Votre panier est actuellement vide !
Étiquette : Thierry Ndong Owona
Cameroun, terre d’hospitalité et d’opportunités
L’opération de charme de l’Agence des Promotion des Investissements (API) a marqué un autre but vendredi dernier à Yaoundé, avec un cocktail de presse très couru et édifiant.
Une vue du village «Merveilleux Cameroun» de l’API au palais des sports à Yaoundé Parking arrière du palais des sports de Yaoundé ce 21 janvier 2022. Un chapiteau géant, d’au moins 100 m2, en matériaux locaux joliment décoré, attire les regards. Un air de village plane, avec cette toiture en natte de raphia et ces grandes ouvertures laissant libre cours aux déplacements. Le pavoisement extérieur à travers des drapeaux au vent donne à découvrir le maître de céans : l’Agence des Promotions des Investissements (API). «La CAN Total Energies 2021 est non seulement une fête africaine, mais également l’occasion rêvée de montrer aux yeux du monde la beauté du Cameroun et ses nombreuses potentialités», justifie la Directrice Générale de l’API dans son adresse de bienvenue aux journalistes sportifs nationaux et étrangers honorant son invitation.
De fait, le village «Merveilleux Cameroun» de l’API est un régal des yeux et des oreilles pour les journalistes. Ici, les petits plats sont mis dans les grands. Une documentation comprenant entre autres le guide et la charte des investissements au Cameroun. Des magazines audiovisuels appelant à «investir au Cameroun, terre d’accueil et d’opportunités». Un car podium avec un orchestre distillant la bonne musique camerounaise. Un espace buffet offrant un échantillon assez représentatif de la cuisine camerounaise. Mme Marthe Angeline Minja a tout mis œuvre pour que le charme Cameroun opère sur ses invités pendant ce «moment d’échanges, de partage et surtout de communion autour d’un idéal commun à l’initiative de l’Agence de Promotion des Investissements dont la logique d’intervention se résume au quadriptyque Accueil–Orientation, Assistance–Soutien des investisseurs».
Leitmotiv
Le leitmotiv de l’API face aux journalistes est sans détour : le Cameroun est une terre d’opportunités qui tend la main aux investisseurs de tous bords ; promouvoir le label Cameroun auprès des investisseurs est non seulement la priorité des priorités pour chacun d’entre- nous, mais aussi un acte patriotique. A l’API, on se félicite des premières retombées de ce leitmotiv. «En 2013, à l’initiative de S.E Paul Biya, une loi est votée sur l’investissement privé en république du Cameroun pour encourager l’investissement privé, accroitre la production nationale et créer des emplois pour les jeunes camerounais en vue de la promotion d’une croissante économique forte, durable et inclusive. Ce dispositif incitatif a permis au Gouvernement à travers son bras séculier qu’est l’API de signer à ce jour 268 conventions avec les entreprises du secteur privé pour un volume prévisionnel d’investissement de 4100 milliards de FCFA et un nombre de 72 mille emplois directs à créer».Dans le concret, «la récente évaluation d’un échantillon de 100 entreprises agréées, conduite par l’API avec la participation des administrations sectorielles, ressort un montant de 987 milliards de FCFA d’investissements déjà réalisés et un nombre de 12 mille emplois directs créés pour les 05 (cinq) premières années». Pour la patronne de l’API, «ces chiffres démontrent à suffisance que le Cameroun que le Cameroun reste et demeure une destination attractive des investissements en Afrique». Et de conclure: «nous avons pensé organiser cette soirée pour amener les médias à comprendre ce que l’API fait, ce que nous menons comme activités et pourquoi nous nous intéressons à la CAN». Le message est-il passé ? Réponse dans les prochains articles de la presse sur les opportunités d’investissement au Cameroun.
Thierry Ndong Owona
Marthe Angeline Mindja
Pourquoi l’API est supporteur national de la CAN 2021
Nous pensons que le football est un vecteur très important pour les investissements. Les footballeurs gagnent beaucoup d’argent, mais en même temps, ils prennent leur retraite assez jeune. Généralement, à 30-35 ans, ils pensent déjà à leur retraite. Cela signifie qu’ils doivent se reconvertir et investir dans un pays. Ce sont des personnes qui sont attachées à plusieurs pays du monde. Pourquoi un footballeur congolais ne viendrait-il pas investir au Cameroun ? Et vice-versa. Nous avons l’exemple de Samuel Eto’o qui a investi dans d’autres pays.
Les footballeurs représentent donc une cible très importante pour une agence de promotion des investissements. S’agissant de notre forte implication au niveau de la CAN, il faut déjà rappeler que c’est le troisième plus grand événement de football au monde. Il est très médiatisé. C’est une occasion idoine pour notre pays de se faire connaître dans le monde entier, pour montrer ses opportunités, ses potentialités, etc. Nous ne voulions pas rater cette occasion de vendre au maximum notre destination au cours de cette CAN.
L’API est supporteur national pour l’organisation de cette compétition. Nous étions déjà supporter national pendant le CHAN. Ce n’est pas un parcours facile. Mais nous en avons fait un défi. Et je crois que nous sommes en train de réussir notre pari.
L’Espoir, notre carburant en 2021
«Ce n’est pas le moment de dire Bonne année, mais plutôt de souhaiter à chacun de vous, dans votre réalité quotidienne, de garder espoir pour des temps meilleurs, mais qui ne seront jamais comme avant». Voilà des propos d’un chef d’entreprise à son personnel, à l’occasion du passage à l’année 2021. Nous les reprenons à notre compte pour nos lecteurs, annonceurs et partenaires. En effet, partageons tous l’espoir que 2021 soit moins déroutant que 2020.
De fait, depuis une dizaine de mois, l’Homme est acteur, sans l’avoir demandé, d’un événement sans précédent qui secoue le monde entier, en semant la mort. Coronavirus, ou Covid-19, puisqu’il s’agit de lui, a tout bousculé sur la planète terre, en créant au passage d’énormes pertes en vies humaines (plus d’un million de morts déjà enregistrés selon l’OMS) et des dysfonctionnements dans tous les secteurs d’activités. «Dans cette intensité, je n’aurais jamais pensé vivre une telle situation», indique un nonagénaire qui en a vu des vertes et des pas mûres. En 2021, rappelle un chef d’entreprise réputé, le travail n’a jamais été autant mal loti. «Sur le terrain précis des relations de travail que nous avons, [il a fallu] piloter sans radar, en terrain désorganisé et encore sans les pratiques sécurisantes des formes de hiérarchie…»
2021, année d’une nouvelle humanité
Se réinventer. Tel est le leitmotiv pour Tous. Il faut savoir transformer en opportunités les causes les plus difficiles, apprend-on des anciens et de quelques contemporains brillants d’esprit. Le génie humain est par conséquent mis à rude épreuve. Une fois de plus, serait-on tenté de dire. Chacun à son niveau est interpellé. Chacun de nous doit relever le défi, avec ses potentialités et dans l’originalité. À situation exceptionnelle, recherche exceptionnelle de solutions.Dans cette perspective, et en phase avec la sous- région Afrique centrale, le journal INTEGRATION trace le sillon de la combativité et de l’espoir. Le contenu de ce premier numéro donne le ton de l’année 2021. Le supplément spécial, CHAN de l’intégration, va promouvoir pendant un long mois, les valeurs d’intégration des peuples et des économies, à travers le football continental. Dans le même timing, nous prenons la route avec le Cameroun pour découvrir son agenda économique à l’horizon 2030. Aux côtés de la Commission de la Cémac, nous présentons la retro de l’année 2020 et la prospective 2021, en s’appuyant sur le message de vœux du Professeur Daniel Ona Ondo, président de la Commission de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cémac). Les crises sécuritaires autant à l’échelon de la sous – région (notamment le phénomène Boko Haram) qu’à l’intérieur des Etats (en l’occurrence la guerre de sécession dans la partie anglophone du Cameroun) sont dans notre viseur éditorial. L’hommage à Ernest Ouandié, l’un des héros de lutte pour l’indépendance du Cameroun, consacre le caractère combatif de votre journal en 2021.
Oui, nous serons plus combatifs et ingénieux que d’habitude, pour continuer à monter la qualité du journal INTEGRATION, malgré la difficile conjoncture économique et un environnement politico – juridique globalement hostile à l’éclosion de la presse écrite en Afrique centrale. Nous invitons tous nos lecteurs, annonceurs et partenaires à suivre nos pas. La somme de nos petits pas courageux sera, au soir de l’année 2021, une grande avancée pour le Cameroun et l’Afrique centrale. YES, WE CAN… DO IT. Dans cet espoir, je souhaite bon courage à tous en 2021.
Thierry Ndong Owona
La vie des 10 millions de Nordistes du Cameroun compte
Le septentrion du Cameroun fait à nouveau parler de lui. Cette fois-ci, à travers le «Mouvement 10 millions de Nordistes».
