Virus cherche nationalité

On n’a pas fini de s’interroger sur les origines de la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19). On connaît le dilemme autour de la question de savoir si oui ou non, la pandémie mondiale est une fuite de laboratoire en Chine.

 

En s’attardant sur le oui, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est revenue à la charge le 22 juillet dernier. L’institution onusienne, apprend-on, a proposé à la Chine de rouvrir son enquête sur l’origine du Covid-19. Sur le coup, l’actuel patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a expliqué qu’il pensait «prématuré» d’abandonner la théorie selon laquelle l’apparition du virus pouvait trouver sa source dans une fuite de laboratoire. «Comme vous le savez bien, j’étais moi-même un technicien de laboratoire et un immunologiste, et j’ai travaillé dans des laboratoires. Et des accidents dans les laboratoires, ça arrive», a-t-il déclaré. Le 12 juin 2021, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a déclaré que les familles des millions de personnes qui sont mortes du Covid-19 «méritent de savoir quelle est l’origine de ce virus, afin que nous puissions éviter que cela ne se reproduise».

Pékin, rapportent plusieurs médias occidentaux, résiste d’ailleurs à toute argumentation. Le gouvernement local s’est déclaré «très surpris» et a jugé la proposition de l’OMS «arrogante», «irrespectueuse» et «contraire au sens commun». Repris par le site «Asialyst» le 23 juillet 2021, Zeng Yixin, vice-ministre chinois de la Commission nationale de la Santé a trouvé que le projet de l’OMS «émet l’hypothèse que la Chine a manqué aux protocoles, causant peut-être ainsi une fuite de laboratoire, cette thèse étant l’une des pistes prioritaires de ses recherches». Zeng Yixin a même insisté: «les chercheurs en sont sûrs, il n’existe aucune preuve d’une fuite de laboratoire».

Dans la foulée, responsables et médias officiels chinois ont choisi de faire cause commune. En chœur, ils pointent le laboratoire de Fort Detrick comme étant à l’origine du Covid-19. Situé près de Washington, ce centre biomédical (base du Programme américain d’armes biologiques jusqu’en 1969, il est actuellement érigé en site de recherche biomédicale abritant un laboratoire P4, contenant 67 agents et toxines dont Ebola, la variole, l’anthrax, la peste, et le poison ricin; fermé à l’été 2019 pour cause de failles de sécurité, il est de nouveau opérationnel depuis le 27 mars 2020, et selon «Asialyst» est maintenant au cœur de la controverse. «L’armée américaine pourrait avoir apporté l’épidémie à Wuhan. Soyez transparents! Les États-Unis nous doivent une explication!», avait martelé l’an dernier dans un tweet Zhao Lijian, porte-parole de la diplomatie chinoise.

Ce qui frappe à la lecture des verbatim recueillis, c’est précisément l’intransigeance de Pékin d’une part et les soupçons réaffirmés de l’OMS (et certains scientifiques américains) d’autre part. Pour la partie chinoise, pas question de communiquer les moindres données sur cette épidémie partie de son territoire, selon certains. «La seule chose dont la Chine ne s’est jamais cachée depuis l’apparition du coronavirus, c’est son refus absolu de la transparence et de la vérité. Depuis, Pékin consacre tous ses efforts à se dédouaner, à effacer les traces, à rejeter le blâme sur d’autres et à redorer son image à coups de masques et de vaccins, en ignorant les questions légitimes d’une planète», s’offusque Philippe Gélie dans un éditorial paru dans le journal français Le Figaro le 4 juin 2021. Dans le même média, l’OMS et des scientifiques américains de haut niveau appellent à une enquête «transparente et objective», invitant à ne favoriser aucune hypothèse tant que davantage de données n’ont été recueillies. Une lettre ouverte qu’ont signée plusieurs chercheurs et publiée le 28 juin dernier par Le Figaro demande une investigation fouillée, «si possible avec la participation du gouvernement chinois». En attendant, le virus est là. Toujours là.

Jean-René Meva’a Amougou

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