généralement octroyée pendant la durée de la retransmission des matches de l’équipe du Cameroun, c’est-à-dire vers la tombée de la nuit, vu le décalage horaire avec l’Egypte», affirme Seydou Mahama, tenancier d’une vente à emporter dotée d’un puissant groupe électrogène. A dire vrai, l’important est conjoncturellement là: l’électricité demeure tant que les matches des Lions indomptables durent. «Après ça, l’effervescence retombe. Le noir revient, repoussant à une autre échéance la solution de fond de l’alimentation en énergie électrique, régulière et suffisante, à laquelle aspirent tous les habitants de Kyé-Ossi», avance, sous anonymat, un cadre communal.

    Depuis le début de la Can 2019, dans cette ville située aux confins du Sud-Cameroun, la fourniture d’énergie est organisée en fonction du calendrier des rencontres. C’est l’un des mécanismes d’adaptation à la pénurie. L’autre solution, c’est le groupe électrogène. Un grand nombre de fans du football ont opté pour la convivialité en désertant leurs domiciles, préférant regarder le match entre amis, dans des bars ou dans les fan-zones. «Là-bas, détaille Amadou, les groupe puissants fonctionnent jusqu’à très tard dans la nuit», au profit semble-t-il, du nombre de bières consommées qui explose. Une voix situe même sur «la réservation des places au bar».

    Dans certains grands lieux de vie de la ville, impossible de réserver quand ce quota est atteint. Un phénomène dont de nombreux témoignages assurent qu’il s’intensifie à la veille des matches des Lions indomptables. Devant cette situation, tous les moyens semblent bons pour promouvoir d’autres moyens d’avoir une place assise dans un bar. «Quand le Cameroun doit jouer, raconte John Kimbong, j’envoie mon fils avec de l’argent tôt le matin. Il s’assoie là-bas pour me réserver une place proche de la télé».

    L’occasion faisant le larron, pour gonfler leur portefeuille de clients avant une sortie des Lions indomptables, quelques propriétaires de bars font le démarchage à domicile, une technique commerciale particulièrement agressive, s’exerçant souvent sur des populations économiquement très fragiles ou en grande précarité énergétique. «Ils viennent te trouver ici sur place, tu leur donnes 500 francs pour avoir une place le soir et après tu te retrouves debout au milieu des gens qui fument un mauvais tabac», s’emporte Célestin Essouma, un quinquagénaire sans emploi.

    Ailleurs, dans ce contexte de délestage fréquent, tout fonctionne à pas de caméléon. Dans une économie déjà bien fragile du fait du «yoyo» à la frontière, le carburant se fait rare. L’argent aussi. Ici, le soleil ne décline pas, il tombe. Dès qu’il disparaît, une nuit d’encre engloutit les quartiers pauvres. «De quoi friser le craquage nerveux et l’asphyxie, quand on a un groupe électrogène à sec, synonyme de privation de matches autres que ceux livrés par le Cameroun», s’emporte un autre cadre communal. Alors, l’option de l’énergie solaire brille dans les esprits. Là encore, ce sont les plus nantis qui en disposent. Pour visionner les matches de la Can 2019, certains forcent le contact. «C’est solidarité, on tente de se faire potes avec ces gens, c’est la débrouille!», affirme en riant Ernest Sohaing.

    Jean-René Meva’a Amougou, à Kyé-Ossi

     

    Talent

    Samuel Chukwueze

    Plus jeune bourreau des filets

    A 20 ans et 49 jours, il est devenu le plus jeune buteur du tournoi cette année grâce à sa réalisation contre l’Afrique du Sud, dans une rencontre où il a été élu homme du match. Parcours et profil d’une étoile montante.

    Une ascension fulgurante. Il a 20 ans à peine, aurait dû disputer la Coupe du monde U20. Mais Samuel Chukwueze a inscrit son premier but avec le Nigeria en quart de finale de la Can 2019 et propulsé les «Super Eagles» en demi-finale face à l’Algérie.
    Son but a permis aux Nigérians de rallier le dernier carré de la compétition, un stade qu’ils n’avaient plus atteint depuis leur sacre en 2013. Mais il marque surtout une étape importante dans sa carrière.

    Sacré champion du monde U17 avec le Nigeria en 2015, l’ailier est convoité par Arsenal, mais finit par rejoindre Villarreal en 2017. Après une saison correcte en deuxième division, il explose en Liga: un but lors du mémorable 4-4 contre le Barcelone de Messi en avril, et le but de la victoire contre Gérone dans le même mois, qui évitera la relégation à son équipe.

    S’il ne tient pas encore la comparaison avec l’Argentin, les qualités du jeune Nigérian se rapprochent de celles d’un autre gaucher dévastateur: le jeune retraité Arjen Robben.

    Chukwueze, fan du Néerlandais quand il était petit, se satisferait bien de la moitié de l’immense palmarès de Robben, huit fois sacré en Bundesliga et une fois en Ligue des Champions (2013) avec le Bayern, finaliste de Coupe du monde (2010) et vainqueur des championnats anglais, espagnol et néerlandais avec Chelsea, le Real Madrid et le PSV Eindhoven.

    «Il a une qualité débordante, que tu ne peux pas arrêter, c’est comme une rivière», s’enthousiasme Miguel Alvarez, l’entraîneur de l’équipe réserve de Villarreal qui a aidé Chukwueze à faire le grand saut vers l’équipe première en 2018.

    Bientôt l’un des meilleurs
    «Chukwueze a un bon pied gauche, il est rapide, a un centre de gravité assez bas -ce qui lui donne un bon sens de l’équilibre- et il peut passer ou marquer», abonde le sélectionneur du Nigeria Gernot Rohr.

    Il n’avait pas été appelé pour le Mondial-2018, où le groupe nigérian, très jeune, n’avait pas réussi à passer la phase de poules. Mais Gernot Rohr assure que la maturité engrangée l’an dernier et l’arrivée de nouveaux talents comme Chukwueze permettra au Nigeria de retrouver sa place parmi les meilleures nations du football africain.

    Source TV5.org

    Can du fric

    Le Nigerian Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique, a promis de donner 50.000 dollars (44.400 EUR) pour chaque but que l’équipe nigériane inscrirait en demi-finale de la CAN 2019 contre l’Algérie, dimanche au Caire (20h00), annoncé le président de la Fédération nigériane de football à ses joueurs.

    Le président de la NFA Amaju Pinnick a également annoncé que Femi Otedola, un magnat du pétrole nigérian, avait lui aussi promis de récompenser les hommes de Gernot Rohr, à hauteur de 25.000 dollars par but inscrit pendant le restant de la compétition.

    Les dons aux Super Eagles affluent de la part des Nigérians les plus fortunés depuis qu’ils ont atteint le dernier carré de la CAN-2019, en battant l’Afrique du Sud (2-1) mercredi.

    Chaque joueur a déjà reçu au moins 72.000 dollars de bonus et de dons grâce aux performances exceptionnelles de l’équipe dans le tournoi continental. Le Nigeria n’avait pas participé à la CAN depuis sa victoire en 2013, quand les Super Eagles avaient remporté la Coupe en battant le Burkina Faso. Le gouvernement avait alors remercié ses joueurs à coup de cadeaux en cash et de parcelles de terre.

    Le président nigérian Muhammadu Buhari a demandé aux Super Eagles de rester concentrés jusqu’au bout, afin d’espérer remporter le tournoi pour la quatrième fois de leur histoire. Le président nigérian Muhammadu Buhari a demandé aux Super Eagles de rester concentrés jusqu’au bout, afin d’espérer remporter le tournoi pour la quatrième fois de leur histoire.La décision d’affréter des avions a été prise afin de « soutenir l’équipe », qui jouera au stade du 30-juin au Caire, selon le communiqué.

    Le Nigeria n’avait pas participé à la Can depuis sa victoire son sacre en 2013face au Burkina Faso. Le gouvernement avait alors remercié ses joueurs à coup de cadeaux en cash et de parcelles de terre.

    Source : RFI

  • Seedorf ne rate pas le coche

    Après son échec, le Néerlandais s’est saisi du micro de la chaîne Canal 2 International pour se faire entendre.

    C’est un véritable match de boxe médiatique! Au coin gauche du ring, Clarence Seedorf. A droite du ring, ceux qui traquent le moindre battement de cils de l’ancien milieu de terrain néerlandais. Au lendemain de l’élimination en 8e de finale de la Can 2019, le sélectionneur des Lions indomptables essuie une tempête de reproches. La dernière en date est consignée dans la Une du quotidien privé Mutations du 11 juillet dernier. «Clarence Seedorf, avis de recherche», brandit le journal. Deux jours plus tard, sur la chaîne de télévision privée camerounais Canal 2 International, le Néerlandais est venu répondre à ses détracteurs. Cette sortie a donné à voir une longue silhouette tonique, un sourire envahissant qui désamorce toute animosité, voire toute critique, dans un grand élan de bonne humeur. Affecté par l’échec des champions de Gabon 2017, d’autres coups sont assenés sur le crâne du coach des Lions indomptables. Pour ce dernier, pas question de laisser saigner les blessures, surtout qu’elles sont provoquées par quelques «aigris». Dans les rangs de ces derniers, l’on retrouve Petrus Boumal, recalé aux portes de l’expédition égyptienne.

    Dans une interview accordée reprise sur le site SoFoot, le milieu de terrain fustige l’ingérence d’Eto’o qui pousse selon lui pour que ses proches soient sélectionnés, visant ouvertement Wilfried Kaptoum, le joueur du Betis: «Kaptoum, il ne joue pas à Séville, mais il est sélectionné parce que c’est le fils d’Eto’o. Même s’il ne joue pas, il est content d’être là, mais de toute façon, il ne peut pas revendiquer une place de titulaire». Avant d’ajouter qu’il n’était pas le seul à avoir cet avis sur l’ancien Barcelonais : «Oyongo, Anguissa, Fai Collins, eux aussi ils n’aiment pas Eto’o, ils ont bien compris qu’il fait trop de magouilles.» Clarence Seedorf en prend aussi pour son grade, le joueur affirmant d’une manière cinglante que «le coach est nul» , avant d’en remettre une couche sur son compatriote: «Tout ce qu’Eto’o touche, ça ne marche pas.»

    Riposte
    L’ancien cadre de la sélection néerlandaise encaisse avec douleur cette rancune. Utilisant à fond les caméras et les micros, il a répondu à son joueur dans un reportage diffusé dans le grand journal du soir de la télévision Canal 2 international le 9 juillet 2019. Il déplore l’attitude du joueur recalé au moment de sélectionner ceux qui devaient disputer la Can 2019. «Je peux comprendre la déception de certains recalés. Ils auraient dû réfléchir par deux fois avant de poser certains actes. Ce n’est pas moi la victime à la fin. Mais c’est le groupe. Et pourtant, depuis le stage à Madrid l’état d’esprit était magnifique. Jusqu’à Doha. Et malheureusement, on a un résultat décevant et les gens en profitent pour créer le doute et la discorde», regrette le technicien.

    Clarence Seedorf espère que cet incident ne va pas plomber l’atmosphère au sein des Lions Indomptables. Il émet le vœu de voir les joueurs «rester unis et protéger ce qui a été fait jusqu’alors, ce qui a été bâti». Un nouvel état d’esprit, un esprit d’équipe, une sérénité qu’il revendique. «A mon arrivée, c’est exactement le contraire que j’ai trouvé : des problèmes de brassard, des crises d’égo et autres», rappelle-t-il pour illustrer le changement apporté dans le vestiaire des Lions indomptables du Cameroun.

    «On a dû tout remettre à zéro en montrant à chaque joueur qu’il était important, en utilisant presque tout l’effectif pendant les différents matches malgré l’enjeu», ajoute-t-il avant de conclure par ces mots à l’endroit de Petrus Boumal: «c’est évident que depuis mon arrivée j’ai montré que je suis libre dans mes choix. Si c’est vrai qu’un joueur a fait des voices messages, c’est juste une preuve d’immaturité pour lui et son entourage».

    Ongoung Zong Bella

     

    Pape Diouf: «le football africain s’est appauvri dramatiquement»

    Dans une tribune publiée sur le site internet du journal français Le Monde, l’ancien président de l’Olympique de Marseille (2005-2009) estime que «le côté chatoyant et spectaculaire du jeu a disparu», notamment à cause de l’arrivée de nombreux entraîneurs étrangers.

    Les résultats de cette 32e édition de la Coupe d’Afrique des nations (Can) sont étonnants et contradictoires. Faut-il les attribuer, comme beaucoup le font, à un «progrès d’ensemble» du football africain et à l’émergence des «petits», comme Madagascar et le Bénin, qualifiés pour les quarts de finale ? Ce serait oublier qu’en même temps, le jeu d’attaque et d’entreprise a cruellement fait défaut aux nations majeures du continent.

    Jusqu’ici –l’Algérie peut-être mise à part–, on a vu se généraliser des tactiques très convenues, reposant avant tout sur des défenses renforcées. Ce procédé a contribué à mettre en relief le nivellement par le bas des valeurs, qui caractérise aujourd’hui le football africain. Celui-ci s’est appauvri dramatiquement et le côté chatoyant et spectaculaire du jeu a disparu. Les attaquants, s’ils existent encore, usent d’expédients plutôt que de créativité pour exploiter la moindre erreur commise par les défenses adverses.

    La déconfiture des grandes nations et, généralement, leurs piètres prestations ont eu pour effet de mettre le paradis à la portée de tous. Mais elles ont aussi largement participé à installer l’ennui. Sur les stades égyptiens n’ont pas jailli la lumière et les fulgurances, caractéristiques du football africain.

    Applaudir les « petits »
    L’importation massive des procédés qui ont cours hors des frontières africaines n’est pas étrangère à ce déplorable état de fait. Les nombreux entraîneurs et techniciens engagés souvent à prix d’or et venus des pays «majeurs» d’autres continents ont inculqué aux joueurs la religion du résultat à tout prix, quitte à annihiler leurs qualités naturelles. Ils font école.
    Pour s’en convaincre, Il suffit d’écouter les commentaires lénifiants d’après match. On célèbre immanquablement, non pas le but inscrit, mais celui qu’on n’a pas pris, non pas le panache de l’équipe, mais l’abnégation et la solidarité de tous. C’est la pente regrettable et sinueuse que prend le football continental. Du reste, ce n’est pas un hasard si aucun des cinq représentants de l’Afrique n’a dépassé le premier tour lors du dernier Mondial 2018 en Russie.

