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Archives des CEDEAO - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : CEDEAO

  • Lutte contre la corruption : pour une meilleure gouvernance en Afrique centrale

    Lutte contre la corruption : pour une meilleure gouvernance en Afrique centrale

    Du 5 au 6 décembre prochain, les acteurs des secteurs publics et privés se réuniront à Yaoundé pour échanger sur la gouvernance et la lutte contre la corruption.

     

    Véritable fléau en Afrique, la corruption est un phénomène qui est presque ancré dans les mœurs des pays de la Cemac. C’est ce que donne à voir l’Indice de Perception de la Corruption (IPC). Dans son édition 2022, celui présente la Guinée Équatoriale comme l’un des pays les plus corrompus d’Afrique, avec un indice de 17. Vient ensuite le Tchad (19 contre 20 en 2021) ; le Congo (20 contre 19 en 2021) ; la Centrafrique (24 en 2021 et 2022) ; le Cameroun (26 contre 27 en 2021) et enfin le Gabon (29 contre 31 en 2022).

    Parce qu’aussi important, ce fléau constitue un frein majeur pour le développement socioéconomique de ces pays. D’ailleurs, apprend-on, la corruption concourt à l’amplification du taux de Flux financiers illicites. La situation perdure depuis des années et ne profite qu’à une poignée d’individus. Cela a un impact négatif sur la gouvernance.

    Amenuiser cette situation dans la sous-région nécessite de prendre le taureau par les cornes. C’est précisément dans cette lancée que s’inscrit l’Ong Environment For Life. En collégialité avec le ministère des Relations extérieures du Cameroun (Minrex), elle organise du 5 au 6 décembre prochain un Forum sous-régional sur la gouvernance et la corruption. D’après Stéphane Nama, l’initiative découle du fait que «dans la pratique, les activités liées à la bonne gouvernance sont très peu utilisées dans les structures, qu’elles soient privées ou publiques».

    Au cours de ces deux jours, il sera donc question de déconstruire la réalité apparente aujourd’hui imposée par les adeptes de la corruption. Pour la communicante, «il est inadmissible qu’on dise que c’est ancré dans nos mœurs, je ne pense pas que mal se comporter c’est quelque chose que nous devons promouvoir».

    Pour cela, apprend-on, le Forum sera l’occasion idéale de débattre sur « la nécessité de communiquer sur les bonnes pratiques en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption, que ce soit dans le secteur privé, le secteur public et au niveau national et sous-régional».

    Objectif ultime, trouver, à l’issue des échanges, des voies et moyens de barrer la voix au fléau, à l’effet de doper la gouvernance en zone Cemac. Ce qui, va permettre de «préserver les ressources qu’elles soient environnementales, qu’elles soient financières ou socioéconomiques pour que les générations futures puissent en jouir autant que les générations présentes» dixit la responsable de la communication de l’Ong.

    Stratégie
    Pour lutter contre la corruption, l’institution non gouvernementale ne mise pas que sur la dénonciation des corrompus. Elle compte donc, au cours de ces échanges, « encourager celles [les entreprises] qui ont du mal à véritablement implémenter des actions en la matière échanges sur les bonnes pratiques ».

    Elle envisage d’ailleurs d’aller au-delà des entreprises pour impliquer les plus jeunes, convaincus de leur rôle capital dans la lutte contre cette gangrène. La méthode est simple, mais vise des solutions durables. «Nous pensons que si très tôt, nous commençons déjà à investir sur la jeunesse, à leur dire dès le bas âge que ce genre de pratique n’est pas bon pour les générations à venir, on pense que les projets de développement seront plus porteurs. », détaille le cadre de Environment For Life.

    Joseph Julien Ondoua Owona

  • Électrifier l’Afrique de l’ouest et du centre pour un avenir plus lumineux

    Électrifier l’Afrique de l’ouest et du centre pour un avenir plus lumineux

    Si le niveau d’électrification du Sénégal est l’un des plus élevés d’Afrique de l’ouest avec un taux d’accès de 80%, de nombreux pays du continent font face à une véritable crise énergétique.

     

    En effet, 220 millions de personnes – soit près de la moitié de la population de la région – n’ont pas accès à l’électricité, limitant ainsi leur capacité d’entreprendre ou d’accéder à des services d’éducation et de santé adéquats. Pour atteindre l’accès universel à l’électricité, le rythme d’électrification en Afrique de l’Ouest et du Centre doit tripler d’ici à 2030.

    L’accès à une énergie abordable, fiable et durable constitue une condition essentielle pour améliorer la qualité de vie de chacun et aussi une nécessité pour transformer le continent.
    La bonne nouvelle, c’est la révolution amorcée dans le domaine de l’accès à l’énergie hors réseau dans nos pays. Lors de l’Appel à l’action de Dakar du 7 juillet 2022 à l’occasion de l’IDA 20, les dirigeants africains ont exprimé un engagement fort en faveur de l’accès universel à l’énergie et ont rappelé l’importance d’une transition juste et équitable pour le continent. Dans ce contexte, les pays africains comptent utiliser notamment leurs ressources en gaz naturel comme énergie de transition pour atteindre les objectifs d’accès universel à l’électricité à moindre coût tout en facilitant la création d’emplois.

    Avec un pétrole à prix élevé, l’Afrique reste dépendante des énergies fossiles surtout que les subventions aux carburants ont fortement augmenté, pesant lourdement sur le budget des États. La mauvaise qualité de la fourniture d’énergie figure en tête des préoccupations en matière d’évaluation du climat d’investissement et entrave la numérisation des économies. Le doublement des financements annuels de la Banque mondiale dans le secteur de l’énergie au cours des trois dernières années a permis des améliorations significatives dans les états fragiles.
    Par exemple, en République centrafricaine (RCA), un nouveau parc solaire de 25 Mégawatts avec batterie de stockage alimentera en électricité 250 000 personnes, doublant sa capacité de génération électrique. Ce parc solaire remplacera plus de 90% de l’énergie actuellement générée par diesel, représentant une économie annuelle de 4 millions de dollars en coûts de combustibles pour le gouvernement. La mise en service d’une centrale solaire de cette envergure en RCA, ainsi que de cinq mini-réseaux et de l’électrification de plus de 600 écoles et hôpitaux ainsi que de 50% des foyers d’ici 2030, est source d’espoir pour d’autres pays.

    Un autre exemple d’investissement à grande échelle dans le solaire, à savoir le projet régional d’intervention urgente dans le secteur de l’énergie solaire, propose un modèle d’appel d’offres concurrentielles pour augmenter l’accès à l’électricité pour des millions de consommateurs au Tchad, Liberia, Sierra Leone et au Togo, en stimulant la capacité énergétique renouvelable connectée au réseau, ainsi que la transmission et les interconnexions régionales.

    Atteindre un accès universel à l’électricité en Afrique subsaharienne nécessitera plus de 200 milliards de dollars de financements avec un rôle essentiel de l’investissement privé. Pour y parvenir il est impératif de renforcer les cadres réglementaires et de développer des compagnies d’électricité financièrement solides.

    Au Nigéria, la plateforme DARES (Distributed Access through Renewable Energy Scale-Up Nigeria) vise à étendre l’accès en développant les énergies renouvelables, tout en levant plus d’un milliard de dollars de financement privé pour donner accès à l’électricité à plus de 15 millions de personnes.

    Le Sénégal quant à lui a signé en juin 2023 avec ses partenaires, notamment l’Allemagne, le Canada, la France, le Royaume Uni et l’UE un Just Energy Transition Partnership (JETP), au titre duquel le pays s’est engagé à porter de 31 à 40% la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique d’ici 2030 avec l’accompagnement des partenaires (mobilisation de 2,5 milliards d’euros en financements nouveaux et additionnels sur une période initiale de 3 à 5 ans).
    Parmi ces projets, celui relatif à l’extension de l’accès à l’énergie permet au pays d’améliorer la résilience des infrastructures publiques essentielles, telles que les écoles et les centres de santé, ainsi que de développer les petites et moyennes entreprises en les connectant au réseau, ou à des centrales solaires off-grid.

    Par ailleurs, le pays progresse dans la mobilisation des financements des secteurs public et privé pour soutenir ses objectifs d’expansion d’accès à l’énergie. Des investissements supplémentaires se concentrent à présent sur la réduction des écarts et le raccordement de tous au réseau.
    Faciliter le commerce de l’énergie au niveau régional pour faire baisser les coûts et offrir un accès plus large et plus fiable constitue une priorité. À cet égard il faut saluer le lancement réussi de l’interconnexion des réseaux électriques de 14 de ses 15 pays membres de la CEDEAO, une initiative comportant de nombreux avantages dans le cadre du système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA). La Guinée-Bissau devrait rejoindre prochainement cette interconnexion pour en tirer les avantages en termes d’accès à une énergie régulière et fiable.
    L’accès universel à une énergie abordable est essentiel pour améliorer les conditions de vie des populations africaines et faciliter davantage le fonctionnement des services sociaux. Il est indispensable pour la transformation structurelle des économies, stimulant ainsi la compétitivité et la création d’emplois. L’utilisation appropriée de l’expertise et des ressources de la Banque mondiale dans le cadre d’une coopération élargie aux institutions bilatérales et multilatérales en collaboration étroite avec les pays de la sous-région constitue un gage pour l’électrification accélérée de notre continent – un message important à la veille de la COP28.

    Macky Sall, président de la République du Sénégal et Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre

  • Tensions Mali-Côte d’Ivoire : la Cedéao en sapeur-pompier

    Tensions Mali-Côte d’Ivoire : la Cedéao en sapeur-pompier

    Les Maliens ont eu une oreille attentive sur le sommet extraordinaire organisé par l’institution communautaire de l’Afrique de l’ouest le 22 septembre 2022 à New York. En marge de l’Assemblée générale de l’Onu.

     

    Le climat est nuageux entre le Mali et la Côte d’Ivoire. La pomme de discorde est la question des 46 soldats ivoiriens détenus depuis le 10 juillet dernier au Mali. Le gouvernement ivoirien a entrepris des démarches et des négociations pour la libération de ses nationaux. Les tentatives se sont soldées par des échecs. Puisque le gouvernement malien qualifie ces soldats de «mercenaires». Pour décrisper l’atmosphère très délétère entre les deux pays frères, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) s’est saisie du dossier. Sous la houlette du président de la Guinée-Bissau et président en exercice de la Cédéao, Umaro Sissoco Embalo. Il a profité de la 77ème Assemblée générale de l’Onu pour discuter avec ses pairs sur les tensions ivoiro-maliennes. Une initiative louable et appréciée par les ressortissants maliens vivants à Yaoundé. D’ailleurs Touré, responsable des Maliens fait savoir que «nous les Maliens et les Ivoiriens vivent en parfaite harmonie ici au Cameroun. Nous menons toutes les activités ensemble. Les Maliens, Ivoiriens et Burkinabés se sont chargés comme un peuple de la Cédéao», explique-t-il.

    L’incident survenu entre l’Etat ivoirien et malien au sujet des soldats ivoiriens est pris comme «une brouille diplomatique». Une brouille dont l’issue favorable repose sur les pourparlers. « Les paires de la Cédéao vont plancher sur ce problème aujourd’hui. Puisqu’il y a deux sujets sur la table. La junte de la Guinée et du Mali. Je croise que les paires de la Communauté vont trouver des solutions à travers des négociations et des tractations pour sortir de l’impasse», espère Traoré du Mali. Et de poursuivre : « Même s’il y aura des désaccords sur certains points, tôt ou tard, les autorités de la Cédéao et les deux protagonistes vont trouver une voie de sortie de cette crise qui dure déjà depuis quelques mois. C’est notre souhait.

    Transparence et sincérité

    Selon les Maliens, les assises qui se tiennent à New York doivent se tenir dans la transparence et la sincérité. La Cédéao doit faire preuve d’impartialité et d’objectivité dans la gestion de cette crise. « Elle doit tout faire pour éviter toute escalade entre les deux États », souligne un Ouest-Africain. Et d’ajouter : « elle devra penser par elle-même et non par procuration pour contenter les intérêts de certaines puissances étrangères. Elle devra prendre des décisions qui arrangeront les deux partis pour la libération des soldats. Et éviter de se présenter comme une institution communautaire aux ordres, dont le rôle est d’infliger des sanctions ».

    Le responsable de la communauté malienne à Yaoundé souligne en outre que « les États africains doivent se battre pour raffermir leurs liens historiques, culturels, géographiques pour être plus forts face aux adversaires communs qui sont les terroristes et certaines puissances étrangères dont le mais est de diviser pour mieux régner ».

    Olivier Mbéssité

  • Jeanne Danielle Nlaté: «Pour la Fotrac 2022, on est bien parti pour un bal CEEAC-CEDEAO»

    Jeanne Danielle Nlaté: «Pour la Fotrac 2022, on est bien parti pour un bal CEEAC-CEDEAO»

    La présidente du Réseau des femmes actives de la Cemac (Refac) fait le point des préparatifs de la Foire transfrontalière annuelle d’Afrique centrale prévue du 28 juillet au 6 août 2022 dans la zone des trois frontières à Kyé-Ossi, Bitam et Ebibeyin

    Journal Intégration: Quelles sont à ce stade les grandes étapes de l’organisation déjà franchies?
    Jeanne Danielle Nlaté: À moins de deux mois, puisque la Fotrac commence le 28 juillet 2022, on peut dire que nous sommes à 75%. Nous avons eu la confirmation de plusieurs partenaires, institutionnels notamment. Déjà d’office le ministère du Commerce (Mincommerce) avec lequel nous travaillons. Et puis les entreprises parapubliques et publiques. Au niveau de la sous-région, on a la CEEAC avec le Projet d’appui aux frontières-GIZ et le Bureau régional des Nations unies pour l’Afrique centrale (Unoca). D’autres sont encore attendus. Nous avons sollicité les grandes institutions bancaires, les banques de développement bien sûr. On attend et, en même temps, on est dans la mobilisation des participants.

    Justement, comment se présente la mobilisation?
    On a déjà enregistré la confirmation de la participation des pays de l’Afrique de l’Ouest. Il y en a déjà sept. On est bien parti pour un bal CEEAC-Cedeao avec une majorité sénégalaise. Puis le Togo, la Côte d’Ivoire et le Benin.

    Qu’en est-il des délégations du Refac censées venir de différents pays?
    En principe, avec l’appui de la GIZ au Programme frontières, on pourrait avoir les onze pays de la CEEAC, en plus des experts venus de Guinée, du Mali. Ce sont des experts des questions de médiation. Parce que nous parlerons certes de la Zlecaf, du commerce intra régional, de la facilitation des échanges, des problèmes enregistrés le long des corridors, des difficultés à franchir les frontières, des questions de visas, mais on abordera également les questions de négociation et de médiation. Nous avons prévu une formation des médiateurs et médiatrices au profit des jeunes et des femmes aux frontières.

    Est-ce que tout est déjà au point au plan administratif pour que les difficultés de libre circulation des délégations ne soient plus à l’ordre du jour?
    On avait eu la grâce d’avoir en face les différents gouverneurs et préfets des trois pays. Et le plaidoyer est monté très haut. Ce qui fait qu’au retour, l’année dernière, toutes les barrières étaient levées. Nous pensons que cela a fait tache d’huile et que cette fois-ci, on pourra éviter cela.

    Mais déjà pour anticiper et prévoir ces désagréments, on a pensé que les participants venus des pays étrangers vont se retrouver trois jours avant à Yaoundé, et nous partiront en cortège. Ils visiteront la ville, échangeront avec les artisans, PME et autres opérateurs qui n’ont pas la possibilité de se déplacer. Autrement dit, on intègre l’aspect tourisme, découverte et visites des marchés.

    On ne va pas dire que la route n’est pas en bonne état entre Ébolowa et Yaoundé, même si c’est une réalité. Mais on ne veut pas qu’ils partent avec une image désastreuse du Cameroun. On va donc passer trois jours à Yaoundé, et le départ se fera ensuite en groupe les 27 et 28 juillet.

    Qu’est-ce qui a été arrêté à la dernière réunion préparatoire de Kyé-Ossi?
    Les autorités se sont montrées favorables. Celles locales se sont mobilisées sous la houlette du préfet qui a présidé la réunion. Les autorités gabonaises ont aussi déclaré être prêtes à accueillir de leur côté, comme l’année dernière, la manifestation.
    Pour ce qui est de la Guinée Équatoriale, on a rencontré le consul à Ébolowa. Il a indiqué que l’édition 2021 qu’il a vécue était une très bonne expérience. Et qu’il mettrait un point d’honneur à transmettre toutes les correspondances à sa hiérarchie. Donc, nous attendons officiellement qu’il se manifeste.

    Quelles sont les grandes mesures d’accompagnement dont vous bénéficiez de la part du gouvernement camerounais?
    Nous avons déjà l’appui institutionnel du gouvernement qui est immense. Parce qu’il y a un arrêté du Premier ministre depuis 2012 instituant un Comité ministériel élargi au secteur privé. La seule difficulté, c’est les moyens financiers de fonctionnement. On a également l’engagement du Mincommerce, Luc Magloire Mbarga Atangana qui saisit ses homologues des pays voisins. C’était encore le cas récemment avec le ministre de la RDC qui a souhaité être notifié officiellement parce que ça l’intéresse. Nous sommes également en attente. Mais on sait déjà que pour l’Afrique centrale, la RDC est le pays à l’honneur. Ce sera le Sénégal pour les pays de la Cedeao.

    Nous avons par ailleurs un appui financier conséquent du Mincommerce. Ce qui fait que nous bénéficions d’un appui institutionnel, technique et financier du gouvernement du Cameroun.

    Interview menée par

    Théodore Ayissi Ayissi

  • Transition au Mali : Les militaires dribblent la CEDEAO

    Transition au Mali : Les militaires dribblent la CEDEAO

    Avec deux militaires à la tête de la transition dont l’ex-ministre de la Défense Ba Ndaw désormais président de la République pour la période de transition et le colonel Assimi Goïta, en qualité de vice-président ont prêté serment le 25 septembre prenant à contrepied les désidératas de la CEDEAO.

     

     

    Le Colonel major à la retraite et ex-ministre de la Défense Ba Ndaw est président de la République du Mali depuis 13 heures ce 25 septembre et pendant les 12 ou 18 prochains mois. Il a prêté serment devant le Conseil constitutionnel. À la clé de cette transition, l’organisation des élections générales (présidentielles, législatives, voire municipales).

    À la vice-présidence, le colonel Assimi Goïta, nouvellement investi, se trouve en position de force. Il était jusque-là le chef de l’État du Mali, car à la tête de la junte militaire, le Conseil national du salut du peuple (CNSP), depuis le coup d’État du 18 aout 2020. Cette désignation a déjà attisé les suspicions des dirigeants de la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

    À Accra au Ghana le 7 septembre dernier, les chefs d’État ont exclu un vice-président militaire qui aurait plus de pouvoir que le président de la transition. En plus, le vice-président de la transition ne devrait pas pouvoir remplacer le président de la transition ni être candidat aux élections présidentielles à venir. Selon le plan de transition retenu par la junte pourtant, le vice-président peut remplacer le président en cas de destitution. Or, le leadeur du coup d’État du 18 aout dernier ne semble pas prêt à faire la figuration au cours de cette transition. Notamment dans le choix des femmes et hommes du gouvernement de transition. La suite réserve donc plusieurs développements.

    Bras de fer

    Pour l’heure, la Cedeao maintient les sanctions. Elle exige la nomination d’un Premier ministre, chef du gouvernement qui sera un civil. Ce après quoi les sanctions seront levées. La Cedeao demande en outre la dissolution de la junte et du CNSP. Le communiqué de la Cedeao a été lu par le président de la commission le 25 septembre dernier après l’investiture. Jean-Claude Kassi Brou a confié que la Cedeao « prend acte de l’investiture». Mais c’est sûr, elle ne s’en contente pas.

    La prochaine étape est donc la nomination du gouvernement de transition. Elle permettra de savoir s’il s’agit d’un duo à la tête du pays comme le craignent les observateurs et certains leadeurs de la Cedeao. Selon l’étendue des prérogatives accordées au vice-président, on sera très vite fixé. Autre indicateur, la répartition des postes et responsabilités qu’il y aura entre les proches du président, les militaires, les membres du mouvement du 5 juin, la société civile, on pourra très vite deviner. Les observateurs et certains chefs d’État craignent que le vice-président soit le vrai leadeur de la transition.

    C’est fonction de cette verticalité inversée ou de cette horizontalité à la tête du Mali que les chefs d’État de la Cedeao vont décider d’alléger ou non, d’annuler ou non les sanctions envers le Mali. Cette levée des sanctions est nécessaire pour desserrer l’étau d’asphyxie qui pèse sur le pays. En pleine instabilité politique, en pleine crise économique et en période de crise sanitaire, le Mali est sous-alimenté en produits de première nécessité depuis les sanctions imposées par la Cedeao. Le Mali est un pays d’hinterland sans littoral qui dépend de la Côte d’Ivoire, du Sénégal et de la Guinée pour ses opérations commerciales. La Cedeao a imposé un embargo sur les flux commerciaux et financiers avec le Mali deux jours après le coup d’État du 18 aout, pour obtenir un retour à l’ordre constitutionnel.

     Bobo Ousmanou

  • Mali : le calendrier clé en main de la CEDEAO

    Mali : le calendrier clé en main de la CEDEAO

    C’est finalement une affaire d’importation de solutions à la crise qui se joue entre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et la junte militaire au pouvoir à Bamako (Mali). Le sommet du 7 septembre dernier a, une fois de plus, été le marqueur d’un déni de solutions endogènes à la situation politique malienne.

    Le Mali est un pays particulier (comme tous les autres). Mais cette singularité doit être reconnue et prise en compte dans la résolution des crises comme celle en cours. Visiblement, les chefs d’État de la Cedeao n’en perçoivent pas la pertinence.
    Culturellement, le rapport à la souveraineté du peuple est ancien au Mali. Dès le moyen âge africain, entre les années 1200 et 1400 (XIIIe et XVe siècles), le royaume du Mali appliquait déjà des actions de redevabilité (accountability) et d’expression des avis du peuple sur la gestion de la cité. Dans les gènes de ce peuple, il existe une détermination particulière à se faire entendre par les dirigeants lorsque le politique devient sourd.

