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Cabral Libii : Jeune premier… aux dents longues

Certains le présentent volontiers comme le « Macron camerounais ». Lui-même dit avoir assez de « tigritude » pour dévorer « l’homme lion».

On se demandait qui pourrait briser le couvercle de la grosse et bouillante marmite à slogans politiques, avant la présidentielle du 7 octobre au Cameroun. Le hasard a voulu que ce soit un apprenti gracieux : Cabral Libii Li Ngwe. C’est lui. Sans doute, ce jeunot (38 ans) a pris la mesure d’un manque, avant de lancer le «Mouvement 11 millions de citoyens». Par la grâce médiatique, son nom et ce slogan, telles des chapes plus lourdes que des plombs, retentissent désormais dans l’espace public.

Dans le sang…

Aux yeux et dans les oreilles de l’opinion nationale et internationale, Cabral et (surtout) son initiative passionnent autant qu’ils intriguent. Il s’explique : « Jeunes Camerounais aux parcours et expériences complémentaires, nous avons décidé de nous réunir afin de contribuer activement à la refondation de la conscience nationale, en lançant le mouvement. Nous voulons apporter une réponse aux attentes légitimes des Camerounais, une vision alternative pour le pays ».

Pleine table

En tout cas, sur le coup, certains collent à l’inventeur du slogan « Mouvement 11 millions de citoyens », l’étiquette de « bon animateur de la démocratie au Cameroun ». D’autres, y décelant amour du verbe et art du mot, concision et force de frappe, estiment que tout y est dit de ce qu’il y aurait à dire sur la candidature de ce neveu de Ruben Um Nyobe.

Là, l’ethnologue Cyprien Mekoa Tsala parle d’« une ascendance surprenante, pas étonnante ». Et pour repeindre Cabral en « fils » du nationaliste de vénérée mémoire, la connexion s’opère par une première phrase : « Il ne faut jamais insulter complètement l’avenir ». Prononcés par le Mpodol le 12 avril 1950 à Eséka, ces mots sont repris, in extenso, par Cabral lors d’une conférence sur le panafricanisme au musée « Blackitude » à Yaoundé le 26 mai 2017. Interrogé ce jour-là sur ses ambitions pour l’avenir, Cabral n’a pas exclu de briguer un jour la magistrature suprême. « Je n’en sais rien. (…) Ça me paraîtrait incongru, mais la vie doit être faite d’incongruités », a-t-il déclaré.

En avril 2017 à Bamenda, la digue des mots voilés saute, avec la confirmation de sa candidature. Entre-temps, son jeune âge, sa personnalité, son parcours atypique ou son peu d’expérience deviennent autant d’ingrédients qui inspirent l’opinion nationale. Elle l’appelle désormais le « Macron Camerounais ». Il incarne, croit-on, la nouveauté, l’aube, l’espoir. Surtout qu’auparavant, l’on avait découvert un jeune intéressant, sympa, intelligent sur les écrans de télévision et antennes de radio. « C’est toujours ainsi », constate Clémence Menye. La présidente du fan-club Cabral Libii au lycée de Nkoabang (Mefou-et-Afamba) apprécie son idole lorsqu’on en vient aux questions politiques sur les médias.

« Il s’exprime de manière plus grave, plus forte, assénant chaque mot pour qu’il rentre bien dans notre tête d’ignorant », indique-t-elle. Normal, le garçon a un parcours académique objectivement brillant. C’est un provocateur intello pour les uns, visionnaire interdisciplinaire pour les autres. Toutes choses pour que les amis, les affidés, les « sabras » du Mouvement 11 millions de citoyens l’appellent « Président». Président de quoi, personne ne sait trop l’expliquer, mais enfin c’est ainsi. Les vieux compagnons de la fac disent « Cabral ». Les adversaires politiques : « petit bassa’a».