Lancé à travers les réseaux sociaux la semaine dernière par Guibai Gatama, directeur de publication de l’œil du Sahel, le mouvement décline succinctement son identité sur la page Facebook de son promoteur: «Le Mouvement 10 millions de Nordistes est là. Cette initiative, commune, est apolitique. Elle vise à promouvoir et défendre les intérêts du Grand Nord dans un esprit républicain. Il est impérieux que chaque Nordiste en fasse la promotion pour une appropriation collective de notre poids au Cameroun. Si nous sommes 10 millions, c’est que nous sommes une force. Nous devons l’affirmer. Nous devons peser dans notre pays. Nous avons une place dans notre pays. Nous devons être respectés».
Voilà officiellement ce qui est dit sur cette initiative. Des indiscrétions annoncent la suite de la déclinaison au plus tard à la fin du mois de juillet 2020. «La charte du Mouvement sera dévoilée dans trois semaines», claironne Guibai Gatama. En entendant, les spéculations vont bon train sur les réseaux sociaux et dans les chaumières. Que cherche encore à dire ou faire le Grand Nord Cameroun? La question taraude les esprits et installe le débat.
D’emblée, le Mouvement entend inscrire le septentrion en acteur – et non plus en victime résignée – de la vie politique, économique et social du Cameroun. Une prise en main de son destin qui capitalise sur le poids démographique pour casser les préjugés et changer la perception, et partant la donne. Oui, le Grand Nord en a marre d’être mal compris et d’être sous –estimé. Il a besoin d’engager un new deal avec le reste du pays dans une relation «gagnant – gagnant».
Ce nouveau discours ô combien séduisant fera-t-il des émules? A en croire le buzz suscité par le sujet sur les réseaux sociaux, Guibai Gatama a tapé dans le mille. Les populations du Grand Nord accueillent favorablement l’initiative. Elles attendent voir comment celle-ci prendra corps. Ailleurs, la suspicion prédomine. Mathieu Youbi, activiste proche du parti politique MRC (Mouvement pour la renaissance du Cameroun) n’y va pas du dos de la cuiller sur Facebook: «Le porte – parole du Mémorandum du grand nord. Le parent de l’axe Nord – Sud.
La voix et l’œil autoproclamés du Nord est le nouveau rassembleur. Un nouveau gadget du chantage est né. Bientôt il y aura une pétition pour dire comment le Nord doit être prise en compte dans l’alternance». Très amusé par cette levée de bouclier, Guibai Gatama répond: «le dernier paragraphe de ce post me plait trop. Dieu soit loué, mon ami Mathieu Youbi l’a enfin compris». Dans la même lancée, il répond aux critiques formulées par l’artiste Valsero à l’endroit des populations du Grand Nord, qualifiées par tous les noms d’oiseaux. «Jai écouté l’artiste Valsero. Ah, ce Grand Nord si mystérieux, politiquement incompris», soupire-t-il. C’est dire combien le travail sera ardu pour le néo mouvement. Heureusement, son promoteur a le profil de l’emploi.
Thierry Ndong Owona
Black lives matter: nouvel ordre mondial du vivre – ensemble
Coronavirus reléguée au second plan par l’affaire George Floyd. Qui l’eût cru. Suite à l’assassinat le 25 mai dernier de George Floyd à Minneapolis par un policier blanc, des géantes marches de protestations – aux quatre coins de la planète terre ont fait l’actualité du week-end dernier dans les grands médias du monde. L’Afro – américain, qui sera inhumé ce mardi à Houston dont il est originaire, est devenu le symbole mondial de la lutte contre les discriminations raciales et de la revendication de l’égalité des droits pour tous.
Samedi dernier, en marge des marches organisées dans la capitale fédérale américaine, la mairie de Washington a rebaptisé la 16e avenue «Black lives matter». Un pied de nez au président Donald Trump, hostile à la publicité sur l’affaire Floyd, et désormais obligé d’emprunter cette avenue qui conduit à la Maison blanche.
L’Afrique aussi
Le continent noir a aussi fait entendre sa voix ce week-end, avec des manifestations en Tunisie et au Ghana. A Accra, la cérémonie funèbre en mémoire de l’Africain – américain George Floyd s’est déroulée en présence d’autorités gouvernementales, politiques, religieuses, de figures éminentes et d’un public nombreux au Centre Web Dubois. Les grincements de dents et les hommages provoqués par l’affaire Floyd suscitent des débats au sein de l’intelligentsia africaine.Pour le prix Nobel de Littérature, Wole Soyinka, «les afro descendants sont pour ainsi dire condamnés à l’excellence et à la conquête du pouvoir économique et politique partout où ils vivent. Il ne faut attendre aucun salut ni aucune compassion d’un système fondé depuis le 15è siècle sur le pillage de l’Afrique et l’asservissement ou l’infériorisation de ses descendants… Il nous faut promouvoir l’excellence, la culture, l’entreprenariat, le pouvoir politique, l’unité, la solidarité et la défense de nos intérêts partout et y compris et surtout en Afrique, Terre – mère où tous les Afro-descendants et tous les peuples respectueux sont les bienvenus».
L’écrivain nigérian de réputation internationale propose des pistes pour y arriver: «Enrichissons-nous intellectuellement et financièrement, éduquons nos enfants dans les foyers stables, épanouissants et aimants, créons des entreprises, fabriquons et achetons prioritairement nos produits car le juteux business ethnique sur notre dos les vide de leurs vrais sens et qualité, partageons notre Histoire, notre culture et notre force qui nous ont permis de survivre à tout pendant des siècles». Et le journaliste Jean – Baptiste Placca de reprendre à son compte cette sortie du président ghanéen: «Tant que l’Afrique n’est pas respectée, le Noir (à travers le monde) ne le sera pas». Fort opportunément, le journaliste émérite d’origine togolaise a titré sa dernière chronique matinale du samedi sur Radio France internationale (Rfi): «Tout homme est homme, l’homme noir aussi».
Thierry Ndong Owona
Dr Christian POUT, Ministre Plénipotentiaire
«Un changement radical, prioritairement sur la question du racisme anti-noir»
Le Président du Think Tank CEIDES, Directeur du séminaire de Géopolitique africaine à l’Institut Catholique de Paris, analyse la portée et les implications mondiales de l’affaire George Floyd.
Dr Christian POUT, Ministre Plénipotentiaire Comment vous êtes-vous senti en regardant les images insoutenables de l’assassinat de George Floyd?
« I can’t breathe». Ces mots prononcés par l’Américain George Floyd, sous l’effet asphyxiant du policier Derek Chauvin au cours d’une interpellation ayant lieu à Minneapolis aux Etats-Unis, résonnent comme un orchestre funeste dans mon esprit, marquent à l’encre indélébile mon âme. En tant qu’humain et fervent défenseur des Droits de l’homme, cette scène est d’une rudesse qui me consterne d’autant plus que dans une complicité silencieuse mais agissante, aucun des collègues de Derek Chauvin n’est intervenu pour mettre fin à ce supplice. C’est déplorable.Que vous inspire le vaste mouvement de protestation violent et pacifique qui s’en est suivi?
Les mobilisations collectives interviennent généralement à l’effet de défendre des intérêts qui semblent menacés, ou de changer une situation sociale à la faveur des groupes mobilisés. Il y flotte un air de conscience collective et un sentiment d’identité commune, qui entrainent presqu’inéluctablement la mobilisation.Il importe d’emblée de mettre en exergue l’importance du contexte numérique dans la propagation virale de cette scène. La puissance observable et observée des réseaux sociaux comme vecteurs de communication actualise de façon systématique l’expression de «village planétaire», en ce sens que cet événement qui point aux États-Unis est vécu dans le monde entier, brisant les frontières physiques et créant une sorte de communauté émotionnellement connectée. Les différentes protestations perceptibles aux quatre coins du monde interviennent pour opérer un changement radical, prioritairement sur la question du racisme anti noir, d’où le hastag #Blacklivesmatter.
L’État, gestionnaire du biopouvoir, étant par conséquent chargé de préserver les vies et les corps de ses citoyens, est interpellé au premier chef dans ces revendications. Nous savons qu’en démocratie, les mobilisations sont – avec la médiatisation – un des modes courants de la problématisation d’une situation sociale et de sa mise sur agenda. À côté de l’État, c’est la question des mentalités de façon générale qui est visée, l’Homme noir est un Homme, semble-t-on lire entre les lignes.
D’aucuns pensent que la mobilisation quasi-mondiale sur l’affaire Flyod est un tournant décisif dans l’avènement d’un nouvel-ordre mondial du vivre-ensemble. Qu’en dites-vous?