    Les dirigeants et responsables sont évidemment fautifs. Que ce soit au niveau des associations ou de la Confédération africaine de football (CAF), seuls comptent les intérêts particuliers des uns et des autres. La VAR (assistance vidéo à l’arbitrage), nouveau gadget adopté par la CAF, fera partie du jeu à compter des quarts de finale programmés pour ce mercredi. Ce n’est pas avec elle q ue la compétition va s’illuminer et permettre au football d’Afrique de reprendre du souffle. Seul un retour aux vertus locales serait source de progrès. En attendant, contentons-nous d’applaudir les «petits».

     

    Source : lemonde.fr

    Autre choc…

    L’élimination de la Guinée Bissau en 8e de finale à la Can 2019 irrite toujours le premier responsable de la Fédération (Féguifoot) Mamadou Antonio Souaré. Malgré des déclarations jugées diffamatoires par le sélectionneur Paul Put, il a envie de continuer l’aventure avec le Syli national.

    Entamée depuis la Can 2019, la guerre de communication continue entre Antonio Souaré et Paul Put. Quelques jours après la cuisante défaite face à l’Algérie, le président de la Féguifoot a organisé une conférence de presse au cours de laquelle il a dénoncé certains faits.

    «Il parait, je ne peux confirmer que ses membres du staff ont racketté sur les primes de match. Il y a des gens qui sont prêts à témoigner auxquels il a dit que si ces gens ne paient pas ici à Conakry, qu’ils payeront en Belgique. C’est une menace très grave, si cela s’est avéré, il ne pourra jamais plus entraîner dans sa vie», a-t-il laissé entendre.

    Une véritable hécatombe et le sélectionneur est sévèrement critiqué. Réponse du berger à la bergère, Paul Put réponds à travers un courrier adressé à la presse locale. «Beaucoup de mensonges circulent sur moi pour me salir. Je tiens vigoureusement à démentir ces mensonges honteux. Du début de ma carrière d’entraîneur à aujourd’hui, je n’ai jamais, au grand jamais, touché un centime avec mes joueurs. Je n’ai jamais racketté ni un joueur, ni un membre de mon staff. D’ailleurs, j’ai reçu plusieurs messages de soutien de mon staff et de mes joueurs. Tout ceci est fait pour nuire à mon image, pour me pousser à bout», a-t-il écrit.

    Malgré cette rocambolesque affaire, Paul Put est décidé à poursuivre à la tête de la sélection guinéenne. «On est en train de construire une équipe. L’objectif était de qualifier, on est qualifiés après avoir passé le premier tour. On va continuer à travailler. Parque le travail n’est pas encore fini. On va encore améliorer des choses pour construire une équipe», a-t-il conclu.

    Ongoung Zong Bella

  • Zone Cemac : Les rues désormais plus liquides

    Zone Cemac : Les rues désormais plus liquides

    Duel

    « Crise des devises ». Voici une expression ajustée au millimètre dans la science économique. Parmi les érudits de cette discipline, il y a ceux qui l’avaient annoncée et avaient été taxés d’inaltérables pessimistes. Et il y a ceux qui minimisent la gravité de la situation, et sont considérés comme d’éternels optimistes. Les premiers avaient utilisé (et continuent de le faire) un vocabulaire dramatique, voire cataclysmique. De leur côté, les seconds essayent de faire tenir debout la pantomime du « tout va bien ».

    Voilà en résumé la situation financière actuelle de la zone Cemac (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) ; où, depuis longtemps, il y a un cocktail explosif de mauvais signes. On se croyait pourtant averti, mais cela n’a été d’aucune aide pour appréhender ce qui allait fatalement arriver. À côté des populations dans le désarroi, les opérateurs économiques et les banques commerciales, écœurés par cet état de choses, ne se montrent pas indulgents et occasionnent un duel de grandes gueules avec la Beac (Banque des États de l’Afrique centrale). Le tout laisse penser à un manège bon pour creuser le tombeau des économies de la sous-région. Entre l’emballement des événements et les déclarations plus ou moins renversantes, il n’échappe plus à grand monde que le marché de change légal est aujourd’hui pétrifié. Pendant ce temps, dans la caverne de l’informel, on se frotte les doigts.

    Politique monétaire restrictive ou comportement spéculatif des acteurs économiques ? Les certitudes vacillent, les hypothèses demandent parfois à être rebattues. Pour autant, la banque centrale applique sans faiblesse la nouvelle réglementation sur les devises. Il est question de remettre le marché à l’équerre et discipliner les acteurs.

    D’après une enquête réalisée au premier trimestre 2019, par le patronat, 71 % des entreprises du Gicam considèrent comme une préoccupation majeure cette difficulté d’accès aux devises. Quelle est la réalité du terrain ? Que disent les uns et les autres ? Qui fait quoi ? Le présent dossier s’emploie à répondre à ces questions.

    Dossier réalisé par

    Jean-René Meva’a Amougou

    et Alain Biyong

     

    Des géants de la finance aux petits portefeuilles, ils sont nombreux à se ravitailler désormais en devises étrangères dans les marchés de change informels.

    « Change ! » Prononcé en anglais, le mot qui, il y a peu, avait un côté désinvolte, résonne agréablement aux oreilles des usagers. Devant les supermarchés, les banques ou les grands établissements hôteliers de Yaoundé, l’ambiance souligne une vérité essentielle: il y a beaucoup d’argent dans la rue. « Depuis janvier 2018, l’indice du marché noir de devises étrangères ne s’est jamais aussi bien porté dans la capitale camerounaise », expose Abbo Youssoufa. Sur la foi d’une étude que cet enseignant assistant à l’université de Yaoundé II a menée depuis lors dans tous pays de la Cemac (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale), parle d’«environ 50 millions de francs CFA qui se changent chaque jour, beaucoup plus dans les capitales économiques des pays ». «Au moins 90 % des échanges impliquent le dollar américain, le Yuan et l’euro», ajoute l’expert camerounais en monnaie et finances internationales, soulignant un marché fréquenté par de gros, mais aussi de petits clients

    Business
    En approchant quelques-uns parmi ces derniers, c’est à l’insulte qu’on tend le micro. Au milieu des plus courtois, une voix fait valoir que venir ici c’est à la fois le produit de l’intelligence et de la résilience. «Dans les banques, on ne peut pas acheter plus de 2000 euro ou dollars tandis qu’ici, il n’y a pas de barrière. Et aussi, par exemple, si la banque vend le dollar aujourd’hui à 510 FCFA, nous, nous pouvons le vendre un peu moins», affirme notre interlocuteur. Plus incisif, un autre soutient que «le caractère liquide du change dans la rue donne des preuves que l’économie informelle est en avance sur les politiques monétaires de la Cemac».

    En clair, la rareté des coupures étrangères dirige une clientèle importante vers les «dollars» (nom donné aux vendeurs de devises à la sauvette au centre-ville de Yaoundé). «Partout dans la sous-région, on voit des cambistes des microfinances ou des banques, des investisseurs institutionnels (assureurs, opérateurs pour compte propre) écumer les rues ouvertes 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, à la recherche de la moindre devise», souffle Abbo Youssoufa. Pour lui, la tendance est généralisée et accentuée au Gabon et au Cameroun, «pays les plus touchés par la récession actuelle des devises , selon Babissakana, économiste camerounais.

    Suite aux contrôles de la Banque centrale et la carence avérée en devises à l’intérieur, certains acteurs dans deux pays se sont organisés. «En tout cas, il s’agit bien d’un système», tranche l’analyste économique Mays Mouissi, dans une interview accordée à Gabon Media Time, le 7 février dernier. À la vérité, il se murmure que pour pallier le difficile accès aux devises auprès des banques commerciales, par solidarité, des entrepreneurs camerounais et gabonais se vendraient des devises. Raison : «Avant, un chef d’entreprise devait compter entre deux et trois jours. Aujourd’hui il y a un mois et demi d’attente. Il vaut mieux explorer d’autres pistes, car la survie du secteur privé en dépend», brandit sous le manteau, un opérateur économique.

    À la Beac, tout cela est connu. À Douala, le 4 juillet dernier, une source proche du gouvernement de cette institution financière souffle que «cela a développé un marché interbancaire des devises et même un marché parallèle au circuit formel. Le produit de ce commerce des devises et autres services financiers pèse entre 50 et 80 % dans la structure du produit net bancaire (PNB) des établissements de crédit (chiffre d’affaires annuel des banques) en activité dans la zone Cemac».

    Jean-René Meva’a Amougou

    Et la Beac appliqua la réglementation

    Pour la Banque centrale, dans le fond, il n’y a pas de crise, juste une application rigide des mesures.

     

    « Sans devises, les entreprises sont à l’agonie ». En posture d’invité du 13 h sur les ondes de la CRTV-Radio le 4 juillet dernier, Alain Blaise Batongué, le secrétaire exécutif du Gicam (Groupement inter-patronal du Cameroun) a fait «officiellement» état du profond malaise et de l’inquiétude grandissante de nombreux hommes d’affaires camerounais face aux contraintes imposées par la Beac. Il a été entendu. Le même jour, autour de Abbas Mahamat Tolli, le gouverneur de la Beac, opérateurs économiques et banquiers se sont rencontrés en fin d’après-midi à Douala, «pour réunion de sensibilisation sur la nouvelle réglementation des changes », selon le libellé du programme du jour.

    Entre témoignages et réflexions sur la situation, toutes les parties sont reparties, calées sur deux mesures. Selon les lignes d’un communiqué publié à cette occasion, la Banque centrale a consenti à ne plus rejeter systématiquement les demandes de transferts des banques commerciales ayant «des avoirs extérieurs suffisants qui auraient dû servir à l’exécution, par les banques elles-mêmes, de ces transferts sans recourir à la Beac». En contrepartie de cette mesure de flexibilité décidée par la Banque centrale, les banques commerciales, elles, se sont engagées à rétrocéder sur leurs avoirs extérieurs, et dans des délais raisonnables, les volumes de devises ainsi mis à leur disposition par la Beac. Au cas contraire, apprend-on, il leur sera infligé une sanction pécuniaire d’une valeur de 5 % du montant des avoirs qu’elles détiennent illégalement à l’extérieur de la zone Cemac.

    Toujours selon le même communiqué, l’on retient que les banques et les opérateurs économiques vont désormais mettre à la disposition de la Banque centrale les coordonnées des importateurs et autres entreprises sollicitant des transferts à l’international. De cette manière, la Beac pourra directement informer l’opérateur économique du traitement de sa demande, afin que ce dernier se rapproche de sa banque pour s’enquérir du sort réservé à sa demande de transfert.

    Pour rappel, la pénurie des devises dans la Cemac découle du dessein de la Beac, Banque centrale des six États de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, RCA et Tchad), de limiter la saignée du compte des opérations. Cette caisse commune aux États de la Cemac, qui est logée au Trésor français pour soutenir les importations des pays de la Cemac, a été très sollicitée et peu renflouée depuis 2015.La raison est la chute des prix des matières premières (notamment le pétrole brut) exportées par les pays de la Cemac.

    Afin de reconstituer ce compte des opérations et de le maintenir à un niveau permettant d’éviter une dévaluation du FCFA, la Beac a entrepris de durcir les conditions des transferts des fonds à l’international. Cette politique monétaire restrictive se traduit par le difficile accès aux devises auprès des banques commerciales. Accusée par les banques d’être à l’origine de la rareté des devises, la Beac a toujours rejeté la responsabilité sur les banques commerciales. Elle les accuse à son tour d’entretenir des « pénuries artificielles ».

    Dans l’optique de restreindre l’accès aux devises, la Beac a rendu publique une nouvelle réglementation sur le change, jugée beaucoup plus contraignante. Le 10 juin 2019, cette Banque centrale a défini «les conditions et modalités d’utilisation hors de la Cemac des instruments de paiement électronique . Il y est prescrit que désormais, le montant des opérations de paiement et de retraits sur des guichets et terminaux situés à l’extérieur de la Cemac est plafonné à cinq millions de FCFA par individu et par voyage. En outre, le règlement des transactions à distance, notamment les paiements en ligne, est plafonné à un million de FCFA par personne et par mois. Au-delà de ces montants, les transactions doivent être justifiées.

    Alors, à Douala, le Pr Michel-Cyr DjienaWembou, secrétaire permanent du Programme des réformes économiques et financières de la Cemac (Pref-Cemac), a tranché : « il faut respecter la nouvelle réglementation des changes. Je peux vous assurer que lorsque vous ferez la panoplie des mesures, vous comprendrez pourquoi on a pris d’abord cette nouvelle réglementation, où nous voulons aller ensemble dans la communauté».

    Ongoung Zong Bella

    Dieudonné Essomba

    «Le Gicam devrait être le dernier à se plaindre»

    Dans une tribune publiée sur sa page Facebook la semaine dernière, l’économiste-statisticien camerounais affirme que la crise des devises actuelle est normale. Pour lui, elle était prévisible, au regard des réalités de la zone Cemac depuis quelques années.

    Fuite des capitaux : la Beac durcit les conditions d’ouverture de compte en devises.

    La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, à travers le comité ministériel de l’Union monétaire de l’Afrique centrale, a adopté le 21 décembre 2018, une nouvelle réglementation des changes. Celle-ci stipule en son article 41 que : « L’ouverture d’un compte en devises hors de la Cemac au profit d’un résident, est interdite, à l’exception des établissements de crédit ». Sont aussi concernés par cette restriction, ceux qui séjournent même de façon discontinue pendant plus d’un an dans l’un des pays de la sous-région ou ayant l’intention d’y exercer une activité économique pendant au moins un an, y compris les réfugiés. « Toutefois, la Banque centrale peut autoriser une personne morale résidente à ouvrir un compte en devises hors de la Cemac dans les conditions et modalités fixées par elle. Par la suite, la Banque centrale en informe le ministère en charge de la monnaie et du crédit », indique la nouvelle réglementation.