Regard

Reste qu’une dizaine de candidats déclarés pour la présidentielle d’octobre, ça lui fait de la peine à deux titres. Et pour cause : « Je reste convaincu que c’est une action consensuelle, coalisée de l’opposition qui ouvrira à cette dernière les meilleures chances d’évincer Paul Biya du pouvoir. La deuxième démarche pour laquelle ça me fait de la peine, c’est que tous ceux qui annoncent leur candidature prennent cela comme un amusement. C’est à croire que la politique est devenue au Cameroun comme la samba. Quelqu’un se lève un matin, il fait des grimaces devant le peuple, il dit qu’il est candidat et puis il s’arrête là. Il dit qu’il est très fort. Surtout quand il circule dans la rue et tout le monde l’appelle président. Dans son esprit, il croit vraiment qu’il est président. Je crois que quand Paul Biya voit tout ça, il rit en envoyant les deux pieds en l’air ».

« Prépa Etoudi »

Au moins lui, il paraît presque « naturellement » fait pour le rôle. Visiblement, sans le vouloir, il a dû opérer une transfiguration. Glisser du statut d’individu normal à celui d’homme d’État. « Fendre l’armure», selon le mot du journaliste Gilbert Tsala Ekani. En somme, s’introduire dans la peau de ce président qui, dans l’esprit camerounais, promène toujours quelques oripeaux d’un roi. C’est un long cheminement. Intime. Imperceptible tout d’abord, même aux yeux de son entourage, la métamorphose s’accomplit peu à peu et les premiers signes sont à chercher dans l’adoption d’une nouvelle discipline : aller à l’élection présidentielle est un renoncement à la légèreté. Ce n’est pas une entrée au monastère. Mais une nouvelle hiérarchie des priorités pour marquer la forte détermination de battre Paul Biya. Des réunions politiques, Cabral les enchaîne. Des notes politiques et économiques, il les ingurgite. Des tours du Cameroun éreintants, il les effectue. Et la présidence de la République pour seul objectif.

À l’instar de tous les candidats, on dit : voici un candidat qui présente une situation visible et propose un lot de mesures. Par exemple, il réitère les convictions qu’il défend : la décentralisation et son hostilité à l’envol de la dépense publique. Par exemple aussi, il dresse un tableau douloureux de l’action politique telle qu’elle est devenue. De son point de vue, ceux qui la mènent n’inventent donc plus rien face à l’inquiétude grandissante à l’échelle nationale.

Car, avise Cabral, voici trop longtemps que le régime actuel est trahi par certains de ses cadres, qui, depuis au moins l’indépendance du Cameroun, semblent honteux d’avoir travaillé pour le chaos. Littéralement, Cabral n’en revient pas, et craint pour sa perpétuation. Au moins, croit-il en avoir identifié la cause : l’unité nationale, qui fédérait les âmes et jouait un rôle d’adjuvant ou de substitut au désastre, s’est ossifiée, perdant toute efficacité symbolique. « Elle a éclaté en sectes idéologiques mutuellement hostiles », juge Cabral.

Programme

Avec un supplément d’horizon, il flâne sur la question anglophone. « Globalement, ces compatriotes anglophones sont derrière l’opération “onze millions d’inscrits”. Eux aussi disent qu’il est temps pour le changement au Cameroun, et que c’est par la voie des urnes que ce changement va arriver. Vous voyez donc que contrairement à ce qu’on raconte, la crise anglophone n’est pas pour créer du désordre, mais une crise qui vise simplement la satisfaction d’une tranche de la population camerounaise d’expression anglaise », tranche le jeune leader.

Après avoir pris la mesure de ces écrouelles, Cabral propose un avenir meilleur, à travers le slogan: « demain on sera heureux ». À l’en croire, plus ce programme sera audacieux et clivant et plus il sera un produit passe-partout. Destiné à favoriser son élection, ce projet de société pourrait impliquer une rupture rapide, en permettant un renouvellement démocratique. Renouvellement du personnel politique, avec l’avènement de figures issues de nouveaux horizons. Renouvellement des institutions également en redonnant aux citoyens la faculté de faire entendre leur voix sur le processus des réformes — et non pas seulement à l’heure des grandes messes électorales.