Je dirais que la problématique du vivre-ensemble s’actualise avec encore plus de force du fait de ce tragique événement. En effet, la question des minorités s’invite constructivement dans le débat; et cela est perceptible dans la capacité qu’a eu cette scène, à inviter ou inviter derechef des minorités éparses et clairsemées dans une mobilisation qui au départ était captée par les populations noires.À titre illustratif, les Aborigènes d’Australie ont récupéré le mouvement; c’est également le cas des Kurdes et des Palestiniens dans une perspective de Droit des minorités. Par ailleurs, il échoit de percevoir la résurgence de blessures mal cicatrisées, causées par les violences policières envers les noirs. En France, l’affaire Adama Traoré, datant de juillet 2016, est plus que jamais réactualisée. Vous voyez donc que c’est une séquence qui entraîne toute une vague de revendications susceptibles de recomposer, même de façon incrémentale, l’ordre mondial prégnant dans le vivre-ensemble.
Quelles leçons tirer de cette affaire?
Cette affaire triste est un sinistre pédagogue à maints égards. Tout État, aussi puissant soit-il sur la scène internationale, est une organisation. En cette qualité, il peut connaître des défaillances dans la gestion des membres du tissu social. Il est d’une impérieuse nécessité d’être proactif en réduisant au maximum les inégalités de toute nature, et en gommant autant que possible les discriminations qui sont des catalyseurs pouvant mener à des manifestations violentes.Par ailleurs, la scène mondiale est de plus en plus fluide avec la prégnance des réseaux sociaux; il n’existe plus ou du moins il existe peu d’actes recouverts du voile local. En une fraction de seconde, un acte s’internationalise. Ces vecteurs de communication sont plus que jamais mobilisateurs; et je dirai par surcroît qu’ils constituent des ressources stratégiques non négligeables.
Que faut-il faire pour que cette affaire devienne le ferment d’un nouveau départ dans la relation entre les peuples du monde entier?
Cette question met au goût du jour les dynamiques de changement de comportement et de mentalités. Il faut savoir que tout changement produit une certaine violence psychosociale. Les actes routiniers et les dépendances au chemin emprunté sont des racines fortement ancrées dans les cartes mentales des acteurs. Toutefois, Les manifestations d’envergure comme l’affaire Floyd constituent clairement une modalité apte à reconfigurer les rapports humains, car elles touchent au domaine de la perception, et nous savons à quel point la perception est créatrice de réalité.En effet, la question des minorités s’invite constructivement dans le débat; et cela est perceptible dans la capacité qu’a eu cette scène, à inviter ou inviter derechef des minorités éparses et clairsemées dans une mobilisation qui au départ était captée par les populations noires. À titre illustratif, les Aborigènes d’Australie ont récupéré le mouvement; c’est également le cas des Kurdes et des Palestiniens dans une perspective de Droit des minorités.
Elles montrent que la situation actuelle est devenue nocive et qu’il faille un nouveau mode de fonctionnement. A cette action mobilisatrice qui est plus «bottom up» que «top down», il faudrait ajouter la partition des systèmes gouvernants nationaux, régionaux et internationaux de par une production de politiques et actions publiques favorables à la consolidation d’un vivre – ensemble réel. Tous les hommes ont une responsabilité sur les rapports entre les peuples. Si dans la socialisation initiale, nous apprenons aux jeunes générations les principes de la Déclaration universelle des Droits de l’Humains, si les politiques publiques mondiales en matière d’éducation incluaient dans les programmes l’enseignement de ces valeurs, ce serait une avancée durable.
Propos recueillis par Ongoung Zong Bella
Lutte contre Boko Haram : Complot contre l’armée tchadienne
La terrible vengeance de Déby contre les djihadistes… et le dispositif de lutte contre Boko Haram. Ainsi devrait-être la quintessence de cette chronique, au regard des deux faits majeurs qui ont marqué de façon forte la lutte contre la secte terroriste Boko Haram la semaine dernière dans la zone du Lac Tchad.
Primo, l’opération coup de poings dénommée colère de Bohoma de l’armée nationale tchadienne conduite par son chef suprême (Idriss Deby Itno) contre les djihadistes. L’opération, menée autant sur le territoire tchadien qu’en territoires nigérian et nigérien, serait un grand succès selon la télévision nationale tchadienne. 1000 djihadistes tués. Une zone insulaire (Tchikumnaïda) nigérienne, sous contrôle des islamistes depuis 2013, récupérée par les forces armées tchadienne. Idem pour la ville carrefour de Maday, à sept kilomètres à l’intérieur du Nigéria. Cette partie du territoire nigérian était abandonnée depuis 2010 aux islamistes. Idriss Déby et son armée viennent donc de marquer un grand coup contre Boko Haram et ses affidés. Malgré la perte déclarée d’une centaine de soldats au cours des expéditions punitives de la semaine dernière, l’armée nationale lave ainsi l’affront subi une dizaine de jours plutôt dans la zone désertique de Diffa au Niger. Où elle avait perdu 7 généraux et plus de 100 soldats au cours d’une attaque terroriste de sept heures d’horloge. Selon des témoignages concordants, le terroriste avait utilisé l’artillerie lourde pour pilonner les positions tchadiennes à Diffa. Pourquoi la base militaire de la Force multinationale mixte de Diffa n’a pas réagi? L’interrogation ouvre des spéculations sur des complicités à un très haut niveau du dispositif de lutte contre Boko Haram.
Coup de sang
Le deuxième fait majeur de l’actualité dans le Lac Tchad est le retrait annoncé -par son chef suprême- des soldats tchadiens de tous les théâtres d’opération hors des frontières du Tchad dans la lutte contre Boko Haram. La décision du Président Idriss Déby rappelle le «cavalier seul» de l’armée tchadienne lors des expéditions punitives contre les djihadistes la semaine dernière. Où sont passées la Force multinationale mixte et l’Opération Barkhane? Leurs quartiers généraux et démembrements se trouvent pourtant à Ndjamena.Cette absence remarquée des partenaires dans la lutte contre Boko Haram explique-t-elle la décision du Président Déby? Une évidence, les événements de la semaine dernière dans le Lac Tchad confirment le malaise perçu au sommet de la coordination du commandement dans la guerre contre la secte islamiste. La convocation en France par Macron d’une réunion des chefs d’Etat du Sahel africain, pour arrêter de nouvelles stratégies contre les djihadistes, avait laissé apparaitre de grands trous d’air dans la position des leaders africains invités à la grand-messe. Vraisemblablement, le fossé des mésententes se creuse davantage.
Dès lors, il se pose avec acuité la question du sort réservé aux deux bastions nigérien et nigérian libérés des fourches caudines de Boko Haram.L’armée nationale tchadienne ne peut pas rester indéfiniment à Tchikumnaîda et Maday. Une mission diplomatique dépêchée par Idriss Déby a été reçue le 9 avril dernier à Abuja et Niamey. Son objectif : convaincre les chefs d’Etat des deux pays à envoyer leurs armées respective chaque partie du territoire libérée par le Tchad. On attend les résultats sur le terrain.
Le coup de colère du Président Idriss Deby Itno a également pour destinataire la France (dont il est le principal allié dans la lutte contre le terrorisme en Afrique), les membres permanents du conseil de sécurité de l’ONU et autres pays ayant pris part aux conférences internationales de soutien aux théâtres d’opérations auxquels elle est engagée. Le Tchad frôle la tension opérationnelle. Son armée est engagée sur 6 théâtres d’opérations (RCA, Mali, Lac Tchad, G5 Sahel, Lybie et au Tchad pour le maintien de l’intégrité territoriale). Face aux engagements déclaratoires et les bonnes intentions prolongent les attentes financiers et logistiques de N’djamena.
Prise en main
En attendant, c’est pratiquement du chacun pour soi contre la pieuvre islamique en regain de forme. En effet, la fréquence des attaques djihadistes a augmenté depuis la fin du mois de décembre. Au Cameroun par exemple, l’une de ses attaques vient de faire dix morts non loin de Mora dans l’Extrême – Nord du Cameroun. Trois explications à ce retour en force: les inondations, consécutives à la saison des pluies dans les îles du Lac Tchad, obligent les islamistes à chercher des terres plus hospitalières, proches des villages ; la fermeture de certains postes avancés de l’armée camerounaise, sollicitée sur d’autres fronts ; les règlements de comptes entre djihadistes et certains dealers cachés dans la population.Pendant ce temps, les populations font avec les moyens de bord pour s’en sortir. Cas pratique à Mokolo, dans le Mayo Tsanaga, au Cameroun. La diaspora de ce département -parmi les plus peuplés du pays- a lancé le 21 février dernier une initiative de mobilisation des dons en faveur des groupes d’auto-défense contre Boko Haram. La phase 1 de cette initiative baptisée «Opération Solidarité envers les victimes de Boko Haram dans le Mayo Tsanaga s’achève ce 30 avril. Nous y reviendrons.