    Du point de vue sécuritaire, l’inclusion (sociale et spatiale) demeure un défi. La stabilité n’a toujours pas été retrouvée depuis 2013. La moindre précipitation sur un ordre politique déséquilibré, qui n’est pas pleinement légitimé par la volonté de l’ensemble des parties prenantes (classe politique, société civile, militaires, indépendantistes), serait une étincelle dévastatrice pour l’ensemble de la région.

    Passage en force
    C’est la résolution numéro 16 du communiqué final ayant sanctionné les travaux en présentiel, lors de cette 57e session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao. Elle s’est tenue à Niamey au Niger.

    Pour les Chefs d’État, il y a lieu de rétablir «l’ordre constitutionnel dans ce pays, avec une transition politique dirigée par un président et un Premier ministre civils pour une période de douze (12) mois».

    En d’autres termes, les dirigeants devant conduire l’intérim auront une année civile pour l’organisation des élections générales dans le pays. Cette consultation populaire conduira à la désignation d’un président de la République élu, d’un parlement élu et, par ricochet, d’un gouvernement désigné par le nouvel exécutif.

    Fast and Furious
    Au moment où les discussions sont des plus âpres au Mali avec le nouvel ordre dirigeant (militaires) organisé au sein du Conseil national de salut du peuple (CNSP), les chefs d’État de la Cedeao choisissent d’accélérer le mouvement. En effet, ils offrent huit (8) jours à l’ensemble de la classe politique malienne afin que soient désignés le Président et le Premier ministre de transition. Le communiqué final indique: «la conférence demande que le Président et le Premier ministre de la transition, tous deux civils, soient désignés au plus tard le 15 septembre 2020». Au moment de la rédaction de cet article, le compteur affiche quelque 4 jours et heures. Autrement dit, presque pas de place à la tergiversation et donc à la discussion, aux négociations, aux concertations.

    Fondamental
    En ne visant que la face visible de l’iceberg, l’essentiel des mesures s’éloigne du centre de gravité ayant conduit au renversement de l’ordre constitutionnel. Les conditions de vies des populations maliennes et la gouvernance sont une fois de plus sacrifiées sur l’autel du tout politique.

    Dans cette volonté d’asphyxie de la junte militaire, les sanctions décidées le 20 août restent en vigueur. Le Mali, pays sans littoral, est coupé de ses fournisseurs en denrées alimentaires et sanitaires. La conjoncture marquée par la pandémie mondiale à coronavirus et le regain de diffusion du virus est une autre inconnue.

     

    Rémy Biniou

  • Eco : Et c’est reparti pour 5 ans!

    Eco : Et c’est reparti pour 5 ans!

    L’insuffisante harmonisation macroéconomique autour des critères de convergence ainsi que la suspension de ces critères pour assurer la relance économique post Covid-19 obligent le report à moyen terme du lancement de la monnaie unique de l’Afrique de l’Ouest.

    La crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus a non seulement creusé les déficits macroéconomiques (déjà existants) des États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), mais il faudra davantage creuser ces déficits pour assurer le financement des plans de relance économique post Covid-19. Bien avant, tous les États n’ont pas ramené leurs données macroéconomiques au niveau des critères de convergence de la Communauté. Ces critères de convergence indiquent le niveau autorisé de déficits dans la communauté économique.

    Globalement, voilà l’environnement économique dans lequel l’Afrique de l’Ouest vient de refuser de lancer sa monnaie commune, l’Eco. Le communiqué final de la 57e session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao, tenue à Niamey (Niger) le 7 septembre 2020, indique que la Conférence a décidé de «différer, à une date ultérieure, le lancement de la monnaie unique».

    Covid-19

    La pandémie de la Covid-19 aura finalement accéléré le mouvement social au Mali et déstabilisé les institutions. Elle aura entrainé des pertes en vies humaines, l’aggravation de la pauvreté, le regain de la menace sécuritaire et l’augmentation des déficits. L’Afrique de l’Ouest est clairement frappée de plein fouet par les répercussions de la crise sanitaire actuelle.

    Pour s’en relever, les chefs d’État d’Afrique de l’Ouest décident d’«exempter les États membres du respect des critères de convergence macroéconomique en 2020», souligne le communiqué final. La mesure vise à permettre aux États de s’endetter pour financer les plans de relance post pandémique. Dans cette perspective, ils ont «lancé un appel aux partenaires en vue d’une augmentation du soutien accordé aux États membres de la Cedeao». Il faudra aussi faire «les réformes économiques nécessaires pour assurer la reprise de leurs économies».

    Les experts de la Banque africaine de développement, lors de la présentation du rapport sur les «perspectives économiques régionales en Afrique de l’Ouest 2020», avaient indiqué que l’Afrique de l’Ouest aurait besoin des mesures énergiques pour se relever de cette situation. Selon les scénarios d’une reprise en forme de V, W ou U, le moyen terme (4-5 ans) pourrait être envisagé.

     Énième feuille de route

    Les chefs d’État concluent qu’une feuille de route sera nécessaire pour le chantier monétaire. Une nouvelle feuille de route, après celle révisée de 2019 et les précédentes qui ont eu cours dans les décennies précédentes.

    Ladite feuille de route intègre la redéfinition «d’un nouveau pacte de convergence et de stabilité macroéconomique». Un projet à envisager sur le moyen terme (5 ans) pour les plus optimistes. Car il faudra déjà le concevoir, le discuter avec les États, les partenaires techniques et financiers, le mettre en œuvre et en tirer les premiers résultats. Dans ce sillage, la commission de la Cedeao est tenue de «travailler avec les banques centrales, les ministères des Finances, l’AMAO et l’IMAO, en vue de la mise en œuvre de la feuille de route révisée pour le programme de la monnaie unique».

    Ce n’est pas un adieu!

    Bobo Ousmanou

     

     

    Monnaie unique Cedeao : Une histoire d’atermoiements

    Le projet au cœur de la naissance de la dynamique d’intégration en Afrique de l’Ouest demeure un serpent de mer.

     

    2020 symbolisera un rendez-vous manqué de plus pour la naissance de la monnaie unique ouest-africaine. Les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) trainent deux décennies de report du lancement d’une monnaie devant les trois zones monétaires qui squattent la région à savoir l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (Uemoa) et son franc CFA (le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Togo et la Guinée-Bissau), la ZMAO et ses devises (cédi au Ghana, dalasi en Gambie, dollar libérien au Liberia, franc guinéen en Guinée, leone en Sierra Leone et naira au Nigéria) et le Cap-Vert dont la monnaie, l’escudo, n’appartient à aucune des deux unions monétaires.

    Si en 2020, les questions de géopolitique ont largement dominé et ont conduit les ministres des Finances de la Zone monétaire d’Afrique de l’Ouest (ZMAO) à conclure que le processus de transformation du FCFA en Eco ne respectait pas la feuille de route définie par les chefs d’État, il faut également souligner l’incidence générée par la crise sanitaire liée à la Covid-19 sur les économies. Des économies en état d’impréparation structurelle à accueillir cette monnaie, car très peu respectueuses des règles de la surveillance multilatérales qui créent un dominateur commun d’homogénéisation.

    Évolution

    L’histoire des renoncements débute en réalité avec la création de la Cedeao. Dès 1972, le président togolais, Gnassingbé Eyadema, et son homologue du Nigéria, le général Yakubu Gowon, entreprennent une tournée destinée à promouvoir l’idée d’une intégration sous régionale en Afrique de l’Ouest. En 1975, leurs efforts débouchent sur le traité de Lagos et la création de la Cedeao. Au début des années 1980, les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté posent les bases d’un processus d’intégration monétaire.

    Pour structurer ce projet, la ZMAO est créée en 2000 pour se rapprocher de l’Uemoa qui, elle, a vu le jour en 1994. En 2001, la Cedeao adopte le mécanisme de surveillance multilatérale des politiques économiques et financières des États membres. Objectif: le respect d’un ensemble de critères de convergence macroéconomiques, susceptibles de contribuer à homogénéiser les économies de la région.

    Après trois reports successifs, en 2003, 2005 et 2009, les autorités ouest-africaines renoncent finalement, en juillet 2014, à lancer l’Eco en janvier 2015 au sein de la Zone monétaire d’Afrique de l’Ouest. Raison invoquée: Le niveau insuffisant de préparation et de convergence économique au sein de la ZMAO.

    Finalement, c’est en 2018 que les discussions vont reprendre en vue d’un lancement en 2020. Une feuille de route révisée est adoptée en 2019 à cet effet. Elle est intransigeante et fort ambitieuse. Elle indiquait que seuls les pays qui respecteront les critères de convergence dits de premier rang avant 2020 (déficit budgétaire limité à 3% du PIB, une inflation à 10% maximum et une dette inférieure à 70% du PIB) participeront à la monnaie unique.

    Enfin de compte…

    Bobo Ousmanou

    EcoFCFA/Convergence : Buhari détricote Ouattara

    La Cedeao se prépare à mettre sur pied une nouvelle architecture de la surveillance multilatérale. C’est l’une des décisions majeures de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement du 7 septembre dernier. C’est aussi et surtout un gage technique pour la réalisation du chantier monétaire en Afrique de l’Ouest.

     

    C’était le principal argument du chef d’État ivoirien qui justifiait techniquement et triomphalement le passage du FCFA à l’Eco et son lancement en 2020. Un argument convergent avec la feuille de route révisée de 2019 qui indiquait que seuls les pays ayant été disciplinés dans le respect des critères de convergence pourraient prendre part au lancement de la monnaie unique ouest-africaine, initialement prévue pour le 3e trimestre 2020. Avec la Banque de France, la zone franc et le FMI comme épée de Damoclès, les pays de l’Uemoa sont très studieux (mais toujours bons élèves) dans le respect des critères de convergence qui ressortent même (chose rare) dans le traité de création de l’organisation.

    Ce tacle technique sur les critères de convergence, le Nigéria de Buhari (très mal en point économiquement depuis la crise des matières premières de 2014) n’avait pas encore, jusqu’au 2e trimestre 2020, pu contrecarrer et riposter. D’autant plus que Paris, en initiant un rapprochement avec Accra tout au long de l’année 2019 (invitation à Paris, mise à l’honneur, accords économiques), avait engagé son projet «isolement du Nigéria».

    Il aura fallu la rencontre des chefs d’État de la ZMAO en juin 2020 pour décider d’aplanir les divergences entre la dynamique FCFA et celle de la Cedeao. Car quelques mois auparavant, le 16 janvier, les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales des pays de la ZMAO, réunis en conseil de convergence, avaient «pris note avec préoccupation» du passage du FCFA Uemoa à l’Eco d’ici 2020 comme indiqué en décembre 2019 par Ouattara. Ils avaient indiqué, dans le communiqué final, que «cette décision n’est pas conforme» avec la démarche des chefs d’État.

    Le mandat à venir du chef d’État ivoirien réserve des défis sur ce chantier où le Nigéria semble reprendre la main!

    BO

  • Coup d’État au Mali : Umaro Sissoko coud un costume à Ouattara et Condé

    Coup d’État au Mali : Umaro Sissoko coud un costume à Ouattara et Condé

     

    Le tout nouvellement élu président bissau-Guinéen Umaru Sissoco Embaló fait les choux gras de la presse africaine. Au cours du sommet extraordinaire de la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) du 20 août 2020 consacré au coup d’État au Mali, il s’est illustré par une particulière appréciation de la notion de coup d’État.

    Estimant au préalable qu’un coup d’État est forcément condamnable, il a invité ses pairs à condamner tous les coups d’État, sans exception. Pour le tombeur de Domingos Simões Pereira lors de l’élection de février 2020, les projets de troisième mandat anticonstitutionnel sont aussi des coups d’État et on ne peut pas les laisser prospérer impunément. «Donc, si on doit condamner la junte malienne du CNSP pour avoir fait un putsch, il faut également condamner Alpha Condé et Alassane Ouattara», a-t-il lâché en plein huis clos des chefs d’État. «Les présidents Buhari et Sall ont éclaté de rire, tandis que Condé et Ouattara sont devenus verts de rage, face à l’audace du jeune président bissau-guinéen», indique Mediapart.

    Crise de respect
    À l’origine de cet affront, un manque de respect. À en croire jeune Afrique, le président de la Guinée-Bissau n’a toujours pas digéré le dédain des présidents ivoiriens et guinéens envers sa personne. Les deux personnalités ont clairement affiché leur soutien à l’adversaire de Umaro Sissoko. Cette attitude se serait poursuivie après l’investiture du champion de la présidentielle de 2020, lui qui avait déjà reçu les soutiens de Macky Sall, Muhammadu Buhari et même de Denis Sassou Nguesso en Afrique centrale.

    Lorsqu’Alassane Ouattara, voulant réagir, lui oppose un «filston» pour rabattre le caquet à son pourfendeur, Umaro réplique «Il n’y a pas de fiston ici… Il y’a des Chefs d’État qui sont tous égaux. Et j’entends assumer pleinement la souveraineté de mon pays».

    Bobo Ousmanou

  • Action humanitaire non gouvernementale au Cameroun : Le temps de l’«acceptation diplomatique»

    Action humanitaire non gouvernementale au Cameroun : Le temps de l’«acceptation diplomatique»

    Selon la chancellerie française à Yaoundé, l’offre de service reste chevillée à l’évolution de la crise sanitaire de la Covid-19. 

    Signature de l’arrangement d’établissement entre la Fondation Ad Lucem et le gouvernement

    «Arrangement d’établissement» ; pour une certaine opinion, le concept est neuf. Pour les spécialistes des questions diplomatiques, il est symboliquement fort. Raison : «il confère un statut de nature diplomatique, équivalent à celui d’une ambassade ou d’une représentation d’organisation internationale», souligne Daniel Nkomba, internationaliste. En abordant les actualités récentes au ministère camerounais des Relations extérieures (Minrex), l’on dira que le gouvernement vient d’ouvrir l’espace de la «diplomatie humanitaire» à deux institutions.

    A Yaoundé le 14 août dernier, Lejeune Mbella Mbella et Henry Njakoi ont signé un arrangement d’établissement liant l’Etat du Cameroun à Nascent Solutions. Désormais, l’ONG américaine (financée à hauteur de plusieurs milliards FCFA depuis 2005 par le gouvernement des USA et d’autres organismes internationaux) est officiellement libre de mettre en œuvre son programme international «Aliments pour l’éducation et nutrition pour enfants dans diverses communautés des régions de l’Adamaoua, de l’Est, du Nord et du Nord-Ouest du pays.

    Avant Nascent Solutions, le Minrex a renouvelé, le 12 août 2020 à Yaoundé, l’arrangement d’établissement de la fondation Ad Lucem (FALC). Signé pour la première fois le 11 juin 2012, le document encadrant la collaboration entre l’État du Cameroun et cette fondation reconnue d’utilité publique le 30 août 1968 comporte désormais une innovation. En effet, l’article 17 de l’arrangement d’établissement entre les deux parties permet désormais «d’accélérer et de faciliter les prochaines démarches de la fondation médicale Ad Lucem en vue du renouvellement du présent arrangement».

    Aux yeux des observateurs, l’Etat du Cameroun amorce ainsi la construction d’un outil diplomatique non gouvernemental pour accompagner sa politique sur le terrain. Bien sûr, tout cela est encadré , nuance Daniel Nkomba. Il ajoute : «Avec un arrangement d’établissement, les ONG restent des partenaires plutôt discrets qui n’ambitionnent pas de peser sur la politique nationale mais privilégient les interventions ponctuelles et soigneusement ciblées. L’Etat gère lui-même son espace de souveraineté». En écho, la déclaration du ministre de l’Administration territoriale du 9 mars 2020 à Yaoundé. Ce jour-là, Paul Atanga Nji dénonçait les ONG conspiratrices des institutions républicaines.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Mali : les organisations d’intégration sont-elles si déconnectées?

    Mali : les organisations d’intégration sont-elles si déconnectées?

    Les organisations d’intégration régionale en Afrique sont-elles la propriété des États ou des peuples d’Afrique?

    Le renversement de l’ordre constitutionnel au Mali le 18 aout dernier a fait ressortir les vieilles recettes de l’Union africaine (UA), de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et, dans une certaine mesure, de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Après avoir condamné le coup d’État, ces organisations africaines ont tout de suite exigé le rétablissement dans leurs fonctions du président et du gouvernement maliens. Pour imposer leur volonté, l’Union africaine et la Cedeao ont suspendu le Mali. Les États membres de la Cedeao ont, en plus, fermé leurs frontières avec ce pays. Un embargo, doublé d’une isolation, qui a pour objectif de tordre la main à la junte militaire en l’asphyxiant et réduisant ses marges de manœuvre. C’est à se demander si les États membres de ces organisations prennent en compte les causes profondes de la désobéissance militaire.

    Appréciation questionnée

    S’il est admis que rien ne justifie une prise de pouvoir par d’autres moyens que ceux prévus par la constitution, le besoin d’imposer un régime muselé par la rue est tout aussi malsain que l’attitude décriée en début de phrase. Les militaires ont illégalement acquis le pouvoir au Mali. Soit! Mais, on omet de dire qu’il s’agit ni plus ni moins d’une jambe en bois pour penser l’embrasement d’une société en putréfaction continue depuis plusieurs mois. La rue a en réalité pris le pouvoir au Mali. Le pouvoir et le chef d’État ont été rendus inaudibles sur la scène nationale et internationale. D’où les quatre médiations engagées par la Cedeao, sans succès, il faut bien le préciser. Même Paris n’a pas su protéger Ibrahim Boubacar Keita et son régime. C’est dans l’objectif de rompre la radicalisation et éviter un bain de sang que ces militaires sont intervenus. On peut ne pas être d’accord avec le procédé, mais l’action de la junte a peut-être permis d’éviter le pire.

    Cette analyse n’est pas la plus populaire. Mais si on peut valider partiellement l’argumentaire, on peut soupçonner l’Union africaine et la Cedeao de se tromper dans l’appréciation de cette situation en voulant à tout prix imposer et re-introniser un ordre gouvernant déchu. Cette option ne va-t-elle pas définitivement embraser le pays et causer plus de problèmes qu’elle ne veut résoudre?

     Crédibilité menacée

    Au service de qui sont les organisations d’intégration africaine? Des États ou des peuples? Ces organisations sont-elles des clubs qui défendent les intérêts des chefs d’État?

    L’échec des tentatives de médiation de la Cedeao n’est-il pas assez éloquent pour convaincre que la solution à la crise sociopolitique malienne passe par des réformes socioéconomiques ambitieuses qui ramènent la quiétude. Un gouvernement d’union nationale n’est qu’un pansement de vétérinaire sur une blessure d’humain. Le coup d’État actuel l’est tout autant.

    Le malaise sécuritaire rajoutera de l’allant à cette vague de mécontentement. Le ras-le-bol est profond.

    Les exigences légitimes, mais incompréhensibles de la Cedeao (qui est en première ligne) pourraient lui coûter sa crédibilité et sa légitimité auprès du peuple malien, étant entendu bien sûr que les contestataires ne sont pas «le peuple». Ne serait-il pas judicieux de travailler à une concertation profonde, neutre et élargie qui accoucherait d’un consensus national de renaissance du Mali?

    Les organisations d’intégration régionale sont des excroissances du peuple souverain qui a confié son pouvoir à des représentants qui l’exercent en lieu et place. Ces entités supranationales sont ainsi à son service et devraient avant toute chose prioriser son intérêt supérieur. Tel est le gage du passage d’une intégration des États à une intégration des peuples!

    Bobo Ousmanou

  • Banque africaine de développement : l’assemblée générale en visioconférence

    Banque africaine de développement : l’assemblée générale en visioconférence

    Cette édition de l’assemblée annuelle de la Banque africaine de développement (Bad) est aussi inédite que le contexte dans lequel elle se tient. Fait inédit, cette année les réunions se limiteront aux réunions statutaires à huis clos des gouverneurs et à l’élection du président, indique le communiqué rendu public le 13 août dernier.

    À cela s’ajoute la 46e réunion annuelle du Fonds africain de développement, qui est la branche confessionnelle du Groupe de la banque. Le conseil des gouverneurs fera l’évaluation des interventions de la banque au cours de l’année, en fonction des résolutions de l’assemblée annuelle de l’année dernière tenue à Malabo. Les réunions se tiennent alors que le monde continue de faire face à une crise de santé publique résultant de la pandémie de Covid-19. La Bad a estimé dans une étude que le continent africain pourrait perdre au moins 173,1 milliards de dollars de PIB en 2020 et 236,7 milliards de dollars en 2021 en raison des incidences économiques de la pandémie. Cette dernière a contraint plusieurs industries à fermer et a conduit à des pertes d’emplois chiffrées en millions.

    La banque a apporté une réponse rapide pour soutenir ses pays membres régionaux et le secteur privé avec le lancement, le 8 avril, d’un mécanisme de réponse au Covid-19, d’un montant maximal de 10 milliards de dollars. Elle soutient d’ores et déjà la stratégie de relance économique de certains pays et de certaines sous-régions. Les gouverneurs vont se pencher sur les interventions de la Bad contre les impacts négatifs de la crise sanitaire actuelle.

    Les gouverneurs vont également évaluer le processus d’augmentation du capital de la banque. Les actionnaires, réunis en assemblée extraordinaire le 31 octobre 2019 à Abidjan (Côte d’Ivoire), ont décidé d’une augmentation de 125% du capital. Soit, en valeur relative, un passage de 93 milliards à 208 milliards dollars US. C’est 115 milliards dollars US en plus. Les actionnaires devront ainsi faire le point sur leur participation.

    Bonne santé
    C’est une institution débarrassée des scandales qui arrive à son assemblée annuelle. Plus légère et plus sereine. La notoriété, la crédibilité et l’intégrité de son président ayant été boostées après deux mois d’embourbement dans un conflit géopolitique incompréhensible.

    L’agence de notation financière S&P Global Ratings a confirmé le triple A de l’institution dans un communiqué du vendredi 19 juin 2020. Le maintien du triple A s’explique enfin, par un profil de risque et des niveaux de fonds propres qui sont très solides, tout autant que la capacité de la Bad à mobiliser facilement des ressources sur les marchés de capitaux. La perspective stable de l’institution multilatérale africaine repose sur l’engagement maintenu de ses actionnaires, qui continueront de payer leurs contributions au capital.