    Celle-ci précise que le compte en devises ouvert dans la sous-région ne peut être crédité ni de versements en franc CFA ni par le débit d’un compte en franc CFA. En outre, il ne peut présenter un solde débiteur. Les retraits de devises sur un compte de résident en devise pour la couverture de besoins locaux sont interdits. Cette nouvelle réglementation de la Beac viserait à juguler la rareté des devises dans la zone Cemac. En effet, selon les révélations faites par le Fonds monétaire international (FMI) dans un rapport sur la Cemac, publié le 24 mars dernier, « certains signes laissent penser que d’importants dépôts sont effectués à l’étranger par les résidents de la Cemac, ce qui n’est probablement pas tout à fait conforme à sa réglementation des changes ».

    En tenant compte des données fournies par la Banque des règlements internationaux (BRI), le FMI a indiqué que les fonds dont disposent les résidents de la sous-région dans les banques étrangères sont d’environ 5 milliards de dollars US, soit près de 2 897 milliards de francs CFA, à la fin de l’année 2017, dépassant ainsi le montant notionnel autorisé. Quand vous associez ces deux mesures, vous pouvez comprendre que les devises soient devenues si rares. Surtout pour des gens habitués à la gabegie des devises comme c’était le cas avec nos gens de la Cemac.

    Importation. Il faut savoir que nous consommons les devises quand nous importons de l’étranger. Et nous produisons des devises quand nous exportons des produits. Actuellement, malgré notre croissance, nous avons une balance commerciale déficitaire. Raison ?

    Nos importations sont supérieures à nos exportations !
    Et parmi les grands importateurs du Cameroun, nous avons nos grands bayam selam internationaux du Gicam que nous appelons fallacieusement hommes d’affaires. Ils avaient l’habitude de prendre de grosses sommes en crédit dans les banques pour importer des produits livrés à leurs clients. D’autres prenaient des crédits pour soutenir leurs appareils de production dont la majorité des intrants étaient importés. Ceux-là qui importent tout au lieu de produire sur place. Et quand même ils essayent de produire sur place, leurs appareils de production sont en majorité importés. L’info claire et nette. Tout ce qui compte pour eux c’est faire du profit. Ils ne se préoccupent pas de la politique nationale ou même du patriotisme économique. Ils importent, font des bénéfices, et ce sont les devises produites par le cacao du petit paysan du Centre, le bois de l’Est, le café du paysan des hauts plateaux de l’Ouest, la banane de Njombe Penja au Littoral, le pétrole du Sud-Ouest ou encore les bovins de l’Adamaoua…qui sont consommés pour réduire le déficit.

    Pourtant il suffirait que ces gens, que l’État du Cameroun a aidés à s’enrichir, sachent simplement prendre la mesure de leurs responsabilités. Ils peuvent investir dans les secteurs porteurs, afin d’accompagner l’État dans sa politique de mise en valeur des chaînes de valeurs nationales et ainsi porter à bout de bras le Made in Cameroon.

     

    Le cri des businessmen

    Dans ce communiqué publié le 1er juillet 2019, le Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam) exprime ses vives préoccupations face à la situation de pénurie des devises dont souffre l’économie camerounaise depuis plusieurs mois.

     

    Ce manque de devises est d’une ampleur sans précédent dans notre pays. Il se traduit au niveau des entreprises par un ralentissement considérable des opérations d’importation d’intrants, produits et équipements de production, ainsi que de maintenance de l’outil de production. En outre, à plus ou moins brève échéance, cette pénurie pourrait contraindre les entreprises à suspendre voire cesser leurs activités du fait d’une perte de confiance dans des relations distendues avec leurs fournisseurs et partenaires extérieurs. D’ores et déjà, certains prestataires ont suspendu leurs opérations avec le Cameroun et aucune visibilité n’est perceptible à l’horizon pour rassurer nos partenaires.

    Au 15 juin dernier, les demandes de transfert totalisaient plusieurs dizaines de milliards de FCFA. Les délais d’exécution ne sont plus respectés, ils varient de plusieurs semaines à plusieurs mois. De plus, les commissions de transfert et d’achat des devises, ainsi que divers frais bancaires sont à la hausse, et les procédures de transfert plus longues et plus complexes.
    Au total, les conséquences de cette pénurie sont désastreuses pour les entreprises et pour l’économie en général.

    Aux premières heures de cette crise, le Gicam, en liaison avec l’Apeccam, a attiré l’attention des autorités monétaires sur les risques grandissants qui pèsent sur l’économie du pays du fait de cette pénurie des devises. De fait, les entreprises sont exposées à la perte de protection de leurs actifs en lien avec le non-paiement effectif des primes dues aux compagnies de réassurance internationales. Le risque-pays se dégrade et tend à détourner les assureurs-crédit de nos entreprises.Nos efforts sont restés vains malgré la nouvelle réglementation de change. Cette réglementation n’a jusqu’ici pas permis d’apporter des solutions concrètes aux problèmes des entreprises, ni à rassurer les opérateurs économiques, s’est caractérisée par des contrôles administratifs accrus préjudiciables aux opérations d’importation.

    Face aux menaces réelles de paralysie de l’économie, le Gicam maintient le contact avec les autorités monétaires pour que des solutions à cette problématique soient identifiées et mises en œuvre. Le Gicam propose notamment que trois (3) mesures conservatoires soient prises dans l’urgence, et qui permettront de limiter les effets néfastes de cette crise des devises :

    – La suspension temporaire de l’importation de certains produits ;

    – le contingentement de l’importation de produits plus ou moins essentiels ;

    – la priorité donnée au paiement des importations de produits et services essentiels, ainsi que des secteurs stratégiques.

     

    Pr Michel-Cyr Djiena Wembou

    «Nous n’avons pas une crise des devises»

    Dans un entretien exclusif qu’il a accordé à Intégration le 6 juillet 2019 à Douala, le secrétaire permanent du Pref-Cemac livre sa lecture de la situation.

    Que propose le Pref-Cemac pour sortir de la crise des devises qui secoue les États ?
    Je pense que nous n’avons pas une crise des devises. Nous devons plutôt avoir des séances d’explication sur la nouvelle réglementation des changes, ainsi que les liens entre cette nouvelle réglementation et le rapatriement des recettes d’exportation. C’est pour clarifier les choses qu’il y’aura une concertation à Douala, le 04 juillet 2019, laquelle permettra d’organiser la communication autour de la nouvelle réglementation des changes et d’édifier sur les liens entre cette réglementation des changes et le rapatriement des recettes d’exportation. Ce sont des questions techniques. Après le 04 juillet, nous serons en mesure de vous livrer les mesures qui seront prises. Cette communication ne concerne pas seulement les responsables de la Cemac, il y’aura toutes les institutions communautaires notamment la Beac qui est en première ligne. Il y’aura également les principales sociétés d’exportation et les banques. Tout le monde va être associé, puisqu’il s’agit d’une démarche participative.

    Dans la sous-région, il y’a des entreprises qui se plaignent de ne pas avoir accès aux devises d’exportation pour leur opération…
    Il y a une question de discipline budgétaire, tout comme il y’a une discipline dans le transfert. Il y’a d’ailleurs une partie de la discussion que nous devons avoir avec les banques commerciales de la place. C’est après cela que nous devons, de manière consensuelle, trouver des solutions. Mais, quelles que soient les solutions, la question de discipline budgétaire, financière et de respect de la règlementation pour nous même et les autres doit être posée. On ne peut pas toujours demander aux autres de respecter ce que nous avons fait et ne respectons pas.

    Propos recueillis par Alain Biyong

  • Sur la pelouse : Lions indomptables « Le crime » a payé

    Sur la pelouse : Lions indomptables « Le crime » a payé

    Après s’être amusée avec les Ecureuils, la bande à Clarence Seedorf a été dévorée par les Aigles.

    Phase de jeu Cameroun-Nigeria lors des 8e de finale

    Adieu la Can 2019. Les Lions indomptables et le peuple camerounais tout entier ont prononcé ces mots en revivant toute l’horreur du coup fatal porté par les Super Eagles du Nigéria, samedi dernier au Stade d’Alexandrie. Le bilan est simple : l’équipe du Cameroun n’a pas été là où on l’attendait, confirmant ainsi ses limites dès que le niveau de l’adversité grimpe de plusieurs crans. Au premier abord, les choses vont de soi: «C’est la réalité du football; il fallait un vainqueur et un vaincu», accepte laborieusement Joseph-Antoine Bell, dans un commentaire d’après-match sur Eurosport. Cependant, l’ancien portier des Lions indomptables met en exergue des détails dans sa note : «Le nul contre le Bénin n’a certes pas à lui seul été le tournant, mais le symptôme de ce qui est arrivé aujourd’hui. Pour avoir bradé la première place, une simple arithmétique nous montrait déjà que ce calcul se révélerait funeste».

    Analyses
    Dans ces moments de larmes, un tel esprit de nuance peut rapidement passer pour un ronchonnement de grincheux. Mais il est à prendre en compte. «Car, dit Claude le Roy, cette équipe du Cameroun mérite aussi qu’on analyse froidement les ressorts de son élimination». S’exprimant chez nos confrères de BeinSport, l’ancien coach des Lions indomptables, pense surtout que Choupo Moting et ses coéquipiers ont abordé le match contre le Bénin avec les ingrédients de la désinvolture. Claude le Roy évoque notamment «un jeu peu flamboyant, voire frileux, une solidarité peu collective parfois illuminée par quelques talents offensifs». Et à revivre le match de poule Cameroun-Bénin, les poulains de Clarence Seedorf ont terminé la partie dans la monotonie, faisant bâiller d’ennui leurs supporters les plus acharnés. «Peu de rythme, d’envie et d’occasions malgré les 68% de possession de balle, la plus forte statistique mesurée au cours des matches du 1er tour», décrit le correspondant de lepoint.fr Guillaume Paret.

    Le journaliste poursuit : «les élans offensifs du Cameroun étaient la conséquence des brèches béantes ouvertes par les Ecureuils, plutôt que le résultat d’un jeu patiemment construit… Comme si on s’amusait». Christian Bassogog l’a d’ailleurs reconnu sur la chaîne France 24 : «On n’a pas fait le match qu’il fallait face à une équipe qui a joué comme elle aime jouer, et nous, on n’était pas là. C’est ça le haut niveau. Qu’on soit champions du monde ou pas d’ailleurs, à partir du moment où on n’est pas là, avec les intentions, on ne peut rien espérer. Et heureusement que c’est comme ça. On prend une belle gifle ce soir».

    A la fin, un mauvais match nul (0-0). «En tout cas, si la rencontre s’était terminée d’une manière beaucoup plus heureuse pour les Lions indomptables, ils auraient conservé leur première place», regrette Joseph-Antoine Bell. Dans le regard du consultant de RFI (Radio France internationale), il flotte l’impression que c’est le score du match contre les Ecureuils qui a relégué le Cameroun à la seconde place de sa poule. «L’équipe a raté l’occasion d’éviter le Nigéria en 8e de finales de ce tournoi. Or dans une compétition, un tel crime ça se paie», conclut Zinedine Zidane dans les colonnes de El Watan.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Les Pharaons déchus de leur Can 

    Les vices-champions d’Afrique en titre sont tombés face à l’Afrique du Sud (1-0), samedi au Caire. Coup de froid au sommet de la pyramide.

     

    Mohamed Salah et ses coéquipiers ont été étourdis par la charge d’une équipe des Bafana Bafana sans complexe. Sur un contre-éclair, le Strasbourgeois Mothiba a parfaitement servi Thembinkosi Lorch, qui n’a pas manqué de sang froid pour ouvrir le score (85e). Globalement dominatrice l’Egypte a pêché aux abords de la surface de réparation sud-africaine. Mais ce sont bien les Bafana-Bafana qui se sont procurés les meilleures occasions tout au long de la rencontre. Leur abnégation a fini par payer.
    Vainqueur de trois des quatre éditions organisées à l’ombre des pyramides, l’Egypte laissera 2019 aux autres, l’Algérie, le Sénégal et le Nigeria, trois favoris qui ont dû se réjouir des sorties précoces des hôtes mais également du Maroc et du Cameroun tenant du titre.

    Les Pharaons quittent la compétition, la tête basse, dans un scénario rare : ils n’avaient perdu qu’une seule fois un match à élimination directe devant leur public dans la compétition, en demi-finales face au Zaïre en 1974. Au milieu de la nuit, l’influent Hani Abou Rida, membre du conseil de la FIFA, a acté cette déroute historique en quittant son poste de patron de la Fédération (EFA) et en limogeant l’ensemble du staff technique, dont le sélectionneur mexicain Javier Aguirre. Cette décision répond à «une obligation morale» selon Abou Rida. «L’équipe technique et administrative a été renvoyée dans sa totalité après avoir déçu les supporters du football égyptien», a-t-il ajouté au cours d’une conférence de presse au soir du 6 juillet 2019 au Caire.

    Tous les membres du conseil d’administration de la fédération ont également été invités à présenter leur démission. Certains ont rapidement répondu à cet appel, selon des communiqués de la fédération égyptienne de football (EFA). Selon cette instance, Abou Rida reste néanmoins à son poste de président du comité d’organisation de la Can, au nom de «la responsabilité nationale», a ajouté l’EFA dans son communiqué.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Clarence Seedorf

    Partira, partira pas ?

    A Alexandrie le 6 juillet 2019, le coach néerlandais des Lions indomptables évite de s’étendre sur son bail à la tête de l’équipe.

     

    En conférence de presse après la défaite contre le Nigéria, le sélectionneur camerounais Clarence Seedorf laisse un flou quant à son avenir avec les Lions Indomptables. «Mon contrat? Vous aurez besoin de quelques jours pour connaître la réponse» a-t-il répondu. «Je suis vraiment désolé pour mes joueurs car ils ont travaillé durs et ont beaucoup donné. J’espère que le peuple camerounais sera content de l’expérience en elle-même» a-t-il conclu.