Thierry Ndong Owona
J’ai le Corona
Depuis quatre jours, je traine un rhume. Est-ce du fait du changement de saison ou de la contamination au Corona virus? A la maison, je me fais appeler malicieusement «Corona» par mon épouse. Dans la rue, rien à signaler. Je suis comme un poisson dans l’eau. Même si, dans de très rares occasions, je dois me moucher, pour libérer mes narines. Mais cela ne suffit pas pour attirer l’attention.
En début de week – end dernier, je me suis retrouvé à tout hasard devant ma banque. Trois jours après mon premier écoulement de nez. On m’a désinfecté les mains et imposé la traversée d’un portillon spécialement dédié aux clients accédant à la banque. En ressortant de l’édifice, après mes opérations bancaires, je pose la question au vigile de service: «Si j’avais été malade, ce portillon aurait-il alerté?» Réponse par l’affirmative.
En suis-je pour autant rassuré? A l’observation, avec le coronavirus, chacun de nous est un malade qui s’ignore.Par conséquent, mes pensées s’orientent prioritairement vers tous les malades réels ou présumés de ce redoutable virus. Une pensée particulière pour le Cameroun et l’Afrique centrale, où la riposte s’organise dans une ambiance d’insouciance populaire, de stigmatisation et surtout de moyens limités.
De fait, la grande majorité de la population camerounaise affiche une inconscience déconcertante au train de mesures du Gouvernement contre le Coronavirus. Dans les villes, les lieux de plaisirs continuent à faire salle comble. Dans les villages, «le Coronavirus, c’est pour les citadins». Dans la foulée, un doigt accusateur est pointé vers ces «voyageurs venus d’ailleurs», qui propagent la maladie en Afrique et au Cameroun.
La population camerounaise a choisi l’excuse facile pour se faire bonne conscience et démissionner face aux responsabilités inhérentes à la lutte contre Coronavirus. Une fuite en avant sans issue, qui pourrait aboutir à une contamination à grande échelle de la population. L’Europe l’expérimente aujourd’hui à ses dépens. Et le Cameroun tarde à en tirer les leçons.
Pourtant, l’heure est grave. La «guerre contre le coronavirus» ne saurait être la seule affaire du Gouvernement et des malades. Les ordres religieux prêchent déjà par le bon exemple. Aux autres acteurs du champ social d’en faire autant. Nous en appelons à l’union sacrée de tous, pour une montée en puissance de la lutte contre le virus au Cameroun et dans la sous-région.
Notre survie et notre avenir à tous en dépendent. Prévenir vaut mieux que guérir. Cassons la chaine de la contamination à travers des gestes simples: lavement régulier au savon et à l’eau des mains; l’évitement des places de fortes concentrations humaines; le silence autant que faire se peut; la limitation des civilités habituelles; la consultation des services sanitaires en cas de besoin… Prompt rétablissement!
Thierry Ndong Owona
Michel Niama : En 2021, nous ambitionnons passer à au moins 10% des échanges commerciaux intra-communautaires
Le commissaire chargé du département du marché commun au sein du gouvernement de la Communauté présente les jeux et enjeux d’une labélisation du « made in Cemac ». Il trace les perspectives du commerce intra-régional pour la sous-région.
Vous êtes à Douala dans le cadre d’une rencontre sous régionale sur les agréments des produits transformés en zone CEMAC. Pour la gouverne de nos lecteurs, de quoi s’agit-il concrètement?
Permettez-moi de vous rappeler, d’entrée de jeu, «qu’il n’y a pas d’économie sans commerce, sans échanges».De cette assertion, je pourrais vous dire que la construction de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale est un vaste chantier que nous avons commencé depuis fort longtemps, et vous connaissez bien l’historique qui ne pourrait point faire l’objet d’un développement ici en cette circonstance.
Ce qui est plus important à dire, aujourd’hui, c’est que nous avons un certain nombre de leviers qui doivent consacrer notre intégration sous régionale.
L’un de ces leviers, qui aiderait à garantir cette intégration, est le commerce: l’intégration commerciale de notre sous-région, tant dans son volet commerce de marchandises que dans celui des services.
Or, qu’est-ce que nous avons observé depuis bien des décennies dans notre sous-région: le commerce extérieur de nos États est un commerce essentiellement tourné hors zone CEMAC.
Pour preuve, les deux notes de conjonctures que nous avions rédigées nous révèlent que le niveau des échanges entre nos pays est extrêmement bas. Il est de l’ordre de 3,5 % pour les produits transformés. Ce qui est tout à fait déplorable, pour une communauté économique et monétaire… Or, qui dit «économie, dit échanges». C’est dire qu’à ce stade de l’évolution de notre communauté, nous avons encore un défi important à relever.
Le législateur communautaire a pourtant mis en place un dispositif qui devrait encourager les produits des entreprises de la sous-région à disposer d’un marché plus vaste, à travers l’application d’un tarif préférentiel généralisé (taux de douane égale à zéro), pour les produits du cru et les produits transformés dans l’espace communautaire. Car, reconnaissons-le, nous sommes des petits pays avec une population relativement modeste et qui ne pourrait donner la dimension optimale à chacune de nos entreprises pour prétendre faire face à la rude compétition internationale.
Le Comité de l’origine est donc un comité qui vient donner l’agrément aux produits d’une «entreprise dite nationale» de pouvoir accéder à un marché beaucoup plus important (environ 54 millions de consommateurs).
Comme vous pouvez le comprendre, une entreprise installée au Gabon, qui, jusque-là, ne misait que sur une population cible d’un million huit cent mille habitants, ne serait pas tout à fait en capacité de faire face efficacement à un producteur (concurrent) du même produit, habitué à produire pour 100 millions de consommateurs. À moins de miser sur la qualité, mais encore là, c’est très relatif, car les échelles de production et de marché joueraient largement en sa défaveur (en termes de compétitivité prix).
Étant donné que nous évoluons par étape, la mise en place du dispositif d’agrément CEMAC/CEEAC est une étape qui prépare les produits des entreprises de notre sous-région à la compétition internationale.
Il est de notre devoir de faire en sorte que nous puissions privilégier la transformation locale de nos produits qui, en d’autres termes, crée davantage de la valeur ajoutée locale.
Privilégier la production qui se réalise dans notre sous-région, en ayant mis en place ce dispositif d’agrément des produits, nous parait plus que justifié.
En effet, les six États de la CEMAC ont déjà, en commun, un code des douanes, un même code général des impôts. Bien plus, ces six états ont une charte communautaire d’investissement à partir de laquelle en découlent les chartes ou codes des investissements de nos États. Dans ces différents codes ou chartes communautaires sont mis en exergue un certain nombre de dispositions, qui sont de nature à encourager la production qui se réalise dans la sous-région.
Les entreprises de cette sous-région devraient donc tirer leur épingle du jeu à travers le commerce. D’où la mise en place d’un dispositif approprié visant à labéliser les produits transformés des entreprises qui opèrent dans notre sous-région.
Bobo Ousmanou
Alors, monsieur le commissaire, le décor étant ainsi planté, entre cette ambition et la réalité sur le terrain, il y a parfois un grand fossé! Qu’est-ce qui nous garantit que ce comité régional, qui est né depuis une dizaine d’années, pourra fonctionner de façon efficiente, après les travaux de Douala?
Après les travaux de Douala, je puis vous rassurer que, statutairement, il y aura au moins deux comités régionaux de l’origine, d’ici la fin de l’année 2020. Nous avons des objectifs à atteindre: il s’agit de faire en sorte que si autrefois, en onze années, nous n’avons eu que 322 produits pour 35 entreprises, dès cette première session, qui normalement est la session de 2019, nous ayons quand même 304 produits pour 25 entreprises. Nous sommes donc optimistes de croire que l’objectif de 1000 produits agréés en fin d’année pourrait raisonnablement être atteint. J’en profite d’ailleurs pour lancer un vibrant appel aux entrepreneurs de la sous-région de venir faire agréer leurs produits, car le marché de la CEMAC est le leur. C’est là où ils pourront réaliser de bonnes performances et croitre en maturité, dans la perspective des prochaines conquêtes hors zone CEMAC. C’est un bon champ d’entrainement pour les entreprises de la sous-région, pour amorcer l’étape suivante de la conquête du marché continental et, pourquoi pas, international.Au-delà de la conquête des parts de marché au niveau sous régional, il convient de rappeler en vérité que le territoire de la CEMAC est une zone riche en ressources naturelles à transformer. Donc, il s’agit ici d’une zone de grand intérêt économique pour tous les investisseurs, nonobstant quelques tracasseries présentes, mais qui sont appelées à disparaitre, suite au programme que nous allons, de commun accord, implémenter, avec le concours bienveillant de nos États.
