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Pandémie du COVID 19 au Cameroun, possibilité d’une relance économique : le plan d’assistance publique en question

La pandémie du COVID 19 que traverse le monde restera Evènement le plus marquant de ce 21e siècle dont l’histoire et l’humanité retiendront.

Tant son impact traverse largement la sphère sanitaire. Dans l’observation cette crise sanitaire conduit inexorablement à une crise économique sans précédent eu égard aux conséquences graves vécues à l’échelle mondiale. Dans tous les Etats, l’activité et la majorité des secteurs de l’économie sont frappés sans exception. Alors même que la crise bat encore  son plein, nombre des Etats industrialisés grands et petits affichent déjà des signes évidents de récession.

Dès lors, les plus avertis planchent sur les questions de la relance des activités, voire la reconstruction du tissu économique procédant à la réflexion qui sied en pareille circonstance. Dans l’espoir d’une stabilisation proche, le gouvernement camerounais, sur instruction du Président de la République, a entendu prendre la pleine mesure de l’impact de cette pandémie sur l’activité économique nationale. Une étude a été implémentée avec la participation des regroupements patronaux et certains partenaires économiques.

Mais, la plus importante question est celle de savoir où trouver les moyens nécessaires au financement de la relance une fois que le diagnostic sera établi ? Considérant qu’au plan mondial les donateurs eux-mêmes subissent la même catastrophe et sont à la recherche des moyens pour le redressement de leur situation. Ici l’ingéniosité, l’imagination et la volonté politique sont des valeurs à la mode. Les propositions affluent sans préjudice de redondance.

Traditionnellement, le système international dominant offre des solutions multiples et connues de tous, par les mécanismes de l’aide publique au développement dans ses différentes formes de prêts, dons, assistance financière et technique etc. Celle-ci dans le cas d’espèce nécessite un consensus mondial pour faire tourner de manière concertée la planche à billets. Au vu des nombreuses inégalités souvent révélées jusque-là par ces politiques au détriment des plus faibles, le choix de cette éventualité demeure donc incertain pour les pays africains et le Cameroun.

Par ailleurs, la coopération multilatérale sous la conduite des institutions de Bretton Woods (FMI et de la Banque mondiale), offre un ensemble de solution dont les souvenirs restent vivaces dans les consciences et la seule évocation du plan d’ajustement structurel ferait pâlir plus d’un citoyen fonctionnaire au Cameroun et  ailleurs. Sans nul doute qu’on pourrait trouver cette fois une autre appellation. Pour la coopération bilatérale et les partenaires directs historiques, ces derniers sont chacun dans la même situation. Une prétendue aide venant de leur part ne saurait relever que d’une escroquerie politique.

Choix audacieux et actes politiques exceptionnels

Il est temps de croire en nous, à notre potentiel et de poser des actes politiques exceptionnels. L’Afrique est depuis toujours qualifiée de ne pas suffisamment être ancrée dans l’histoire, de tout subir et ne jamais savoir anticipé. Cette nouvelle étape que traverse l’humanité doit permettre au continent de marquer sa présence dans le concert des nations. L’Afrique politiquement absente, institutionnellement faible et fort heureusement riche en ressources, une prise de conscience est donc aussi nécessaire qu’urgente dans les Etats africains en général et pour l’Afrique en miniature qu’est le Cameroun.

Le besoin de financement sera important et penser que les fonds nécessaires à la reprise et la reconstruction, car il s’agit bien de cela et non d’une simple relance, ne pourraient provenir que des partenaires ou de l’ingéniosité des autres est un leurre. Alors qu’en temps normal nos Etats n’obtiennent que douloureusement les concours financiers nécessaires auprès de ces institutions, ce qui le serait encore plus aujourd’hui, la situation étant exceptionnelle.