    Devenu sélectionneur des Lions indomptables en août 2018 à la surprise générale, Clarence Seedorf a connu des débuts pour le moins contrastés avec l’équipe. Rattrapé par les ambitions d’un pays dont la quête de gloire est sans répit, le public estime que «le Néerlandais n’a pas assouvi les attentes de tout un peuple». «J’avoue que je suis surpris. Seedorf a une expérience d’entraîneur très légère: il n’est jamais resté plus de six mois en fonction, que ce soit à Milan, à Shenzhen ou au Deportivo La Corogne. Il n’a jamais eu de résultats très probants», s’agaçait par exemple Patrick Mboma, Ballon d’Or africain et double vainqueur de la CAN en 2000 et 2002 avec les Lions Indomptables, dans les colonnes de So Foot.

    La colère est d’autant plus vive que, bien que démenties par la Fécafoot (Fédération camerounaise de football), des révélations de Jeune Afrique à propos du salaire de l’intéressé et de son adjoint continuent de faire des vagues au sein de l’opinion nationale. «Avec 96000€ par mois, soit environ 62 millions 880 mille francs CFA, le duo Clarence Seedorf-Patrick Kluivert entraîneurs des Lions Indomptables du Cameroun arrive en deuxième position des sélectionneurs les plus chers du continent, parmi ceux présents à la Can Egypte 2019», révèle l’hebdomadaire panafricain.

     

    Jean René Meva’a Amougou

  • Egypte 2019 : La Caf «entièrement satisfaite» de l’organisation

    Egypte 2019 : La Caf «entièrement satisfaite» de l’organisation

    Mouad Hajji, le secrétaire général de l’instance continentale, l’a déclaré le 7 juillet 2019 au Caire.

    Mouad Hajji (à droite) pendant la conférence de presse

    Pour les officiels de la Caf, le bilan sportif est bon. Personne ne parle des pelouses. On a la chance d’avoir des terrains en parfait état, salués par les équipes. La bonne surprise au niveau de la sécurité, pourtant annoncée comme le gros point noir de l’événement. «Tout le monde est satisfait. Je pense que nous sommes en train d’assister à un tournoi exceptionnel, avec ce nouveau format à 24 nations. Il y a eu des efforts conjugués entre la Caf et l’Etat égyptien pour réussir ce rendez-vous. L’événement se passe dans d’excellentes conditions», a affirmé le SG en conférence de presse tenue au stade international du Caire.

    Interrogé sur le passage du tournoi de 16 à 24 nations, le responsable marocain a défendu le projet initié par l’instance africaine : «Nous sommes conscients que ce nouveau format nécessite des stades et des terrains d’entraînement, le Cameroun, la Côte d’Ivoire et la Guinée auront largement le temps pour se mettre à niveau. Nous sommes certains que le Cameroun sera au rendez-vous en 2021, nous sommes prêts à l’assister. Idem pour la Côte d’Ivoire (2023) et la Guinée (2025), a priori nous n’avons aucun souci à nous faire. Nous sommes arrivés à un stade élevé d’organisation».

    Sur le même sujet, Mouad Hajji a enchaîné: «Le passage à 24 nations a été une décision très pertinente. Ça a permis par exemple à Madagascar de se qualifier pour les 1/8 de finale pour sa première participation. Le Burundi et la Mauritanie ont signé leur première présence dans le tournoi. Nous recherchons un football plus ou moins compact avec des équipes qui peuvent sortir du lot».

    Evoquant le niveau général de la compétition, le dirigeant de la Caf s’est dit «satisfait» : C’est une compétition exceptionnelle au niveau du jeu et du fair-play. Il a toutefois reconnu que les matchs de l’Egypte ont été suivis par plus de 70 000 spectateurs, et jusqu’ici les autres rencontres de la compétition se sont déroulées devant des gradins presque vides. Mouad Hajji a tenu à justifier cette situation. Selon lui, l’organisation de cet événement a été attribuée très tardivement à l’Egypte, laquelle s’est concentrée sur le plan infrastructurel. «Nous avons discuté avec le Comité Local d’Organisation (LOC) sur l’importance d’avoir plus ou moins des stades remplis, il y a des projets qui sont actuellement à l’étude. Le comité est en contact avec des associations à caractère caritatif pour permettre à des enfants et aux personnes à mobilité réduite d’assister aux matchs», a-t-il fait savoir.

    Enfin, Mouad Hajji a réagi à la désignation de la Secrétaire Générale de la Fédération Internationale de Football (Fifa), la Sénégalaise Fatma Samoura, comme déléguée-générale de la Fifa pour l’Afrique, pour une période de six mois, afin de «remettre de l’ordre» dans l’administration de la Caf. «L’arrivée de Samoura est une grande opportunité. Elle arrive avec un groupe d’experts, ça va permettre d’accélérer les réformes dans un climat de bonne gouvernance, d’équité. Ça nous permettra de gagner beaucoup de temps par rapport aux réformes mis en place depuis l’arrivée du président Ahmad Ahmad. Il y aura des commissions et des instruments pour aller de l’avant avec la FIFA, elle qui aide beaucoup l’Afrique avec notamment son programme Football for Hope», a dit le secrétaire général de la Caf.

     

    Synthèse Jean-René Meva’a Amougou
    Source : Caf

    Cameroun 2021, on y pense déjà !

    La Confédération africaine de football (Caf) a dévoilé le 6 juillet 2019 les noms des équipes qui composent les pots, en prélude du tirage au sort officiel des éliminatoires de la Can Cameroun 2021 dont la date reste à déterminer.

    Le stade de Japoma déjà prêt à 90%

    Selon une note officielle de la CAF sur la base du classement Fifa de juin 2019, le Gabon est classé dans le pot 2 avec l’Afrique du Sud, le Congo, la Guinée, le Cap Vert, l’Ouganda, la Zambie, le Bénin, la Mauritanie, le Niger, le Kenya et la Libye. Le pot 1 est composé du Sénégal, de la Tunisie, du Maroc, du Nigéria, de la RDC, du Ghana, du Cameroun, de l’Egypte, du Mali, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire et de l’Algérie. Le Pot 3 est constitué de Madagascar, du Zimbabwe, de la Tanzanie, de la Centrafrique, de la Namibie, de Sierra Leone, de la Guinée Bissau, du Mozambique, de l’Angola, du Malawi, du Togo et du Soudan.

    Dans les chapeaux 4 : Burundi, Rwanda, Guinée Equatoriale, Lesotho, Eswatini, Botswana, Comores, Ethiopie. Dans le dernier pot on retrouve le Libéria, la Mauritanie, la Gambie, le Soudan du Sud, le Tchad, Sao Tomé et Principe, les Seychelles et Djibouti. Selon la CAF une équipe qui sera tirée du pot 5 jouera contre une équipe tirée dans le même pot. Cette procédure sera répétée pour les six autres équipes du pot 5. Les gagnants des quatre rencontres seront qualifiés pour les matchs de groupes et iront automatiquement aux positions A4, B4, C4 et D4. Pour ce qui est des groupes il y en a 12 de quatre équipes allant de A à L.Une équipe sera tirée du pot4 et ira à la position E4.

    Une procédure qui sera répétée pour les autres équipes du pot4 qui iront aux positions F4, G4, H4, I4, J4, K4 et L4. Une équipe sera tirée du pot 3 et ira à la position A3.

    Cette procédure sera répétée pour les autres équipes du pot 3 en utilisant le même raisonnement d’emplacement appliqué ci-dessus. Une équipe sera tirée du pot 2 et ira à la position A2 .Cette procédure sera répétée pour les autres équipes du pot 3 en utilisant le même raisonnement d’emplacement appliqué ci-dessus. Une équipe sera tirée du pot1 et ira à la position A1. Cette procédure sera répétée pour les autres équipes du pot3 en utilisant le même raisonnement d’emplacement appliqué ci-dessus.

    Source : Caf

    Les potins

    Ismail Bennacer, Meilleur joueur du 1er tour

    Homme du match face au Sénégal, le milieu de terrain algérien sociétaire d’Empoli a rayonné de son talent les matches des Fennecs. Ismail Bennacer a été désigné meilleur joueur du premier tour obtient ce titre. Le sélectionneur algérien, Djamel Belmadi, a également été nommé meilleur coach du premier tour par la Caf. L’Algérie remporte également le titre de l’équipe la plus «fair play» du tournoi.

    Par ailleurs, Madagascar a été nommé «Révélation du tournoi» et El Shennawy (Egypte), un mur impénétrable lors des trois premiers matchs remporte le titre de «Meilleur gardien».

    Yaya Banana


    Il est le seul Camerounais qui figure dans le 11 type de la phase de groupes de la CAN 2019. Au cours de trois matches, il a été titularisé deux fois contre la Guinée-Bissau et le Benin. D’ailleurs, il est l’un des auteurs des deux buts inscrits par le Cameroun en phase de groupe. C’était contre la Guinée Bissau. Franck Zambo deux fois homme du match ne figure pas dans ce onze type de la CAF. André Onana et Franck Zambo Anguissa, quant à eux, font partie des remplaçants.

     

    Mvog-Ada

    Les Nigérians ont fini leur «course contre le monstre Cameroun»

    Sons de flûtes et de tambours, routes envahies, drapeaux nigérians brandis, la liesse a explosé dans ce quartier de la capitale après la qualification des Super Eagles pour les ¼ de finale de la Can.

     

    Où l’on voit qu’il suffit d’un but pour entendre des sonorités et de voir des pas de «Njuju dance»? Pour trouver la réponse, rendons-nous au quartier Mvog-Ada (Yaoundé IV. Parmi les Nigérians, bien nombreux ici, on ne compte plus les chroniques mettant en relief la suprématie «légendaire» des Supers Eagles sur les Lions indomptables. Ce 6 juillet 2019, à la résidence de Mama Hukabjui, le chef de la communauté, le 8e de finale entre les deux formations s’ouvre sur le verbe coloré et l’humour ravageur des supporters agglutinés devant un écran géant. «On va manger ces Lions. Avant c’était avec le fufu, aujourd’hui, c’est avec le Busali», lance Kọ́láwọlé Túbọ̀sú. Pour cette occasion toute particulière, ce Yoruba installé à Mvog-Ada depuis une dizaine d’années joue le reporter.

    Il commente le duel entre Cameroun et le Nigéria cet après-midi. La scène est d’autant plus belle que, dès la 19e minute, les Super Eagles tiennent le bon bout grâce à une avance d’un but. Ce score permet à Dibia Okey de s’exercer dans la démesure : «le Nigeria est le vrai champion d’Afrique», dit-il. Il est aussi convaincu que l’équipe de son pays est «une flopée de grands joueurs entourés de bons joueurs». «Un jeu si bon, avec des joueurs si bons!» s’exclame-t-il avant de s’extasier sur les performances individuelles. Tout est dit. Le Nigéria est sur un nuage. Avec lui, tout le public présent à la cour de Mama Hukabjui. Seuls les buts successifs de Bahoken et de Njie (41e et 43e minutes) les renvoient sur terre.

    Ascenseur émotionnel
    Au rythme des flûtes et tambours, la remontée survient à la 63e minute. Heureux et chahuteurs, les Nigérians ont déjà l’impression d’avoir tout lu, tout vu. «Il reste un but», prédit Mama Hukabjui. A la 66e minute: instant d’entrée au paradis. Alex Iwobi achève de tondre la crinière des Lions. Il vient de marquer, permettant aux Super Eagles de reprendre l’avantage. Dans la foule, quelqu’un entonne le compte à rebours dans les dernières secondes de la partie.

    Fin du match ! 3 buts contre 2. En faveur du Nigéria, le score charrie des élans de coeur, des bouffées de noblesse, des éclats de rire. Pour le chef de la communauté nigériane de Mvog-Ada, «dans quelques mois, on publiera sans doute des thèses sur ce match». Le dignitaire ne manque pas de le faire savoir à ses amis Camerounais venus le féliciter. A l’écouter, on est dans la logique des «choses normales», avec un «Nigéria plus fort que le Cameroun».

    C’est simple: les Super Eagles ont réduit en miettes la confiance et la verve des supporters camerounais. Martin Túbọ̀sú 15 ans, la voix totalement cassée: «On a beaucoup entendu parler des finales entre le Cameroun et le Nigéria, je n’étais pas né. La fête va être le 19 quand on sera champions d’Afrique !». Et d’entonner avec ses copains «champions d’Afrique! champions d’Afrique! champions d’Afrique! champions d’Afrique!» A son père de compléter: «nous n’allons plus jamais courir contre le monstre Cameroun»

     

    Jean-René Meva’a Amougou

    Egypte 2019

    Can amère… sucrée chez les commerçants

    Business mi-figue mi raisin. Le tournoi de cette année ne fait pas recette.

     

    Les activités économiques autour de la Can 2019 ne rapportent pas autant de gains que dans les années antérieures. Quelques rares commerçants se glorifient du succès des ventes effectuées depuis le début de la Can. Alors que, la majeure partie des vendeurs rencontrés se plaignent d’une potentielle «crise économique».

    Dans le secteur des débits de boisson par exemple, les activités semblent stables. Pour les revendeurs, les recettes ont augmenté, mais pas comme les années antérieures.

    C’est le cas au quartier Nkomkana (Yaoundé II), précisément au lieudit Carrière, où foisonnent des fans de football. Dans ce bidonville de la cité capitale, on trouve des buvettes à chaque coin des rues. En ces lieux toujours bondés de monde, l’ambiance est à son paroxysme. Dans les espaces appartenant au groupe Marteau Bar, par exemple, les matches de la Can sont très courus. Fans du football et partisans des liqueurs se retrouvent pour suivre les matches de la Can en direct. Mawxell qui dirige l’un des comptoirs du groupe indique que les ventes ont augmenté.

    Le jeune barman reconnait tout de même que tous les gains ne sont pas exorbitants. «Parce que tous spectateurs ne consomment pas toujours», confie-t-il. Dans le deuxième espace de vente, situé à près de 300 m du premier, la situation est la même. Sauf que le gestionnaire indique que les ventes sont bonnes.

    Situation quasi identique dans l’estaminet Up station situé au lieudit Flamenco. Dans ce bar qui a pour devise «tous derrière les lionnes et les lions indomptables», les ventes ont grimpé mais légèrement. «Avec la Can les gains ont légèrement augmenté», confie Franck Erick, gérant de la structure de vente des boissons alcoolisées.