Je puis vous rassurer que notre Comité de l’origine, qui a repris, a siégé à un rythme régulier, conformément à nos textes, pourra nous assurer que l’on puisse avoir les 1000 produits labélisés en fin d’année 2020 et qui pourront circuler dans notre sous-région.
Étant donné que ce sont les six pays réunis qui forment la Communauté, mais qui commercent peu entre eux, relever le niveau des échanges dans la Communauté est notre défi majeur. Plus nous allons échanger entre nous, moins on s’exposera à certaines importations inutiles. Inutiles parce que certains de ces produits existent pourtant dans notre communauté, et qui sont souvent de bonne qualité, mais qui ne sont pas mis à la disposition des consommateurs de la sous-région.
En réponse à ce que vous dites, quelqu’un dira, «rien de nouveau sous le soleil» l’Afrique centrale a toujours eu ces potentialités. Le Comité d’origine a toujours été pensé; certains pays ont eu des agréments pour vendre en zone CEMAC, mais ils n’ont pas pu; il y en a qui ont même eu l’agrément CEEAC, mais ils n’ont pas pu… Qu’est-ce qui vous fait croire que vous allez réussir là où les autres gouvernements de la CEMAC ont échoué?
Nos actions sont menées de façon concomitante. Nous sommes conscients qu’il y a des mange-mil dans les principaux corridors. Nous avons responsabilisé le Comité des chefs de police d’Afrique centrale, le tout, couronné par la réunion ministérielle, le 15 novembre 2019 à Libreville. Nous devons donc nous appuyer sur cette institution communautaire pour accompagner les efforts de la Commission de la CEMAC, parce qu’en vérité, les seuls petits obstacles qui restent à lever sont, effectivement ce que l’on appelle les barrières non tarifaires. Nous sommes tous les fils et filles de cette communauté, nous devons nous comprendre, pour faire en sorte que nous puissions créer une économie sous régionale dynamique, forte et complémentaire. On ne peut pas produire et distribuer aisément un produit dans la sous-région, si celui-ci est soumis à des barrières multiples infondées et souvent injustifiées, comme il nous a été révélé, à titre d’exemple, sur le trajet Douala-Ndjamena (où 108 barrières ont été repérées); certaines sont tout à fait inutiles, car elles renchérissent le coût de revient du produit.À Libreville, nous nous sommes accordés pour alléger ce type de situation, sans compromettre notre sécurité collective, par la création des brigades mixtes inter-États. Ces dernières vont contribuer à rendre plus fluides ces corridors pour l’intérêt supérieur et bien compris de l’ensemble de la communauté. Même si cela a un coût, nous serons gagnants: cas de la viande bovine, un déficit alimentaire de 400 milliards pour la seule viande bovine et ovine dans la sous-région. Vous comprendrez aisément que si nous faisons ces efforts à libérer les corridors de passage, même si nous allons dépenser, à titre d’exemple, un milliard en perdiem, pour ces brigades, pour en économiser 400 milliards dans notre sous-région, je pense que le choix sera simple à faire.
Cette fois, nous ne ferons pas les choses dans les bureaux; nous serons sur le terrain, pour veiller à ce que ceux qui ont reçu leur agrément pour leurs produits puissent les faire circuler dans tous les pays de la communauté, dans les conditions optimales, pour assurer effectivement la libre circulation des personnes et des biens dans notre espace communautaire, comme prescrit par nos chefs d’État et de gouvernement. Celle-ci va devenir enfin une réalité et non plus une vue de l’esprit. Mais cela commande toutefois l’adhésion de tous, de tous les acteurs impliqués.
Alors monsieur le commissaire, je vous interpelle au niveau des mentalités. On sait très bien que les mentalités doivent être cultivées davantage pour que l’on obtienne des résultats. Un exemple simple: pour des gens habitués à consommer du bœuf français, ça pourrait être difficile pour eux de consommer du bœuf en provenance de Ndjamena. Étant donné que les habitudes alimentaires sont fortement influencées par l’héritage colonial, ne pensez-vous pas qu’il y a de la pédagogie à faire? Étant donné que ça prend du temps, est-ce que ça ne va pas réduire votre ambition sur le court et le long terme?
Effectivement, nous savons mesurer nos capacités, mais aussi nos limites. Voilà pourquoi nous sommes en face de vous. Nous comptons beaucoup plus sur vous les journalistes: c’est vous qui devez nous aider dans cette tâche titanesque, parce que c’est vous qui conscientisez les masses; c’est vous qui êtes écoutés tous les jours par nos concitoyens. Très sincèrement, comme vous pouvez l’observer, comment pourrait-on atteindre tout le monde sans passer par vous?Ce qui nous intéresse en ce moment c’est de mettre très vite en place un dispositif qui va alléger les barrières non tarifaires. Nous sommes d’ailleurs conscients que nous ne pourrons point les lever sans la contribution de tous. Ce qui est au moins rassurant, c’est que nous sommes en parfaite communion avec la police de nos six États: ce sont les policiers qui parleront à leurs propres frères policiers, pour leur expliquer que certaines barrières n’ont plus raison d’être. Ce sont les policiers et les autres corps de l’État qui composeront ces brigades, et il va leur revenir la mission de faire appliquer la loi dans les principaux corridors de passage. Naturellement, nous allons assurer la supervision. Nous n’allons pas nous éloigner, sinon on pourrait également vivre d’autres travers. Comme toute tâche confiée à une institution, nous croyons que nous devons nous assurer que les résultats que nous allons récolter sur le terrain seront tout à fait ceux attendus.
Monsieur le commissaire, vous évoquez là les barrières physiques. Mais qu’en sera-t-il des barrières mentales?
Lever les barrières dites mentales dépendra de la manière dont vous allez nous aider par la communication, qui est votre métier… Bref, vous allez nous aider à communiquer, à mieux communiquer avec toutes les parties prenantes.
Qu’est-ce qui se passe en réalité? Toutes les maladies que nous commençons à voir émerger dans la sous-région, et qui étaient des maladies pas connues du tout, sont généralement dues à de multiples manipulations génétiques que nous ne maitrisons pas. Or, pour ne citer que le cas de la viande du Tchad, du nord Cameroun ou encore de l’est de la RCA, c’est généralement une viande bio. Les bêtes ne mangent que de l’herbe, le maïs, etc.Il n’y a pas d’additions chimiques bizarres qui pourraient avoir des effets inattendus sur le corps humain. Donc, on pourrait se rassurer d’avoir de la viande relativement saine. La plupart des moutons que l’on trouve dans nos marchés grandissent dans des conditions naturelles, avec un pâturage naturel, de façon à ne pas nous créer des maladies additionnelles. Ce n’est pas comme les autres qui élèvent leurs animaux en tabulation, qui les enferment, les dopent nous ne savons par quel moyen. Nous croyons que c’est un avantage pour nous aujourd’hui, d’avoir davantage des produits bio qui pourraient nous permettre d’exporter vers ces pays auxquels vous avez fait allusion. Les tendances peuvent bien s’inverser si nous croyons en notre savoir-faire et en nos propres capacités.
Dans un premier temps, il nous faut déjà consommer ce que nous avons.
Ce sont des aliments bio et cela nous honore, tout au moins.
Il y a en vérité peu d’arguments pour discréditer la viande du Tchad, du nord du Cameroun, ou de l’est de la RCA.
Alors, dans ce que vous dites, je vois la dimension pédagogique qui doit se faire de façon globale. Qu’est-ce que vous vous engagez à dire aux chefs d’entreprises? Que c’est désormais possible, le Comité d’origine a validé; nous vous donnons des gages que vos produits peuvent être distribués dans la sous-région. Est-ce que vous avez fait une démarche particulière envers cette cible-là?
Nous pouvons vous dire que nous avons fait un travail de sensibilisation pendant le dernier semestre de l’année 2019: cette première mission a consisté à sensibiliser nos États sur la nécessité de mettre en place les comités nationaux de l’origine et d’en assurer leur plein fonctionnement. Nous y sommes parvenus. Il reste à consolider cette dynamique dans la durée. Aujourd’hui les six comités sont en place et bénéficient d’un appui constant de la commission, comme il en sera toujours pour les entreprises désireuses de préparer les dossiers d’agrément pour leurs produits, à présenter au niveau du Comité de l’origine.L’étape suivante va consister:
– à rassurer les premiers qui vont faire valider leurs produits, que nous ferons en sorte que la circulation de leurs produits soit effective;
– à demander à nos entreprises d’aller effectivement à la conquête du marché communautaire, afin de s’offrir des perspectives de croissance et de développement;
– à venir en masse faire labéliser leurs produits, au niveau du comité national d’abord, et au niveau du comité régional.