    Aussi, ses créanciers potentiels maintiendront à son profit un traitement privilégié, lors de ses sorties sur le marché des capitaux. L’agence de notation indique: «Le 4 juin 2020, le bureau des conseils des gouverneurs de la Bad a examiné les récentes allégations contre le président Akinwumi Adesina. Le bureau a souscrit aux conclusions du comité d’éthique qui a exonéré le président de tout acte répréhensible, bien qu’il autorise un examen indépendant du rapport compte tenu des opinions divergentes des gouverneurs. Nous pensons que, conformément à nos attentes, cette question a été traitée de manière idoine par les voies institutionnelles appropriées».

    Voie royale
    C’est une voie royale pour Akinwumi Adesina, président sortant de la Bad et seul candidat déclaré à sa propre succession. Il jouit du soutien de l’Union africaine, de la Cedeao et des pays membres non régionaux à l’exception sans doute des États-Unis d’Amérique.

    Bobo Ousmanou

  • Fermeture des frontières entre le Nigeria et ses voisins: visées fausses, justes cibles

    Fermeture des frontières entre le Nigeria et ses voisins: visées fausses, justes cibles

    Le monde est à l’écoute du Nigeria. Puissance pétrolière, puissance agricole, puissance démographique, puissance culturelle (avec Nollywood et la musique), ses dirigeants sont fâchés.

     

    Il y a plusieurs mois, ils ont décidé de fermer les frontières de leur pays avec ses voisins. Officiellement, pour le gouvernement nigérian, il s’agit d’une opération de sécurisation de ses frontières terrestres. Cette opération dénommée «Ex-Swift Response» mobilise (depuis août 2019) l’armée, la police, les services d’immigration. Mais plus tard, l’argument sécuritaire est vite délaissé et on retiendra plutôt que la fermeture de la frontière est motivée par la lutte contre la contrebande des armes, du riz, des véhicules d’occasions, du carburant, des surgelés… se déroulant au niveau de ses frontières terrestres avec ses voisins; le Bénin étant désigné comme le principal fautif visé, aux côtés du Niger, du Tchad et du Cameroun.

    Et du coup, l’effet est là: ce pays anglophone, enclavé dans un espace ouest-africain très majoritairement francophone, tient en respect toute la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). «Notre communauté vit des moments difficiles. Il y a péril en la demeure; nos acquis sont fragilisés par la fermeture des frontières terrestres aux marchandises entre le Niger, le Nigeria et le Bénin depuis six mois maintenant, ce qui a un impact négatif sur le volume des échanges intercommunautaires pour les années 2019 et 2020. Cette fermeture a des répercussions profondes sur les échanges, les opérateurs économiques, sans oublier les consommateurs qui doutent aujourd’hui de notre communauté», a déclaré l’Ivoirien Jean-Claude Kassi Brou chez Jeune Afrique, le 15 février 2020. À décrypter la déclaration du président de la Commission de la CEDEAO, c’est l’économie de presque toute l’Afrique de l’Ouest qui est mise à très rude épreuve.

    Au-delà des raisons avancées pour justifier cette fermeture qualifiée par beaucoup de politique de protectionnisme économique, d’autres y voient plutôt une volonté du gouvernement nigérian de montrer ses muscles pour imposer sa vision politique aux voisins. Derrière, l’École de guerre économique (IGE) n’exclut pas l’activité des lobbies. Ce centre international de réflexion rapporte d’ailleurs une déclaration du représentant de Olam (géant international de l’alimentation) au Nigeria. Selon Ade Adefeko, «depuis la fermeture des frontières, le riz produit localement se vend mieux, la production augmente». À en croire IGE, l’industriel a même demandé au gouvernement que la mesure soit appliquée «jusqu’à la fin de l’année pour voir les conséquences sur le plus long terme».

    IGE considère aussi cette fermeture de frontières comme une pression sur le gouvernement béninois. Ce dernier a refusé, en 2017, de renouveler la licence de l’opérateur nigérian de téléphonie mobile Globalcom, malgré les interventions des uns et des autres. Pour d’autres observateurs, il s’agit plutôt d’une mise en application des représailles de l’homme le plus riche d’Afrique, Aliko Dangote, qui a aussi essuyé des refus pour l’installation de sa cimenterie au Bénin et sur bien d’autres points.
    En tout cas, le Nigeria le sait: ses moindres faits et gestes sont scrutés. Toute la CEDEAO espère que si le pays a traditionnellement fait preuve d’un esprit d’ouverture en se montrant à l’écoute des enjeux de ses voisins francophones, en conduisant une politique étrangère responsable acquise au règlement multilatéral des différends entre nations, il peut aussi revenir à de meilleurs sentiments.

    Rémy Biniou

  • CEEAC-CEDEAO : vers une relance de la coopération

    CEEAC-CEDEAO : vers une relance de la coopération

    La Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont jeté, le 10 février dernier, les bases d’une relance de la coopération entre les deux institutions.

    En effet, en marge de la 33e Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine à Addis Abeba, Ahmad Allam-Mi, secrétaire général de la CEEAC, et Jean Claude Kassi Brou, président de la Commission de la CEDEAO, se sont retrouvés en vue d’un nouveau départ. Constatant d’abord une tiédeur depuis le sommet conjoint CEDEAO-CEEAC tenu le 30 juillet 2018 à Lomé au Togo, les deux responsables ont alors convenu de l’organisation d’un 2e sommet conjoint dont les contours restent encore à définir. «Compte tenu notamment des agendas politiques des deux régions au courant de l’année 2020, les deux personnalités se chargeront de proposer aux États membres que le 2e sommet conjoint se tienne dans le deuxième trimestre de l’année 2021», a rapporté une source au sein de l’Union africaine.

    Mais avant 2021, Ahmad Allam-Mi et Jean Claude Kassi Brou se sont accordés sur «l’organisation de la première réunion annuelle des hauts responsables des organes exécutifs des deux institutions», ont-ils annoncé. Ladite réunion trouve en partie son fondement dans le constat fait par les deux autorités selon lequel très peu de choses ont été réalisées jusqu’ici pour la mise en œuvre des recommandations du sommet de Lomé. Pour rappel, ces recommandations visaient entre autres objectifs l’établissement d’un cadre d’action commun entre les deux communautés dans le domaine de la paix et de la sécurité. Ladite réunion se tiendra alors les 26 et 27 mars prochains à Abuja au Nigéria et devrait être «élargie au secrétariat exécutif de la Commission du golfe de Guinée», ont fait savoir les deux responsables.

    Théodore Ayissi Ayissi (stagiaire)

  • 38,1 milliards FCFA

    38,1 milliards FCFA

    C’est la somme qu’a déboursée l’État camerounais en 2018 pour importer du bitume dans le cadre de la réalisation de ses infrastructures routières.

    D’après le confrère Cameroon Business Today (N° 126 du 9 octobre 2019), ces deux dernières années, le Cameroun a importé plus de 194 000 tonnes de bitume pour ses différents chantiers. Soit une facture cumulée de 54,2 milliards de francs sur les exercices 2017 et 2018. Face cette énorme dépense pour le seul achat de bitume, le gouvernement camerounais croit tenir une alternative : concevoir et utiliser du bitume local.

    À cet effet, rapporte la même source, le ministère des Travaux publics (Mintp) a récemment lancé un avis de sollicitation à manifestation d’intérêt pour la sélection d’une entreprise ou d’un consortium d’entreprises en vue de la production de bitume au Cameroun. L’objectif étant d’alimenter le marché local, et les marchés de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao). L’entreprise adjudicataire devra ainsi au préalable réaliser une étude de faisabilité, construire et exploiter une usine à cet effet.

  • Carte rose Cemac : La vie en rose avec la Carte de la Cedeao

    Carte rose Cemac : La vie en rose avec la Carte de la Cedeao

    Malgré quelques avancées, les barrières et les financements plombent le bon fonctionnement de l’outil d’assurance au service de la sous-région.

    Une vue du panel lors des travaux du bureau de la Carte Rose Cemac à Douala

    Les délégations des bureaux des Etats membres de la Cemac étaient réunies en session extraordinaires du 15 au 19 Juillet dernier à Douala. Parmi les sujets traités, les règlements financiers harmonisés, l’instruction des dossiers sinistres en insistant sur l’harmonisation des procès-verbaux et des rapports des bureaux nationaux. A l’occasion, il a été annoncé le partenariat imminent entre la Carte Cedeao et la Carte Rose Cemac. De fait, la Carte Rose n’étant valable qu’au niveau des pays de la sous-région, le vœu est d’aller au-delà des frontières de la Cémac. De fait, dès les prochains mois, si un ressortissant de la Carte Rose Cemac traverse la frontière, le conducteur du véhicule va directement s’adresser au bureau national de la Cedeao, qui va prendre attache avec le bureau national de la Cemac. Toutes choses qui vont faciliter le règlement des sinistres et participer à la réalisation des intérêts de l’intégration.

    En créant la Carte rose Cemac en 1996, l’idée des chefs d’Etat de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale était de favoriser les règlements des sinistres automobilistes. Afin d’encourager les mouvements ou les échanges des marchandises, des biens et des personnes à travers la circulation des véhicules dans l’espace sous-régionale. En effet, lorsque ces véhicules n’arrivaient pas à circuler librement, il se posait un écueil pour l’intégration sous régionale.

    Malgré quelques avancées, notamment du système d’arbitrage qui consiste à faciliter le règlement des sinistres, l’option pourtant noble des chefs d’Etat de la Cemac est sapée par certaines initiatives comme le mur-frontière en construction entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale. «Justement, ça constitue un facteur bloquant, parce que quand on dit circulation des personnes et des biens, il ne doit plus avoir des séparations entre nous. Si les chefs d’Etat peuvent voir leur pair pour que ce mur ne voit pas le jour entre nous». Ainsi s’exprime la Gabonaise Essoue Céline, Présidente du Conseil des Bureaux de la carte Rose Cemac pour déplorer la construction du mur-frontière par les autorités équato-guinéennes à Kye Ossi.

    Dans la même veine, poursuit-elle, «ayant déjà jeté les bases, ce sont les finances, entre autres, qui constituent un facteur de blocage. Nous avons entrepris des démarches et envoyé des lettres auprès des institutions qui peuvent nous aider. Et nous avons des entraves au niveau des attestations parce que l’article 308 alinéa 1 veut que si tu es par exemple Camerounais, tu paies ton assurance au lieu de ta résidence. Mais il s’avère que vers les zones transfrontalières, par exemple au Gabon, les populations viennent au Cameroun pour s’enregistrer et ça fait un manque-à-gagner au Gabon qui a de la peine à bien voir ce qui s’est réellement passé au plan national».

    Alain Biyong (stagiaire)

  • Afrique : Les priorités d’Al Sissi

    Afrique : Les priorités d’Al Sissi

    Le président égyptien Fattah Al Sissi assume désormais la présidence de l’Union africaine. Son action est principalement assise sur les piliers sécuritaires et économiques. 

    Abdel Fattah Al Sissi dévoilant son plan d’action pour l’Afrique

    L’Union africaine a du pain sur la planche. Son projet de libre circulation des personnes est sur le point de rencontrer des obstacles structurels à l’instar de la carte de séjour. Une manne pour les caisses de l’émi-immigration des États, mais surtout un indicateur du caractère extraverti du continent noir.

    En Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest, les frais d’établissement de la carte de séjour se chiffrent à plusieurs milliards de dollars par an. Au Gabon, on estime les recettes à près de 10 milliards de dollars par an et le pays compte à peine 2 millions d’habitants. Au Cameroun, la loi de finances dispose que le montant du droit de timbre pour l’établissement d’une carte de séjour est de 200 000 (deux cent mille francs CFA) pour les ressortissants français et 250.000 (deux cent cinquante mille francs) pour les autres nationalités. La carte de séjour a une validité de deux (2) ans renouvelable.

    En Côte d’Ivoire, la grille tarifaire de l’office national d’identification suit la même logique. Un résident hors CEDEAO doit débourser 300 000 francs CFA. Un résident français se procure le titre de séjour contre la somme de 150 000. Tandis qu’un religieux et coopérant français doit se munir de 35 000. Les ressortissants des pays de la CEDEAO sont exonérés, car la libre circulation, et le libre établissement des citoyens de ce regroupement régional sont une réalité. En Côte d’Ivoire et dans le reste de l’espace CEDEAO, la carte de séjour est biométrique. Sa validité est de 5 ans.

    Incongruité
    Les pays africains déroulent mieux le tapis rouge à la main-d’œuvre étrangère. Et pourtant celle-ci est réputée plus chère. Si dans l’espace francophone, c’est la France qui est indexée, l’espace anglophone et lusophone montrerait le même scénario. La libre circulation recherche justement 3 enjeux : le libre établissement des travailleurs, c’est-à-dire la main d’œuvre, la circulation préférentielle des investisseurs, des prestataires de services et de leur capital, et enfin le libre apprentissage des étudiants et enseignants.

    Au moment où le continent africain est lancé dans l’intensification des échanges, il est temps d’interroger ces contradictions du libre mouvement des personnes en Afrique. Après la démonstration marocaine, qui a établi que la migration sur le continent représente 3 fois plus celle irrégulière et régulière vers l’Europe, le rapport de la Cnuced a achevé de convaincre sur l’intérêt de faciliter les mouvements des personnes. Selon ce rapport, les mouvements en Afrique sont des traits d’union économiques et commerciaux. C’est aussi des canaux de rétrocession de fonds et des vecteurs de réinvestissements dans les pays d’origine. Le rapport de la Banque africaine de développement sur les perspectives économiques en Afrique a démontré qu’une Afrique décloisonnée verrait son PIB croitre de 134 milliards de dollars.

     

    Union africaine

    Guerre de leadership au sommet

    Le président et le vice-président s’opposent sur la gestion de l’organisation continentale. Moussa Faki veut garder la main, tandis que Kwesi Quartey appelle à moins de dirigisme et plus de clarté.

     

    C’est le feuilleton qui traverse Addis Abeba en ce moment. Le président de la Commission de l’Union africaine (UA) et son adjoint sont dans une opposition sourde. En cause, le leadership de l’institution. Alors que le président veut asseoir son positionnement comme personnalité politique et managériale qui engage la Commission, son adjoint s’arc-boute sur l’organigramme et les manuels de procédures pour dénoncer l’obésité managériale.

    Une situation qui ne rassure pas plus sur la quiétude au sein de l’organisation. Après la démission du Ghanéen Daniel Batidam du Conseil consultatif de lutte contre la corruption (CCUAC) en juin dernier, il y a eu la confirmation des pratiques de harcèlement et de discrimination sexuelle. Plusieurs employés de l’organisation témoignent de cet état de fait. Une source, qui a voulu conserver l’anonymat, estime que «c’est de la politique et de la lutte de pouvoir. Le vice-président parle de respect des procédures, le président invite au respect de la hiérarchie. La division semble profonde, puisqu’elle est visible sur les visages des deux hommes».

    Révélations
    Plusieurs médias anglo-saxons sur le continent et au-delà font état d’une lettre du vice-président de la Commission adressée au président ghanéen. Dans cette missive, datée du 6 novembre 2018, Kwesi Quartey dénoncerait le népotisme et le favoritisme de Moussa Faki Mahamat à la tête de la Commission de l’UA. La nomination d’Ahmat Awad Sakine au poste de représentant permanent de l’UA à l’Union européenne est particulièrement indexée. Ce diplomate tchadien serait un «vieux copain» du président de la Commission, indique ladite lettre.

    Au-delà des divisions sur le contrôle du management des ressources humaines, la question des mœurs au sein du département est également évoquée. Le Ghanéen indiquerait alors que les révélations sur les pratiques peu orthodoxes des femmes pour décrocher des contrats sont connues depuis fort longtemps. Mais rien n’a été fait avant, comme depuis la livraison du rapport d’enquête sur la question.

    Curiosités
    Les déclarations attribuées au vice-président de la Commission de l’UA soulèvent des questionnements. L’UA est une organisation internationale, fonctionnant dans une logique intergouvernementale. Ainsi, la nomination des fonctionnaires respecte un ensemble de critères, dont l’équilibre entre les États membres de l’UA et les régions géographiques de l’Afrique. Plus complexe encore, la désignation d’une personnalité engageante comme un représentant permanent dans une organisation partenaire de l’acabit de l’Union européenne. La Commission, après validation du collège des commissaires, soumet l’identité des hauts fonctionnaires au conseil des représentants permanents (qui réunit les ambassadeurs des États membres). Le rapport de cet organe est transmis au conseil exécutif, qui réunit les ministres des Affaires étrangères des États membres.

    L’article 13 de l’Acte constitutif de l’UA énonce que, le Conseil exécutif assure la coordination et décide des politiques dans les domaines d’intérêt commun pour les États membres. Il prépare l’ordre du jour des sessions de la conférence, et rédige des projets de décision pour examen. Il élit les membres de la Commission pour nomination à la conférence. Il examine les attributions et les statuts de la Commission, et fait des recommandations à la conférence. C’est peut-être là la raison du silence et de l’absence de commentaires des principaux concernés.

    Zacharie Roger Mbarga

    Le pied de nez de Tshisekedi 

    Contesté après son élection, le président congolais est depuis le dimanche 10 février, le deuxième vice-président de l’organisation panafricaine.

     

    Le 32e sommet ordinaire de l’Union africaine (UA), qui s’est tenu à Addis Abeba (Éthiopie), a donné l’occasion au nouveau président de la République démocratique du Congo (RDC) de faire ses premiers pas sur la scène continentale.

    La présence de Felix Antoine Tshisekedi à ses assises a consacré une double reconnaissance pour le nouveau chef de l’État. Tout d’abord, le président congolais a prononcé un discours devant ses pairs. Ensuite, au terme de ces assises, Felix Tshisekedi a été élu deuxième vice-président de l’UA. Aux côtés de Fattah Al Sissi (Égypte) président, Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud) premier vice-président et Mahamadou Issoufou(Niger) troisième vice-président.

    Cette reconnaissance apparait comme un pied de nez à Paul Kagame, le président rwandais qui vient de quitter la tête de l’UA. Mais également à Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA. Les deux hommes avaient en effet pris la tête de la contestation de l’élection de Felix Tshisekedi à la présidence de la RDC. Après avoir émis de «sérieux doutes» sur la fiabilité des desdits résultats, ils avaient demandé au Conseil constitutionnel de surseoir à la proclamation définitive des résultats. Paul Kagame et Moussa Mahamat Faki envisageaient même de se rendre en RDC avant d’essuyer une fin de non-recevoir des autorités congolaises.

    «Les élections qui ont eu lieu le 30 décembre 2018 consacrent la toute première alternance démocratique et pacifique du pouvoir depuis notre indépendance, et ce dans le respect de la Constitution. Cette passation pacifique du pouvoir entre le président sortant et le dirigeant du plus ancien parti d’opposition a démenti tous les pronostics du chaos annoncé à l’issue de ces élections. Elle est la preuve de la maturité politique de notre peuple», leur a lancé Felix Tshisekedi, lors de son allocution.

     

    Ifeli Amara

  • Réformes économiques : La Cemac évalue le Cameroun

    Réformes économiques : La Cemac évalue le Cameroun

    Une équipe de la surveillance multilatérale de la Commission de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale séjourne dans le pays du 4 au 13 février. Jean Claude Ngeumeni, directeur de la surveillance multilatérale et chef de cette mission, s’explique.

     

    Vous conduisez une équipe qui va séjourner pendant plus d’une semaine au Cameroun. Quels sont les objectifs de cette mission?
    Nous sommes au Cameroun dans le cadre d’une mission de la Cemac sur la surveillance multilatérale. Qui dit surveillance multilatérale dit surveillance des politiques macroéconomiques et budgétaires. Dans le cadre de notre mission, nous aurons à examiner la situation macroéconomique et financière du Cameroun en 2018 et les perspectives pour 2019 et 2020, évaluer l’état de conformité du Cameroun aux nouveaux critères de convergences de la Cemac, évaluer les dispositions prises au niveau national pour une conclusion satisfaisante des revues restantes du Programme économique et financier du Cameroun avec le Fonds monétaire internationale (FMI), examiner l’état de mise œuvre des divers piliers des réformes économiques et financières de la Cemac ; en bref, évaluer l’état de mise en œuvre des différentes réformes structurelles engagées.

    Au cours de la séance de travail que nous avons eue ce matin (04 février, NDLR), nous avons partagé les objectifs de la mission. Nous avons évoqué les points qui feront l’objet d’une attention particulière au cours de la mission. Notamment les mesures qui sont mises en œuvre pour renforcer la mobilisation des recettes hors pétroles, les mesures qui sont mises en œuvre pour améliorer et rationaliser la qualité de la dépense publique, des mesures qui sont prises pour renforcer l’état de mise en œuvre des réformes structurelles engagées, les mesures qui visent une meilleure mise en œuvre du budget d’investissement public.

    Cette évaluation va se faire sur la base du nouveau dispositif surveillance multilatérale entré en vigueur en 2017. Quel est sa particularité ?
    Ce nouveau dispositif vise à amener les nouveaux états membres à la mise en œuvre de politiques budgétaires contra cycliques. Lorsque le dispositif avait été adopté. Il avait été demandé à l’ensemble des États de transmettre à la Commission de la Cemac, leur programme triennal de convergence. Nous sommes satisfaits du fait que le Cameroun a transmis à la Commission de la Cemac, en décembre 2018, son programme triennal de convergence pour la période 2019-2021.

    Concrètement, comment va se dérouler cette mission?
    Nous aurons des rencontres avec diverses administrations et structures concernées. Notamment les administrations relevant des ministères des Finances, de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire. Nous aurons des rencontres avec les partenaires au développement notamment la représentante résidente du FMI, la Banque mondiale, l’Union européenne, la coopération française, la Banque africaine de développement, etc.

    Nous aurons également des rencontres avec les acteurs de la société civile, du secteur privé. Tout cela pour nous permettre d’avoir une meilleure appréhension de la santé macroéconomique et financière du Cameroun.