Pour l’instant, Afrik-Inform et le baromètre Elmed (du nom des trois chercheurs qui l’ont conçu : Dr Célestin Elockson, du Pr Joël Müller et du Pr Emmanuel Djuatio) concluent que Cabral reste le challenger que Paul Biya doit prendre le plus au sérieux. Afrik-Inform, un média en ligne a, du 17 au 30 mai 2018, soumis quelques candidats aux internautes pour un vote. À l’issue de celui-ci, Cabral Libii vient en tête avec 1710 voix. Et selon le baromètre Elmed, « sur un échantillon représentatif de la société camerounaise, de 4 154 individus (inscrits sur le fichier électoral ou en voie de l’être) », soit 1768 à Douala et 2 386 à Yaoundé, les deux plus grandes métropoles camerounaises, 57 % des individus interrogés préfèrent Paul Biya comme président de la République. Le président sortant est suivi de Cabral Libii (16 %). Même si la crédibilité de ces sondages est remise en cause notamment par ses adversaires politiques, le fils de Mahomey dans les environs d’Eséka y voit un signe du destin.

Jean René Meva’a Amougou,

Intégration n° 326

Bio-Express

Nom : Cabral Libii
Nationalité: camerounaise
Naissance : 29 mars 1980
Formation : droit public international
Expérience professionnelle : journaliste, homme et consultant politique, activiste, juriste et enseignant d’université.
Parti politique : Univers
Idéologie : Socialisme progressiste
Récompense : lauréat du Prix d’excellence du «Meilleur booster de la démocratie camerounaise » (2017)
Vie conjugale : marié à Murielle Peggy Libii

 

Réformes institutionnelles

Refaire le portrait de l’État

À l’instar des autres candidats engagés, Cabral Libii compte opérer une profonde refonte du système institutionnel du pays. Le Sénat et le poste de Premier ministre disparaitraient. Il instaurera une élection à deux tours et le bulletin unique.

Une marche des avocats à Yaoundé

« L’État comme espace délimité est d’abord une collectivité humaine établie. Puis, un ensemble de règles d’organisation et de fonctionnement qui forment un corpus institutionnel. Ces deux visages de l’État à l’évidence présentent des incisions et des déformations auxquelles nous proposons des thérapies et corrections, afin de «refaire le portait » d’un avenir étatique plus inclusif de nos aspirations ». Telle est la vision de l’État selon le candidat du parti Univers. La mise en œuvre de cette vision aura huit piliers principaux.

1- Sortir de la captivité français/anglais et promouvoir les langues nationales. Cela passe par : la création de trois instituts de langues nationales où seront conçus les programmes d’enseignement qui seront dispensés.

2- Enseigner dans chaque commune la langue utilisée. Dans chaque commune, il sera enseigné la langue nationale utilisée en son sein. Nous considérons comme priorité politique, le fait d’affecter aux langues nationales, une puissance de marquage culturel analogue aux langues étrangères.

3- Réviser le code de la nationalité. Nous allons donner la possibilité aux Camerounais qui n’ont pas été en indélicatesse avec la fortune publique d’avoir une seconde nationalité. Parce que nous pensons que les Camerounais ayant acquis une seconde nationalité pour motifs divers restent néanmoins rattachés au Cameroun.

4- Adopter le régionalisme à la camerounaise comme forme de gouvernement. Nous nous engageons à donner aux régions la possibilité de créer des lycées et de recruter les enseignants pour lesdits établissements, ramener la dotation générale de la décentralisation de 0,30 % à 10 % comme c’est le cas au Rwanda, à ériger la commune comme véritable levier de développement.

5- Instaurer un régime présidentiel. Nous allons réinstaurer le poste de vice-président et supprimer le poste de Premier ministre.

6- Instaurer un Parlement monocaméral. Nous allons supprimer le Sénat et créer à la place la Chambre consultative des anciens et des patriarches (économie de 12 milliards francs CFA à réorienter vers les secteurs productifs).

7- Instaurer un véritable État de droit. Nous allons revisiter le statut des magistrats et des personnels judiciaires, humaniser la justice et l’environnement carcéral, libérer la presse, protéger le syndicalisme
8- restaurer la confiance aux élections. Nous allons restaurer la confiance aux élections en instaurant une élection à deux tours avec bulletin unique et ramener le mandat présidentiel renouvelable une fois.