Les financements sur l’Afrique sont très souvent liés à de multiples conditionnalités, lesquelles ont toujours conduit à un assujettissement des gouvernements, à la perte de la souveraineté et à perpétuer les inégalités à l’intérieur des Etats. Par ce que ces programmes sont constitués comme des packages auxquels on souscrit ou pas. Les objectifs n’épousant pas totalement les besoins propres. Il vaut mieux d’abord compter sur sois même dans cette quête aux financements qui s’ouvre et la concurrence s’annonce rude.

Face au Cameroun et à l’Afrique centrale, les demandeurs seront nombreux et l’offre très sélective. L’accès au financement est naturellement adossé sur tous les marchés à la garantie, fondement du crédit et de la création monétaire. Pour cela, il existe des ressources qui donnent de la monnaie et d’autres qui sont de la monnaie. En disposer est un atout majeur dans une négociation en qualité de valeur refuge et garantie réelle.

Pour le Cameroun, il est urgent de prendre des décisions politiques fortes, sur les ressources à valeur de monnaie dont la plus importante serait  la nationalisation immédiate de l’exploitation des mines d’or et de diamant. Les compensations aux opérateurs en place devant être examinées en temps utile. L’objectif direct est d’obtenir synergie gouvernementale par laquelle le ministère en charge de l’exploitation minière mettra à la disposition du ministère des Finances un stock d’or et de diamant, actifs précieux à la création monétaire comme contrepartie ou garantie pour toute négociation.

Pour un financement juste et efficace, l’audace politique donne la primauté au financement endogène de la relance économique par la création monétaire. Le gouvernement doit avoir l’ambition et la volonté de s’offrir à la sortie de cette crise une souveraineté monétaire et trouver des solutions durables au financement de l’économie nationale. Car, le financement par le crédit dans ce cas voudrait qu’on exploite la création monétaire de ceux qui ont été ingénieux et manquer ce rendez-vous avec notre histoire. L’Occident créera comme souvent de la monnaie sur nos ressources et nous irons emprunter avec des conditions en payant des intérêts avec toutes les conséquences que l’on connaît. Certains pourraient voir ici l’occasion de ressusciter l’épineuse question du franc CFA à raison, que non c’est tout  un autre débat.

Une question de responsabilité et de patriotisme

Toutes les couches sociales ayant été affectées, l’ensemble du pays exprime des grandes attentes à l’endroit des pouvoirs publics. Même s’il faut tempérer ce sentiment du retour en force à l’Etat providence, le gouvernement a le droit et l’obligation d’intervenir. De la ménagère au grand industriel, en passant par les chefs d’entreprise de toutes catégories, les commerçants, les artisans et les petits acteurs de proximité du secteur informel, tous et chacun, attendent une action de l’Etat en leur faveur.

Cependant, reste importants de relever que, de manière permanente, des mécanismes formels sont mis en place par l’organisation étatique et que ceux-ci sont peu ou pas du tout exploités. Ces mécanismes permettent pourtant de parer à des situations de catastrophe ou tout au moins d’en faciliter la gestion. C’est l’occasion d’interpeller l’ensemble des acteurs privés et publics nationaux pour leur sens de responsabilité personnelle et collective et leur esprit patriotique.

Parmi ces mécanismes, l’assurance avec ses multiples branches permet, en fonction des risques auxquels souscrit l’assuré, de bénéficier d’une assistance ou réparation des dommages subis, même en cas de catastrophe. Aujourd’hui, très peu de chefs d’entreprise assurent leur activité au Cameroun. Le problème se trouve-t-il sur l’offre ou s’agit-il d’une tare au plan managérial ? De même, pour les petits métiers et le secteur informel, la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), pour ne citer que cette initiative, propose depuis quelques années une assurance volontaire par laquelle on pourrait façonner un plan de soutien à ces petits acteurs. Même pour les entités plus structurées comme les PME, l’immatriculation des employés à la sécurité sociale pose encore problème. Celles-ci ne pourront donc pas, le cas échéant, obtenir des compensations pour les employés non immatriculés.