     

    Frais de séjours

    Casse-tête pour la libre circulation 

    En Afrique, le coût de la carte de séjour augmente tout en restant avantageuse pour les expatriés occidentaux.

    L’Union africaine a du pain sur la planche. Son projet de libre circulation des personnes est sur le point de rencontrer des obstacles structurels à l’instar de la carte de séjour. Une manne pour les caisses de l’émi-immigration des États, mais surtout un indicateur du caractère extraverti du continent noir.

    En Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest, les frais d’établissement de la carte de séjour se chiffrent à plusieurs milliards de dollars par an. Au Gabon, on estime les recettes à près de 10 milliards de dollars par an et le pays compte à peine 2 millions d’habitants. Au Cameroun, la loi de finances dispose que le montant du droit de timbre pour l’établissement d’une carte de séjour est de 200 000 (deux cent mille francs CFA) pour les ressortissants français et 250.000 (deux cent cinquante mille francs) pour les autres nationalités. La carte de séjour a une validité de deux (2) ans renouvelable.

    En Côte d’Ivoire, la grille tarifaire de l’office national d’identification suit la même logique. Un résident hors CEDEAO doit débourser 300 000 francs CFA. Un résident français se procure le titre de séjour contre la somme de 150 000. Tandis qu’un religieux et coopérant français doit se munir de 35 000. Les ressortissants des pays de la CEDEAO sont exonérés, car la libre circulation, et le libre établissement des citoyens de ce regroupement régional sont une réalité. En Côte d’Ivoire et dans le reste de l’espace CEDEAO, la carte de séjour est biométrique. Sa validité est de 5 ans.

    Incongruité
    Les pays africains déroulent mieux le tapis rouge à la main-d’œuvre étrangère. Et pourtant celle-ci est réputée plus chère. Si dans l’espace francophone, c’est la France qui est indexée, l’espace anglophone et lusophone montrerait le même scénario. La libre circulation recherche justement 3 enjeux : le libre établissement des travailleurs, c’est-à-dire la main d’œuvre, la circulation préférentielle des investisseurs, des prestataires de services et de leur capital, et enfin le libre apprentissage des étudiants et enseignants.

    Au moment où le continent africain est lancé dans l’intensification des échanges, il est temps d’interroger ces contradictions du libre mouvement des personnes en Afrique. Après la démonstration marocaine, qui a établi que la migration sur le continent représente 3 fois plus celle irrégulière et régulière vers l’Europe, le rapport de la Cnuced a achevé de convaincre sur l’intérêt de faciliter les mouvements des personnes. Selon ce rapport, les mouvements en Afrique sont des traits d’union économiques et commerciaux. C’est aussi des canaux de rétrocession de fonds et des vecteurs de réinvestissements dans les pays d’origine. Le rapport de la Banque africaine de développement sur les perspectives économiques en Afrique a démontré qu’une Afrique décloisonnée verrait son PIB croitre de 134 milliards de dollars.

    Zacharie Roger Mbarga

    Banque mondiale

    Une Africaine l’orge la présidence

    Il s’agit de l’ancienne ministre des finances du Nigeria, Ngozi Okonjo-Iweala.

     

    La succession du président démissionnaire de la Banque mondiale Jim Yong Kim est désormais ouverte. Alors que le secteur financier mondial traverse toujours le choc, des candidats fourbissent leurs armes pour occuper le strapontin. C’est le cas de la nigériane Ngozi Okonjo-Iweala, ancienne ministre des finances du Nigéria et ancienne directrice de la Banque mondiale. En 2012, l’économiste et championne africaine de la lutte anti-corruption s’était déjà portée candidate au poste de Président de la Banque mondiale. Elle avait perdu contre le Président Kim.

    En marge du Forum économique mondial de Davos, elle affirme être intéressée par l’opportunité mais pause des préalables. Elle ne fera acte de candidature que si les circonstances sont réunies et qu’elle se sent soutenue. «Non je n’ai pas déclaré ma candidature. Mais je serai candidate si je suis nominée. Je sais que, parce que j’étais dans la course en 2012, beaucoup de gens me posent la question» a-t-elle récemment confié à CNN.

    Conditions
    C’est le soutien que son ambition pourrait recueillir qui décidera celle qui a toujours lutté contre l’endettement improductif des États Africains. Le principal soutien est au sein de la banque mondiale étant entendu que les candidats au poste de président de la Banque mondiale sont nominés par les directeurs exécutifs. L’autre soutien pourrait être celui du continent africain. En travaillant pour une candidature africaine à la banque mondiale comme ce fut le cas de Mushikiwabo à la francophonie, il y a de fortes chances que Ngozi Okonjo-Iweala soit plus qu’une figurante à l’élection en perspective.

    Cette issue reste toutefois difficile, le Président Buhari en campagne de réélection, n’a pas encore actionné l’outil diplomatique auprès de ses pairs Africains et l’Union Africaine ne s’est toujours pas saisi du dossier. Qui plus est, la banque mondiale est le symbole de l’hégémonie des États Unis d’Amérique. En règle générale, le pays a une très grande influence sur la désignation du président de l’institution.

     

    Zacharie Roger Mbarga

  • Zone Franc : L’Italie rejoint le front anti CFA

    Zone Franc : L’Italie rejoint le front anti CFA

    En traitant la France de puissance spoliatrice de l’Afrique, le vice-président du Conseil italien a rouvert la boite de pandore.

    Le gouvernement italien joue désormais sérré avec la France

    Tout est parti d’une réflexion sur les causes de l’immigration clandestine africaine vers l’Europe. Dimanche 20 janvier, le vice-président du Conseil italien des ministres a dénoncé la politique africaine de la France à qui il impute la responsabilité des migrations irrégulières auxquelles sont forcés les Africains. «À partir d’aujourd’hui, ceux qui veulent débarquer en Italie, on va les emmener à Marseille. Je vais demander des sanctions contre les pays qui colonisent l’Afrique. La France imprime le Franc dans les colonies pour financer une partie de sa dette. Pour laisser les Africains en Afrique, il suffirait que les Français restent chez eux», affirme Luigi Di Maio sur la radio italienne RTL 102.5.

    L’allusion à une monnaie qui appauvrit l’Afrique sera renforcée le lendemain par celui qui, depuis 2017, dirige la principale formation politique au parlement italien : le parti politique d’extrême droite baptisé Mouvement 5 étoiles. Lundi 21 janvier dans la soirée, Luigi Di Maio, qui occupe la fonction de ministre du Développement économique, du Travail et des Politiques sociaux depuis 2018 dans le gouvernement italien, en rajoute une couche. « Tout ce que j’ai dit est vrai. La France imprime une monnaie pour 14 États africains et, par conséquent, elle en empêche le développement. Au contraire, elle contribue aux départs des migrants, qui vont ensuite mourir dans la Méditerranée ou débarquer sur nos côtes. Il est temps que l’Europe ait le courage d’aborder le thème de la décolonisation de l’Afrique. Si la France n’avait pas les colonies africaines, parce que c’est ainsi qu’il faut les appeler, elle serait la 15e puissance économique mondiale alors qu’elle est parmi les premières, grâce à ce qu’elle est en train de faire en Afrique », accuse-t-il.

    Consolidation
    En Italie, la question est portée avec énergie par la majorité au parlement. Matthieu Salvini, l’autre vice-président du conseil italien, a soutenu les propos de son collègue et camarade politique. « Le problème des migrants a beaucoup de causes : par exemple, ceux qui ne vont pas en Afrique pour créer du développement, mais plutôt pour soustraire de la richesse au peuple africain. La France est parmi eux, l’Italie, non », a ajouté pour sa part le ministre italien de l’Intérieur, lors d’une émission télévisée le 22 janvier.

    Le moins que l’on puisse dire est que cette question cruciale hante une partie de l’Italie, qui est au bord du stress humanitaire avec l’accueil des migrants. Afin de donner de l’emphase aux réactions des deux ministres italiens, le député italien Di Battista, l’un des cadres du Mouvement 5 étoiles en Italie, a déchiré un billet de franc CFA en pleine émission télévisée. C’était le 23 janvier dernier. Il s’agissait du billet de 10 000 francs CFA de la Coopération financière en Afrique, c’est dire celui de la zone Cemac.

    Zacharie Roger Mbarga

    La France fait grise mine

    Inacceptables et aberrants, c’est la réaction de Paris aux envolées verbales des ministres et politiques italiens.

    Très peu flatté par les accusations du voisin transalpin, le directeur de cabinet de Nathalie Loiseau, la ministre française des Affaires européennes, a convoqué, le 21 janvier, Teresa Castaldo, l’ambassadrice d’Italie en France. Rien n’a pour l’instant filtré des échanges. Mais ce que l’on sait c’est que le cabinet de la ministre parle de « propos inacceptables ». À l’Élysée, on évoque « des déclarations aberrantes ». « Notre intention n’est pas de jouer au concours de celui qui est le plus bête », a esquivé Nathalie Loiseau, à l’issue du Conseil de ministres du 23 janvier.

    Plusieurs réactions des politiques français ont fait échos à la position de leurs autorités. Le commissaire européen aux affaires économiques, l’ancien ministre socialiste de l’Économie, Pierre Moscovici, qualifie les propos des autorités romaines d’« insensés », et juge leur attitude « irresponsable ». « Accuser la France d’appauvrir l’Afrique avec le franc CFA et d’accroître la crise migratoire, c’est stupide et totalement faux ! Salvini et Di Maio font de la démagogie ridicule à Rome pendant que Français et Italiens travaillent ensemble au Sahel », peste Jacques Maire, député de la république en marche des Hauts-de-Seine, vice-président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et président du groupe d’amitié France-Niger.

    Garant et non maitre
    Plusieurs fois, le président français Emmanuel Macron s’est exprimé sur la question du franc CFA. « Sur la question du franc CFA, la France n’en est pas le maître, mais le garant. Ça veut dire que c’est un choix des États membres. Personne n’oblige un État à en être membre », se défendait Emmanuel Macron à Ouagadougou, devant des étudiants burkinabés. « J’accompagnerai la solution qui sera portée par l’ensemble des présidents de la zone Franc. S’ils veulent en changer le périmètre, j’y suis plutôt favorable. S’ils veulent en changer le nom, j’y suis totalement favorable. Et s’ils considèrent qu’il faut même supprimer totalement cette stabilité régionale et que c’est mieux pour eux, je considère que c’est eux qui décident et donc je suis favorable », ajoutait par la suite le président français.

    « Si on ne se sent pas heureux dans la zone Franc, on la quitte et on crée sa propre monnaie comme l’ont fait la Mauritanie et Madagascar. Si on y reste (dans la zone Franc-NDLR), il faut arrêter les déclarations démagogiques, faisant du franc CFA le bouc émissaire de vos échecs politiques et économiques, et de la France la source de vos problèmes », indiquait Emmanuel Macron à l’attention des chefs d’État africains en juillet 2017 au sommet extraordinaire du G5 Sahel à Bamako.

    Zacharie Roger Mbarga

    Autonomie monétaire

    L’Afrique de l’Ouest prend une longueur d’avance 

    La Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) est engagée à avoir sa monnaie à l’horizon 2020.

     

    La 53e conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao tenue le 31 juillet 2018 à Lomé (Togo) a constaté la création quasi définitive de l’union monétaire de cette communauté économique régionale. Après plusieurs amendements et hésitations, le projet prend forme. En créant cette union monétaire, les 15 États membres de cette communauté auront une économie régionale commune. Pour y arriver, des aspects importants liés à la convergence économique et financière, à la philosophie de la conception matérielle des différentes coupures et au financement du processus demeurent.

    Feuille de route
    Pour ce qui est du régime de change, de l’harmonisation du cadre de la politique monétaire et du modèle de la future banque centrale, les ministres des Finances, le président de la Commission de la Cedeao et l’ensemble des gouverneurs des banques centrales de la Cedeao sont en train de finaliser les études d’impact. Leurs propositions seront soumises aux chefs d’État lors du sommet de cette année à Abuja.

    Pour ce qui est du nom de baptême et des signes de la future monnaie commune, un groupe de travail est sur le point de se réunir. Le président de la Commission de la Cedeao a la charge de rassembler les représentants des banques centrales et des experts dans les domaines du design, du graphisme, de l’économie, de l’histoire, de l’anthropologie, de la sociologie, des sciences politiques, des signes monétaires ou du droit. Ce groupe sera chargé de proposer des noms et des signes pour la future monnaie unique au comité ministériel. Les chefs d’État ont exhorté les banques centrales à accélérer le financement de la feuille de route.

    Zacharie Roger Mbarga

     

    Amos René Martin Tonye, économiste, auteur de « Afrique-Occident : le New Deal industriel »

    « Le problème de la monnaie est beaucoup plus complexe » 

    Quel écho les sorties des autorités italiennes sur le franc CFA ont-elles eu sur vous ?
    La réaction de monsieur Luigi Di Maio, vice-président du conseil des ministres italien, et dirigeant du Mouvement 5 étoiles (M5S) traduit simplement le climat de tensions prévisibles que vit l’Occident en ce moment, notamment, le continent européen. Ces tensions sont suscitées par les vagues d’immigration galopantes observées depuis les côtes et frontières méditerranéennes. Nous avons toujours indiqué que si rien n’est fait pour stopper, efficacement à la racine, l’immigration clandestine qui décime la jeunesse africaine en Méditerranée, croyez-nous, les Occidentaux perdront leur tranquillité. Ce n’est que le début d’un processus.

    Au-delà de cette dénonciation, l’Italie peut-elle vraiment faire quelque chose pour que les pays de la zone franc retrouvent leur souveraineté monétaire ?
    Le problème de la monnaie en tant qu’instrument de politique monétaire en Afrique (zone franc) est beaucoup plus complexe et ne saurait trouver une solution par un coup de colère qui émane, fut-il, d’un haut dirigeant italien. Plusieurs positions pertinentes ont été faites sur l’usage de cet instrument en Afrique. Mais elles avaient, pour certaines, des faiblesses d’ordre technique, et pour d’autres, d’ordre stratégique ou politique (elles n’ont pas pris en compte les rapports de force dans leur faisabilité). Les aspects techniques ayant déjà été examinés par la littérature économique abondamment disponible sur la question, il revient aux économistes et aux politiques africains de repenser une stratégie pour rendre réalisable l’usage de l’instrument monétaire en Afrique. Tel est l’objet de notre prochain ouvrage.

    En quoi votre récent ouvrage sur l’industrialisation de l’Afrique peut-il constituer la solution à la querelle opposant l’Italie à la France sur l’Afrique et ses flux de migrants en Europe ?
    D’abord, une jeunesse démographiquement majoritaire en Afrique et en croissance exponentielle, sans espoir, sans emploi et condamnée à la misère, a pour seul espoir, la traversée de la méditerranée. Cette perspective lui offre, au moins, deux possibilités : « 50 % d’être avalée par un requin et 50 % de chance d’atteindre “la terre promise” ou l’eldorado européen. En restant en Afrique, selon cette jeunesse, c’est 100 % de chance d’être avalée et de mourir par la misère ».
    Notre ouvrage de stratégie et de politique économique, intitulé «Afrique-Occident : le New Deal industriel», jette les bases d’un front commun à bâtir entre l’Afrique et l’Occident pour faire face à cette difficulté commune.

    Pour ce faire, nous y avons élaboré une stratégie pour rendre réalisable (concrète et réaliste) l’industrialisation de l’Afrique. En plus, nous y avons formulé des modèles économiques qui sont en adéquation avec les réalités, les ressources budgétaires et naturelles des États africains. Il s’agira de parvenir à réduire les rigidités (à améliorer les facteurs de production), à moderniser les économies africaines, dans la perspective de les rendre compétitives (débloquer l’offre). Il est également question de résorber ce chômage de masse sur le sol africain, à l’effet de sédentariser la jeunesse africaine dans son milieu naturel, dans l’intérêt de toutes les parties (les Africains comme les Occidentaux).

    Interview réalisée par
    Thierry Ndong

     

    Blaise Élie Pamboudem, coordonnateur du Centre africain pour le développement durable et l’environnement (Cadde)

    « Il appartient aux peuples africains de saisir la balle au bond » 

    J’ai appris, comme tout le monde, que monsieur Luigi Di Miao, vice-président du conseil italien, a accusé la France d’être à l’origine du retard de développement qu’accusent certains pays africains. Il ressort de la litanie de chefs d’accusation : l’utilisation du franc CFA par les 14 États de la zone franc. Ce discours m’a semblé comme du déjà entendu, puisqu’il est évident que le fait de rester cloîtrer dans le cercle infernal du franc CFA est un frein au développement des États utilisateurs de cette monnaie.

    Il est aussi vrai que la dénonciation faite par l’Italie participe à la conscientisation du peuple africain, dont les dirigeants doivent accélérer le processus de création de leur monnaie, élément si besoin en est, de la souveraineté étatique. C’est le seul avantage, à mon sens, que cette dénonciation pourrait apporter. Il ne peut en être autrement puisque les rapports internationaux sont régis par le principe de souveraineté dont l’une des principales implications est le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Ce principe est au cœur de certaines revendications étatiques. Il appartient donc aux peuples africains, eux-mêmes, de saisir la balle au bond pour perpétuer la revendication, à l’effet de faire bouger les lignes.

    Propos recueillis par
    Zacharie Roger Mbarga

     

    Siegfried Kamga Nkuissa, chercheur en relations internationales

    « L’Italie ne fera rien pour les Africains »

    Assurément, la sortie du vice-premier ministre italien relance le débat sur le franc CFA. Mais cette polémique devrait d’abord être lue sous le prisme européo-européen. Il s’agit avant tout d’une querelle de famille, querelle qui épouse le clivage politique actuel né de la mondialisation au sein des nations démocratiques occidentales. Il s’agit du clivage libéral mondialiste et le clivage conservateur nationaliste.

    Emmanuel Macron est présenté aujourd’hui comme le dernier rempart de la démocratie libérale à l’occidental. Face aux forces populistes qui prennent d’assaut l’Europe, il se positionne comme un défenseur de la mondialisation. Le point qui cristallise le plus cette friction est l’immigration clandestine. Il est une évidence que l’immigration clandestine venue d’Afrique subsaharienne est essentiellement économique et en majorité de pays francophones. L’occasion était donc donnée ici au vice-premier ministre italien de faire d’une pierre deux coups. Dans un premier plan, il fustige l’attitude de la France donc il fait l’unique responsable du sous-développement en Afrique à travers le franc CFA. Il rend par la même occasion Macron responsable de l’immigration massive qui, nous devons le rappeler ici, est la vague qui a porté son mouvement politique au pouvoir.

    Une fois de plus, l’Afrique n’est pas un acteur, il n’est qu’un enjeu et un prétexte dans des guerres de leadership d’autres entités qui lui sont extérieures. Alors non, l’Italie ne fera rien pour les Africains, d’autant plus que l’élite africaine ne semble pas être pressée de prendre le chemin que vous indiquez.

     

    Propos recueillis par

    Zacharie Roger Mbarga

  • Akere Muna : “Monsieur propre” dans la gadoue

    Akere Muna : “Monsieur propre” dans la gadoue

    En se jetant dans la course au palais de l’Unité, l’ancien bâtonnier a bâti sa candidature autout des valeurs d’intégrité, d’honnêteté et de patriotisme. Depuis, il fait face à de nombreuses affaires succeptibles d’écorner sa réputation. Le match avant la lettre.

    Plutôt que du “Monsieur le président”, Akere Tabeng Muna (ATM) préfère qu’on lui donne du “monsieur propre”. “J’aime bien ça”, avoue-t-il aux journalistes du Club politiques qu’il rencontre ce 7 juin dans un hôtel de Yaoundé. En réalité, c’est sous ce jour que le candidat déclaré à la présidentielle d’octobre 2018 se présente devant les Camerounais. En vue de conquérir les déçus de la politique qu’il sait nombreux, l’ancien vice-président de Transparency International se positionne comme une alternative aux politiciens camerounais réputés véreux, corrompus et calculateurs.

    D’où l’idée d’« une Nouvelle République » portée par le sexagénaire. Pour la construire, « nous devons changer radicalement notre attitude vis-à-vis de la chose politique et promouvoir un comportement citoyen», explique-t-il ajoutant que « la marque d’un bon homme politique est l’honnêteté, l’intégrité et la confiance ». De l’avis de cet avocat anglophone, « cela doit être suivi par l’amour pour le pays et pour le peuple».

    Réputation

    Aussi ATM travaille-t-il à démontrer qu’il incarne ces valeurs. À travers des visites dans les campagnes, les marchés…, l’époux de l’Anglo-américaine Beverly Bird affiche sa proximité avec le bas peuple. Rien de feint, défend Paul Mahel. L’ancien journaliste, devenu porte-parole du candidat, soutient qu’en dépit du fait que membre de l’une des familles les plus puissantes du pays, « Akere est très proche du citoyen et très accessible ». « L’une des manifestations de cette proximité est la fondation Salomon Tandeng Muna [du nom du père des Muna] qui œuvre dans le social », brandit-on dans l’entourage de l’ancien bâtonnier.

    « Akere Muna et Donald Kaberuka ont quelque chose en commun, ce qui n’est pas toujours fréquent, c’est de réussir, mais en même temps d’être des hommes droits, avec des valeurs », ajoute pour sa part Pascal Lamy, ancien directeur général de l’Organisation mondiale du commerce. Un témoignage bien mis en exergue dans la section de la biographie officielle du candidat titrée « la réputation d’Akere T. Muna ».

    Revirement

    Sauf qu’en politique tenir dans le manteau de « monsieur propre » n’est pas donné. Sa seule déclaration de candidature est déjà considérée comme problématique. Avant la présidentielle de 2011, l’homme qui ne quitte presque jamais ses lunettes rondes et son nœud papillon assure qu’il ne se présentera jamais contre Paul Biya. Or, ce dimanche 8 octobre 2017, lorsque l’ancien président du conseil d’administration d’Ecobank Cameroun annonce qu’il brigue la magistrature suprême, on ignore toujours si oui ou non le président sortant sera candidat à sa propre succession. ATM n’exclut donc plus cette option.