La rupture prônée par le candidat du parti Univers semble limitée à ces points du programme. Rien ou presque n’est dit sur la restauration de la confiance aux institutions. De plus, en gardant en l’état la plupart des institutions qui grippent le système républicain, le candidat Cabral fait peser le risque de reproduire le système qu’il entend combattre. Le « régionalisme à la camerounaise » apparait en fin plus comme un slogan qu’un programme politique.

Ifeli Amara, (stagiaire)

Politique sociale

Bouleversement tous azimuts de l’affirmation

Pour contrer «la dégradation programmée de la société camerounaise», le joker du parti UNIVERS a élaboré un projet de société. Zoom sur les grandes lignes de la rubrique « social ».

I-Eau et énergie
Dans ce secteur, Cabral Libii projette de :
– fournir 500 MW d’électricité par an, soit 2500 MW en 5 ans ;
– construire des centrales électriques, en mettant simultanément en chantier la construction de plusieurs dizaines de méga ou mini centrales électriques ;
– subventionner l’achat des énergies vertes ;
– produire 500 000 m3 d’eau par an ;
– approvisionner les entreprises en eau et en électricité.

II— Santé
Dans la perspective d’être élu le 7 octobre prochain, Cabral Libii s’attachera à :
– promulguer la loi instituant l’assurance maladie obligatoire pour tous les citoyens camerounais et créer la caisse d’assurance maladie ;
– améliorer les infrastructures sanitaires par la création de 10 unités de prise en charge des urgences hypertensives (AVC et crises cardiaques), dont 1 unité/région ;
– décentraliser totalement la gestion des districts de santé au niveau des mairies ;
– mettre en place 2 hôpitaux de références à Yaoundé et à Douala ;
– porter à 400 milliards le budget alloué à la santé ;
– doter le Cameroun d’un code de santé publique et d’une loi sur la bioéthique ;
– réorganiser et restructurer le secteur de la santé à travers la mise en place des conventions collectives ;
– créer la haute autorité de Médecine traditionnelle ;
– réorganiser et renforcer les activités et pouvoirs des ordres nationaux de la santé (Médecine, chirurgie dentaire, pharmacie, médecine vétérinaire).

III— Habitat et logement
Comme ambition, le candidat dit être en mesure de :
– construire 50 000 logements sociaux chaque année à 500 milliards ;
– faciliter l’accès au logement décent via des contrats location-achat sur 100 mensualités (9 ans maximum), pour être propriétaire d’un logement;
– rénover et restructurer progressivement les bidonvilles ;
– réprimer la délinquance routière;

IV— Emploi et Sécurité sociale
Pour le plus jeune candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2018, les préoccupations liées à ce domaine consistent principalement en :
– l’harmonisation de l’âge de départ à la retraite à 62 ans pour tous les personnels civils ;
– la formalisation de l’informel pour assurer une pension retraite aux travailleurs indépendants et la sécurité sociale ;
– l’assurance de l’insertion sociale des handicapés;
– la création de près de trois millions d’emplois ;
– le recrutement d’au moins 200 000 personnels de l’état en 5 ans ;
– l’instauration d’un salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG);.

V-Education
En cas d’élection à la magistrature suprême, Cabral va :
– densifier les ressources humaines du secteur éducatif en procédant à la formation, la contractualisation et l’affectation de tous les instituteurs dès la sortie des ENIEG et ENIET, soit 10 000 personnels chaque année à 15 milliards ;
– réduire de moitié la pension dans les universités d’État ;
– accroître l’offre de formation des universités ;
– recruter 1000 enseignants au supérieur chaque année ;
– rétablir les bourses d’études pour tout étudiant en Master en génie agronomique ou industriel, et pour tout étudiant en thèse de l’ordre de 125 000 FCFA par mois;
– intensifier la promotion du bilinguisme intégral de la maternelle en Terminale ;
– introduire dès septembre 2019, des techniques agropastorales (TAP) comme spécialité nouvelle dans tous les lycées d’enseignement technique ou polyvalent;
– construire des lycées polyvalents de 3 500 places par commune.

Jean René Meva’a Amougou

Politique économique 

Du «Big push» à la transformation structurelle

Contrairement à politique actuelle qui consiste à tout embrasser, la stratégie de relance de la croissance de Cabral Libii repose sur deux secteurs : l’agro-industrie et les services.