En cas de catastrophe, ce sont ces schémas qui facilitent l’intervention de l’Etat puis qu’en pareille circonstance si les compagnies d’assurance sont débordées, l’Etat vient en appui. Au plan patriotique, l’Etat, du moins ses caisses sont une cotisation de l’ensemble des citoyens et les opérateurs économiques et producteurs de richesse en premier. C’est la caisse commune à travers laquelle la répartition se fait à plusieurs niveaux sous l’arbitrage du gouvernement qui en assure la gestion. Il est attendu de tous une contribution en fonction des facultés de chaque opérateur économique. La transparence de tous permet à l’Etat de recevoir une juste contribution de chacun dont la sincérité de la déclaration fiscale est le support. L’intervention de l’Etat est fonction de sa signature (notation financière) obtenu à travers un ensemble d’agrégats dont le niveau de recouvrement des recettes et la maitrise du déficit budgétaire entre autres.

L’opacité et la tricherie doivent donc disparaitre et céder la place à l’orthodoxie managériale dans la gestion quotidienne des entreprises et l’exercice de la fonction entrepreneuriale. Cela permettra au gouvernement de mobiliser plus de ressources pour le bien commun et l’intérêt général. Si non les positionnements des uns et la clandestinité des autres rendrait impossible et inefficace la bonne volonté de l’Etat à intervenir dans des situations comme celle qu’impose la pandémie du COVID 19. L’Etat ne saurait se mettre au coin de la rue pour distribuer des aides.  C’est par des mécanismes réguliers comme celui de l’assurance, des impôts et bien d’autres qui enregistrent les différents acteurs économiques qu’il devient possible au gouvernement de déployer efficacement l’aide en cas de situation exceptionnelle.

Le problème ici n’est pas sur qui mériterai d’être aidé ? Mais, d’emprunter un modèle qui permet à l’Etat d’atteindre effectivement la cible, tous les acteurs ayant été affectés. C’est aussi le cas des ménages pour qui la fuite de l’impôt foncier et du bail rend impossible la constitution d’un fichier normalisé des habitants des municipalités. Alors que la décentralisation aidant, ce serait un modèle important dans la distribution des aides aux populations. La distribution d’une aide de manière impersonnelle par mobil money semble peu efficace ne pouvant pas identifier le problème à résoudre. On l’a observé avec la titrisation de la dette salariale. Au-delà bien entendu du déficit de management dans les collectivités territoriales décentralisées.

Un financement plus structurant et plus juste               

            Au-delà de mesures conjoncturelles, un plan de soutien plus structurant mérite d’être élaboré par le gouvernement. Lequel aura le bénéfice de rendre plus parraine et visible une nouvelle orientation de l’économie nationale. Aider le secteur privé certes c’est la voie de la croissance. Mais, comment est-ce possible dans ce contexte précis? Bien entendu c’est le sérieux de chacun et sa capacité à conquérir à la fois, le financement et les marchés qui devraient guider le gouvernement. Qui veut aller loin ménage sa monture. Il est donc urgent pour les opérateurs économiques de cesser de déplorer les pertes subies. Mais, de préparer un vrai plan de relance ambitieux et vendable auprès des investisseurs, traduisant ainsi leur capacité à capter le financement. L’Etat fera ce qu’il doit faire et il l’a commencé avec quelques mesures conjoncturelles.

Une grille d’identification des bénéficiaires et une matrice des aides possibles sont alors proposées ci-dessous. Sur la base d’une grille d’identification des opérateurs, trois catégories de types d’aides sont à envisager. Les éléments d’identification ne sauraient être pris pour critères de sélection. Mais, des indications utiles permettant l’enregistrement et le classement plus juste des bénéficiaires dans la distribution des soutiens de l’Etat.