Pour mémoire, nous avons encore deux assises du Comité régional pour cette année 2020. Nous espérons que ces assises vont avoir un nombre d’entreprises et de produits beaucoup plus important que les 25 entreprises qui ont présenté les 304 produits examinés au cours de cette session.Les statistiques de la Banque mondiale démontrent que l’Afrique centrale est la zone la moins intégrée, avec moins de 4% de taux d’échanges intrarégionaux, pendant que d’autres régions telles que la SADEC caracolent à un taux d’échanges à deux chiffres. Qu’est-ce que cela vous fait, lorsque vous êtes dans ces pays-là et que vous voyez que l’on peut partir de l’Afrique du Sud à Nairobi, sans trop de tracasseries?
Je crois, une fois de plus, comme vous l’avez dit, qu’il y a un problème de pédagogie, à devoir communiquer et faire comprendre à nos concitoyens que la CEMAC que nous sommes est une zone riche, mais malheureusement sous-exploitée, sous valorisée. Le taux de transformation de nos produits est l’un des plus bas au monde. Nous invitons donc tous ceux qui viennent prélever nos matières premières à devoir les transformer désormais dans notre territoire, afin de créer des emplois et garantir un espace d’affaires viables.Aucun homme d’affaires au monde n’est venu parce qu’on lui a fait une simple invitation à venir investir. Nous savons très bien qu’investir dans un pays ou dans une région nécessite une autre procédure que l’appel que vous lancez…
Notre appel ne s’adresse pas qu’aux investisseurs extérieurs. Parce que nous sommes convaincus que le développement de la sous-région est d’abord une affaire d’hommes et de femmes de la sous-région, et ceux qui veulent le faire avec nous y contribuent, mais nous ne nous faisons pas d’illusions.C’est aussi pour vous dire qu’en vérité, nous croyons beaucoup en notre propre potentiel, mais cela suppose un changement de paradigme: si jusqu’à hier, nous étions habitués à faire exporter nos matières premières, demain, nous devrons faire l’effort de les transformer davantage sur place. Car en le faisant, nous allons créer davantage d’emplois. Pour ceux qui pensent que nous devons indéfiniment rester dans l’approche des économies de traite, ils constateront à leur dépens qu’au fil des mois et des années, l’espace communautaire leur deviendra de plus en plus réduit. Car, chaque économie, de par ce monde en mutation, est en train de se construire et nous ne croyons pas être les seuls laissés pour compte.
Vous nous dites une chose intéressante: lorsque vous circulez de l’Afrique du Sud jusqu’à Monbassa, c’est une très bonne chose, mais nous n’avons pas oublié le fait que nous avons un défi aussi important à relever: celui des infrastructures. Nous y sommes déjà et la Commission de la CEMAC s’y est attelée. En effet, y a eu une tournée pour aller rencontrer les principaux bailleurs de fonds sur un certain nombre de projets intégrateurs à réaliser.
Mais pour notre part, en ce qui concerne le marché, il s’agit d’abord de donner l’espace et les conditions optimales aux entreprises qui opèrent dans la sous-région. C’est en cela que même d’autres entreprises qui sont en dehors de la zone CEMAC seront intéressées à venir y contribuer.
Pour preuve, vous voyez, nous avons eu 304 produits à agréer au cours de cette session, et nous sommes sûrs que quand toutes les entreprises seront sensibilisées, elles y trouveront intérêt. Nous ne voyons plus d’entreprises qui veulent vivre dans une position fermée. Toute entreprise est toujours portée à avoir à conquérir davantage de parts de marché pour réaliser un chiffre d’affaires toujours plus élevé.
Pour cette session, nous venons de reprendre l’élan, le bon élan. Il nous faudra davantage d’entreprises et beaucoup de produits qui vont circuler dans notre sous-région; ce qui va nous occasionner moins de déficits du côté de nos balances de paiements.
Donc le Comité de l’origine est l’un des instruments communautaires qui vont contribuer à résorber une partie des déficits de nos balances de paiements. Comme on pourrait le dire de manière beaucoup plus simple, nous ne pouvons pas continuer à être ces États qui vendent peu, mais qui achètent beaucoup et qui continuent, indéfiniment à trainer des déficits de balance de paiements: les différents acteurs qui sont sur le terrain doivent le comprendre. Il en est de même pour les consommateurs, qui doivent se rassurer que les produits CEMAC, sont des produits pour la plupart bio, et non des produits avec des manipulations génétiques ou chimiques de tout genre et qui peuvent détruire davantage notre santé.
C’est dans cette perspective que nous sommes, et nous souhaitons avoir un marché qui soit bien fourni en produits de la sous-région. Ce ne serait qu’une bonne chose, puisqu’il va nous permettre d’économiser des devises qui serviront à payer les biens d’équipements nécessaires à notre développement.
Alors, pour ce qu’il est de la Zone de libre-échange continentale, on peut dire que c’est des fondations pour l’Afrique centrale que vous posez, afin qu’on ne rate pas le train de la Zone de libre-échange continentale?
On peut dire que nous sommes en train de mettre en œuvre le dispositif de 2008, dont les premiers résultats ont été quelque peu mitigés. Nous devons plutôt redoubler d’efforts pour être à la hauteur de ce que représentent nos économies. C’est donc juste un coup d’accélérateur à donner à ce dispositif communautaire, fort utile à notre sous-région.
La Zlecaf apporte une preuve supplémentaire et incontestable de l’urgence à devoir préparer les entreprises de la sous-région à la conquête du marché continental.Interview réalisée par
Thierry Ndong OwonaCémac : La nouvelle année du Gouvernement de la Commission
Daniel Ona Ondo, président de la Commission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, présente ce lundi 17 février 2020, devant le Parlement de la Cémac, le projet de Budget 2020 de la Communauté, arrêté à 88.230.068.283 FCFA par le Conseil de ministres de l’Union économique d’Afrique centrale (UEAC) du 20 novembre 2019. A l’occasion, il présentera aussi le Rapport sur le fonctionnement et l’évolution de la Communauté en 2019.
Cette sortie solennelle devant les députés du Parlement de la Cémac marque symboliquement le lancement de la nouvelle année de travail de la Commission de la Cémac. Une année 2020 faite de chantiers précisés jeudi 13 février dernier par la douzième session du Collège des commissaires. Parmi les chantiers les plus emblématiques, il y a entre autres: le défi d’un meilleur recouvrement de la Taxe communautaire d’intégration (Tci); le financement et la mise en œuvre des projets intégrateurs; le retour progressif de la Commission à son siège de Bangui; etc.
Votre journal marque un temps d’arrêt sur les points cruciaux de cette feuille de route du Gouvernement de la Commission, à la lumière des décisions de la douzième session du Collège des commissaires.
Dossier réalisé par
Thierry Ndong OwonaDaniel Ona Ondo, président de la Commission de la Cemac 1-Alerte rouge sur la Taxe communautaire d’intégration
L’Agent comptable central de la Commission de la Cémac a présenté le 13 février 2020 au Collège des commissaires son rapport sur le recouvrement de la Taxe communautaire d’intégration en 2019. A s’en tenir au communiqué final de la réunion de Malabo, «le Gouvernement de la Commission a pris acte du rapport de l’Agent comptable central sur la situation de recouvrement de la TCI à fin décembre 2019, caractérisée notamment par un faible recouvrement de la TCI courante (20%) et près de 33 milliards de FCFA de TCI non reversée correspondant à près de 70% du budget».A en croire l’Agence comptable de la Cémac, «L’année 2020 démarre sur la tendance observée en 2019 et appelle à un resserrement des priorités des activités financées par la TCI». Une conjoncture totalement en rupture avec l’embellie de 2018. Cette année-là, le recouvrement de la TCI avait atteint une performance jamais égalée jusqu’ici, soit 46% de reversement par les Etats – membres de cette taxe dans les caisses de la Commission. La TCI représente généralement la moitié du budget de la Commission. Les ressources liées à la TCI contribuent pour l’essentiel aux charges de fonctionnement de la Commission. Son faible recouvrement induit une réduction substantielle du train de vie de la Commission et de ses institutions spécialisées. Une mauvaise nouvelle pour le processus d’intégration en zone Cémac. A défaut de mettre en place un plan B, avec des financements alternatifs à trouver et à mobiliser.