Cabral dans un marché de vivres

Le candidat du parti UNIVERS veut, en 5 ans, atteindre une croissance économique d’au moins 8%. Pour atteindre cet objectif, Cabral Libii «casse les codes» et «change de paradigme». Il passe de la politique actuelle du «Big push» (on embrasse tout) à la transformation structurelle (c’est-à-dire priorisation des secteurs). Et ces secteurs sont : l’agro-industrie et les services. Mais comment chacun de ces secteurs va contribuer à cet objectif? Cabral Libii ne le dit pas clairement. «Nous allons pénétrer les marchés européens (via les APE [Accords de partenariat économique]), nord-américains (via AGOA), asiatiques avec nos produits agricoles semi-finis ou finis, notamment les agrocarburants, les textiles, les denrées alimentaires manufacturées», tout juste, énonce-t-il pêle-mêle, les mesures à mettre en œuvre pour booster ces secteurs.

On apprend ainsi qu’il va créer une agro-industrie par arrondissement (à l’instar d’Hevecam à Niété, ou de la Sosucam à Mbandjock et à Nkoteng). Pour y parvenir, le doctorant en droit explique que l’Etat investira 500 milliards de francs CFA dans les semences, les intrants, l’eau, l’électricité, les bâtiments agricoles, les chaines de froid, les abattoirs… afin de favoriser l’investissement privé. Il est aussi prévu d’accorder des prêts à taux zéro aux petits producteurs pour doubler ou moderniser leurs exploitations, octroyer des titres fonciers gratuits aux propriétaires terriens traditionnels et «cadastrer» le domaine national pour faciliter l’entreprenariat agricole. Par ces mesures, le candidat de l’UNIVERS espère mettre en exploitation chaque année 20 mille ha par région.

Infrastructures

Mais en ce qui concerne les services, le candidat indique qu’il va «accompagner la création des entreprises de services divers dans des domaines comme la banque, les assurances, la microfinance, les transports terrestres, maritimes et aérien, le tourisme, l’hôtellerie-restauration, les commerces» et «encadrer, financer et accompagner au moins 100 startups par an».
En termes d’accompagnement, il prévoit de renflouer la banque des PME à hauteur de 200 milliards francs CFA.

«La politique d’industrialisation ne pourra être mise en œuvre que si elle est précédée, puis accompagnée régulièrement par une infrastructure économique en quantité et en qualité suffisante». Pour cela, Cabral Libii annonce qu’il va accroitre la production d’électricité chaque année de 500 et produira 500 000m3 d’eau par an à raison d’une méga station d’eau par région, une mini centrale par département et une microcentrale par arrondissement, grâce aux partenariats public-public ou public-privé (PPP). Il promet aussi de construire 1000 km de routes par an, un chemin de fer de 3500 km (1750 km X 2) voie double et écartement normal (1,43m) entre Kousséri et Kribi, puis de 480 km (240 km X 2 voies) entre Yaoundé et Douala, des entrepôts, des silos, des abattoirs, des chambres frigorifiques et autres bâtiments agroindustriels pour bien conserver la production des coopératives agricoles.

Limites

Pour assurer les engagements de l’Etat, le coordonnateur du «Mouvement 11 millions des citoyens» indique qu’il va porter l’enveloppe budgétaire de près de 4 700 milliards de francs CFA actuellement à 5700 milliards ; soit une augmentation de 1000 milliards. Mais le programme du candidat de 38 ans est muet sur la stratégie de mobilisation de ressources qui permettrait de financer une telle augmentation budgétaire. Il n’est par ailleurs pas indiqué à partir de quel exercice budgétaire, cette augmentation sera effective. Tout ce que l’on sait, pour l’instant, c’est que le budget de fonctionnement sera ramené de 60 à 44% et cette économie orientée vers l’investissement.

Aboudi Ottou

Politique étrangère et intégration régionale

Géopolitique et géoéconomie d’intelligence

Le Cameroun sous le magistère du candidat du parti Univers s’insère à l’international par le biais des coalitions militaires, monétaires, économiques et d’innovations régionales.

