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Franc des colonies françaises d’Afrique: une affaire de faux amis

La monnaie utilisée en zone franc est fabriquée en France. Lequel État perçoit bien plus que de simples frais d’imprimerie des billets de banque.

«Je ne comprends pas comment il est possible pour la France de tirer profit du franc CFA». Cet avis que donne Jean E. est commun à plusieurs Africains. Et en marge de tous les efforts et sensibilisations qui sont menés jusqu’ici, nombreux sont ceux qui ne mesurent pas la menace que représente cette monnaie pour l’économie du continent noir.

Pourtant, plusieurs économistes africains, bec et ongles, se battent nuit et jour pour que le « berceau de l’humanité » acquiert son indépendance. Dans cette lancée, le Pr Nicolas Agbohou estime que le frein majeur de l’Afrique réside dans l’ignorance permanente dans laquelle la France veut maintenir les ressortissants des pays de la zone franc CFA. C’est pourquoi, il se fait guide de nombreux jeunes Africains. Ce 13 décembre 2023, à la troisième édition des Panafrican Awards, l’économiste a établi la part financière dont bénéficie le pays d’Emmanuel Macron (président français) depuis des décennies.

Entre autres, la France obtient des gains importants parce qu’elle imprime les billets de banque usités dans le bon nombre de pays africains. Ceux-ci, apprend-on, sont valorisés à 25% du montant imprimé. Pour s’en convaincre, l’économiste, en bon scientifique, schématise la «supercherie». « Si nous imprimons pour 100 mille milliards FCFA. L’imprimerie de Chamalières doit prendre 25 mille milliards FCFA. Cette somme est destinée pour l’imprimerie», explique-t-il. Ce qui revient en réalité au Trésor français.

Pourcentage et droit de regard
Selon les dires du panafricain, l’hexagone lui-même refuse d’être payé en franc CFA. Par conséquent, les pays de la zone franc payent l’impression de cette monnaie en euros. Ce qui inclut impérativement la convertibilité des francs CFA en euros. De fait, 25 mille milliards de FCFA deviennent 38 milliards d’euros. Cet argent, poursuit l’universitaire, est déduit «des comptes d’opérations qu’elle possède déjà».

Pour l’expert, la France se donne tous les moyens pour être présente dans tous les conseils d’administrations des banques centrales. « Pourquoi elle est présente ? C’est tout simplement parce qu’on utilise le franc CFA, sa choisi. Pour l’avoir inventé, elle défend son bien», révèle-t-il.

C’est le cas de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac). Constituée de six pays, elle devrait normalement compter douze membres au Conseil d’Administration. Pourtant, elle en compte quatorze, dont deux Français de plus. Par ailleurs, les deux Français disposant d’un droit de véto, déplorent l’enseignant. Il en est de même à la Banque centrale de l’Afrique de l’Ouest.

Dans certains cas, la représentativité française est plus importante. À la Banque centrale des Comores (BCC), il y a 8 administrateurs, « dont 4 Comoriens et 4 Français », indique-t-il. Par ailleurs, explique l’, aucune résolution n’est prise dans cette banque si le quota de six membres n’est pas atteint. «Lorsqu’il y a un ordre du jour, il faut qu’il y ait 4 Comoriens auxquels s’ajoutent 2 Français au moins. Si la France ne veut pas de cet ordre du jour, elle fait la politique de la chaise vide et le pays est bloqué», s’indigne l’orateur du jour.

André Gromyko Balla

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