2-L’obsession de la mise en œuvre des projets intégrateurs
Ils sont douze projets intégrateurs à mobiliser l’ensemble du Gouvernement de la Commission. Au cours du dernier Collège des commissaires, un rappel de Daniel Ona Ondo a été fait «sur les priorités des activités bénéficiant des financements au titre du FODEC et de l’Aide Budgétaire Globale Française». Selon le communiqué qui a sanctionné cette réunion du Gouvernement de la Commission de la Cémac, «les décaissements au profit de certaines interventions de l’ABG viennent d’être engagés. Concernant le FODEC, il a été demandé aux départements en relation avec la BDEAC et le cabinet du président, davantage d’implication dans les démarches visant la concrétisation des projets intégrateurs retenus».Bon à savoir, l’Aide budgétaire globale (Abg) est un financement français qui permet entre autres à la Commission de la Cémac de mettre en place un Observatoire régional du climat des affaires. Le mois d’avril prochain est l’échéance fixée pour le démarrage effectif de cet observatoire. Celui-ci doit contribuer efficacement l’amélioration substantielle du climat des affaires en zone Cémac. Daniel Ona Ondo en fait l’une des priorités de son quinquennat. Profession de foi du président de la Commission: «Convaincu que le développement économique, la croissance et la création massive d’emplois passent par l’expansion d’un secteur privé fort, dynamique, compétitif et dominant dans le tissu productif de nos économies, la Commission de la Cémac s’emploie à aider les Etats à adopter des instruments communautaires de bonne gouvernance, de transparence et de facilitation des affaires intra et inter- Etats»..
3-Le retour progressif à Bangui dès avril 2020
C’est confirmé: dès avril prochain, les premiers services de la Commission de la Cémac prennent leurs quartiers dans la capitale Centrafricaine. Détails dans cet extrait du communiqué final de la douzième session du Collège des commissaires: «Il découle des échanges approfondis sur ce point que les conditions ayant motivé le départ de Bangui il y a deux ans ont été dans l’ensemble améliorées, en dépit de quelques zones d’ombre notamment, sur l’offre des logements aux fonctionnaires et les capacités financières disponibles pour assurer dans de bonnes conditions le retour et l’installation des personnels.S’agissant de l’Ecole Inter-Etats des Douanes, déplacée à DJIBLOHO, le Collège a préconisé l’accomplissement de préalables nécessaires dans le domaine de la sécurisation du site et la réhabilitation des infrastructures, avant d’envisager son retour à Bangui». Afin de consolider entièrement ce retour vers le siège traditionnel de la Commission, le Collège des commissaires entérine dans la foulée, « tout en sollicitant l’appui multiforme du Gouvernement centrafricain, les mesures suivantes:• L’attribution des 4 villas offertes par l’Etat centrafricain aux 4 Commissaires ;• La tenue de la 13ème session du Collège à Bangui ;• Le retour des services par vagues dès le mois d’avril 2020 en commençant par le Département des Politiques Economique, Monétaire et Financière et une partie des personnels du Protocole et de la Direction de l’Administration et des Finances ;• La formalisation du retour par la prise d’un acte du Président de la Conférence des Chefs d’Etat».
Le dossier sensible du retour de la Commission à Bangui, qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive, est finalement sur la bonne voie de sortie de crise. Un bon point à l’actif du Gouvernement de la Commission.
Communiqué final
La 12è Session du Collège des Commissaires / Malabo
En date du jeudi, 13 février 2020, s’est tenue dans la salle de réunion du 2ème étage du Parlement Communautaire abritant le siège provisoire de la Commission de la CEMAC, la 12ème réunion du Collège des Commissaires. Y ont pris part :
• Pr. Daniel ONA ONDO, Président de la Commission ;
• Clément BELIBANGA, Commissaire du DPEMF
• Michel NYAMA, Commissaire du DMC
• José Antonio EDJANG NTUTUMU AVOMO, Commissaire du DEDRS
Mme Fatima HARAM ACYL, Vice- Présidente et Mr Shey JONES, Commissaire en charge du Département des Infrastructures et du Développement Durable (DIDD) étaient représentés respectivement par leurs Directeur/Chef de Cabinet.
Dans sa communication liminaire, le Président de la Commission a renouvelé ses vœux de santé et de prospérité aux Commissaires, tout en les exhortant à la bonne conduite des dossiers d’intégration, notamment en mettant en relief les projets intégrateurs visibles pour les populations. Le Président de la Commission a, à cet effet, inviter les Commissaires à consolider les initiatives prometteuses entreprises en 2019, en particulier la recherche et mobilisation des financements de 12 projets intégrateurs prioritaires, le démarrage et la poursuite de la mise en œuvre de projets d’infrastructures.
Passant à l’examen des points inscrits à l’ordre du jour et après adoption du compte rendu de la 11ème session du Collège, le Gouvernement de la Commission a pris acte du rapport de l’Agent Comptable Central sur la situation de recouvrement de la TCI à fin décembre 2019, caractérisée notamment par un faible recouvrement de la TCI courante (20%) et près de 33 milliards de FCFA de TCI non reversée correspondant à près de 70% du budget. L’année 2020 démarre sur la tendance observée en 2019 et appelle à un resserrement des priorités des activités financées par la TCI.
S’agissant de l’état de diffusion des textes issus de la 34ème Session du Conseil des Ministres de l’UEAC du 20 novembre 2020 à Yaoundé, il ressort que 34 textes sont en attente de signature par le Président dudit Conseil.
L’adoption du projet de texte portant organisation et fonctionnement des Représentation-Pays de la CEMAC a été renvoyée à la prochaine session, dans l’attente de son examen en interne et la communication au Cabinet, pour compilation, les amendements qui en découlent. Il a été demandé aux Commissaires de se prononcer notamment sur la pertinence de l’occupation des postes de représentants-pays par les nationaux et, par ailleurs proposé la durée adéquate de présence au même poste.
La revue de la matrice des recommandations du COPIL du PREF-CEMAC a mis en exergue les avancées réalisées par la Commission dans la mise en œuvre de celles relevant de sa compétence. Toutefois, le Président a demandé aux Commissaires de renforcer l’appropriation de cette matrice pour des performances plus accrues qu’ils présenteront et défendront à l’occasion du prochain COPIL du PREF CEMAC.
Poursuivant l’examen des points inscrits à son ordre du jour, le Collège a suivi le rappel fait sur les priorités des activités bénéficiant des financements au titre du FODEC et de l’Aide Budgétaire Globale Française. Les décaissements au profit de certaines interventions de l’ABG viennent d’être engagés. Concernant le FODEC, il a été demandé aux départements en relation avec la BDEAC et le Cabinet du Président, davantage d’implication dans les démarches visant la concrétisation des projets intégrateurs retenus.
Au sujet du processus de retour de la Commission à son siège à Bangui, le Collège, après avoir pris connaissance des comptes-rendus du Commissaire BELIBANGA et du Directeur de Cabinet de Mme la Vice- Présidente, s’est longuement penché sur la question. Il découle des échanges approfondis sur ce point que les conditions ayant motivé le départ de Bangui il y a deux ans ont été dans l’ensemble améliorées, en dépit de quelques zones d’ombre notamment, sur l’offre des logements aux fonctionnaires et les capacités financières disponibles pour assurer dans de bonnes conditions le retour et l’installation des personnels. S’agissant de l’Ecole Inter- Etats des Douanes, déplacée à DJIBLOHO, le Collège a préconisé l’accomplissement de préalables nécessaires dans le domaine de la sécurisation du site et la réhabilitation des infrastructures, avant d’envisager son retour à Bangui.
Aussi, tout en sollicitant l’appui multiforme du Gouvernement centrafricain, les mesures suivantes ont été entérinées par le Collège :
• L’attribution des 4 villas offertes par l’Etat centrafricain aux 4 Commissaires ;
• La tenue de la 13ème session du Collège à Bangui ;
• Le retour des services par vagues dès le mois d’avril 2020 en commençant par le Département des Politiques Economique, Monétaire et Financière et une partie des personnels du Protocole et de la Direction de l’Administration et des Finances ;
• La formalisation du retour par la prise d’un acte du Président de la Conférence des Chefs d’Etat.
La Collège a adressé sa vive gratitude aux Autorités de la République centrafricaine, en particulier à Son Excellence le Professeur Faustin-Archange TOUADERA, Président de la République, Chef de l’Etat, pour toutes les diligences et facilités diverses consenties pour le retour de la Commission à son Siège Historique à Bangui.
Le Collège a, par ailleurs, réitéré ses remerciements sincères aux Autorités de Guinée Equatoriale au premier rang desquelles, Son Excellence Monsieur Teodoro OBIANG NGUEMA MBASOGO, Président de la République, Chef de l’Etat, pour leur attachement profond à la Communauté et qui n’ont eu de cesse, d’offrir les commodités idoines au bon fonctionnement des institutions communautaires. Par conséquent, il est du devoir du Gouvernement de la Commission de veiller à la transparence du processus vis-à-vis de la Guinée Equatoriale, à la communication aux Autorités du chronogramme de départ et la négociation avec elle de certaines facilités, notamment d’ordre logistique et administratif dans le cadre du processus de retour.