Prendre la tête des délégations camerounaises à l’international sera le leadership de présence du candidat du parti Univers Cabral Libii. La politique étrangère qu’il entend mener repose sur trois piliers : la convergence régionale, le rapport de force ligué et le multilatéralisme.

Coopération

D’emblée, 100 % de la coopération de Cabral Libiih est introvertie sur le continent africain. Le candidat souhaite développer l’intelligence et l’innovation africaine par la coopération universitaire sous régionale et l’érection des centres de recherche panafricains. Ces structures sont prises en charge par un financement endogène. Il suggère que les États membres contribuent à hauteur de 10 % des budgets de l’enseignement supérieur pour garantir l’indépendance des centres panafricains.

La coopération militaire est le second axe pour lutter contre le terrorisme notamment. Le candidat souhaite construire une alliance de la Cemac au Nigéria. La préservation de la sécurité est une entreprise couteuse pour bon nombre d’États qui n’hésitent pas souvent à faire recours à l’endettement face aux chocs extérieurs. Le candidat promet de mener une action auprès de ses pairs pour « sortir de la spirale de l’endettement vis-à-vis du FMI et de ses plans d’ajustement structurel en privilégiant l’auto ajustement, l’investissement public massif, de l’ordre de 50 % du budget et de 10 % du PIB, les IDE et les PPP ».

Intégration régionale

Le pluralisme, le libéralisme politique et la limitation des mandats devront être les valeurs du processus d’intégration en Afrique. Cabral Libii. envisage de porter au niveau de l’union économique et monétaire à l’échelle régionale comme continentale. Ses projets intégrateurs sont : l’interconnexion régionale et interrégionale à travers la construction d’une route côtière sous régionale de 1200 km partant de Campo à Pointe-Noire au Congo et la connexion du réseau ferroviaire national au Tchad, à la Centrafrique et au Nigéria. Tout ceci sous financement endogène conjoint. Le candidat prévoir d’inciter « ses pairs à construire des routes et des vois ferrées panafricaines facilitant ainsi le libre-échange intra-africain ». Ce plan directeur consensuel permettra de fluidifier la mobilité des facteurs de production.

Autre projet intégrateur, la politique agricole commune à l’Union africaine (PAC/UA) pour équilibrer le développement des États membres. Dans ses velléités d’expansion, le candidat veut rentabiliser l’APE et l’AGOA (demande de 6700 produits) par une production agro-industrielle nationale et sous régionale de conquête. Les marchés de la Chine, du Japon et de l’Arabie Saoudite sont également visés.

Le dernier chantier de souveraineté que le candidat veut vendre aux Africains par le biais des suffrages des Camerounais est l’adoption d’une monnaie unique à l’échelle continentale. Il propose un délai de 10 ans maximum. Partisan d’une géométrie variable, il est favorable à un noyau dur de 5 ou 10 États.

Equivoques

Plusieurs inconnues entourent l’action extérieure du candidat Cabral Libii. Notamment, le nombre de missions diplomatiques dont il aura besoin. Sur le plan sécuritaire, il faut rappeler qu’en Afrique centrale seule la Ceeac a une compétence militaire en vertu du principe de subsidiarité des chapitres 7 du conseil de sécurité de l’Onu et de l’UA. C’est d’ailleurs l’unique Cer reconnue par l’UA. Qui plus est, l’alliance avec le Nigéria et la Cemac est une concurrence au cadrage géostratégique de l’UA qui prévoit dans les Cer des brigades régionales de la Force africaine en attente.

Le détournement de l’endettement n’exige-t-il pas des critères de convergence d’une institution panafricaine notamment dans la perspective d’une monnaie commune ? La position du candidat sur le fonds monétaire africain est introuvable.

En suggérant une monnaie africaine en 10 ans et proposant la réalisation du PAC/UA, le candidat se met quelque peu en porte à faux avec le traité d’Abuja qui propose un séquencement vers la communauté économique africaine. D’autant plus qu’en 2016, les banques centrales ont repoussé la monnaie unique en 2045 après les échéances de 2022 et 2025.

Zacharie Roger Mbarga

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