    Pénurie de clientèle
    Dans le secteur de la vente de télévisions, décodeur et autres, les affaires sont au ralenti. Même le sourire blanc esquissé par les vendeurs ne suffit pas à masquer les signes de désespoir sur leurs visages. Les couloirs du centre commercial sont vides faute de clients. « Depuis quelques mois, les ventes ne sont pas bonnes parce que les clients se font rares. Tous les écrans qu’on a mis en place n’ont pas été vendus », confie le propriétaire d’une boutique bien garnie en écrans. Comme ce vendeur, beaucoup d’autres se plaignent.

    Ailleurs, les boutiques sont vides. Las de contempler les marchandises invendues, certains commis préfèrent sortir «se changer les idées». «Depuis ce matin, je n’ai eu que deux clients et je n’ai rien vendu. La situation est difficile», confesse un vendeur. «Le pays est en crise il n’y a pas l’argent», lance un autre. Alors que certains vendeurs du secteur de l’audiovisuel sont aux abois, quelques rares autres se consolent à travers la vente de quelques décodeurs.

    Le secteur des maillots ne fait pas mieux. Ceux qui ont acquis les maillots produit par le coq sportif, nouvel équipementier des lions indomptables, se mordent bien les doigts. C’est le cas de Nadine. Propriétaire d’un prêt-à-porter elle n’a vendu aucun maillot des Lions indomptables. C’est que, explique un baron du métier, les nouveaux maillots de l’équipe camerounaise de football n’attirent pas. Parce qu’«ils sont moins beaux que les précédents» indique-t-il. Tout compte fait, la Can 2019 est bien là, et ce, jusqu’au 19 juillet 2019. En attendant, les commerçants continuent d’égrainer le chapelet dans l’espoir d’avoir plus de clients.

    Joseph Julien Ondoua Owona, Stagiaire

  • Suisse : Le Cameroun s’humilie à Genève

    Suisse : Le Cameroun s’humilie à Genève

    Un spectacle ubuesque qui déshonore le pays : des Camerounais protestent bruyamment contre la présence de leur chef d’Etat à l’hôtel Intercontinental de Genève. Avec à la clé des échauffourées qui tournent à l’affrontement. La police genevoise sort de ses gongs.

    La police genévoise envoie des canons d’eau sur des manifestants camerounais

    Elle a eu lieu dans l’après-midi du 29 juin 2019 devant la Place des Nation à Genève. La manifestation contre Paul Biya, à l’initiative de la nébuleuse BAS (Brigade Antisardinards), a rassemblé environ 250 personnes, sous l’œil vigilant de la police genevoise. Les manifestants n’ont pas pu approcher l’Intercontinental où logerait le président de la République du Cameroun. Chaque tentative de s’émanciper de l’espace défini pour manifester s’est soldée par une réaction vigoureuse de la police.

    Selon le journal Le Matin, «les forces de l’ordre ont sorti la tonne- pompe et fait usage de gaz lacrymogènes, a constaté un photographe de Keystone – ATS sur place. Quelques heurts ont eu lieu entre les pro Biya et les opposants». Le même journal fait le bilan humain de cet événement, en faisant parler le porte-parole de la police genevoise. Pour Sylvain Guillaume-Gentil, «certaines personnes ont été incommodées, mais personne n’a été hospitalisé. À cause de la chaleur, quelques manifestants ont eu des malaises passagers. En fin d’après-midi, ils n’étaient plus que 30 à 50 personnes à manifester calmement».

    Un avant-goût de la manifestation de samedi dernier avait également donné un bilan humain léger. En effet, des échauffourées au hall de l’Intercontinental de Genève trois jours auparavant avaient fait plus de peur que de mal. Une bagarre entre les éléments de la garde rapprochés de Paul Biya et trois opposants ce mercredi 25 juin a juste provoqué des blessures sans grande conséquence de part et d’autre. Un journaliste suisse, venu faire son travail, s’en tire avec des voies de fait sur sa personne et la confiscation de son matériel de travail par la sécurité présidentielle.

    Tempête dans un verre d’eau ?
    Plus de peur que de mal au regard du bilan humain. Mais le désastre sur le plan symbolique est énorme. Le Gouvernement camerounais reconnait que ces «comportements inadmissibles» sont «de nature à ternir l’image du Cameroun». Le ministre de la communication, porte-parole du Gouvernement camerounais, parle de «spectacle ubuesque qui déshonore le Cameroun, orchestré par des concitoyens qui ne sauraient se prévaloir d’une quelconque légitimité face aux millions d’autres camerounais, à l’intérieur comme à l’extérieur, qui demeurent fidèles aux institutions républicaines et qui ont foi en l’avenir de leur pays».

    Sur les réseaux sociaux, on enregistre également des conséquences néfastes des affrontements épiques entre les Camerounais. Certains ont lancé des pétitions en ligne contre l’hôtel Intercontinental qui accueille Paul Biya, ou en direction des autorités suisses pour que Genève déclare le président de la République du Cameroun persona non grata sur le territoire helvétique. D’autres camerounais soutiennent sans sourciller leur champion de président, en partageant au maximum les images et les écrits en défaveur de la BAS. Les dérives ne manquent pas d’un camp comme de l’autre. On s’en doute, la manipulation tourne à plein régime dans un tel contexte. Celle-ci ouvre la porte à toutes sortes de confusions et d’interprétations. Dans la foulée, le discours tribal et tribaliste prospère, faisant vaciller l’unité nationale construite patiemment depuis 60 ans par les gouvernants camerounais.

     

    Thierry Ndong Owona

     

    Sylvain Guillaume-Gentil

    «Votre message a été compris aujourd’hui»

    Verbatim du porte-parole de la police genevoise aux manifestants de samedi dernier devant la Place des Nations à Genève.

    Ce que je peux vous dire à défaut d’être compris, votre message a été compris aujourd’hui… Au niveau de ce qui s’est passé aujourd’hui, vous devrez savoir que la Suisse a des lois et que les autorités suisses ont accepté la venue de monsieur Biya sur son territoire. Pour moi, en tant que policier suisse, monsieur Biya est un président. Il a été accueilli par mon pays, et j’ai le devoir de tout faire pour le protéger. La Suisse vous a par ailleurs donné le droit de manifester et de dire votre mécontentement. Il y a des règles typiquement à respecter qu’on avait demandées à l’organisateur. C’était que le rassemblement reste au niveau de la Place des Nations. Je pense que vous avez compris ; à un moment de l’après-midi, vous avez voulu, vous vous êtes opposés à moi, parce que je dois protéger monsieur Biya. Voilà où on en est aujourd’hui. Nous n’avons pas la possibilité, nous, la police et autorités genevoises, de dire à monsieur Biya de quitter la Suisse. Les autorités fédérales suisses ou les autorités camerounaises sont les seules compétentes à décider du départ de monsieur Biya.

     

    Dialogue national inclusif au Cameroun

    La Suisse prépare le terrain des négociations

    La Confédération helvétique a souhaité et obtenu de Paul Biya un mandat officiel de médiation dans le cadre de la crise sociopolitique qui secoue le Cameroun.

     

    « Aux problèmes camerounais, il y a des solutions camerounaises». L’heure n’est plus à retourner cette phrase lancée à Yaoundé le 22 mai dernier par Pietro Lazzeri, l’ambassadeur de Suisse au Cameroun. Depuis le 27 juin 2019, la Confédération helvétique s’abrite derrière le paravent décoratif de l’accompagnement pour légitimer sa présence lors du dialogue national inclusif annoncé au Cameroun. Sous l’aiguillon de son Centre pour le dialogue humanitaire (HD Centre), une rencontre avec divers groupes d’opposition camerounais a eu lieu du 25 au 27 juin.

    Sur son site internet ce 30 juin, RFI (Radio France internationale) précise qu’une douzaine de représentants du SCLC (Conseil de libération des Camerounais du Sud), une faction du « Gouvernement par intérim » de l’AIPC (Ambazonian International Policy Commission), le RoAN (Republic of Ambazonia Nationals), entre autres ont répondu présents à cette rencontre. Leur séjour en terre helvétique a été totalement pris en charge par le HD Centre. «C’est à ce groupe, constitué d’un assemblage hétéroclite d’individus aux parcours et origines politiques variés, qu’appartient l’industriel français Antoine Saint-Affrique. Il est le président du groupe agroalimentaire Barry Callebaut, propriétaire de la Société industrielle des cacaos (Sic cacaos) à Douala. Il a été reçu le 22 avril 2019 à Yaoundé par le président Paul Biya», soulignent des sources bien informées.

    Lobbying payant
    C’est l’histoire d’un méticuleux travail de lobbying. L’euphémisation du vocabulaire répond à une volonté de gommer toutes les aspérités dialectiques, et les affrontements à l’œuvre dans les rapports de force depuis janvier 2018 (période pendant laquelle les représentants d’intérêts diplomatiques et privés ont commencé à circuler dans les couloirs du Palais de l’Unité). Les uns après les autres, ils ont usé de pratiques tantôt ultra-agressives, tantôt retorses. En mars 2019, Ueli Maurer avait été annoncé à Yaoundé. La visite du président suisse a été annulée. Si les raisons de ce désistement n’ont pas été officiellement dévoilées, «il n’en demeure pas moins que les rouages du lobbying n’avaient pas encore été bien calés», assure le politologue Belinga Zambo. L’universitaire associe ce «glissement» à la montée en première ligne de Pietro Lazzeri, juste quelque temps après. Au sortir d’une autre audience que lui avait alors accordée Paul Biya, le diplomate suisse, en poste à Yaoundé, n’avait pas manqué de vanter les états de service de son pays en matière de résolution de conflits.

    Pour des observateurs, l’ambassadeur suisse ne reprenait que le crédo de Nicoletta Mariolini. Au cours d’une visite très médiatisée en terre camerounaise en janvier 2018, la déléguée fédérale suisse au plurilinguisme avait exploré les possibles domaines de coopération devant permettre de relever le défi de renforcement de la cohésion nationale et la promotion du vivre ensemble entre les différentes communautés culturelles et linguistiques du Cameroun. «La Suisse est un pays qui sait mener des actions concrètes et utiles, avec modestie, mais avec détermination, qui y parvient par son impartialité, par le travail et par le dialogue. Un pays qui apporte de l’eau à ceux qui ont soif, quel que soit leur camp», avait dit Nicoletta Mariolini.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Perturbation du séjour du couple présidentiel en Suisse

    L’indignation du Gouvernement

    Le ministre camerounais de la Communication, porte-parole du Gouvernement, a fait une sortie le 29 juin dernier, pour dénoncer les agissements de la Brigade Antisardinards (BAS).

    Le ministre de la Communication du Cameroun

    Des individus se réclamant d’une organisation dénommée -Brigade Antisardinards-, après avoir entrepris de commettre des actes de vandalisme dans un établissement hôtelier de Genève en Suisse, le 25 juin 2019, dans le but de perturber le séjour privé du Chef de l’Etat, se sont une fois de plus manifestés sur une des rues de Genève, ce samedi, 29 juin, avant d’être rappelés à l’ordre par la force publique de la Confédération Helvétique.

    Face à la récurrence de ces agissements aussi incompréhensibles qu’inopportuns, perpétrés par une frange de Camerounais de la diaspora, le Gouvernement de la République exprime l’indignation de toute la Nation et dénonce fermement des comportements inadmissibles, de nature à ternir l’image du Cameroun, et qui méritent l’opprobre de tous, au-delà de toute considération.

    Au demeurant, l’attitude particulièrement hostile et belliqueuse de ces compatriotes, suscite tant d’interrogations au sein de la communauté nationale : pourquoi toute cette violence, quel en est le bien-fondé, quels en sont les bases de légalité et de légitimité ?

    Car, il est constant, qu’au-delà des considérations d’ordre politique ou idéologique, une chose est incontestable, incontournable et infrangible, c’est notre appartenance à un même pays et notre attachement à une même Nation.

    Ceci induit pour tout camerounais, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne, quelle que soit son obédience politique, le respect des institutions de la République, et conséquemment, le respect de celui qui incarne lesdites institutions.

    À ce titre, il est fait obligation à tous, citoyennes et citoyens camerounais, quel que soit le lieu de résidence, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, d’œuvrer à la préservation de l’image, de la dignité et de la souveraineté du Cameroun.

    Fort de ces principes sacrés, le Gouvernement réaffirme sa vive condamnation de l’état d’esprit d’une partie marginale de la diaspora, qui se manifeste depuis quelque temps, par une hostilité et une agressivité innommables contre celui qui, aujourd’hui, après avoir été dûment investi du soutien et de la confiance du peuple camerounais, préside aux destinées de la Nation camerounaise.

    Devant la démesure des actions menées, il y a lieu de questionner ces concitoyens sur les mobiles qui les poussent à étaler sur la face du monde leurs sentiments antipatriotiques, et à porter préjudice à cette Patrie qui nous est commune et chère à tous.
    Le Gouvernement dénonce cet activisme pernicieux, qui, somme toute, procède d’une contradiction flagrante, car l’on ne saurait à la fois, prétendre aimer le Cameroun, et en arriver si gravement, à attenter à l’honorabilité de celui qui incarne au plus haut point, les aspirations profondes, les nobles ambitions et la fierté.

    Le Gouvernement exprime une fois de plus, sa réprobation totale face à ce spectacle ubuesque qui déshonore le Cameroun, orchestré par des concitoyens qui ne sauraient se prévaloir d’une quelconque légitimité face aux millions d’autres camerounais, à l’intérieur comme à l’extérieur, qui demeurent fidèles aux institutions républicaines et qui ont foi en l’avenir de leur pays.
    Aussi, le Gouvernement tient-il à saluer celles et ceux de nos compatriotes de la diaspora qui se démarquent de ces actes infâmes, mettant en avant l’intérêt supérieur de la Nation et l’image du Cameroun, et faisant ainsi preuve de patriotisme et de responsabilité.

    Enfin, le Gouvernement rappelle que le PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, Son Excellence Paul BIYA, n’est pas ni le Président d’un groupe, d’une tribu ou d’une formation politique, mais bel et bien, le président de tous les Camerounais, sans exclusive, et qu’à ce titre, il doit bénéficier du respect et du soutien de la Nation tout entière.