    Sur cette question, la plaidoirie de cet avocat qui cumule une quarantaine d’années d’expérience tient à deux choses. D’abord, à l’en croire, il ne s’agirait pas d’un rétropédalage sur « une question de principe ». « Le pays n’était pas en guerre quand je faisais cette déclaration », justifie-t-il. D’ailleurs « seuls les imbéciles ne changent pas d’avis. Et c’est parce que certains refusent de changer d’avis que nous sommes en ce moment en guerre », réplique-t-il faisant allusion à la crise anglophone. Ensuite, se persuade-t-il, « si je ne mets pas mon expérience au service du pays, j’aurais été complice d’une situation alarmante ». N’empêche, pour certains, cela reste une tâche sur la cape d’homme de parole qu’essaie de se coudre cet amateur de bonne musique.

    Muna contre Muna

    Dans sa pièce de théâtre « Les mains sales » (1948), l’écrivain français Jean-Paul Sartre estime que faire de la politique s’assimile à plonger ses mains dans « la merde et dans du sang ». L’engagement d’ATM, dans les années 1990, au sein du SDF de Fru Ndi, dont il a contribué à la rédaction des statuts, ne lui a pas fait retenir la leçon. Peut-être était-il trop dans l’ombre… Mais à bien écouter cette figure de proue de la lutte anti-corruption, le message semble être aujourd’hui passé. « Mes détracteurs vont voir de quoi je suis capable dans ce monde. Je leur rappelle que j’ai fait 22 ans à Transparency International. Je connais leurs dossiers. Si c’est par là qu’ils veulent qu’on passe, on va y passer. Je suis prêt, menace-t-il en cette matinée du 14 juin 2018 en réaction à l’affaire l’opposant à sa sœur cadette Ama Tutu Muna (ATA).

    La colère d’ATM est à la hauteur des enjeux. L’ancienne ministre des Arts et de la Culture (Minac) vient de lui porter plainte. ATA reproche à son frère aîné la gestion de l’héritage de leur père et réclame sa nomination comme co-administratrice de la succession. Elle l’accuse de faux et usage de faux et affirme n’avoir jamais eu connaissance du jugement d’hérédité établi par la famille à la mort en 2002 de l’ancien Premier ministre. Dans cette affaire, ATM risque gros. S’il est reconnu coupable, sa réputation de « monsieur propre » va s’écrouler et avec, ses ambitions présidentielles.

    Laurent Esso

    L’avocat formé à l’école anglo-saxonne le sait trop bien. L’actuel administrateur du patrimoine des Muna, soutenu par le reste de la fratrie, voit donc derrière la démarche de sa sœur, une machination politique ourdie par le ministre de la Justice Laurent Esso : « je suis un candidat déclaré à la présidentielle. Le ministre de la Justice bat campagne pour un autre candidat. Si je suis emprisonné, je suis disqualifié pour gagner la présidentielle », indexe-t-il. Les soupçons sont renforcés par la proximité avec Laurent Esso qu’on prête à ATA.

    Mais en face, l’avocate de l’ancienne Minac, dément toute manipulation. Fostine Chébou Kamdem, met plutôt en avant, la volonté de sa cliente de rentrer dans ses droits. À l’issue de la dernière audience de l’affaire tenue le 26 juin dernier au tribunal de première instance de Yaoundé, elle soupçonne ATM de vouloir faire traîner le jugement sur le fond, en sollicitant « une décision avant dire droit sur la question de prescription ». Attitude que le député juge « peu orthodoxe pour un candidat qui veut vite démontrer à ses électeurs qu’il est innocent ». Reste que, certaines allégations de l’ancien bâtonnier restent troublantes. Selon ce dernier, depuis qu’il a déclaré sa candidature, il perd systématiquement tous ses procès et le ministre de la Justice manœuvrerait pour que ses honoraires ne soient pas payés dans les affaires où il défend l’État du Cameroun. « Dis à ton patron de retirer sa candidature sinon, ça va chauffer », aurait même conseillé un juge au conseil de l’ancien bâtonnier.

    Financement

    Outre cette affaire, l’ancien vice-président du conseil d’administration de Transparency International, doit aussi gommer l’étiquette de candidat de l’extérieur que lui colle une partie de l’opinion. Cette perception s’est renforcée avec sa saisine de l’Onu. Il y dénonçait « un génocide » dans les régions anglophones. Une image que le pouvoir contribue à grossir les traits. Au lendemain de la déclaration de candidature d’ATM, Issa Tchiroma, ministre de la Communication, l’accuse par exemple, au cours d’une conférence de presse, d’avoir, en complicité avec d’autres Camerounais basés à l’étranger, « planifié un bain de sang» dans le but de provoquer « une intervention internationale ». Des accusations restées à ce jour sans suite judiciaire.

    Pour ne rien arranger, il s’est ajouté ces derniers jours des rumeurs, démenties par l’ambassade des États-Unis, de financements par le pays de l’Oncle Sam. « De la vraie sorcellerie », commente Paul Mahel. L’ancien journaliste explique que, jusqu’ici, les activités de l’ancien bâtonnier sont financées « sur fonds propres » et celles du mouvement Now qui porte sa candidature, par ses membres. Cette organisation dite de citoyens engagés, compte parmi ses « membres fondateurs » l’Alliance des forces progressistes (AFP) de Bernard Muna, frère aîné d’Akere. Mais c’est le Front populaire pour le développement, un parti de seconde zone basé dans la région de l’Adamaoua, qui a investi ATM le 23 juin dernier. « Je suis le tout premier candidat anglophone investi par un parti francophone », préfère mettre en exergue le natif de Ngyen Mbo dans le Nord-ouest.

    Aboudi Ottou, Intégration N° 328

    Bio-Express

    Nom : Akere Tabeng Muna
    Âge : 66 ans (né en août 1952 à Ngyen Mbo, dans le Nord-ouest du Cameroun)
    Expérience professionnelle : avocat au barreau du Cameroun ; bâtonnier ; président de l’Union panafricaine des avocats ; vice-président du conseil d’administration de Transparency International ; président du Conseil économique, social et culturel de l’Union africaine ; président du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs ; président de la Conférence internationale contre la corruption ; président du conseil d’administration d’Ecobank Cameroun, membre du Groupe de haut niveau de l’Union africaine sur les flux financiers illicites en provenance d’Afrique…
    Niveau académique : diplômé de la Lincoln’s Inn society
    Vie conjugale : marié avec Beverly Bird et père de trois enfants

     

    Réformes institutionnelles

    Du vin nouveau dans de vieilles outres

    Tout en changeant la forme de l’État, Akere Muna compte garder la plupart des institutions déjà en place.

    Akéré Muna sur le terrain

    « Notre pays est bloqué ! », pense le candidat du Front populaire pour le développement. Pour le débloquer, Akere Muna pense que le premier défi à relever est celui de « l’institutionnalisation ». «Reconstruire, c’est d’abord relever le défi de l’institutionnalisation pour assurer l’hégémonie du projet étatique sur les initiatives concurrentes », pose-t-il. Dans le chapitre « État et politiques étrangères » de son programme, trône en bonne place un pan consacré à la consolidation de la démocratie constitutionnelle et l’État de droit.

    Avant tout, l’avocat constate qu’il n’existe pas de séparation de pouvoirs entre l’exécutif, le législatif, et le judiciaire. Pour y remédier, il propose une conduite des réformes selon un séquencement bien précis : constitution d’une commission de révision constitutionnelle, élaboration d’un projet de révision constitutionnelle, organisation d’un référendum constitutionnel.
    Le résultat de ce premier processus devrait aboutir à l’instauration d’un poste de vice-président et la suppression du poste de Premier ministre au sein de l’exécutif. Le code électoral va intégrer une élection du président au suffrage universel direct à deux tours, tandis que Akere Muna propose «l’institution d’un droit de véto contre les textes d’origines parlementaires » ; et le vice-président devient « président de droit du Sénat ». Pas de suppression de la Chambre haute du parlement comme le propose certains candidats. Le parlement reste bicaméral, mais « indépendant de l’exécutif ».

    Hybride

    Entre réforme du Conseil constitutionnel et réforme du Conseil supérieur de la magistrature, Akere Muna veut rendre le parquet plus indépendant et supprimer la compétence du tribunal militaire sur les civils. Le candidat n’oublie pas la publication par le président de son bilan de santé et de son patrimoine. Tout comme il suggère la reconnaissance du «droit de renverser l’exécutif ». Toutes les personnalités nommées aux hautes fonctions de l’État seront probablement auditionnées par le Parlement avec « avis simple publié».

    Dans l’État régionalisé qu’il propose, Akere veut créer des Conseils économiques régionaux. « C’est d’abord l’application de la Constitution consensuelle de 1996, et rien que toute celle-ci et de reconnaissance à travers la crise dite anglophone et de la nécessité de l’organisation d’un débat serein sur la forme de l’État qui porte en elle l’idée constitutionnelle du partage optimal de pouvoirs et richesses entre gouvernants », écrit le candidat.

    À l’observation, l’ancien bâtonnier a l’ambition de renforcer l’État de droit à travers un auto-contrôle des institutions et des hommes qui vont les incarner. Pas de grands chamboulements : la plupart des institutions déjà existantes — Parlement bicaméral, Conseil constitutionnel, Conseil économique et social, Commission des droits de l’Homme, etc. — continueront d’exister sous le règne Muna. L’avocat propose in fine une forme hybride, résultat de la fusion de l’État décentralisé et l’État fédéral.

    Politique sociale

    Pour un lifting social

    Le Cameroun sous le magistère de l’avocat s’insère à l’international par le biais des coalitions militaires, monétaires, économiques et d’innovations régionales.

    À l’envi, il parle de « Révolution ». Du point de vue du leader du mouvement «Now », « le système actuel pendant 60 ans a été requinqué, revu, mais ça reste celui-là qui protège les dirigeants plutôt que les citoyens. Il faut tout remettre en place ». Au cours de son mandat, l’ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun veut appliquer « une politique qui restaure et consacre l’équité sociale et la prospérité ».

    I- Genre
    Il est prévu, selon Akéré Muna,
    – la création des maisons intercommunales du Genre et de l’égalité chargées de l’accueil de la sensibilisation et de l’orientation des jeunes filles et des femmes ;
    – la création d’un référant égalité au sein de chaque parquet général ;
    – l’affectation des ressources publiques en fonction de besoins définis, les dépenses et les recettes étant restructurées pour renforcer l’égalité hommes-femmes et l’autonomisation des femmes.

    II— Jeunesse et emploi
    — renforcer les stratégies de développement de l’entrepreneuriat des jeunes, et de créer pour chaque jeune, les conditions d’un véritable épanouissement économique, notamment à travers une réforme d’intégration économique par laquelle le secteur informel, leur principal employeur, est arrimé aux systèmes de protections sociales institutionnels de la nation ;
    – créer au profit des jeunes auprès des chambres de commerce et d’agriculture d’un guichet unique pour l’évaluation et l’orientation ;
    – harmoniser les dispositifs existants de soutien aux jeunes ;
    – créer un dispositif de promotion de l’innovation et de la compétitivité des entreprises portées par les jeunes.

    III— Éducation
    Sous Akéré Muna, elle sera obligatoire et gratuite, de la maternelle jusqu’à la fin du cycle secondaire (ou 5 th grade) de l’enseignement général. Il y a aura aussi le rétablissement du système de bourses et autres aides scolaires, pour les élèves méritants issus de familles défavorisées. Le candidat annonce également la création d’un système extrascolaire d’apprentissage adossé à une chambre des métiers. Il évoque l’instauration de stages obligatoires en entreprises pour toutes les filières techniques et professionnelles ainsi que l’instauration d’une allocation parentale de rentrée scolaire selon le nombre d’enfants et les revenus de la famille.

    IV— Santé et habitat
    Le projet de société du candidat de l’AFP prévoit essentiellement :
    – d’institutionnaliser et développer la médecine dite traditionnelle ;
    – d’étendre le programme de construction d’hôpitaux régionaux de référence à raison d’un hôpital de référence par chef-lieu de région ;
    – d’harmoniser les politiques de l’emploi et du logement en milieux urbains (un logement construit pour un emploi créé).

    Jean René Meva’a Amougou

    Politique économique

    Au service d’une nation moderne, prospère et unie

    Akere Muna veut travailler pour que la richesse nationale soit en mesure de financer la transformation de la nation.

    La gare Bessengue à Douala

    Le candidat porté par le mouvement Now veut débloquer le Cameroun par des réformes structurelles. Ainsi Akere Muna envisage-t-il de mettre en œuvre « une économie capable d’en supporter le financement ». De ce fait, l’ancien bâtonnier se fixe comme objectif de multiplier le PIB par 2 sur un horizon de 10 ans ! C’est-à-dire, de réaliser un taux de croissance moyen de 8 % entre 2019 et 2028. « Sans un tel niveau de production nationale de richesse, il est illusoire d’envisager toute politique transformatrice de la nation vers une prospérité durable et une plus grande justice sociale », estime le candidat investi par le Front populaire pour le développement.

    Pour atteindre cet objectif, l’avocat propose une « transmutation » reposant sur sept chantiers : le développement du transport ferroviaire, « préalable au développement industriel » ; la modernisation de l’infrastructure des télécoms, afin d’« assurer l’émergence d’une économie digitale dynamique, créatrice d’emplois » ; la création des hubs intégrés de marché agricole & artisanal, « afin d’assurer une distribution fluide de la production agricole et artisanale nationale » ; la création de la Banque Nationale d’infrastructure et d’investissement (BNII) ; la rénovation du pilotage des comptes publics, « pour des politiques publiques plus efficientes » ; la mise sur pied d’une couverture santé universelle (CSU), « afin de disposer des citoyens en santé au service de l’économie » et l’élaboration d’une stratégie de développement de l’offre énergétique intelligente, adaptée à la structure de la demande, diversifiée et respectueuse de l’environnement.

    Travaux d’Hercule

    Concrètement, il s’agira par exemple de construire 4000 km de chemin de fer en 10 ans. Pour cela, un investissement d’un montant 15 milliards de dollars (soit près de 9 000 000 de FCFA est nécessaire. Il devrait être financé sous fond propre, par l’épargne locale et l’endettement auprès des partenaires multilatéraux [Banque mondiale, Banque africaine de développement…]. Escompté chaque année, une hausse de croissances d’au moins 1,5 % et la création de 300 mille emplois.
    Il est aussi question de se doter d’une infrastructure de télécom de pointe [renforcement des pouvoirs du régulateur-ART —, incitation à l’investissement, promotion des services digitaux]. Ce qui devrait coûter à l’État sur 10 ans 1240 milliards de francs CFA en termes d’exonération fiscale, attirer 10 000 milliards de FCFA d’investissements directs étranges, 10 000 milliards d’investissements des opérateurs du secteur, générer 30 000 milliards de recettes fiscales sur la même période, engendrer une croissance d’au moins 1 % et 1,7 million d’emplois directs et indirects par an.

    Pour booster la production et la transformation dans le secteur agricole, Akere Muna prévoit la création de sept hubs de marché agricole et artisanal national [Hana] sur 5 ans. Les Hana sont des plates-formes duales composées chacune d’un marché national de gros [MNDG] absorbant l’essentiel des flux des producteurs régionaux, et d’une zone de logistique polyvalente [ZDLP] assurant la distribution optimale des stocks MNDG en fonction des demandes aussi bien domestiques que d’exportation. Coût de l’investissement 110 milliards pour 17 mille emplois créés et un impact annuel moyen espéré d’au moins 0,75 % de point de croissance.

    Hics

    Il est également prévu d’investir 1143 milliards à travers la Cameroonian Energy Finance Cooporation, à créer, afin de tripler l’offre actuelle d’électricité au bout de 15 ans. Attendu, une augmentation annuelle du PIB 1 % et la création annuelle de 150 000 emplois. L’avocat prévoit par ailleurs de reformer la gestion des finances publiques afin d’économiser 1200 milliards notamment par la réduction à 15 du nombre de ministère. Un argent qu’il orientera notamment dans la revalorisation des salaires des fonctionnaires et le financement de la CSU.

    Mais problème : la plupart des objectifs sont calés sur 10 ans voir 15 ans, un peu comme si Akere Muna avait l’intention de faire plus de trois mandats à la tête de l’État. Le calendrier de réalisation n’est pas clair. Par quoi commencera-t-il ? Va-t-il s’attaquer à tous ces chantiers à la fois au risque de trop embrasser et de mal étreindre ? Par ailleurs certaines actions envisagées ne sont pas claires. Le candidat propose par exemple de supprimer progressivement les exonérations dont bénéficie actuellement le secteur agricole sans en dire plus. Invariablement, l’ancien vice-président du conseil d’administration de Transparency International répond qu’il en dira davantage après un audit des finances publiques.

    Ifeli Amara, (stagiaire)

    Politique étrangère et intégration régionale

    L’ère de la diplomatie publique

    Faire la diplomatie par des moyens de large diffusion, avec un Cameroun membre de l’Afrique de l’Ouest et une diaspora réhabilitée.

    Pour faire partager la vision, porter la voix et donner les positions du Cameroun sur des sujets internationaux, Akere Muna aura son France Media Monde [France 24, RFI, Le Monde] ou son BBC. Cette vision repose sur les principes de sa politique étrangère suivants : la culture démocratique, l’autodétermination et le panafricanisme sécuritaire. Pour lui, « les nations démocratiques développent plutôt de solides relations entre elles que les nations non démocratiques ». Pour créer une communauté d’intérêts, le candidat veut réaliser un panier de valeurs partagées comme au sein de l’Union européenne. Ce socle devrait faciliter la régularité et l’intensité des interactions transfrontalières.

    Capacités diplomatiques

    Une diplomatie stratégique au service de la culture et des valeurs démocratiques autour du Cameroun. Voilà le logiciel de l’action extérieure de l’État dirigé par Akere Muna. La diplomatie stratégique sera une synergie entre la diplomatie classique actuelle [dont les moyens auront été augmentés] et la diplomatie publique. Les actions concrètes restent pour l’instant inconnues.

    La diaspora est un autre levier diplomatique du candidat qui souhaite les intégrer « en tant que citoyens expatriés » pour accroitre leurs investissements au Cameroun par la création d’un service de soutien. Stratégiquement, l’expertise des Camerounais de la diaspora sera mobilisée pour contribuer au développement du Cameroun.

    Intégration régionale

    « Le Cameroun est dans la position envieuse de l’interface entre les pays de la CEDEAO et de la CEMAC. La Nouvelle République mènera des consultations pour que le Cameroun rejoigne la CEDEAO » affirme le candidat dans ses 50 engagements. Cette option de coopération régionale vise deux objectifs : la constitution d’une diplomatie régionale pour « l’élargissement du champ diplomatique camerounais sur tous les continents, en synergie avec les États de la sous-région » et la réalisation des économies d’échelle par la mobilité des facteurs. Sur ce dernier but, Akere Muna ambitionne de construire « les infrastructures nécessaires […] pour favoriser le commerce et l’intégration au niveau régional et continental ».

    Une connexion continentale que l’ancien président du Mécanisme d’évaluation par les pairs [MAEP] de l’UA connait bien. Aligné sur le discours l’UA, il construit une géopolitique régionale en ces termes « ce n’est qu’avec un projet panafricain que nous pourrons commercer d’égal à égal avec les acteurs majeurs du système international et à valablement défendre les intérêts de nos peuples ».

    Sécurité collective

    Afin de se prémunir des convoitises extérieures parfois belliqueuses sur les ressources naturelles Camerounaises et Africaines. Et dans le souci primordial de «protéger et exploiter celles-ci au bénéfice des Camerounais et des Africains», le postulant à la tête de la magistrature suprême propose l’érection d’un pacte de sécurité commune.

    Ce dernier axe de la politique étrangère d’Akere Muna s’inscrit dans les déterminants de la violence de l’ordre international. Son maillage sécuritaire exige la cession totale de la souveraineté militaire des États, car propose-t-il : «les États africains ne disposent pas de capacités propres pour leur défense. Il est par conséquent plus rationnel qu’ils mutualisent leurs moyens de défense ».

    Équivoques

    Très au fait des mutations de l’intégration continentale, le candidat Akere affirme dans son engagement 45, « nous veillerons désormais à l’accomplissement de toutes les obligations régionales et internationales de notre pays, y compris la ratification de tous les lois et traités nécessaires ». Le Candidat ignore l’obligation faite au Cameroun d’adhérer à la seule communauté économique régionale [Cer] reconnue par l’UA en Afrique centrale : la communauté économique des Etats de l’Afrique centrale [CEEAC]. L’Union africaine invite désormais à éviter la multiappartenance aux Cer. Pacta sunt servanda !

    Jean René Meva’a Amougou

  • La stratégie globale contre le terrorisme s’élabore entre l’Afrique de l’ouest et centrale

    La stratégie globale contre le terrorisme s’élabore entre l’Afrique de l’ouest et centrale

    La réunion ministérielle conjointe sur la paix, la sécurité, la stabilité et la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent s’est ouverte à Lomé, le 28 juillet 2018.

    Les ministres des affaires étrangères des deux communautés en ouverture de leurs assises

    En prélude au sommet des chefs d’Etat et des gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) et de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la paix, la sécurité, la stabilité et la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.

    Une cérémonie solennelle marquée par deux discours prononcés, le premier par le Ministre des Affaires Etrangères, de la coopération et de l’intégration africaine de la république togolaise, président du Conseil des ministres de la CEDEAO, S.E .Prof. Robert Dussey et par le Ministre d’Etat, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération, de la Francophonie et de l’Intégration Régionale de la République Gabonaise, Président du Conseil des Ministres de la CEEAC, SEM. Régis Immongault Tatangani qui a ouvert les travaux.

    Dans son mot de bienvenue, le chef de la diplomatie togolaise s’est félicité des bonnes relations de coopération entre la CEEAC et la CEDEAO, notamment dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. «La sécurité est un bien public que nous devons défendre tous… et c’est ensemble que nous devons gagner cette guerre», a souligné le Président du Conseil des Ministres de la CEDEAO. La tenue du présent sommet est la preuve palpable par nos deux Communautés de leur engagement à combattre avec la dernière énergie le radicalisme et l’extrémisme violent qui font le lit au terrorisme

    Pour sa part, le Président du Conseil des Ministres de la CEEAC a exhorté les deux communautés Economiques Régionales à mettre en place des mécanismes fiables de renforcement d’échanges de renseignements stratégiques notamment en matière d’alerte précoce. «Nos deux communautés liées par un destin commun, doivent mettre en place une approche globale et pragmatique de lutte contre le terrorisme, en accordant une attention particulière à la sécurité humaine, y compris aux problèmes liés aux trafics en tous genres, à la gestion et à l’exploitation des ressources naturelles et à la transhumance», a souligné le diplomate gabonais qui en appelle à l’implication des jeunes et des femmes dans la mise en place d’une politique holistique.