Grille d’identification des PME et entreprises

Eléments d’identification Observation
1 Nom de l’entreprise  
2 Capital Social  
3 Nombre d’actionnaires  
4 Branche d’activité  
5 Chiffre d’affaires des trois derniers exercices  
6 Résultats bruts des mêmes exercices  
7 TVA colletée au court des mêmes exercices  
8 Nombre de salariés  
9 Masse salariale  
10 Nombre d’employés permanents  
11 Nombre d’employés immatriculés à la CNPS  
12 Indication des polices d’assurance et leur couverture  
13 Principaux produits de l’entreprise  
14 Produits accessoires et occasionnels de l’entreprise  
15 Estimation des stocks par catégorie de produits  
16 Estimation des pertes subies  
17 Plan de relance  
18 Estimation du besoin de financement  

Les aides sont réparties en trois grandes catégories : la première est constituée des mesures administratives, la deuxième catégorie des aides financières indirectes et la troisième les aides financières directes.   

Les catégories et types d’aides

Eléments d’identification Observation
Catégorie 1 : Mesures administratives diverses
1 Promotion de la participation populaire à la vie économique  
2 Allègement des procédures admiratives aux PME  
3 Exemption à certaines procédures administratives  
4 Suspension des contrôles administratifs  

5

Autorisation d’exploitation des certaines ressources  
Catégorie 2 : Aides financière indirectes
1 Bonification des taux d’intérêts sur prêts  
2 Rééchelonnement des emprunts  
3 Report du payement des impôts dus  
4 Annulation partielle des dettes d’impôt  
5 Report du payement des cotisations sociales  
6 Report ou annulation du payement de factures Eau et Elec.  
7 Réduction des coûts de communication  
8 Rééchelonnement du payement des primes d’assurance  
9 Suspension temporaire de certains droits d’enregistrement  
10 Annulation totale des pénalités de toutes sortes pour 2020  
Catégorie 3 : Aides financières directes
1 Subventions publiques  
2 Crédits publics (souscription aux émissions BVMAC)  
3 Cautionnement et garantie (crédit bancaires)  
4 Crédit bancaire  
5 Accélération du payement de dommages (assurance)  
6 Accélération du payement de la dette commerciale  

Des opportunités auprès de la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale (BVMAC)

Le marché financier en activité depuis 2019, peut être important vecteur de financement. Il est judicieux de relever très opportunément le rôle que devrait jouer ce marché financier dans le financement de l’économie après COVID 19. Il ne fait point de doute sur l’origine des financements, car ceux-ci seront attendus de tous, privé comme publics, internes ou externes. Mais, privilégiant des fonds générés de manière endogène, leur allocation doit emprunter un mécanisme réglementé et le marché financier en constitue le plus adéquat. Celui-ci offre un financement mieux organisé et plus structurant. Sous forme d’émission sur le marché financier sous régional, les entreprises éligibles aux différents compartiments du marché et disposant d’un plan de relance ambitieux peuvent lever des fonds par emprunt obligataire à appel public à l’épargne (APE).

Ainsi, la souscription à ces emprunts sera libre et l’Etat directement ou à travers la banque centrale et les institutions publiques (investisseurs institutionnels) aura pour mission de soutenir les différentes opérations en souscrivant la partie des titres qui n’auraient pas été souscris par le public. Ceci sans concurrence avec l’injection des liquidités à travers le secteur bancaire déjà préconisé par la BEAC. Car, le crédit bancaire ne devrait pas être la seule source de financement envisageable par cette dernière comme cela semble être le cas.

Le financement public, au lieu des subventions souvent contreproductives, pourra être tiré des fonds issus de la création monétaire et injecté directement dans l’économie à travers le marché financier sous régional. Ce qui va d’ailleurs donner un coup d’accélérateur à ce dernier qui tarde à prendre véritablement. L’opération permettant de susciter une adhésion populaire.  Les titres souscrits par l’Etat resteront disponibles sur la cote du marché secondaire. Lesquels pourront faire l’objet de transaction, de rachat par les émetteurs eux-mêmes ou d’achat par les investisseurs particuliers.

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