     

    Le ministre de la Communication
    Réné Emmanuel Sadi

    Dernière heure

    John Fru Ndi libéré

    Le président du Social democratic front (Sdf) a regagné son son domicile de Ntarikon dans l’après-midi du 29 juin dernier, après avoir été enlevé la veille par des individus armés se réclamant de la république d’Ambazonie.

    Un happy end pour cet homme politique à la tête de la deuxième force politique au parlement camerounais. Aucune information n’a filtré sur ses ravisseurs, les conditions de sa détention ou les modalités de sa libération.

    Lors de l’enlèvement du chairman John Fru Ndi à Ntarinkon, vendredi 28 juin 2019 à 15h25mn par une bande d’individus armés à bord d’un véhicule banalisé de couleur rouge, l’un de ses gardes du corps -connu sous l’appellation de Bob- a reçu une balle de fusil dans la jambe. Le chairman du Sdf venait de regagner son domicile en provenance de l’hôpital Baptiste Mbingo où il était interné.

    C’est la deuxième fois, en l’espace de deux mois, que John Fru Ndi est enlevé par des hommes armés. Se rendant le 27 avril 2019 dernier à Kumbo, à l’inhumation du député Joseph Banadzem Lukong, président du groupe parlementaire Sdf à l’Assemblée nationale, John Fru Ndi avait été kidnappé dans la localité de Sob par des hommes armés se réclamant de la république virtuelle d’Amazonie. Maintenu en captivité pendant des heures, il avait été libéré en soirée.

    Les secessionnistes exigent la démission des élus du Sdf du parlement camerounais. Les cadres de son parti politique dénoncent l’absence d’une sécurité digne de ce nom autour du président du Sdf. Et en appellent aux autorités publiques pour que des mesures sécuritaires soient prises en faveur de John Fru Ndi.

     

    Leçons des agressions de la Brigade Antisardinards en Suisse

    À travers les actions agressives portées sur sa personne par la nébuleuse BAS, en Suisse et devant le monde entier, le président Paul Biya vit, de lui-même et de son vivant, l’imposture de son idéologie néocoloniale d’État unitaire avec ses paradigmes éculés de vivre-ensemble !

    On lui a expliqué et réexpliqué que le Cameroun est un pays multinational, avec des communautés ayant des comportements différents impossibles à niveler, et que la meilleure gestion était un État fédéral. Il s’est arc-bouté à sa fumeuse «nation au-dessus des tribus !» Il vivra cette humiliation jusqu’à la lie !

    Le Cameroun est un pays multinational, avec des communautés qui ont un comportement très différent. La perception que chaque communauté a vis-à-vis de l’État, vis-à-vis de son chef et vis-à-vis des institutions diffère profondément suivant qu’on est au Nord, au Sud, à l’Est ou à l’Ouest. Telle tribu voit en Biya un envoyé de Dieu, alors que telle autre n’y voit qu’un démon !
    Vous ne pouvez donc pas prétendre mettre un ensemble aussi hétéroclite et hétérogène dans un même moule institutionnel et les harmoniser par des décrets et des discours sur l’unité nationale!

    Ce que l’on fait dans ce cas, et que Biya aurait dû faire depuis longtemps, c’est de donner un État régional à chacun de ces segments ethno régionaux, et de chapeauter le tout par un État fédéral.

    Cela permet que les frustrations des Bamilekés, des Betis ou des Fulbés ne s’appliquent plus de manière directe sur le président fédéral, mais passent d’abord par la médiation d’un État régional qui les tamise et les amortit. De cette manière, le chef de l’État est protégé

    Mais quand celui-ci se met en tête d’assumer, lui-même et de manière directe, ces milliards de réclamations venant du Cameroun tout entier, quand il prétend jouer à une divinité toute-puissante dispensant le bonheur au gré de ses humeurs, en confisquant toutes les ressources financières et humaines, il est naturel que chaque communauté s’adresse à lui de manière directe, avec ses pratiques et ses méthodes ! Il est normal que certains le divinisent, mais il est aussi normal que d’autres l’insultent !

    Car, il faut le dire très clairement, la racaille qui se réclame de la BAS n’aurait jamais eu l’audace de s’adresser directement au Président si celui-ci avait eu, à temps, la lucidité de sous-traiter les problèmes des Bamilekés par un État qui leur est dédié !
    C’est sa prétention mortelle à faire tout, à se mêler de tout, à fabriquer son «unité nationale» qui lui rejaillit de plein fouet sur le visage ! Et qui signale aussi la mort définitive de l’État unitaire !

    Certains s‘arc-boutent sur ce système périmé, devenu dangereux pour la paix et la stabilité au Cameroun, mais il faut en sortir définitivement et immédiatement. Il faut aller à la fédération !

    Et dans les négociations qui s’engagent avec la sécession, le président de la République, qui ne s’y oppose plus comme auparavant, du moins si on en croit les déclarations de son Premier ministre, doit cesser d’être un blocage à ces évolutions absolument indispensables pour le Cameroun.

    Dieudonné ESSOMBA

  • Marché central de Yaoundé : Les affaires courent au petit trot

    Marché central de Yaoundé : Les affaires courent au petit trot

    Business

    D’après les commerçants, la Can de cette année n’a pas encore infusé une véritable fièvre marchande.

    Les maillots bradés au marché central de Yaoundé

    Bernard Njamen avait prévu la déconvenue : «l’équipementier des Lions ayant changé à quelques jours du tournoi, il était évident que nous ne pouvions plus vendre les anciens maillots estampillés du logo de l’ancien équipementier». Ce 29 juin 2019, ses prévisions sont encore plus sombres. «On ne sait pas si on pourra vendre ne serait- ce que le moindre article puisque les clients se font rares», s’alarme le jeune commerçant. Au marché central de Yaoundé ce jour, bien que les allées de cette grande place marchande reflètent la brillance du soleil des vacances, période propice pour de nouvelles tendances vestimentaires notamment, l’édition 2019 de la CAN, la première à se tenir en juin-juillet, ne participe pas de cette perspective. «Personne ne veut des anciens trucs», se désole Brice Toko, le président des vendeurs des articles de sport.

    Au moins, les clients se comptent au bout des doigts d’une seule main. A ceux-là, les maillots disponibles sont «bradés». «Les maillots de meilleure qualité viennent de Turquie, ils sont vendus à 5000 francs CFA, d’autres proviennent de Chine et sont plus abordables à 4000 francs CFA la pièce», explique ce commerçant trentenaire, qui ne parle au reporter qu’avec l’autorisation expresse de son patron.

    Parole de fan ou astuce de commerçant simplement, Badara Guèye précise que le maillot floqué au nom de Christian Bassogog, meilleur joueur de la Can 2017, est quand même vendu un peu plus cher que les autres, à 6000 francs CFA, car dit-il la qualité ne compte pas vraiment dans ce cas, juste la renommée de la star de l’équipe du Cameroun.

    Des maillots, il y en aura de toutes les façons suffisamment, car les commandes passées après la qualification des Lions indomptables n’ont pas été totalement épuisées, sans compter que le style des maillots de l’équipe nationale a été changé, «donc on patiente avant de faire d’autres commandes». «On fait du commerce et on ne peut pas renouveler les stocks juste comme cela, on fait aussi attention pour notre business, étant entendu que les résultats de l’équipe nationale peuvent impacter la vente des maillots», indique Nestor Ebanda. «J’espère qu’ils iront très loin», dit-il au sujet des Lions indomptables.

    A quelques mètres de son comptoir, le même alignement, une jeune vendeuse se montre très enthousiaste à l’idée de parler de ce sujet. Se présentant comme «spécialiste en vente de maillots», elle renseigne que ne pas avoir de problème pour liquider ses stocks, puisqu’elle vend des pièces lors des compétitions comme en dehors.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Les potins

    Zidane, l’«Algérien»

    Le cœur de Zinedine Zidane, le coach du Real Madrid bat pour les Fennecs. Le tacticien français d’origine kabyle, a encouragé les joueurs algériens: «On a envie de voir l’Algérie bien jouer pour le peuple, descendu dignement dans la rue», a-t-il déclaré sur le site goal.com le 25 juin dernier. Des propos qui feront certainement chaud au coeur aux supporters des Fennecs, d’autant que Zidane, réputé pour son profil lisse et centré uniquement sur le football, prend rarement parti et ne s’implique pas en politique. Pour l’instant, le champion du monde 1998 peut se féliciter de n’avoir pas fait un mauvais pari. Son « équipe » a défait le Sénégal (1-0) validant ainsi son billet pour les huitièmes de finale.

    Pauses-fraîcheur
    Les matchs de la Can sont entrecoupés de deux pauses en raison des fortes chaleurs, a annoncé la commission médicale de la compétition. «Tous les matchs connaîtront deux interruptions de trois minutes pour préserver le bien-être des joueurs», a déclaré cette commission, selon un communiqué publié le 19 juin Cette pause aura lieu à chacune des deux mi-temps, à la 30e et à la 75e minute, et «permettra aux joueurs des deux équipes et aux arbitres de boire et de s’hydrater le corps avec des serviettes mouillées», a-t-elle précisé.

    Lucarne

    Mauritanie, Madagascar et Burundi

    Les gagnants du passage à 24

    Ils ont rêvé d’une qualification en huitièmes de finale. Pas vraiment facile au terme de leur deuxième poule.

    L’équipe de Mauritanie

    Après sa défaite cinglante 4-1 contre le Mali pour le premier match de son histoire dans une Can, la Mauritanie avait certainement à cœur de se montrer sous un meilleur jour face à l’Angola. En se quittant sur ce score nul et vierge, les deux équipes ont signé le premier 0-0 du tournoi mais cette statistique est loin de faire l’affaire de la Mauritanie. Avec un point, elle est désormais condamnée à la victoire pour son dernier match si elle veut espérer pouvoir sortir du groupe E et voir les huitièmes de finale (un nul pourrait suffire pour les Maurabitounes mais cela dépendra du résultats des autres équipes).

    Si l’Égypte et le Nigeria sont déjà qualifiés, Madagascar a un bon coup à jouer. Madagascar, pour sa première Can, se retrouve dans une position d’outsider inattendue après son nul contre la Guinée (2-2) et son succès face au Burundi (1-0). «Nous n’avons rien à perdre maintenant. Nous allons simplement jouer et nous amuser», a commenté l’ailier Anicet Andriahanantenaina, qui ajoute: «Ce sera difficile d’aller jusqu’au bout mais nous allons essayer d’aller aussi loin que possible».

    Il est à souligner que c’est grâce au passage du nombre d’équipes à 24 que la Mauritanie, Madagascar et le Burundi font leur apparition sur la carte du foot continental, avec une première participation dans l’épreuve. Madagascar n’a disputé jusque-là aucune Can, mais dispose de l’effectif le plus âgé du tournoi, avec une moyenne d’âge supérieure à 28 ans. Les Mourabitounes, 103es au classement Fifa, ont été logés dans un groupe difficile, avec la Tunisie, l’Angola et le Mali.

    Corentin Martins a réussi un exploit en qualifiant la Mauritanie pour sa première Can, en devançant lors des éliminatoires le Burkina Faso. Les Barea de l’attaquant de Clermont (L2) Faneva Adriatsima, espèrent rivaliser avec le Burundi et la Guinée dans leur poule pour voir les huitièmes. S’ils ont réussi à neutraliser le Sénégal durant les éliminatoires (2-2), ils n’ont pas convaincu lors de la préparation, avec deux défaites contre le Kenya (1-0) et la Mauritanie (3-1).

    Le Burundi a privé la Can d’une star: les Hirondelles ont éliminé les Panthères de Pierre-Emerick Aubameyang, en devançant le Gabon dans leur poule de qualification. L’exploit est d’autant plus surprenant qu’ils sont l’équipe la moins bien classée de la compétition au classement Fifa, à la 134e place. Le sélectionneur burundais Olivier Niyungeko a choisi trois joueurs évoluant en Europe pour le tournoi en Égypte: les attaquants Saïdo Berahino (Stoke/D2 anglaise), Mohamed Amissi (Breda/D2 néerlandaise) et le milieu Gaël Bigirimana (Hibernian/D1 écossaise). L’équipe a notamment réussi à faire un nul contre l’Algérie (1-1) lors de la préparation.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Coup franc

    2019 : la Can des records

    552 joueurs, 24 pays qualifiés, précocité et longévité…Arrêt sur les autres titres de la compétition.

    Les Aigles du Mali, jeunes dans l’esprit et dans le sang

    Le joueur le plus jeune : Marc Lamti (Tunisie)

    La Coupe d’Afrique des nations fête ses 62 ans, et en cette 32e édition, un cap est en passe d’être franchi : pour la première fois, des footballeurs nés au XXIe siècle vont peut-être jouer. La palme du plus jeune revient au défenseur de la Tunisie Marc Lamti, âgé de 18 ans et 4 mois. Il est l’unique joueur né en 2001 convoqué pour la Can 2019. Germano-tunisien de naissance (il a vu le jour à Cologne le 28 janvier 2001), Lamti, qui évolue au Bayer Leverkusen, a décidé de représenter les Aigles de Carthage.
    Le Malien Cheick Doucouré, le Bissaoguinéen Edimar Vieira Ca « Ivanov » et le Burundais Mohamed Amissi sont, eux, nés en 2000.

    A noter que Marc Lamti ne battra pas le record du plus jeune joueur à avoir joué un match de CAN. Cette distinction revient au Gabonais Shiva Star N’Zigou, qui avait 16 ans, 2 mois et 30 jours quand il joua (et marqua) contre l’Afrique du Sud lors de la CAN 2000. Toutefois, l’ancien attaquant a admis, dans une interview donnée durant l’été 2018, qu’il avait été contraint de mentir sur son âge au début de sa carrière et qu’il avait en fait cinq ans de plus.

     

    Le joueur le plus âgé : Naby-Moussa Yattara (Guinée)

    Le gardien de la Guinée, Naby-Moussa Yattara, est le joueur le plus âgé de la compétition. Le portier du Syli national et de l’AS Excelsior, un club de l’île de La Réunion, a le titre de doyen avec ses 35 ans, 5 mois et 9 jours (son âge précis au coup d’envoi de la CAN 2019, le 21 juin).