    Le Ministre d’Etat gabonais a terminé son discours par une invite solennelle à mener une lutte ensemble: «nos populations comptent sur nous pour trouver des solutions à ces fléaux qui n’ont pas de frontières. Unis, nous avancerons et nous arriverons.»

    Source: CEEAC

  • Fusion des Communautés économiques régionales: Le dispositif de pilotage de la rationalisation

    Fusion des Communautés économiques régionales: Le dispositif de pilotage de la rationalisation

    Afin de rentrer dans les clous de l’échéance 2023, le Copil a procédé à un réaménagement de son plan d’action et de son organigramme. 

    L’implication personnelle des plus hautes autorités de l’Etat camerounais est un marqueur de la nouvelle dynamique

    Le plan d’action réaménagé du comité de pilotage de la rationalisation des Communautés économiques régionales d’Afrique centrale (Copil/Cer-AC) s’étend sur la période 2018-2023. De fait, ces cinq années constituent la période charnière pour le travail technique et les décisions politiques à prendre à l’effet de converger vers la nouvelle Communauté économique régionale en Afrique centrale. Ce plan a procédé à une précision des actions et activités à exécuter.

    Il s’articule en 11 domaines (commercial, libre circulation des biens et des personnes, financement de l’intégration, questions sécuritaires, transports, TIC, énergie, santé, environnement, sécurité alimentaire et règles budgétaires ou monétaires), 17 activités et 42 actions à mener. Cette planification permet aussi de fixer les échéances et d’engager les différentes parties prenantes. Parmi celles-ci, les partenaires financiers qui assurent le financement des activités des comités techniques du secrétariat technique du Copil. Le précédent plan d’action du Copil, adopté en 2013, avait retenu 12 domaines prioritaires de la rationalisation en Afrique centrale.

    Dans le même sillage du réaménagement, le Copil a opérationnalisé un cadre de concertation et de coordination des Hauts responsables conforme à l’article 2 de la décision conjointe N°01/CEEAC/CEMAC du 31 mars 2015 portant création, organisation et fonctionnement du Copil/Cer-AC. Ledit cadre réunit le président du Copil/Cer-AC, le secrétaire général de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (Ceeac) et le président de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Ladite concertation est semestrielle et s’attèle à évaluer les avancées du processus de rationalisation. La première concertation de haut niveau a eu lieu le 10 juillet dernier à Yaoundé. En effet, la première réunion tripartite de Yaoundé, qui a réuni les hauts responsables du cadre de concertation, a permis d’évaluer la mise en œuvre des résolutions de la quatrième réunion du Copil tenue à Yaoundé en novembre 2017.

    Opérationnalisation

    La récente réunion des Hauts responsables du cadre de concertation et de coordination s’inscrit dans l’élan d’accélération du processus de rationalisation. Une exhortation déjà exprimée lors des assises du Copil en novembre 2017. Ainsi, sept mois après le dernier Copil, les Hauts responsables évaluent déjà la mise en œuvre de ses résolutions. Ils recommandent que le rapport sur la rationalisation soit présenté lors des prochains sommets de la Ceeac et de la Cemac. Certes le processus a été lancé en 2010. Mais, le travail technique d’harmonisation n’a effectivement démarré qu’avec la mise sur pied d’un secrétariat technique (ST) en 2016. Cheville ouvrière opérationnelle du Comité de pilotage, le ST a engagé les chantiers d’unification des instruments communautaires.

    Le Copil a tenu à ce jour quatre réunions. Respectivement en 2010, 2013, 2015 et novembre 2017. Or, c’est en janvier 2012 que les chefs d’Etat et de gouvernement de la Ceeac ont adopté la décision conjointe portant création, organisation et fonctionnement du Copil. Cette décision sera signée en mars 2015. Le secrétariat technique du Copil, quant à lui, sera créé et installé dans ses activités en avril 2016. En rappel, la rationalisation des Communautés économiques régionales africaines est l’une résolution des Conférences des ministres africains de l’intégration (Comai). Ces conférences se sont tenues successivement à Accra en 2005, à Lusaka et à Ouagadougou en 2006. En 2007, à Brazzaville, les Etats d’Afrique centrale se sont prononcés en faveur de la rationalisation de leurs Cers avec pour objectif d’aboutir à une seule Communauté économique régionale en 2023.

    La treizième Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Ceeac, tenue en octobre 2007 à Brazzaville, invite les présidents en exercice de la Ceeac et de la Cemac à mettre en place un Comité de pilotage. Il lui sera confié l’élaboration d’une feuille de route définissant les actions d’harmonisation des politiques, des programmes et instruments d’intégration des deux Communautés. A la quatorzième Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Ceeac, tenue à Kinshasa en RDC le 24 octobre 2009, la présidence dédiée de la rationalisation est confiée au Président Paul Biya du Cameroun.

    Zacharie Roger Mbarga

    La dynamique de rationalisation des Communautés économiques régionales de l’Afrique centrale permet désormais d’entrevoir le squelette de la Communauté attendue en 2023. Lancé en 2009, le processus est matériellement mis en branle en 2016. Cette optimisation couplée à la production des premiers documents de procédures facilitent l’entrée en scène des partenaires techniques et financiers. L’adhésion désormais agissante des Etats d’Afrique centrale et la récente rénovation du processus permette une dynamisation politique et opérationnelle. Des mécanismes techniques harmonisés sont en adoption progressive. Des propositions d’optimisation sont en cours d’examen par les Hauts responsables de Cer à fusionner. Il s’agit de la technostructure communautaire nouvelle et des instruments d’intégration économique (Zone de libre-échange, Union douanière, marché commun, union économique).
    Toutefois, des défis demeurent. Et le vrai combat est à venir. Du financement du processus en cours à l’entrée en activité de la nouvelle communauté, plusieurs paliers doivent être franchis. L’Afrique centrale a donné mandat au Cameroun de concevoir la nouvelle Communauté économique d’Afrique centrale. Le chef de l’Etat Paul Biya en assume la présidence dédiée depuis 2009. Naturellement, le Comité de pilotage (Copil) de la rationalisation des Communautés économiques en Afrique centrale est présidé par le ministre camerounais de l’économie et de l’aménagement du territoire (Minépat).

    Financement du processus 

    Le frémissement qui soulage le Cameroun

    Jusqu’ici, Yaoundé supportait à 80% le financement du processus de rationalisation. Les différentes parties commencent à peine à manifester une solidarité. La note reste toutefois salée.

    Au terme de la réunion des Hauts responsables du cadre de concertation et de coordination du Copil, le communiqué final n’est pas élogieux sur le recouvrement de la dette du Comité de pilotage auprès des Etats et des Cers. Il ressort de ce conclave que les Cers ont signé des moratoires en vue de l’apurement de leurs arriérés de contribution. «Au regard des faibles résultats enregistrés, les Hauts responsables invitent le président du Copil/Cer-AC à poursuivre l’action de recouvrement auprès des Etats membres, et s’engagent à respecter les termes des échéanciers de paiement de contribution signés avec le Copil/Cer-AC», lit-on dans le communiqué final de la concertation des Hauts responsables.

    Au niveau des Etats, la situation n’est pas différente. Seul l’Angola a manifesté une réaction concrète. Les Cers «conviennent de déployer tous les efforts en vue de mobiliser les ressources nécessaires auprès de leurs partenaires respectifs pour le financement des activités du plan d’action réaménagé du Copil», indique encore le document.

    Le quatrième Copil de novembre 2017 s’était achevé sur une dette cumulée des Etats et des Cers chiffrée à 2 milliards 870 millions de francs CFA à la réalisation. Elle se présentait comme suit: 1 milliard 670 millions de dette de la Cemac et de la Ceeac ; 1 milliard 200 millions de la part des Etats. La note présentée par le secrétariat technique montrait qu’elle avait reçu exactement un accompagnement estimé à 1.251.000.000 (un milliard deux cent cinquante et un millions) de francs CFA soit 30,48% de couverture. On peut évoquer en plus un appui (non chiffré) en matériel informatique de la Ceeac au travers de son Programme d’appui au renforcement des capacités institutionnelles (Parci/ Ceeac).

    De manière précise, en terme de contribution, l’Etat du Cameroun a fourni 821.000.000 (huit cent vingt et un millions) de francs CFA, soit 110.000.000 (cent dix millions) francs CFA de contributions financières, la mise en disponibilité gracieuse des locaux, le mobilier de bureau et le matériel informatique. La Ceeac a mis à disposition 190.000.000 (Cent quatre-vingt-dix millions) de francs CFA et la Cemac 240.000.000 (deux cent quarante millions). Cette situation financière est le premier plomb dans l’aile de la rationalisation.

    Tentatives de solution

    Afin d’encourager les Etats, un apurement des dettes avait été décidé par les ministres du Copil. Il avait été arrêté que les Etats allaient verser deux années de dette (soit 60 millions de francs CFA) et les Cers devaient s’acquitter de la totalité des sommes dues. Aujourd’hui, le taux de recouvrement est difficilement mesurable.

    La Ceeac a, pour sa part, entamé un plaidoyer auprès de la Banque africaine de développement à travers le Parci. Lors d’une rencontre d’évaluation de ce programme le 25 juin dernier à Libreville, le secrétaire général de la Ceeac, Ahmad Allam-Mi, a affirmé que «les activités importantes comme le processus de rationalisation n’ont pu être réalisées qu’à 20%, alors qu’elles représentent 40% du projet». Cette situation pourrait expliquer l’insolvabilité de l’institution communautaire vis-à-vis du comité de pilotage de la rationalisation des Communautés économiques régionales d’Afrique centrale.

    Zacharie Roger Mbarga

     

    Bilan de la rationalisation des instruments de coopération

    Les outils de la zone de libre-échange d’Afrique centrale sont en fin d’harmonisation. A côté, ceux de l’union douanière et l’union économique sont en train d’être peaufinés.

    L’unification des instruments de coopération est un vaste chantier à accélérer

    Le domaine commercial est le plus avancé dans le processus d’unification des instruments d’intégration. Les mécanismes d’éligibilité à l’agrément au tarif préférentiel généralisé de la Ceeac et de la Cemac ont déjà été harmonisés. Il s’agit des quatre instruments de la zone de libre-échange Ceeac- Cemac ci-après : le certificat d’origine Ceeac-Cemac, le dossier d’agrément au tarif préférentiel de la Ceeac et de la Cemac, le formulaire de vérification de l’origine des produits, et le schéma type d’agrément aux tarifs préférentiels Ceeac-Cemac.

    Le chantier en cours est celui de la délivrance de l’agrément. Il est en train d’être rationalisé lui aussi. La solution transitoire est la co-signature par les deux tops managements des institutions communautaires. Jusqu’à présent, chaque Cer disposait de son expertise à elle. Les signatures du président de la Commission Cemac et du secrétaire général de la Ceeac achevaient le processus pour faire foi. Désormais, il y aura un comité régional d’agrément conjoint. Lequel soumettra à la co-signature des deux chefs d’institution les produits jugés conformes à l’obtention.

    La Cemac doit, elle aussi, procéder à une modification importante. Il s’agit de la modification du règlement de l’Union économique de l’Afrique centrale (Ueac). Le président du Copil a d’ores et déjà transmis la proposition à ses pairs. L’Ueac est l’une des cinq institutions de la Cemac. Elle réunit les ministres en charge de l’économie de chaque pays. Elle est habilitée, jusqu’à présent, à valider les produits et proposer au président de la Commission d’accorder l’agrément aux industriels de la Communauté ayant requis la faculté de commercer à taux nul sur l’ensemble de l’étendue du territoire communautaire.

    Autre chantier, le mécanisme de compensation unique à mettre sur pied. Il est en cours d’examen. La compensation des pertes douanières est destinée à atténuer les effets pervers du déséquilibre des échanges, en régulant le partage des coûts et profits du marché entre les différents partenaires régionaux. Le droit à la compensation porte sur le commerce des produits miniers et des produits industriels agréés aux différents Tarifs préférentiels généralisés. Il est exercé annuellement à concurrence de 50% des moins-values enregistrées sur le commerce de ces deux types de produits.

    Au niveau de le Ceeac, le mécanisme est institué par le protocole VI de son traité constitutif. Il a été adopté par la décision du 27 janvier 2004 portant modalités de mise en place de ce Fonds permettant d’atténuer les effets du démantèlement tarifaire dans le cadre de la Zone de libre échange (ZLE). Il postule que les pertes de recettes douanières subies par les Etats – membres sont compensées à hauteur de 50% et sont reversées dans un fonds national de développement à créer par chaque Etat membre pour promouvoir la création de petites et moyennes entreprises afin d’aider au développement économique des Etats.

    Perspectives

    Parmi les autres dossiers techniques de la rationalisation, l’harmonisation du code douanier unique communautaire. Celui-ci permettra de passer à la deuxième approche du schéma d’intégration économique de Bela Balassa, à savoir l’union douanière. Là aussi, deux unions douanières se chevauchent. Le tarif extérieur commun unique devra intégrer les caractéristiques des balances commerciales des pays membres. Notamment les importations et les exportations. En 2011, les deux institutions (Cemac et Ceeac) et les États-membres se sont engagés dans un processus d’harmonisation de tarifs extérieurs de la région Afrique centrale sur la base du Tec/Cemac en vigueur.

    Ceci en prenant en compte les évolutions déjà enregistrées ou en cours pour un tarif à trois catégories et trois taux du droit de douane (5%,10%,20%). Les deux premières catégories du projet de tarif sont connues. Primo : «Biens de première nécessité, biens d’équipements industriels, agricoles et halieutiques, et intrants agricoles et halieutiques». Cette catégorie devra inclure l’ensemble des équipements destinés aux activités industrielles, agricoles et de pêche. Secundo: « Matières premières et autres biens d’équipement».

    D’autres chantiers cruciaux sont en attente. C’est le cas de l’harmonisation des politiques commerciales et de l’instrument monétaire. Sur ce dernier dossier, les ministres du Copil ont instruit la mise sur pied d’un groupe de travail comprenant les six banques centrales de la région (Beac et les 5 banques des pays non membres de la Cemac). Les premières conclusions sont attendues.

    Zacharie Roger Mbarga

    Architecture institutionnelle 

    La maquette de la communauté unique en étude

    La construction institutionnelle de la Cer nouvelle est un des enjeux sensibles de ce processus de rationalisation. Présenté aux Hauts responsables du Copil, son squelette semble rassurant.

     

    Le rapprochement institutionnel des deux communautés se précise

    Une esquisse de l’armature institutionnelle de la nouvelle Communauté, fruit de l’étude du cabinet Carletas, a été présentée aux Hauts responsables du cadre de concertation et de coordination du Copil à Yaoundé le 10 juillet 2018. Cette première mouture montre une Cer bâtie sur cinq institutions, à savoir : la Conférence des chefs d’Etat, le Conseil des ministres (de l’intégration), le Parlement, la Commission et l’organe judiciaire (subdivisé en cour judiciaire et en cour des comptes). Cette ossature offre à la Commission le statut d’organe exécutif. Composée de 11 commissaires, soit une par pays, la commission sera appuyée par plusieurs institutions spécialisées. Ainsi, contrairement au processus en vigueur dans la Cemac, les comités ministériels seraient considérés comme des institutions spécialisées, notamment sur les questions économiques, monétaires, sécuritaires, agricoles, numériques…

    La philosophie du rapprochement institutionnel consiste à étendre les compétences de certaines institutions à la nouvelle communauté et de supprimer celles qui seront jugées incompatibles. Dans cet esprit, il est prévu que l’architecture judiciaire et le Parlement de la Cemac soient reversés dans la nouvelle ossature institutionnelle. Bien sûr, quelques amendements devraient y être apportés. De même, le mécanisme sécuritaire de la Ceeac devrait être étendu. La proposition a reçu les félicitations des Hauts responsables, qui ont demandé au cabinet de poursuivre son travail sereinement, mais dans la prise en compte des délais.

    Citoyenneté communautaire

    Pour le cabinet Carletas, ingénieur de conception de la matrice institutionnelle de la nouvelle Cer, l’architecture devra aussi se charger de booster l’ancrage de la citoyenneté communautaire. Actuellement, il y a une carence en sentiment d’appartenance communautaire. En tant que communauté, l’Afrique centrale est très en retard en la matière par rapport aux régions d’Afrique de l’ouest, d’Afrique de l’est et d’Afrique australe. Cette affirmation de l’indice d’intégration publié en 2016 par la Communauté économique des Nations unies pour l’Afrique s’appuie sur de nombreux facteurs.

    Notamment le manque d’information sur la conduite du processus d’intégration, l’implication limitée de la société civile et de la jeunesse, le sentiment de peur d’envahissement et de xénophobie, la construction politique des discours d’inhospitalité, l’absence de mobilité et de communication entre les peuples… Ainsi, le Cabinet Carletas propose que, dans sa construction, la nouvelle institution intègre ces dimensions notamment dans l’organigramme des institutions et dans les programmes et activités qui seront mis en œuvre.

    Capitalisation d’expériences

    La construction de la nouvelle Cer se fait également en examen des modèles des autres communautés. A cet effet, une délégation composée de la Ceeac, de la Cemac et du Secrétariat technique du Copil s’est rendue successivement en Afrique de l’ouest et en Afrique de l’est. Avec les officiels de ces différentes communautés, la délégation d’Afrique centrale a échangé sur le fonctionnement de certaines institutions. Ainsi, il est apparu qu’en Afrique de l’ouest, les Cer (Uemoa et Cedeao) ont réduit le nombre de programmes à seulement 27. Les mêmes communautés ont réduit la taxe communautaire d’intégration à 1% divisée en part égale de 0,5% pour chacune d’elles au moment du recouvrement des fonds. En Afrique de l’ouest toujours, l’institution judiciaire communautaire, qui rend des centaines d’arrêts par an, est convoquée juste lorsque le travail l’impose. Ainsi, seul un secrétariat est permanent. Ce qui facilite de grosses économies financières.

    A la présentation du rapport de cette mission lors de la récente réunion des hauts responsables du cadre de concertation, le président du Copil et les tops manager des Cers ont «recommandé que les points positifs desdits voyages soient capitalisés dans la mise en œuvre du processus de rationalisation et dans la conduite des réformes en cours à la Ceeac et à la Cemac» indique le communiqué final de ladite rencontre.

    Zacharie Roger Mbarga

  • Depuis le Nigéria: Macron… en marche contre la crise anglophone

    Depuis le Nigéria: Macron… en marche contre la crise anglophone

    Pour certains analystes, une ligne se dégage du show politico-télévisuel du président français au sujet du Cameroun: la résolution des problèmes sociopolitiques dans le Nord-ouest et le Sud-ouest du pays. Pour d’autres, la France vise à réaliser un objectif de fond: préserver ses intérêts. 

    A Abuja où il achève une tournée africaine ce 04 juillet 2018, Emmanuel Macron s’épanche sur le contenu de son entretien téléphonique avec Paul Biya. «Nous avons parlé des grands sujets en cours. Le Cameroun a clairement un défi qui est la cohésion, la stabilité de l’Etat (…) La stabilité va aussi vers la reconnaissance des éléments de pluralisme, parfois de décentralisation qui permettent de régler ces problèmes et ces tensions», a dit le chef de l’Etat français. Dans le vocabulaire employé, on relève des euphémismes, des prudences, tout un champ lexical de pondération.

    Prise de position, coup de gueule ou simple réaction ? Tout y passe. «En tout cas, il apparaît clairement dans l’extrait qui a circulé dans divers médias que le président Macron a intentionnellement voulu aborder des sujets sur lesquels il sait l’attention des Camerounais très mobilisée», analyse d’emblée Christian Pout, président du think thank dénommé Centre africain des études internationales, diplomatique, économique et stratégiques (Ceides).

    L’internationaliste s’attarde sur le double format de cette prise de parole du dirigeant français. «Il relève tant de la courtoisie diplomatique que du strategic stakeholder management», pose-t-il, reconnaissant que, fondamentalement, il n’y a rien de distinct de la démarche de ses prédécesseurs. Plus direct, le sociologue Claude Abé s’appuie sur les références de la sortie d’Emmanuel Macron. Implicitement, celles-ci ciblent, selon lui, la résolution du problème anglophone au Cameroun.

    Autre regard

    D’autres analyses ne nient pas la capacité du discours du patron de l’Elysée à exprimer autre chose. Aux yeux du politologue Belinga Zambo, l’interview du chef de l’Etat français en terre nigériane souligne «la mise en marche d’un appareil diplomatique en surchauffe face à la crise anglophone et à l’élection présidentielle d’octobre prochain au Cameroun». Citant Jean-Yves le Drian, l’expert camerounais estime qu’à partir d’Abuja, le coming-out d’Emmanuel Macron trahit le propre de la politique africaine de l’Hexagone. En effet, selon le ministre des Affaires étrangères (repris par le journal le Figaro du 21 janvier 2018), régler les crises à l’étranger a un impact direct sur le climat sociopolitique en France.

