INSTITUTIONSINTÉGRATION RÉGIONALE

Gestion de l’inflation et des devises: Abbas Mahamat Tolli versus Beac

La vision et les options détaillées par le gouverneur de la Banque centrale laissent transparaître une réelle volonté d’aller au-delà des décisions du Comité de politique monétaire réuni le 12 décembre dernier en sa 4ème session ordinaire de l’année.

L a Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) a rendu public le 12 décembre dernier, le bulletin de santé de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Et deux paramètres vitaux parmi tant d’autres retiennent surtout l’attention. «Les tensions inflationnistes persistantes à 5,6% en moyenne annuelle comme en 2022 et un recul des réserves de change qui reviendrait de 4,95 mois d’importations des biens et services en 2022 à 4,12 mois en 2023». À en croire Abbas Mahamat Tolli, gouverneur de la Banque centrale, la baisse du niveau des devises de la Cemac «est en effet de 5,7%. Leur valeur s’établit alors à 6463,7 milliards FCFA à fin décembre 2023. Pour un taux de couverture extérieure de la monnaie qui passerait de 73,1% en 2022 à 71,1% en 2023». Deux pistes essentiellement sont privilégiées par le Comité de politique monétaire (CPM) pour faire face à la situa-
tion. Le spectre des possibilités semble par contre plus large pour Abbas Mahamat Tolli.

CPM
Le CPM a pris deux décisions le 12 décembre dernier au cours de sa 4ème session ordinaire de l’année 2023. Il s’est montré constant dans son option de «maintenir inchangés le Taux d’intérêt des appels d’offres à 5,00%; le Taux de facilité de prêt marginal à 6,75%; le Taux de la facilité de dépôt à 0,00% et les coefficients des réserves obligatoires à 7,00% sur les exigibilités à vue et 4,50% pour les exigibilités à terme». Il a en outre engagé le gouverneur de la Banque centrale à «émettre des Bons du Trésor sur
des maturités comprises entre 14 et 28 jours». Cette dernière action, est-il expliqué, est destinée à «accélérer la résorption de l’excès de liquidité bancaire sur le très court terme et mieux monitorer son évolution». Au vu notamment de la conjoncture, mais aussi des perspectives économiques mondiales et sous-régionales.

Tolli et l’import-substitution
«Nous subissons les contrecoups de quasiment tout ce qui se passe à l’extérieur. Ensuite nous ne sommes pas des économies diversifiées. Nous ne transformons pas ce que nous produisons. Et quasiment tout ce que nous avons, nous l’importons». Pour le gouverneur de la Beac, cela vaut aussi pour l’inflation et cet état de choses a évidemment des conséquences sur l’érosion des réserves de change de la Cemac. D’où sa volonté clairement affichée d’aller plus loin que le CPM en interpellant aussi la
Cemac et ses États membres. «Pour inverser la situation, il faut mettre en place des politiques d’import-
substitution. Je pense que les politiques de cette nature peuvent permettre de diversifier, et plus que ça, d’avoir une offre suffisante des produits qui seront consommés localement». Lorsque ce sera fait, à en croire Abbas Mahamat Tolli, «il y aura une pression exercée sur les prix qui vont baisser. Donc, la question de la cherté de la vie peut être aussi résolue de cette façon». Mais, reconnaît le président statutaire du CPM, «ce n’est pas le rôle de la Banque centrale d’élaborer des politiques économiques. C’est davantage celui des États». Et justement, le patron de la Beac attend également les membres de la Cemac au tournant des exigences «d’une bonne gestion des finances publiques et de meilleures politiques en termes de dépenses publiques. Des choses qui créent des emplois et donnent des opportunités, en se mettant en rapport avec le secteur privé»

Projets intégrateurs
La boîte à suggestions du gouverneur de la Beac fait également la part belle à la libre circulation et aux projets intégrateurs routiers. Abbas Mahamat Tolli parle notamment de «la mobilité des biens et des
personnes, et de la nécessité de construire des infrastructures pour circuler d’un pays à l’autre. Le commerce intracommunautaire étant à date de moins de 5%». Et le responsable communautaire d’indiquer alors que «nous attendons que la nouvelle équipe au niveau de la Commission de la Cemac s’investisse davantage pour faciliter le transport. Entre Douala et Ndjamena, il y a une centaine de barrières, entre Douala et Bangui il y a 108 barrières». Toutes choses qui ont un impact sur le coût final des produits importés et consommés en zone Cemac.

Théodore Ayissi Ayissi

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