    Il reste quand même à bonne distance du record absolu établi en 2017 par la légende du football égyptien, Essam El Hadary. Le gardien des Pharaons avait 44 ans et 21 jours quand il disputa la finale de la dernière Can. El Hadary est aussi le plus vieux joueur d’une Coupe du monde (45 ans, 5 mois et 11 jours lors du Mondial 2018). Il aurait aimé améliorer son record dans cette Can 2019, mais Javier Aguirre ne l’a pas convoqué.

    La sélection la plus jeune : le Mali

    Le Mali, qui a failli manquer cette CAN sur disqualification, se présente avec le groupe le plus jeune. La moyenne d’âge des Aigles ne s’élève qu’à 24,21 ans. Un coup d’œil au groupe de Mohamed Magassouba permet de mieux comprendre. Le joueur le plus âgé, le gardien Ibrahim Bosso Mounkoro, n’a que 29 ans. Et à l’autre extrémité, on retrouve deux joueurs qui n’ont encore que 19 ans : Cheick Doucouré et le grand espoir Sékou Koïta.

     

    La sélection la plus âgée : Madagascar

    Pour la première CAN de l’histoire de la sélection malgache, Nicolas Dupuis a misé sur l’expérience. L’entraîneur français a notamment convaincu Jérémy Morel de rejoindre les Barea. Résultat, le Lyonnais en est le doyen avec ses 35 ans, 2 mois et 21 jours, et la moyenne d’âge du groupe grimpe : 28,65 ans. Il est vrai que sur les 23 internationaux, 8 d’entre eux (dont 7 joueurs de champ) ont plus de 30 ans.

    Les meilleurs buteurs : André Ayew et Asamoah Gyan (Ghana)

    Sauf exploits retentissants, Samuel Eto’o va garder son titre de meilleur buteur de l’histoire de la Can encore quelques années. Le Camerounais est au sommet avec ses 18 buts en 6 CAN. Dans cette édition 2019, deux joueurs peuvent se rapprocher, et tous deux portent les mêmes couleurs : ce sont les attaquants des Black Stars, les Ghanéens André Ayew (29 ans) et Asamoah Gyan (33 ans), 8 buts chacun. Ils sont les meilleurs buteurs en activité et présents pour cette Can.

    Le record de buts sur une seule Can sera aussi difficile à aller chercher. En 1974, le Congolais Pierre Ndaye Mulamba – décédé en début d’année à l’âge de 70 ans – avait marqué à 9 reprises sous les couleurs du Zaïre. Ces 20 dernières années, les meilleurs buteurs n’ont pas dépassé les 5 réalisations sur une seule édition.

    Les pays novices ne sont plus que douze

    Avec ce passage de 16 à 24 qualifiées, 3 sélections qui n’avaient jamais disputé de Coupe d’Afrique des nations vont connaître leur première : le Burundi, Madagascar et la Mauritanie. Cela signifie qu’il reste 12 pays encore jamais apparus en phase finale de la Can: la République Centrafricaine, les Comores, Djibouti, l’Erythrée, l’Eswatini, la Gambie, le Lesotho, le Tchad, Sao Tomé et Principe, les Seychelles, la Somalie et le Soudan du Sud.

    Le vieil habitué : l’Égypte

    Les Pharaons et la Coupe d’Afrique des nations, c’est une vieille histoire. L’Égypte avait participé et remporté la première édition en 1957. Une Can qui ne regroupait que trois nations – l’Égypte, l’Ethiopie et le Soudan –, rappelons-le. En 32 éditions, elle compte 24 apparitions en phase finale ; aucun pays ne fait mieux. La Côte d’Ivoire (23 qualifications) et le Ghana (22 qualifications) suivent.

    L’expert : toujours l’Égypte

    Les différentes sélections d’Égypte ne perdent pas souvent quand elles se hissent en finales. Certes, la dernière fois, ça s’est mal passé face au Cameroun. Mais généralement, les Pharaons savourent : en 9 finales, ils se sont imposés 7 fois. Le Cameroun compte lui 5 victoires pour 2 défaites.

     

    Le malheureux : le Ghana

    Depuis 1982, les Black Stars courent après une cinquième victoire en Can. Ce n’est pas faute d’essayé… Mais à côté de ses quatre sacres, le Ghana traîne cinq défaites en finales. C’est la nation qui a perdu le plus de finales devant le Nigeria (quatre défaites). Le Burkina Faso, la Guinée, la Libye, le Mali, l’Ouganda et le Sénégal partagent un triste titre: celui de seules nations à s’être hissées en finales mais à n’avoir jamais gagné.

    Source: CAF

    Can Total Égypte 2019 : Les primes en hausse

    Avec l’augmentation du nombre d’équipes, les gratifications ont subi un ajout.

     

    La 32e édition de la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations a été lancée le 21 juin dernier au Caire. Pour la première fois, 24 nations africaines prennent part à cet événement sportif d’envergure.

    À l’occasion de cette compétition « spéciale », la Confédération africaine de football (Caf) a revu à la hausse le montant des primes. « On a augmenté le prize money pour la compétition », a déclaré Ahmad Ahmad, président de l’instance faitière du football africain.

    Ainsi, le vainqueur de cette compétition va empocher 4 millions d’euros, soit 2 624 571 979 de FCFA. La prime du malheureux finaliste n’a pas encore été révélée. Mais l’on sait qu’elle va également augmenter. Chacune des 24 équipes recevra 600 000 dollars (346 032 000 de FCFA).

    D’après certains analystes sportifs, l’augmentation des primes de participation à la fête du football africain est la conséquence de l’accroissement du nombre d’équipes.

    Le nombre de matches a aussi augmenté. Le site sports.gouv.fr parle de 32 matches pour 24 équipes à la compétition.
    Rappelons qu’en 2017, les lions indomptables, vainqueurs de la compétition au Gabon, avaient perçu la somme de 3,5 millions d’euros, soit, 2 299 325 000 de FCFA. L’Égypte, malheureux finaliste avait perçu un peu moins de cette somme. D’après le site football365.fr, le finaliste a reçu un chèque de 2 millions de dollars (1 153 270 000 FCFA). Les deux demi-finalistes avaient touché 1,5 million de dollars chacun.

    Les équipes éliminées à l’issue du 1er tour -celles classées troisièmes et quatrièmes de leurs poules- sont reparties respectivement, avec 540 000 et 446 000 euros. La Confédération africaine de football avait procédé au versement de 223 000 euros à chacune des équipes qualifiées, au titre d’avance pour leurs préparations au tournoi final.

    Il faut rappeler que cette édition de la Can a connu beaucoup de remous en ce qui concerne les primes. Les joueurs des équipes qui prennent part à la phase finale de la Can Total 2019 ont exigé une augmentation de leur prime. C’est le cas du Cameroun, dont le budget de participation à la compétition est estimé à plus de 2 milliards de francs CFA.

    Joseph Julien Ondoua O., Stg

  • Cameroun-Bénin : Le match entre deux portes

    Cameroun-Bénin : Le match entre deux portes

    Selon les spécialistes, tout peut arriver entre les Lions indomptables et les Ecureuils.

    Les Lions du Cameroun

    Le moment de vérité est arrivé. Le 0-0 n’est ni un superbe résultat ni un désastre pour l’équipe du Cameroun. Cependant, Clarence Seedorf, l’entraîneur, pense que ses joueurs montreront leur meilleur visage ce mardi. «Nous sommes une équipe qui répond toujours présent dans les moments délicats. Mais nous parlons de 90 minutes où tout peut se passer. Tu peux perdre un joueur au bout de cinq minutes, ou cela peut arriver à ton adversaire. Mais nous sommes prêts pour mettre la pression sur la cage adverse», a-t-il commenté sur les ondes de la CRTV-radio, quelques minutes après le nul vierge concédé face au Blacks Stars du Ghana.

    Sur la base des calculs, le Cameroun et le Bénin (respectivement 1er et 3e) une défaite ne serait pas non plus rédhibitoire si, dans le même temps, les Blacks Stars et les Djurtus ne parviennent pas à se départager. En tout cas, bien que requinqué par les sondages, le Cameroun n’est pas totalement sorti d’affaire. En réalité, c’est bien plus que cela que les Lions indomptables jouent. «C’est comme une finale. Les trois points seront obligatoires. Si on perd, il nous sera difficile de finir sur le podium», avise Florent Mbia Abena, ex-coach adjoint d’Apejes de Mfou. Ainsi, pour mardi, le qualificatif de match charnière, archi rebattu, semble cette fois-ci approprié. Bertin Ebwele, ancien Lion indomptable présent sur un plateau de la CRTV-Télé, compte sur ses cadets : «leur façon de réagir aux événements, de contrôler leurs temps faibles et d’assommer leur adversaire quand il le faut, dessine de plus en plus les contours d’un potentiel gagnant».

    Dans les paroles des joueurs aussi, le discours a changé par rapport aux deux premières rencontres. La bande à Clarence Seedorf ne cache plus sa soif de titre, sûre de ses forces, la confiance au maximum. Chez nos confrères d’Equinoxe Télévision, Christian Bassogog s’imagine d’ailleurs plutôt une issue favorable. «Nous sommes préparés pour faire un grand match en sachant que nous allons avoir le soutien de notre public, regarder le but adverse et faire ce que nous devons faire, assumer notre statut et tenter de gagner. Nous devons gagner coûte que coûte».

    Chez les supporters, la confiance est au rendez-vous. «Personnellement, contrairement aux rabat-joie et autres pessimistes, je crois fermement aux chances de qualification de l’équipe nationale du Cameroun. En valeur intrinsèque, elle est beaucoup plus talentueuse que son adversaire et, au vu de l’enjeu de la partie, elle n’a pas besoin de motivation supplémentaire pour faire un grand match», énonce Georges Parfait Owoundi, journaliste.

    Adversaire
    De son côté, la formation béninoise mise naturellement sur l’impact physique et la vivacité. «Même si l’axe central des Ecureuils semble avoir retrouvé plus de sérénité contre la Guinée Bissau, pour l’avoir bien observé lors de ses deux premiers matches, ma grande crainte est que l’entraîneur aligne une nouvelle fois une défense avec un maillon faible sur le flanc droit, provoquant déséquilibres, hésitations et pertes de balles dangereuses qui peuvent être potentiellement exploitées par l’adversaire», esquisse Florent Mbia Abena.

    Sur la base des analyses du technicien, le Cameroun devra être hyper concentré sur toutes les balles arrêtées près de sa surface de vérité. Au niveau du milieu de terrain, les Burundais ont l’habitude de donner beaucoup d’énergie dans les duels et sur les seconds ballons. Mais, pour Florent Mbia Abena, il faudra jouer intelligemment pour éviter les contacts rugueux et inutiles dont l’adversaire pourrait abuser, avec l’objectif de remporter coûte que coûte la bataille à ce niveau.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Clarence Seedorf

    Le Cameroun est la deuxième équipe la plus titrée du continent (Cinq CAN remportées derrière une Égypte titrée sept fois, Ndlr). Il fait toujours partie des favoris au même titre que le Ghana, le Maroc ou l’Égypte. Je vais vous donner un exemple : quand l’Allemagne débute un tournoi, elle est favorite même si elle a perdu cinq matches de suite juste avant… C’est la même chose pour l’Italie ou le Brésil. On sent qu’on a la possibilité de faire quelque chose d’important ici. Je suis convaincu qu’on a les moyens de conserver notre titre, malgré le niveau de l’adversité. Entre les jeunes joueurs enthousiastes à l’entraînement et ceux qui sont plus expérimentés, on a trouvé le bon équilibre. Après le premier match, on y verra plus clair, parce qu’on pourra s’appuyer sur quelque chose de tangible. Nous sommes préparés pour faire face à ce challenge. Physiquement, tactiquement, mentalement, on a assez de talent pour briller.

    Samuel Eto’o

    Moi j’attends la victoire finale! Parce que quand vous voyez cette belle équipe que nous avons, avec ses illustres encadreurs, nous ne pouvons pas espérer moins, même si le football reste ce qu’il est.

     

    Dans les communautés

    Supporters béninois : entre ballon rond et vaudou

    A partir de Yaoundé, les compatriotes du président Patrice Talon restent accrochés aux prédictions déclamées par « celui qui voit loin ».

    Masque vaudou, symbole de victoire

    Face à la Guinée-Bissau, le 29 juin à Ismaïlia, les Ecureuils du Bénin ont concédé le nul (0-0). Avec 2 points pris en deux matches, les Béninois auront besoin de réaliser une bonne performance face aux Camerounais, le 2 juillet prochain. Une qualification de l’équipe en huitièmes de finale de la compétition est à ce prix. Chez les supporters béninois résidant dans la capitale camerounaise, cela ne relève pas d’une probabilité. «Nous sommes sûrs que nous serons qualifiés en corrigeant les Lions indomptables», affiche Kadi Adeyemi, aide-boucher au marché Mvog-Ada. Sa certitude se nourrit même d’un score : «2-0, c’est çà !». Le jeune homme est d’autant plus confiant que, depuis Cotonou, Togbui Gnagblondjro III, le président des prêtres vaudou du Togo, l’a prédit. Le pronostic de «celui qui voit loin» a d’ailleurs fait le tour du pays et du monde, car amplifiée par certains médias internationaux.

    Avec ses compatriotes, Kadi Adeyemi dit avoir fait appel au «juju», une divinité aquatique qui protège le gardien de but et empêche les ballons d’y pénétrer. «C’est l’une des choses que le président des prêtres a demandées à tous les Béninois de faire avant le match de mardi prochain», affirme-t-il. A côté, Jean Nigabgayi dévoile d’autres astuces conseillées par Togbui Gnagblondjro III et ici captées via les réseaux sociaux. «Il a demande d’acquérir les poupées magiques. Elles serviront à souhaiter que l’équipe des Ecureuils marque un but avant les 15 premières minutes au Lions indomptables. Pour cela, le jour du match, il faut tenir une aiguille fermement entre le pouce et l’index et piquer doucement la partie de la poupée là où vous voulez produire un effet sur l’adversaire» précise le mode d’emploi.