    Dans un autre versant d’analyse, Belinga Zambo s’arrête sur la «saturation communicante» déployée autour d’un «coup de fil». «Par le truchement de cette actualité sublimée tant à Etoudi qu’à l’Elysée, Paris veut montrer aux autres puissances qu’il reste très actif au Cameroun ; et il sait que dans le concert des États, pour être efficient, un matraquage médiatique ne peut se soustraire aux lois élémentaires de la gravité politique», décrypte-t-il.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Emmanuel Macron : «La région a besoin de stabilité» 

    «J’ai eu Paul Biya au téléphone avant de venir [au sommet de] l’Union africaine. D’abord parce que je savais qu’il ne serait pas présent. Et comme je visitais un de ses voisins [le Nigéria], il était important que nous ayons un échange. Ecoutez, nous avons parlé des grands sujets en cours. Le Cameroun a clairement un défi qui est la cohésion, la stabilité de l’Etat. Nous savons les tensions qu’il y a dans la région anglophone. Et là aussi, j’ai apporté tout mon soutien au gouvernement pour qu’il puisse aller vers la stabilité. Je pense que la stabilité va aussi vers la reconnaissance des éléments de pluralisme, parfois de décentralisation qui permettent de régler ces problèmes et ces tensions. Je pense que ce dont la région a besoin, c’est de stabilité, de trouver de bons modèles de régulation. Ce n’est pas au président français de le dire mais d’accompagner ces réformes de décentralisation, de liberté régionale qui sont offertes dans un cadre national clair. Je pense que beaucoup de ces sujets peuvent trouver une issue favorable par une meilleure intégration régionale. Je l’ai dit, moi je crois beaucoup à la force de l’intégration régionale pour le Nigéria comme pour le Cameroun au sein de la CEDEAO. Et tout ce que la France peut faire pour faciliter, y compris dans le cadre d’une politique monétaire qui devrait être repensée, la France le fera.» 

     

  • Christian Pout: «Je ne sais pas si cette notion de pré-carré a encore un sens»

    Christian Pout: «Je ne sais pas si cette notion de pré-carré a encore un sens»

    L’internationaliste analyse la dernière sortie d’Emmanuel Macron sur le Cameroun.

    Est-ce une volonté de la France de s’affirmer dans ce qui est souvent appelé le «pré-carré français»?
    Je ne sais pas si cette notion de pré-carré a encore un sens et sincèrement, j’ignore ce qui s’y intègre ou ceux qui s’y réfèrent. Je note pour ma part que le président Macron se trouvait au Nigeria et non au Cameroun, avec un agenda multidimensionnel. Tous les acteurs de la coopération internationale aujourd’hui, au Nord comme au Sud, se réinventent et renouvellent leurs pratiques en s’appuyant certes sur les acquis hérités de leur histoire, mais également en s’ouvrant à de nouvelles perspectives.

    C’est d’ailleurs une exigence du temps global actuel où les enjeux sécuritaires, politiques, économiques, financiers et commerciaux demandent que les acteurs de la diplomatie et des relations internationales fassent, encore plus que par le passé, preuve de grande agilité et de considérable créativité, pour créer des opportunités pour leurs populations et en particulier pour leurs entreprises.

    Comme suggéré par le président français, l’intégration régionale peut-elle être une solution au problème anglophone?
    Le problème anglophone est une question qui reste encore interne au Cameroun, bien que présentant un potentiel de déstabilisation qui pourrait nettement dépasser les frontières de notre pays. Il me semble que, c’est principalement pour cette raison également qu’il préoccupe tant nos partenaires internationaux dont pour certains, comme la France, les intérêts se prolongent aussi dans notre proche voisinage.

    Si l’on part du principe que la dynamique d’intégration régionale ne peut progresser que dans un contexte apaisé et qu’aujourd’hui les communautés économiques régionales telles que la CEDEAO à laquelle le Nigeria appartient et la CEEAC à laquelle le Cameroun appartient travaillent prioritairement pour que leurs espaces soient épargnés des guerres et des conflits qui entravent le développement, il est possible de conclure qu’œuvrer à l’intégration régionale c’est se donner aussi les moyens de s’extraire durablement des cycles de violence et d’affrontements intra-étatiques comme inter-étatiques.

    Au regard des déclarations d’Emmanuel Macron, s’avance-t-on vers une réflexion sur le sort du francs CFA?
    Il me semble que celle-ci a commencé depuis un long moment et ceux pour qui ce sujet est encore exotique ou tabou devraient sérieusement se remettre en question. En effet, la réflexion est ouverte et c’est le moment de faire des propositions, des suggestions, des analyses structurées qui pourront éventuellement, le moment venu, éclairer, orienter et faciliter s’il y a lieu des prises de décision, dans un sens comme dans d’autres. Il y a là un chantier ouvert notamment pour les laboratoires d’idées, pour les universités et centres de recherche, pour les structures gouvernementales en charge de la prospective économique, etc.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Sommet de l’Union africaine: Les dossiers sur la table des chefs d’Etat

    Sommet de l’Union africaine: Les dossiers sur la table des chefs d’Etat

    Bien que placée sous le thème de la lutte contre la corruption, la 31e édition de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement du continent planchera sur quatre sujets majeurs: le projet de réforme institutionnelle de l’UA, la zone de libre-échange continentale, les relations ACP-UE post 2020, le budget 2019 de l’organisation continentale. Décryptage.

    Les responsables de la réforme institutionnelle de l’UA.

    Les assises des chefs d’Etats et de gouvernement de l’Union africaine (UA) se dérouleront en Mauritanie les 1er et 2 juillet 2018. Elles seront précédées par les travaux du conseil exécutif (28-29 Juin) et du comité des représentants permanents (25-26 Juin). Le sommet est placé sous le thème «vaincre la corruption: une voie durable pour la transformation de l’Afrique». Le président nigérian Muhammadu Buhari, leader désigné pour la promotion du thème de l’année 2018 exposera les acquis et défis de la lutte contre cette gangrène aux niveaux continental et régional. Cette présentation ouvrira le bal d’un ensemble de communications.

    Paix et la sécurité

    En matière de paix et de sécurité, trois temps forts seront scrutés. Le Conseil de paix et de sécurité de l’UA présentera son rapport sur l’état de la paix et de la sécurité en Afrique. Sur ce sujet, la présentation du rapport sur la mise en œuvre de la feuille de route des démarches pratiques pour faire taire les armes en Afrique en 2020 par cette instance est très attendue. Lors d’un précédent sommet, les chefs d’Etat ont instruit sa préparation pour y voir clair.

    Le dernier mouvement de cette rubrique sera consacré au Sahara occidental. Le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, va exposer son rapport sur cette épineuse question. Il se penchera sur le dernier rapport du Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies sur le sujet, la prolongation de la mission onusienne sur le referendum au Sahara occidental (Monurso) et les négociations en cours. L’Onu vient de consacrer la participation aux négociations des pays tiers ayant une influence sur le problème, en l’occurrence l’Algérie.

    Agenda 2063

    Le sommet sera aussi l’occasion pour les chefs d’Etat de faire le point sur le projet de réforme de l’organisation panafricaine. La commission des 15 ministres africains des finances a rendu son verdict sur les consultations liées au financement de l’UA. L’arbitrage des chefs d’Etat est attendu sur la diminution du nombre de sommets par an et la mutation du Nepad en agence de développement. Le sujet le plus délicat est le renforcement de la position du président de la Commission de l’UA, qui, à défaut de nommer pourrait désormais valider les candidatures des commissaires. Le président Rwandais, Paul Kagame, président en exercice de l’UA et leader de la réforme de l’organisation continentale, va exposer à huis clos sur le sujet. Un rapport assorti de recommandations concertées est attendu.

    Après l’enregistrement de quatre dépôts d’instruments de ratification, la zone de libre-échange continentale (Zlec) est à nouveau à l’ordre du jour des préoccupations des chefs d’Etat et de gouvernement. Le président nigérien Mahamadou Issoufou, porte – étendard de la Zlec, va présenter l’état des lieux à ses homologues. Il les informera de l’avancée des négociations de la seconde phase qui concerne l’érection des protocoles additionnels à l’acte constitutif sur la politique de concurrence, les droits de propriété intellectuelle, l’investissement et la circulation des personnes d’affaires. Ce sera surtout l’occasion de lever les équivoques qui pèsent sur la non- signature et la non- ratification par certains Etats.

    La dernière communication du président de la Commission portera sur la position africaine commune sur les relations ACP (Pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique) avec l’Union européenne (UE) après 2020. L’accord de Cotonou censé durer 20 ans arrive à expiration. L’UE a déjà fait valoir le nouveau format de déploiement. Il sera adossé sur les ensembles régionaux. Le rapport de Moussa Faki Mahamat proposera aux chefs d’Etat africains des pistes pour adopter une position concertée à l’effet de transmettre des contre-propositions.

    Budget et nominations

    Le budget de l’exercice 2019 sera examiné et adopté. Celui de l’exercice 2018 s’élevait à près de 650 millions de dollars (366 milliards de francs CFA). Le nouveau budget est plafonné à 800 millions de dollars. Ceci est dû à «l’embellie économique et financière des Etats», indique le projet d’ordre de jour de l’institution.

    Le personnel des institutions spécialisées connaitra un mouvement. Avec la nomination de quatre juges de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples; cinq membres du Conseil de l’Union africaine pour le droit international ; quatre membres du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant et du vice-président du Conseil de l’Université panafricaine (UPA).

     

    Elargissement de la CEDEAO

    La CEA ouvre la réflexion

    La Commission économique des Nations unies pour l’Afrique réunit une palette d’acteurs pour des discussions profondes, fécondes et dépassionnées sur les implications socioéconomiques et culturelles réelles des nouvelles adhésions dans cette communauté économique régionale.

    Afin de lever les contraintes et relever les défis relatifs à l’adhésion de certains pays d’Afrique du Nord à la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), la CEA réunit cette semaine, du 25 au 26 juin 2018 à Cotonou, les experts des Etats-membres, les représentants des Communautés économiques régionales et des Organisations intergouvernementales de l’Afrique de l’ouest, le secteur privé et la société civile. Les experts du commerce extérieur, des questions douanières et de l’intégration dans les ministères en charge du commerce et ceux en charge de l’économie et des finances sont principalement ciblés au niveau des pays.

    L’élargissement de la CEDEAO est un chantier majeur, selon la CEA. La réunion ad-hoc du groupe d’experts permettra aux participants d’examiner les implications économiques en termes de flux commerciaux et de recettes publiques, d’identifier et de discuter les principaux défis et enjeux pour la CEDEAO et les pays candidats à l’adhésion. La réunion ad-hoc va formuler des recommandations pour un élargissement économiquement et socio – économiquement avantageux pour les différentes parties et surtout pour l’effectivité de la zone de libre-échange continentale (Zlec).

    Selon, Dimitri Sanga, directeur de la CEA pour l’Afrique de l’ouest, «Alors que l’Afrique s’engage résolument sur la voie de la mise en œuvre de la Zlec, nous sommes en train de franchir une étape importante de la création de la Communauté économique africaine telle que prônée par certains pères fondateurs de l’Organisation de l’unité africaine (OUA). C’est le cas des demandes en cours d’élargissement potentiel de la CEDEAO. Nous sommes convaincus que les experts de l’Afrique de l’ouest vont donner des pistes de solutions pour mener à bien tous ces chantiers qui sont censés nous mener vers l’intégration de la sous-région et du continent dans son ensemble».

    Zacharie Roger Mbarga

    ‘’Les reformes doivent se poursuivre’’ 

    Daniel Ona Ondo

    On a du mal à convaincre nos ministres des finances de financer la Cemac. Ils se disent, «à quoi sert cet argent?» Je puis vous rassurer aujourd’hui, nous utilisons le franc que nous recevons pour faire en sorte qu’il y ait des projets intégrateurs

    Le président de la Commission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) fait le point des avancées du Programme des réformes économiques et financières de la Cemac (PREF-CEMAC).

     

    Monsieur le président, quelles sont les principales avancées observées au niveau du Pref-Cemac depuis le sommet des chefs d’Etat du 23 décembre 2016?
    Nous nous sommes réunis pour la cinquième édition d’évaluation du Pref-Cemac ce vendredi 22 juin 2018. Comme vous le savez, le Pref-Cemac a été créé par les chefs d’Etat à la suite des décisions qui ont été prises en 2016. Je crois qu’ils ont bien été inspirés de créer le Pref-Cemac, pour redresser la situation économique de nos pays. Il y a eu des avancées considérables parce que tous les pays ont fait un ajustement réel. Ils ont revu leurs dépenses et ils ont essayé d’augmenter leurs recettes. En matière d’ajustement financier et monétaire, des décisions importantes ont été prises au niveau de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac).

    Aujourd’hui, nous sommes heureux de constater qu’en matière de couverture extérieure, nous avons des réserves qui vont au-delà de deux mois. Au niveau des reformes structurelles, je pilote ce dossier avec le Pref-Cemac. Avec le Fodec, nous avons des reformes structurelles qui sont en place et nous avons des reformes qui vont dans le même sens, faire en sorte qu’il y ait des projets intégrateurs. Les gens ne croient pas à l’intégration parce qu’ils ne voient pas les résultats d’intégration. Donc tout va dans le bon sens. Il y a lieu de ne pas perdre espoir. Nous allons continuer.

    Vous savez que sur les six pays de la sous-région, quatre ont signé des accords avec le Fonds monétaire international (FMI), pour trois ans. Ils bénéficient des ressources financières. Deux sont en phase de signer. La Guinée Equatoriale, qui va avoir un programme de référence et la République du Congo qui est aussi en phase de signer. Tout ne va peut-être pas dans le meilleur des mondes, mais tout va dans le bon sens. Je puis vous rassurer que nous avons fait du bon travail. Nous avons des embellies aujourd’hui. Des recettes pétrolières sont en train d’augmenter, donc nous disons aux Etats «ce n’est pas le moment de relâcher l’effort».

    Il faut continuer les reformes structurelles. Il faut continuer le travail. Il ne faut pas se dire qu’on a des recettes. Je crois que ces recettes doivent permettre de régler notre endettement et faire des projets intégrateurs qui permettent à nos pays de connaître une croissance importante. Aujourd’hui, la croissance est au rendez-vous par rapport à l’année dernière, où la croissance était négative. Nous en sommes heureux. Nous allons rendre compte aux chefs d’Etat pour dire que les dossiers qu’ils nous ont confiés vont dans le bon sens.

    Peut-on avoir une idée des discussions que vous avez eues avec les responsables des compagnies qui exploitent nos ressources naturelles ?
    Le principe est simple : les compagnies sont tenues de rapatrier les recettes d’exploitation conformément aux règlements que nous avons édictés, même s’il y a libre convertibilité au niveau de la zone franc. Elles doivent transférer les réserves. Ça nous arrangerait parce que ça nous permettra de conforter les réserves de change dans la sous-région. Maintenant, vous savez que nous sommes des éducateurs. Il faut des gens pour passer le message.

    Que des gens sachent qu’il y a une loi qui existe. Il faut qu’ils se conforment à cette loi. Avant de passer à la phase répressive, il faut que des gens soient informés des lois qui existent dans nos Républiques, qui font obligation aux acteurs économiques de rapatrier leurs recettes. Bien sûr, ils ont signé certaines conventions avec nos pays. Dans ces conventions, ils ont la possibilité de garder certaines recettes de change pour le fonctionnement régulier de ces entreprises. Nous avons regardé tout ça. Nous avons discuté entre nous pour édicter des mesures qui permettent de ne plus signer ce genre de conventions qui pénalisent nos pays.

    …Tout ne va peut-être pas dans le meilleur des mondes, mais tout va dans le bon sens. Je puis vous rassurer que nous avons fait du bon travail. Nous avons des embellies aujourd’hui. Des recettes pétrolières sont en train d’augmenter, donc nous disons aux Etats «ce n’est pas le moment de relâcher l’effort». Il faut continuer les reformes structurelles…

    Il y avait au programme de la dernière session du Pref-Cemac l’amélioration du cadre des affaires, la diversification des économies des pays membres de la Cemac. A quel niveau en sommes-nous ?
    C’est une question fondamentale. Vous savez, nos économies ont en partie d’être mono producteur de pétrole. Naturellement, quand le prix du pétrole baisse, nous allons vers le bas. Aujourd’hui, nous essayons de faire en sorte que les économies soient diversifiées. Il y a des économies qui ont déjà fait un gros effort de diversification. Le pays dans lequel nous nous trouvons [Cameroun] est mieux diversifié que tous les autres de la sous-région.

    Ces réformes doivent se poursuivre. Nous mettons un accent dessus. Au niveau de la Commission, on améliore la communication pour faire en sorte que l’intégration soit acceptée par tout le monde parce que plus on est nombreux, mieux ça vaut. Nous avons des économies de petites dimensions. Dans la sous-région, je pense que nous sommes à 40 millions d’habitants. Vaut mieux qu’on produise pour 40 millions pour avoir des économies d’échelle. Donc la diversification est au centre des préoccupations de nos Etats.

    Et pour ce qui concerne l’amélioration juridique et l’attractive des différentes économies ?
    C’est normal. On ne peut pas attirer des investisseurs avec le bâton. Il faut créer un cadre qui soit adapté. Donc il faut créer un environnement qui améliore le cadre des affaires. Au niveau de la Commission, nous sommes en train de voir le problème de partenariat public-privé, qui permettrait de concilier le public et le privé dans un cadre organisé. C’est une piste qui est là. Nous faisons en sorte que les lois ne soient pas des lois qui empêchent aux entreprises de pouvoir s’implanter. C’est dans l’intérêt de nos économies.

    Je profite de l’occasion pour remercier les autorités camerounaises pour ce qu’elles font afin qu’on puisse avoir un cadre agréable pour pouvoir discuter. C’est la deuxième ou la troisième fois que nous tenons une réunion du Pref-Cemac ici, et les conditions de travail sont toujours agréables. Je remercie la presse qui fait en sorte que notre voix soit mieux entendue. Parce que souvent, moi, là où je me trouve, on a du mal à convaincre nos ministres des finances de financer la Cemac.

    Ils se disent, «à quoi sert cet argent?» Je puis vous rassurer aujourd’hui, nous utilisons le franc que nous recevons pour faire en sorte qu’il y ait des projets intégrateurs. Pour le Pref-Cemac, nous avons eu plus de dix milliards pour créer des projets. Nous avons des études qui sont déjà lancées aujourd’hui, qui permettront à terme, de financer certains projets intégrateurs dans la sous-région.

    Monsieur le président, où en sommes-nous avec la libre circulation dans la zone Cemac ?
    La libre circulation est effective. Si vous allez dans des aéroports, vous allez y trouver des points de passage de la Cemac, comme en France il y a des points de passage de l’Union européenne. La libre-circulation a été actée par les chefs d’Etat à la conférence de Ndjamena. Donc elle est effective. Il y a eu un petit problème. Je crois que c’est à cela que vous faites allusions. Nous sommes en train d’y remédier. Je crois qu’il faut éviter d’invectiver les Etats. Ce sont ces Etats qui ont accepté la libre circulation. Je crois qu’il y a une avancée considérable de l’intégration sous-régionale. Et effectivement, il y a encore des scories, il y a encore des petits problèmes.

    Il faut éduquer les gens. Que les Camerounais ne soient pas mal vus au Gabon, qu’un Gabonais ne soit pas mal vu en République Centrafricaine, qu’on s’accepte mutuellement. Au niveau de la Cemac, nous avons mis de l’argent au niveau d’Interpol pour faire des passeports sécurisés. Nous allons faire en sorte que des points de passage soient sécurisés. C’est un travail à faire. Ça ne se fera pas du jour au lendemain parce que là aussi, il faut qu’on travaille nos mentalités. Qu’on accepte de vivre ensemble. Ça s’est fait en Afrique de l’ouest, il n’y a pas de raison que ça ne se fasse pas en Afrique centrale. Il y a des pays qui ont déjà des passeports Cemac. Nous faisons en sorte que tout le monde puisse disposer d’un passeport Cemac.

    Propos recueillis par
    Didier Ndengue

  • L’Onu préoccupée par les activités terroristes en Afrique centrale

    L’Onu préoccupée par les activités terroristes en Afrique centrale

    Conseil de guerre contre le terrorisme sous la férule de l’Unoca.

    L’Afrique centrale «continue de faire face au fléau du terrorisme et de l’extrémisme violent, en particulier les activités de Boko Haram», observe le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies et chef du Bureau de l’Unoca, François Louncény Fall, lors de la cérémonie officielle du segment ministériel de la 46e réunion du Comité consultatif permanent des Nations unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale (Unsac), le 1er juin 2018 à Brazzaville.

    Pour y faire face, les ministres et chefs de délégations des Etats membres recommandent à la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) d’accélérer le processus de mise en œuvre de la stratégie régionale de lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes légères et de petit calibre adoptée lors de la 41e réunion de l’Unsac en novembre 2015 à Libreville.

    La réunion des experts, tenue du 29 au 31 mai, a longuement débattu de cette question et a pris conscience des enjeux. «Le prochain sommet conjoint de la CEEAC et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) sur les questions de terrorisme et de l’extrémisme violent, prévu en juillet 2018, sera une occasion importante pour renforcer la coopération interrégionale dans ce domaine», souligne le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique centrale, qui se dit toujours préoccupé par l’impact des activités de l’Armée de résistance du seigneur (LRA) sur les populations civiles et le développement de certains pays de la région.

    Par ailleurs, le Représentant spécial du patron des Nations unies insiste sur le climat politique et la situation sécuritaire dans quelques pays couverts par l’Unoca. Au Burundi et en République démocratique du Congo (RDC), il invite les uns et les autres à «placer l’intérêt général au-dessus de toute autre considération et à faire le choix d’un dialogue inclusif et de bonne foi pour résoudre leurs différends et tracer une voie pacifique pour leurs nations respectives». Au Congo, il note que «le processus de paix et le retour à la sécurité dans la région du Pool […] est un développement encourageant» dont l’Onu espère «un aboutissement heureux dans les meilleurs délais».

    Quant au Cameroun, il regrette la persistance des tensions et des violences dans les régions anglophones du Nord-ouest et Sud-ouest. «Les Nations unies exhortent tous les acteurs à s’abstenir de tout acte susceptible de contribuer à une nouvelle détérioration de la situation, y compris l’incitation à la violence sur les réseaux sociaux», indique M. Fall, rappelant que «le dialogue constitue la meilleure voie pour identifier une solution durable à la crise».

    Bobo Ousmanou

  • Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale

    Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale

    La situation macroéconomique de la CEMAC en 2017, perspectives pour 2018, et état de conformité aux nouveaux critères de convergence

    Les ministres de la zone franc à Brazzaville, la semaine dernière.

    Les chocs pétrolier et sécuritaire auxquels les pays de la CEMAC ont été confrontés au cours des années récentes ont une fois de plus eu des répercussions défavorables sur la situation macroéconomique de la Sous-Région en 2017, caractérisée par la poursuite de la récession en dépit d’une légère correction des déséquilibres macroéconomiques.