    Pour le match contre le Cameroun, Kadi Adeyemi renseigne qu’une «Ong vaudou» basée à Cotonou pilote une opération de collecte de fonds pour «nourrir le grand juju» qui veille sur les Ecureuils en Egypte. «Sans aucun doute c’est le grand juju qui va canaliser les bonnes vibrations des supporters béninois pour changer l’histoire» affirme Jean Nigabgayi.

    Jean René Meva’a Amougou

  • Vestiaires : La prime, ce gros serpent de mer

    Vestiaires : La prime, ce gros serpent de mer

    La tendance à la revendication du pactole s’accélère avant et après les compétitions d’envergure. 

    Bal de faux-semblants à l’aéroport de Nsimalen

    Primes. Le mot s’est, une nouvelle fois, installé sur les lèvres de Lions indomptables peu avant leur départ pour l’Egypte. Dans la tanière, il y a eu crise. Accouché dans la douleur, un plan de sortie a été validé et Clarence Seedorf et ses poulains ont pu embarquer, ventilant derrière eux, une déclaration. «Les mouvements de réclamation ont été initiés par une petite nébuleuse. C’est la perversion des valeurs sportives par l’argent», confie la cellule de communication du Minsp. «En l’absence de référents clairement identifiés sur la question des primes, les joueurs s’adonnent souvent à des initiatives désordonnées, causant doublons et chevauchements et s’exposant au désaveu sans sommation quand une fraction concurrente parvient à persuader le gouvernement est sur la bonne ligne», ajoute-t-on dans le même service.

    Illustrations
    De là, on en sait un peu plus sur le rapport de force qui s’est joué entre les joueurs et les pouvoirs publics. Au cœur de ce constat : la forme gazeuse de la colère des joueurs à la veille d’une compétition d’envergure d’une part, et les reproches réciproques d’autre part. «Cette affaire est un gros serpent de mer pour bon nombre d’équipes africaines», se désole le journaliste Jean-Bruno Tagne. La preuve : à chaque fois, la question explosive des primes revient sur la table. Et pas seulement au Cameroun.
    Il y a quelques jours, les joueurs du Syli National étaient en grève pour une affaire de primes. Les coéquipiers de Naby Keita ont même refusé de s’entraîner, instaurant un bras de fer avec les dirigeants. Nerf de la guerre : 19 millions de FCFA (à chaque joueur) de primes non payées lors des éliminatoires de la CAN 2019.

    En 2015, un gros malaise a pollué les relations entre la fédération de football, le gouvernement et le Trésor public ivoiriens. Une grande partie des primes des Éléphants victorieux de la Can 2015 se serait volatilisée: plus de 700 millions FCFA sont dans la nature. Un gros scandale !

    En 2018, c’était au tour des filles maliennes qualifiées à la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations féminine de football. La sélection malienne a dû le faire savoir bruyamment avant de rentrer dans ses droits.

    A quelques jours du début des éliminatoires de la CAN 2019, le camp de regroupement des Panthères du Gabon s’était vidé pour une affaire de primes; les joueurs avaient quitté l’hôtel protestant contre une décision du ministère des Sports. En effet, le ministère des Sports n’avait décidé de payer que 18 joueurs sur les 25 en regroupement ainsi que 3 membres sur les 11 qui composaient le staff.

    En 2017, les joueurs de la RD Congo avaient fait grève pour protester contre le non-versement de leurs primes de participation à la Coupe d’Afrique des nations.

    Après avoir remporté le trophée de la Coupe d’Afrique des Nations du football féminin au Cameroun, des Super Falcons du Nigeria avaient la grève pour obtenir le paiement de leurs primes et bonus. La capitaine Rita Chikwelu et ses camarades étaient allées jusqu’au parlement. Elles réclamaient 23 650 dollars, soit 14.429.040 FCFA pour chacune d’entre elles. Elles avaient alors décidé de ne remettre le trophée de la Coupe d’Afrique à la Fédération que lorsque leurs revendications seraient satisfaites. Les Super Falcons, également vainqueurs de la Coupe d’Afrique en 2014 avaient déjà dû faire du bruit à l’époque pour rentrer en possession de leur argent.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Les potins

    Pactole
    A en croire le journal français Les Echos, les Lions de la Téranga recevront un joli pactole en cas de victoire finale. Le média croit savoir que d’après le protocole signé entre l’équipementier du Sénégal, Puma, et la Fédération sénégalaise de football, chaque joueur recevra 131 millions de francs Cfa si le Sénégal est champion d’Afrique. Sans compter la prime de qualification de 65,5 millions. Par ailleurs, le protocole stipule aussi que les joueurs recevront 49 millions de FCFA s’ils sont demi-finalistes et 65 millions s’ils sont finalistes malheureux.

    Cash
    Une équipe qui dispute la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations 2019 (21 juin-19 juillet en Egypte) touchera au minimum 600.000 dollars, tandis que le futur vainqueur de la CAN 2019 empochera 4,5 millions de dollars, a indiqué le président de la Confédération africaine de football (CAF), Ahmad, en marge du tirage au sort du tournoi. «Evidemment, on a augmenté le prize money pour la compétition , a assuré le Malgache, qui n’a pas précisé le montant des autres primes.

    Assistance vidéo (VAR)
    Le sujet n’a pas franchement mis le football continental dans les meilleures dispositions ces dernières semaines. Toutefois, Ahmad Ahmad, le président de la Confédération africaine de football, a en parlé au cours d’une conférence de presse le 20 juin dernier au Caire. Une assistance vidéo sera finalement partie prenante en Égypte, même s’il faudra attendre les quarts de finale pour qu’elle entre en jeu. «Si vous regardez les différents pays qui utilisent la VAR, vous voyez bien qu’ils ne se précipitent pas. C’est une technologie que l’on ne maîtrise pas encore totalement. Après discussions et concertations avec les techniciens, nous avons hésité entre les demi-finales et les quarts de finale. Le comité exécutif a tranché pour les quarts. […] N’oubliez pas qu’il y a des matches où il n’y a pas de VAR ! », a longuement expliqué Ahmad Ahmad pour justifier cette décision.

    Binationaux
    À la Can 2019, de nombreuses sélections comptent sur le renfort de joueurs binationaux français. Ils évoluent sous le maillot du pays de leurs parents ou de leurs grands-parents. Jusqu’en 1964, il était possible pour les footballeurs de jouer successivement pour plusieurs équipes nationales, à condition d’en avoir la nationalité : soit par la double nationalité, soit en ayant été naturalisé. La FIFA est alors intervenue pour réguler la situation. Depuis, les binationaux devaient faire un choix concernant leur nationalité sportive avant l’âge de 21 ans : un jeune joueur ayant par exemple défendu les couleurs françaises en catégories juniors ou espoirs ne pouvait plus opter pour une autre sélection après cet âge-là.

    Bobo Ousmanou

  • Favoris : Égypte et Sénégal en pôle position

    Favoris : Égypte et Sénégal en pôle position

    L’une a déjà été sacrée 7 fois, l’autre cherche désespérément une première couronne. Un abime les sépare en termes de palmarès, mais les sélections égyptiennes et sénégalaises semblent a priori les mieux armées pour s’imposer lors de cette Can 2019. Attention toutefois de gagner les matches avant de les avoir joués, car d’autres prétendants sont bien embusqués.

    Les Lions de la Teranga aucours d’une séance d’entraînement

    Égypte : En route pour le 8e ciel
    Pays organisateur de la 32e édition de la Coupe d’Afrique des nations, la première à rassembler 24 équipes (du 21 juin au 18 juillet prochain), l’Égypte, qui a déjà été sacrée 7 fois, est résolument en quête d’une 8e couronne qui ferait d’elle la reine incontestée d’Afrique. Après avoir trébuché en finale en 2017 face au Cameroun, les pharaons vont remettre le couvert pour un festin qu’ils espèrent eux-mêmes clôturer le 18 juillet prochain. Leurs atouts majeurs : leur star planétaire, Mohamed Salah, et un public passionné à la limite du fanatisme, et qui a longtemps été sevré de football par des années de huis clos forcé. Attention à la marmite qui bout. Savant dosage de joueurs locaux et de stars internationales à la valeur ajoutée incontestable (Salah, Elneny), le groupe conduit par Javier Aguirre a les moyens de ses ambitions.

    Sénégal : Maintenant ou jamais
    Sur le papier, ce sont les meilleurs. Mais encore faudra-t-il le prouver sur le terrain et c’est ce que le Sénégal n’a jamais su faire. Qualifiés haut la main, les Lions de la Teranga devront remédier à leur tendance à se crisper à l’approche des matches décisifs. Emmenés par un Sadio Mané au sommet de son art, les hommes d’Aliou Cissé comptent dans chaque ligne des joueurs de grand talent (Koulibaly, Gueye, Niang, Sarr) et ont trouvé un portier sûr en la personne d’Édouard Mendy (Reims). Pour aller loin, ils devront sortir d’un groupe composé de la Tanzanie, du Kenya et de l’Algérie, équipe que les Lions avaient déjà croisée au premier tour lors des éditions 2015 et 2017. S’ils se loupent une nouvelle fois, les autres Lions d’Afrique pourraient s’installer durablement dans la spirale de loosers. Ça n’est jamais bon pour le moral.

    Nigeria : Des aigles en embuscade
    Pour son retour à la CAN depuis l’édition 2013, remportée en terre sud-africaine, le Nigeria a difficilement vaincu le Burundi (1-0) samedi dernier à Alexandrie. Un démarrage au petit trot qui n’entame en rien les ambitions qui veut réaliser un coup, de sa position outsider. Équipes toujours jeune, mais désormais riche de l’expérience d’une phase finale de Coupe du monde, les coéquipiers de Wilfred Ndidi progressent discrètement, mais sûrement sous la houlette du technicien Gernot Rohr. Les triples champions d’Afrique ont progressé depuis. OdionIghalo a retrouvé ses qualités de finisseur, Ahmed Musa n’a pas perdu les siennes, et le Nigeria a vu émerger ces derniers mois de jeunes talents offensifs. Les Chukwueze, Osimhen, Onuachu et autre Kalu ont permis au sélectionneur de rebattre les cartes et de faire mieux que compenser le départ à la retraite internationale de Victor Moses. Capitaine au long cours, John Obi Mikel est quant à lui revenu de son exil chinois et tient de nouveau la barre dans l’entrejeu.

    Maroc : les Lions et le Renard
    Après un Mondial 2018 de bonne facture, le Maroc ne manque pas d’atouts, au moment d’aborder cette CAN 2019. Sortis vainqueurs d’une poule comprenant le Cameroun, le Malawi et les Comores, les Lions de l’Atlas présentent un collectif soudé et rodé. Si le secteur offensif marocain n’est pas une machine à but, leur milieu de terrain excelle dans la créativité avec les Ziyech, Belhanda et autre Boussoufa.

    Pour prétendre au sacre final, le Maroc devra d’abord se dépêtrer d’un groupe particulièrement relevé. Si la Namibie ne paraît pas de taille à lutter, les coéquipiers de Mehdi Benatia retrouvent ensuite une vieille connaissance : déjà sur sa route lors de la CAN 2017 et en éliminatoires du Mondial 2018, la Côte d’Ivoire va de nouveau croiser le fer avec le Maroc. Vainqueur des deux manches précédentes, Hervé Renard jouera-t-il encore un sale tour au pays qu’il amena sur le toit de l’Afrique il y a quatre ans, en Guinée équatoriale ? Réponse le 28 juin à l’occasion de ce qui sera l’un des principaux chocs du premier tour.

    Xavier Tassous

    Les outsiders

    Les Écureuils peuvent surprendre

    Le Cameroun et le Ghana avancent en favoris alors que le Bénin veut créer la sensation.

    Les Écureuils du Bénin

    En quatre participations à la Coupe d’Afrique des nations, le Benin n’a pas gagné un seul match. Avant de regarder plus loin que le bout de leur nez, les Béninois devraient d’abord avoir en tête de savourer un premier succès dans la prestigieuse compétition. Ils croient tenir le bon bout cette fois-ci. Impressionné par leur parcours de qualifications plus que convainquant (ils ont sorti le Togo), l’ancien capitaine des Lions Indomptables, Samuel Eto’o les voit même créer la surprise.

    Le sélectionneur, Michel Dussuyer, peut compter sur des joueurs expérimentés: Poté, Mounié, Sessegnon, Adéoti, Imorou, Adénon… En préparation, la dernière victoire en date, face à la Mauritanie (3-0), a été probante et laisse entrevoir de belles promesses. Des promesses qu’il faudra bien tenir, car en face ça ne sera pas du menu fretin. Le Cameroun est tenant du titre alors que le Ghana reste une valeur sûre du football africain, malgré quelques passages à vide.

    Mais il y a là un coup à jouer. Kwadwo Asamoah et Thomas Partey sont les seuls Ghanéens qui évoluent encore dans des équipes européennes de premier plan, bien loin du ratio des dernières années. Pire encore, les Black Stars sont régulièrement mêlés à des scandales extra sportifs. Après la suspension de la Fédération par la FIFA pour une affaire de corruption, c’est la retraite puis le retour d’Asamoah Gyan qui ont perturbé le football ghanéen. Pas le meilleur moyen de préparer une CAN.

    Un 2e outsider
    Une petite aubaine pour l’autre outsider du groupe. Après soixante ans d’absence sur la scène continentale, la Guinée-Bissau avait découvert les joies d’une phase finale de CAN en 2017. Deux ans plus tard, les Djurtus sont de retour lors de la grand-messe du football africain. Après une première expérience soldée par des performances intéressantes, mais vierges de victoires, les hommes de Baciro Candé vont chercher à franchir un cap. L’effectif a gagné en maturité depuis son voyage au Gabon il y a deux ans, et n’a pas volé sa qualification pour la phase finale 2019. Les partenaires de l’Ajaccien Joseph Mendes ont terminé premiers d’un groupe où l’on retrouvait également la Namibie, le Mozambique et la Zambie. Un exploit réalisé avec seulement deux victoires, mais également un seul revers. Désormais, l’objectif de la Guinée-Bissau sera de ne pas terminer dernière de ce groupe F.

    Xavier Tassous