    L’activité économique dans la zone CEMAC s’est inscrite en 2017 dans un contexte marqué au plan extérieur par : i) un raffermissement de l’activité économique mondiale; ii) une amélioration du cours du pétrole brut qui s’est établie à 52,7 dollars en moyenne.

    Sur le plan intérieur, le contexte économique a été caractérisé par : i) une baisse de 4,8% de la production pétrolière qui est revenue à 42,1 millions de tonnes, et une progression de la production du méthanol et des autres gaz de 6,8 % pour s’établir à 6 668 milliers de tonnes; ii) une baisse de la production de bois en grumes de 4,7 % pour revenir à 8 097,4 de milliers de m3 ; et iii) un affaiblissement de la demande intérieure.

    Dans ce contexte, la situation macroéconomique de la CEMAC a été marquée en 2017 par la poursuite de la récession, une amélioration des comptes des finances publiques et des comptes extérieurs, une légère détérioration de la situation monétaire, et une baisse des tensions inflationnistes. Le taux de croissance du PIB de la Sous-Région s’est établi à -0,2 % en 2017 contre -0,1% en 2016 en liaison avec les contreperformances du secteur pétrolier dans tous les pays producteurs, à l’exception du Congo.

    Le secteur non pétrolier a connu une décélération de sa croissance, qui s’est établie à 0,2 % contre 1,3 % en 2016, en rapport essentiellement avec la déprime dans la branche des BTP. Sous l’angle de l’évolution du niveau général des prix à la consommation, le taux d’inflation en moyenne annuelle s’est situé à 1 % contre 1,1 % en 2016, en relation avec l’affaiblissement de la demande intérieure.

    Du côté des finances publiques, le déficit budgétaire, base engagements, hors dons, déficitaire de 6,3% du PIB en 2016, s’est résorbé pour revenir à 3,3% du PIB en raison des efforts d’ajustement et d’assainissement en cours, notamment dans les pays en programme avec le FMI. Au niveau des échanges extérieurs, le déficit du compte courant, transferts publics exclus, a baissé drastiquement pour revenir à 3,6 % du PIB contre 15 % du PIB en 2016 en lien essentiellement avec la hausse des exportations en valeur de pétrole et du gaz.

    Quant à la situation monétaire, elle s’est détériorée en relation avec la poursuite de la morosité de l’activité économique dans la Sous-Région. Toutefois, cette détérioration a été fortement atténuée par les mesures de politique monétaire restrictive mises en place pour accompagner les ajustements budgétaires opérés dans le cadre des programmes pays avec le FMI. La situation monétaire a été ainsi caractérisée par une baisse des avoirs extérieurs nets de 3,9 % contre 58% en 2016, un repli des crédits à l’économie de 1,9 %, une légère baisse du taux de couverture extérieure de la monnaie à 57,5 % à fin décembre 2017 contre 59,1 % à fin 2016, un léger recul de la masse monétaire de 0,4 % et une hausse des réserves en mois d’importations des biens et services pour s’établir à 2,9 au 31 décembre 2017 contre 2,2 à fin 2016.

    Par pays, les principaux agrégats macroéconomiques au cours de l’année 2017 se présentent de la manière suivante : • Le rythme de l’activité économique a ralenti au Cameroun (3,2% contre 4,5 % en 2016), en Centrafrique (3,9 % après 4,5 % en 2016), et au Gabon (0,3 % contre 2,1 % en 2016). Les autres pays sont restés dans la récession : Congo (-3,2% contre -2,8% en 2016), Guinée Équatoriale (-2,6% contre -8,9% en 2016), et Tchad (-5,2% après -3,3% en 2016).

    • L’inflation en moyenne annuelle a connu une décélération dans trois États membres, à savoir le Cameroun, le Congo et la Guinée Équatoriale. Elle s’est présentée comme suit : Cameroun (0,6 % contre 0,9% en 2016), République Centrafricaine (4,1% contre 3,8% en 2016), Congo (1,6% contre 3,6% en 2016), Gabon (2,7% après 2,1% en 2016), Guinée Équatoriale (1,1% après avoir été de 1,4% en 2016) et Tchad (-0,9% contre -1,6% en 2016).

    • Tous les pays de la CEMAC outre la RCA ont enregistré une amélioration de leur solde budgétaire global hors dons en 2017 suite aux efforts d’ajustement fournis par tous. La situation se présente comme suit : Cameroun (-2,8% du PIB contre -6,3% du PIB en 2016), Centrafrique (-6,6 % du PIB contre -4,4% du PIB en 2016), Congo (-7 % du PIB contre -13,5% du PIB en 2016), Gabon (-2,7 % du PIB contre -5,2% du PIB en 2016), Guinée Équatoriale (-2,3 % du PIB contre -4,4% du PIB en 2016), et Tchad (-3,1 % du PIB contre -4,2% du PIB en 2016).

    • Le solde extérieur courant (dons officiels exclus) a été déficitaire en 2017 dans tous les États hormis le Gabon et la Guinée Équatoriale : Cameroun (-2,8 % du PIB après -3,5 % du PIB en 2016), République Centrafricaine (-11,3 % du PIB contre -10,6 % du PIB en 2016), Congo (-18,1 % du PIB après -82,9 % du PIB en 2016), Gabon (0,5 % du PIB contre -2,5 % du PIB en 2016), Guinée Équatoriale (4,0 % du PIB contre -10,1 % du PIB en 2016) et Tchad (-6,8 % du PIB après -17,9 % du PIB en 2016).

    Les perspectives macroéconomiques de la CEMAC pour l’année 2018 sont favorables, grâce principalement à l’amélioration des termes de l’échange, la mise en œuvre des réformes prévues dans le cadre du Programme des Réformes Économiques et Financières de la CEMAC (PREF3 CEMAC), et la poursuite de la mise en œuvre des programmes conclus par les pays avec le FMI.

    Ainsi, la croissance du PIB réel atteindrait 1,7 % en 2018 en relation avec le dynamisme du secteur pétrolier au Congo et au Tchad et des branches agriculture, industries et services marchands dans bon nombre de pays. Les pressions inflationnistes resteraient contenues sous le seuil communautaire à 1,8%. La résorption du déficit budgétaire, base engagement, hors dons, se poursuivrait ; ce qui le ramènerait à 2,5 % du PIB après avoir été de 3,3 % du PIB en 2017.  Concernant les échanges avec l’extérieur, le déficit du compte extérieur courant, dons officiels exclus, s’accentuerait pour atteindre 4,9 % du PIB contre 3,6 % du PIB en 2017.

    Pour ce qui est de la situation monétaire, elle se raffermirait en 2018 à travers : (i) la hausse des avoirs extérieurs nets de 26,8 % suite à la reprise de la production pétrolière et à l’afflux des appuis budgétaires découlant de la mise en œuvre des programmes des pays avec le FMI, (ii) un accroissement des crédits à l’économie de 6,6 %, (iii) une augmentation de la masse monétaire de 5,1 %, (iv) un redressement du taux de couverture extérieure de la monnaie qui s’établirait à 63,5 %, et (v) une hausse des réserves en mois d’importations des biens et services qui remonterait à 3,1 à fin décembre 2018.

    S’agissant de l’état de conformité en 2017 aux nouveaux critères de convergence de la CEMAC, la Communauté a observé trois critères sur quatre, à savoir ceux relatifs au solde budgétaire de référence, à l’inflation et à l’endettement. La Guinée Équatoriale et le Tchad ont respecté trois critères sur quatre, à l’exception de celui portant sur l’absence d’arriérés de paiement. Le Cameroun et le Gabon ont respecté deux critères, ceux relatifs au taux d’inflation et au taux d’endettement. La Centrafrique a également observé deux critères, ceux portant sur le solde budgétaire de référence et l’endettement.

    Quant au Congo, il a respecté un seul critère, celui afférent à l’inflation. S’agissant de l’état de la coopération entre les États membres et le FMI, la mise en œuvre en 2017 des programmes conclus déjà par quatre pays de la Sous-Région (Cameroun, République Centrafricaine, Gabon et Tchad) avec ladite Institution a été globalement conforme aux objectifs, mais la vigilance et les efforts de réforme devraient rester maintenus. Pour ce qui est du Congo et de la Guinée Équatoriale, les discussions se poursuivent en vue de la conclusion d’un programme de redressement économique soutenu par le FMI.

    En matière d’orientations générales de mesures de politique économique, même si en 2018, l’on entrevoie une hausse de la croissance portée principalement par la bonne tenue de l’activité dans le secteur pétrolier, les déséquilibres macroéconomiques, bien que s’étant résorbés en 2017, resteraient toujours à des niveaux élevés. Cette situation laisse entrevoir des perspectives macroéconomiques à court et à moyen termes encore difficiles. Les mesures à mettre en place en droite ligne avec les résolutions prises au cours de la Conférence des Chefs d’Etat de la CEMAC de décembre 2016 à Yaoundé s’avèrent toujours d’une extrême urgence.

    Depuis lors, bon nombre de mesures ont été prises, notamment les efforts de consolidation budgétaire entrepris par tous les pays de la Sous-Région, la conclusion par quatre pays de la CEMAC d’un programme soutenu par le FMI, le resserrement progressif de la politique monétaire, le renforcement de l’exercice de la Surveillance Multilatérale, ainsi que le maintien de la surveillance renforcée du système bancaire régional. Cet ensemble de mesures a permis d’inverser la tendance baissière des réserves de changes, et de porter légèrement celles-ci en termes de couverture en mois d’importations de 2,2 à fin décembre 2016 à 2,9 au 31 décembre 2017.

    Toutefois, des efforts conséquents restent à être consentis. A cet effet, les orientations générales de mesures de politique économique ci-après sont préconisées. Elles portent sur les mesures de rétablissement de la stabilité du cadre macroéconomique, de réformes structurelles, d’approfondissement de l’intégration régionale et de renforcement de la sécurité.

    En matière de stabilité macroéconomique, en vue de poursuivre l’assainissement des finances publiques, la conduite d’une politique budgétaire ciblée en matière de dépenses publiques, et la reconstitution rapide des réserves de change de la CEMAC, Les Etats membres sont exhortés à :

    o Mettre en place de vigoureuses mesures pour le rapatriement des recettes d’exportation ; o Rationaliser les dépenses fiscales; o Elaborer les Cadres Budgétaires à Moyen Terme sur la base du nouveau dispositif de surveillance multilatérale en zone CEMAC ;

    o Adopter un rythme prudent d’accumulation de la dette en le conformant à la dynamique exigée par le nouveau dispositif de surveillance multilatérale ;

    o Mettre en place un plan d’apurement du stock d’arriérés existant et éviter d’en accumuler de nouveaux arriérés de paiement au cours de la gestion courante ;

    o Accélérer le traitement des banques en difficulté ;

    o Maitriser l’évolution de l’effectif de la fonction publique dans le temps afin de contenir la progression de la masse salariale. Les Institutions régionales, quant à elles, sont exhortées à :

    o Renforcer la coordination des politiques budgétaires à travers notamment la mise en place des outils pour une mise en œuvre efficace du nouveau cadre de convergence régionale et le renforcement du suivi – évaluation de la mise en œuvre des Directives du cadre harmonisé de gestion des finances publiques en zone CEMAC;

    o Maintenir l’orientation restrictive de la politique monétaire et poursuivre la modernisation du cadre de mise en œuvre de la politique monétaire ;

    o Renforcer la mise en œuvre de la politique de pondération des risques sur entre autres la signature souveraine sur la base de l’état de conformité aux critères de convergence;

    o Maintenir la surveillance renforcée du système bancaire régional. En termes de réformes structurelles visant l’amélioration du climat des affaires et la diversification de la base productive, il convient de : o Rendre opérationnel l’Observatoire du Climat des Affaires en zone CEMAC ;

    o Accompagner l’ajustement budgétaire par de profondes réformes structurelles visant à transférer à terme le moteur de la croissance au secteur privé ;

    o Améliorer les indicateurs en matière de facilité à faire les affaires (transfert de titre de propriété, création d’entreprises, etc.). Sur le plan de l’intégration régionale, les actions prioritaires consistent à :

    o Renforcer l’édification du marché commun à travers la suppression des barrières tarifaires et non tarifaires, l’aboutissement rapide du projet de nouveau Code des Douanes de la CEMAC ainsi que la révision des directives fiscales afin de les conformer davantage aux standards internationaux ;

    o Appliquer les textes communautaires ;

    o Mettre en place un tableau de bord de suivi des instruments de l’intégration.

    En matière de renforcement de la sécurité, poursuivre les efforts en vue de la réduction de la menace terroriste Boko Haram et la pacification de la RCA. Il serait convenable dans l’optique de booster le Commerce régional de faire aboutir les projets de création des couloirs de commerce sécurisé avec le Nigéria ainsi qu’avec la Centrafrique.

    La traditionnelle réunion semestrielle des ministres des Finances de la zone francs s’est tenue du 12 au 13 avril dernier à Brazzaville au Congo. Et comme souvent, il n’a pas officiellement été question du francs CFA. Cette rencontre était plutôt axée sur les «les risques et les opportunités des perspectives macroéconomiques en zone franc» et la «lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme». Dans un communiqué rendu public à la fin des travaux, les ministres des Finances de la zone franc soulignent «l’importance de renforcer la lutte contre les flux financiers illicites et le financement du terrorisme via la coopération fiscale et des organismes régionaux». Ils ont aussi souhaité «œuvrer pour le développement des pays de la zone franc et mettre en œuvre des politiques économiques soutenables, susceptibles de promouvoir une croissance inclusive». C’est que, les ministres de la zone franc ont «noté les risques découlant d’importants déficits publics et d’un ré-endettement rapide». De plus, estiment-ils, «la convergence réelle peine à progresser dans la zone franc, témoignant des nombreux obstacles auxquels se heurte l’intégration régionale». Pour vous permettre de mieux apprécier ces inquiétudes, le journal Intégration publie le résumé du rapport intérimaire de surveillance multilatérale 2017 et les perspectives macroéconomiques de la Cemac pour 2018, présentés au cours de cette réunion.

     

    Franc CFA

    «Un consensus est en train d’émerger autour de l’ancrage à un panier de devises»

    À l’occasion de la réunion des ministres des Finances de la zone franc, qui s’est tenue les 12 et 13 avril à Brazzaville, le think tank L’Hétairie a publié une note consacrée à l’avenir de la zone franc. Dans une interview accordée à Jeune Afrique, l’historien Vincent Duchaussoy, l’un des co-auteurs, revient sur ses principales propositions.

     

    Pourquoi le Franc CFA doit évoluer, selon vous ?

    Pour deux raisons principales. Une première critique est portée depuis longtemps par des universitaires, des économistes, qui critiquent le fonctionnement de la zone CFA. Elle existe depuis longtemps mais elle est devenue plus visible, plus relayée dans les champs universitaires, ces dernières années, à travers des figures telles que Kako Nubukpo.  La société civile est également en train de se saisir cette question, comme en témoigne les questions posées à Emmanuel Macron lors de son intervention à l’université de Ouagadougou en novembre 2017. Parfois, ces interprétations sont erronées et donnent lieu à une lecture complotiste du sujet.

    Quels sont les avantages et les inconvénients du système actuel ?

    Le principal avantage du franc CFA est qu’il procure une stabilité monétaire, avec une fixité de sa convertibilité par apport à l’euro, grâce au mécanisme de compte d’opération. La garantie du Trésor français est précieuse puisqu’elle a mis les pays de la zone CFA à l’abri de crises monétaires et d’épisodes d’inflation, alors qu’un pays comme le Nigeria a connu beaucoup de difficultés à gérer le naira. La principale limite est que le fonctionnement du franc CFA lie la politique monétaire des pays qui l’utilisent à celle de la BCE, qui n’est pas forcément appropriée pour ces économies. Elle limite les marges de manœuvres de ces économies en termes de politique monétaire.Vous expliquez qu’un consensus a permis de faire évoluer la coopération monétaire tout en la préservant.

    Est-ce qu’un nouveau consensus autour d’un programme de réforme est en train d’émerger ?

    On se rapproche d’une évolution autour de la question de l’ancrage du franc CFA. Les discussions envisagent le passage de l’ancrage du franc CFA à l’euro à un panier de devise. J’ai pu constater dans mes travaux sur les archives que ce système avait déjà été envisagé dans les années 1990, avant la dévaluation suite aux crises de la dette. Les banques centrales de la zone CFA réfléchissent depuis longtemps sur ces questions et le renforcement des critiques incite les chefs d’États à évoluer sur le sujet, d’autant qu’elles s’appuient sur des propositions de réformes solides. Les politiques sont également sensibles à leurs opinions publiques, qui sont de plus en plus mobilisés sur cette question.

    Parmi les réformes que vous proposez, lesquelles vous paraissent les plus importantes ?

    Le changement du nom de la monnaie pourrait être une première étape symbolique. Passer d’un ancrage à l’euro à un panier de devise serait un changement majeur, puisqu’il conduirait certainement à remettre en cause la garantie illimitée de la convertibilité du franc CFA. Si une telle évolution a lieu, elle ne se fera pas du jour au lendemain, mais selon un calendrier qui reste à définir entre la France et ses partenaires africains, et pourrait s’étaler sur plusieurs décennies.

    Comment voyez-vous le projet de monnaie unique de la Cedeao ?

    L’échéance de 2020 pour la mise en œuvre d’une monnaie unique à l’échelle de la Cedeao me paraît illusoire. En revanche, ce qui est imaginable à moyen terme, c’est la création d’une monnaie commune, sur le modèle de l’ECU, qui existait en Europe avant la création de l’euro dans les années 1980 et 1990. Cette unité de compte serait utilisée principalement pour les paiements interbancaires en Afrique de l’Ouest et pourrait permettre de faire converger les politiques monétaires à l’échelle de la région.

    Il paraît prématuré de mettre en place une monnaie unique à l’échelle de la Cedeao, avec une économie telle que le Nigeria et peut-être l’adhésion prochaine du Maroc, qui ne semblent pas prêt à abandonner leurs monnaies nationales. On n’imagine pas le Maroc se passer du dirham pour une monnaie de la Cedeao.

     

  • L’Afrique à plusieurs vitesses s’enracine !

    L’Afrique à plusieurs vitesses s’enracine !

    Les dynamiques régionales du continent tendent à installer dans les esprits l’idée non pas d’une Afrique cohérente et unie dans le process de développement mais « des Afriques ». Les régions africaines connaissent des rythmes de mobilisations très différenciées, disparates et inégalitaires. Les mutations issues de ces dynamiques font laisser planer la conception d’une Afrique des ambitieux opposée à une Afrique des anxieux. Dans son rapport 2018 sur les perspectives économiques en Afrique, la Banque Africaine de Développement (BAD), dans ses estimations, le démontre déjà «L’Afrique de l’Est demeure la sous-région dont la croissance est la plus rapide, elle devrait rester dynamique et atteindre 5,9 % en 2018, puis 6,1 % en 2019. L’Afrique du Nord a enregistré le second taux de croissance le plus élevé d’Afrique, il devrait s’accélérer pour atteindre 5,1 % en 2018, puis ralentir pour s’établir à 4,5 % en 2019. En Afrique Australe, la croissance devrait augmenter pour s’établir à 2 % en 2018 puis 2,4 % en 2019. Soutenu par l’augmentation de la production pétrolière et la croissance des rendements agricoles, la croissance en Afrique de l’Ouest devrait s’accélérer pour s’établir à 3,6 % en 2018 et 3,8 % en 2019. La région d’Afrique centrale a continué à enregistrer des résultats décevants malgré le rétablissement des prix du pétrole. La reprise modérée en République du Congo stimulera la croissance dans la région qui devrait se rétablir pour atteindre 2,6 % en 2018 et 3,4 % en 2019».

     

    Afrique de l’Ouest

    Décidée à implémenter la feuille de route de son intégration économique, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) accélère le chantier de la création de sa monnaie unique. Après des atermoiements sur les agrégats techniques, les Chefs d’Etat Ouest-africains ont institué une task force pour approfondir davantage la réflexion. Lors de sa dernière rencontre en février, elle a permis l’adoption d’une Feuille de route révisée de programme de la monnaie unique prévu en 2020. Malgré des dissensions entre états notamment marquées par les soupçons du Nigéria sur la bonne foi des pays francophones, la monnaie de la CEDEAO (baptisée « ECO ») devrait être crée en 2020. L’axe déterminant et manquant demeure la convergence nécessaire (critères de convergence économique et monétaire) et la surveillance multilatérale. La Commission de la CEDEAO a, elle aussi, affirmé que la nouvelle monnaie ne serait adossée sur aucune devise régionale. Sa compétitivité et sa flexibilité devant s’apprécier par rapport aux grandes monnaies du monde principalement du marché international.

     

    Orientale et Australe

    Premier tandem de la régionalisation économique du continent africain et porte étendard des échanges intrarégionaux, l’Afrique méridionale constitue le premier nœud de la géoéconomie régionale africaine. D’un point de vue interrégional, la Communauté économique d’Afrique de l’Est (CAE), le marché commun de l’Afrique de l’Est et du Sud (COMESA) et la communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) capitalisent une zone de libre-échange tripartite depuis 2015. Celle-ci réunie 27 Etats africains, 650 millions de consommateurs et un Produit Intérieur Brut (PIB) global de 900 millions d’Euros. Dans le cadre de la réalisation de son agenda 2025, la CAE souhaite mobiliser 78 milliards de dollars pour développer ses projets d’infrastructures. 79% de ce budget total soit 62 milliards serviront à la construction de chemins de fer, de routes et à la mise en œuvre de plusieurs projets dans le secteur énergétique. Le partenariat de la BAD appuiera en outre la construction d’un centre régional d’excellence pour l’enseignement médical supérieur et la recherche. Le financement pourrait également s’organiser autour de l’émission des bons d’infrastructures sur le marché financier selon une piste avancée les Chefs d’Etat présents au sommet de Kampala (Ouganda). A ce jour, seuls 6% des fonds ont été réunis, soit environ 5 milliards $. Quant à l’Afrique centrale et à l’Afrique du Nord ?

    Zacharie Roger Mbarga