Au titre des obligations statutaires immédiates, le Président présentera devant le Parlement le 17 février 2020 le projet de Budget 2020 de la Communauté, arrêté par le Conseil de Ministres de l’UEAC du 20 novembre 2019 et le Rapport sur le fonctionnement et l’évolution de la Communauté en 2019. A cet égard, le Collège s’est assuré de la transmission au Parlement de la documentation requise et a adopté le projet de rapport sur l’état de la Communauté, sous réserve d’amendements.
Poursuivant ses travaux, le Collège a pris acte des actions prioritaires pour 2020 au titre de la coopération avec la FERDI et exhorté les départements concernés à leur mise en œuvre hardie tout en tenant compte des faiblesses constatées dans la mise en œuvre des actions spécifiques pour 2019.
Le Collège a, par ailleurs, pris acte des comptes rendus de missions réalisées par les membres du Gouvernement et adopté, sous réserve d’ajustement sur le plan du budget et des modalités d’organisation, du déroulement de la Journée CEMAC, de la 8ème Session ordinaire de la CUROR-AC et de la Réunion des Ministres sectoriels en charge de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche de la zone CEMAC.
En outre, le Collège a entériné la programmation des ateliers/missions suivantes :
• Réunion ministérielle régionale sur la suppression des frais d’interconnexion téléphonique à Douala du 26 au 28 février 2020 ;
• Cérémonie de 1ère cotation à la nouvelle Bourse à Douala le 21 février 2020 ;
• Atelier sur le code minier communautaire ;
• Atelier de restitution des études sur la rationalisation des IS de formation communautaires ;
• Collège Surveillance Multilatérale dans la perspective de la réunion des Ministres des Finances de la Zone Franc à Libreville le 03 avril 2020 et de la réunion du Printemps du FMI et du GBM à Washington le 13 avril 2020.
Enfin, le Collège s’est réjoui des actions prises par les Etats pour faire face à l’épidémie de Coronavirus et souhaiter la prise de mesures concertées au niveau régional. A cet égard, la Commission a apporté son appui financier à l’initiative prise par l’OCEAC d’organiser à Malabo (Guinée Equatoriale), une réunion d’experts de la sous-région le 17 février prochain, devant statuer sur les actions concertées urgentes à prendre en vue de la préparation d’une riposte sous-régionale contre l’épidémie du Coronavirus.
Commencé à 10H20, le Collège qui s’est tenu dans une atmosphère de convivialité, de courtoisie mutuelle et dans un esprit constructif, a pris fin à 15H30.
Journée de deuil national au Cameroun : Conjurer l’insouciance et l’indifférence nationales
Le 21 juin dernier était jour de deuil national au Cameroun. C’était en hommage à la quinzaine de soldats tombés sous les balles ennemies de Boko Haram, une semaine auparavant.
Deuil national au Cameroun L’observation du deuil national -décrété par le président de la République du Cameroun et non moins chef des Armées- donne à constater plusieurs curiosités. La présidence de la République, clé de voûte des institutions, n’a pas mis en berne le drapeau du Cameroun placé sur le toit du palais de l’Unité au quartier Etoudi à Yaoundé. Simple oubli ou indifférence à l’hommage aux soldats tombés au champ d’honneur à Darak ?
Il faut constater que les populations, dans la grande majorité, ont fait comme la présidence de la République. Dans les grandes métropoles comme dans les localités secondaires du pays, la vie était à son train quotidien habituel ce vendredi 21 juin 2019. Comme si de rien était, les Camerounais n’ont pas changé leurs habitudes de début de week-end. Dans l’« insouciance nationale », le vendredi camerounais est resté égal à lui-même, précisément en matière de lucre et de fiesta. Toutes les industries du plaisir ont ouvert leurs portes et ont fonctionné à plein régime. Chaque famille endeuillée est allée dans son village porter en terre son parent tué à Darak, parfois sans tambour ni trompette, et généralement dans l’anonymat.
Pourtant, la journée de deuil national est bien comprise et appliquée par l’Armée camerounaise, le ministère de la Défense et certaines administrations sensibles dans le dispositif du commandement. En effet, vendredi dernier, il y a bel et bien eu, dans les garnisons et casernes militaires, des cérémonies sobres d’hommage aux morts. Des offices religieux accompagnaient lesdites cérémonies. Mais force est de remarquer que ces cérémonies ô combien louables sont restées sans impact ou effet d’entrainement sur la population camerounaise. Déficit de patriotisme face aux causes nationales ? Indifférence à la mort sur le champ d’honneur ? Inconscience face aux dangers qui guettent le pays ?
Devoir de mémoire, devoir citoyen
Les réponses à ces questionnements ne coulent pas de source. Une évidence : il y a beaucoup de travail à faire, notamment pour exacerber le sentiment national dans l’observance du deuil national. Primo : les cérémonies ne doivent pas se limiter au seul cadre des garnisons militaires. Toutes les administrations publiques (aux niveaux central et local) et les collectivités territoriales décentralisées doivent également s’impliquer, en se mobilisant de façon spécifique et populaire. Secundo : la création d’un cimetière spécialement dédié aux soldats tombés au champ d’honneur. Ce cimetière serait l’un des symboles de la reconnaissance de la patrie envers ses soldats tombés au front. La création de ce « panthéon » devrait accueillir chaque année une cérémonie d’hommages aux valeureux fils tombés en défendant la patrie. Cette cérémonie deviendrait alors un grand rendez-vous dans l’agenda officiel du Gouvernement et partant du pays.Une autre piste à suivre est l’instauration du service militaire obligatoire pour tous les étudiants des grandes écoles des universités camerounaises. Jusqu’ici, seuls les étudiants de l’École nationale d’administration et de magistrature (Enam) en bénéficient. D’autres moules de formations devraient suivre, à savoir les écoles normales supérieures, etc. En addition au service civique offert à certains jeunes camerounais, le service militaire imposé à la future élite camerounaise va disséminer et démocratiser davantage la bonne graine du patriotisme et de l’appartenance à un idéal commun. Dans la foulée, il faut aussi renforcer les cours d’éducation civique dans les programmes scolaires de la jeunesse camerounaise. Ce renforcement porterait sur le volume horaire des cours et le coefficient affecté à cette matière.
Telles sont des mesures et bien d’autres qui permettront, à coup sûr, de conjurer, à moyen et long termes, la mauvaise attitude générale observée vendredi dernier lors du deuil national en mémoire à nos vaillants soldats tombés sous les fourches caudines de Boko Haram, organisation multipolaire à la fois terroriste et mafieuse qui contrôle les routes de la criminalité dans le bassin du Lac Tchad.
Thierry Ndong Owona
Cameroun : un président, un peuple, deux pays !
Le contre-pied parfait. Voilà comment les footballeurs qualifieraient Paul Biya au terme de son réaménagement gouvernemental du 4 janvier 2019.
Le président de la République du Cameroun déjoue tous les pronostics avec son Gouvernement d’inauguration du septennat des grandes opportunités. La rupture attendue dans les chaumières n’est pas au rendez-vous. Le président Biya opte pour la continuité. Son discours du 31 décembre dernier sur l’état de la nation en traçait déjà les sillons. «Face à l’adversité, nous avons élaboré une stratégie de développement articulée en trois temps : les grandes ambitions, les grandes réalisations et les grandes opportunités. Cette dernière étape, nous l’espérons, devrait nous conduire au seuil de l’émergence», dixit Paul Biya.
La rupture est dans la continuité
Dans la psychologie du chef de l’Etat du Cameroun, les acquis du Gouvernement sortant sont à consolider. La structure gouvernementale reste la même, avec de petits réajustements dans la redistribution des cartes. Quelques sacrifiés (Philémon Yang, André Mama Fouda, Zacharie Perevet, etc.) quittent le navire. De nouveaux élus y embarquent, sans la conviction de pouvoir faire bouger le mammouth. Simple jeu de chaises musicales, qui laisse un arrière-goût amer à l’opinion publique.
L’élection présidentielle d’octobre dernier aura donc été une simple formalité, en vue de régulariser sur le plan légal la situation de M. Paul Biya. Car les aspirations légitimes à la rupture exprimées par la majorité des Camerounais ne trouvent pas grâce auprès de l’actuel patron du palais présidentiel d’Etoudi.Vox populi, vox Dei
Paul Biya ne vibre pas au même diapason avec son peuple dans le flop organisationnel de la Can 2019 de football. Une certaine opinion nationale n’a eu de cesse de dénoncer les délits d’initié, les surfacturations de marchés et parfois l’incapacité des entreprises retenues à travailler dans les standards requis et les délais indiqués. Le clou de ces récriminations est pointé avec le retrait de l’organisation au pays de la Can en décembre dernier. Le rejet des responsabilités et les féroces batailles rangées entre les membres du même Gouvernement ont désabusé les populations camerounaises et les observateurs avertis. Paul Biya excelle dans le poncepilatisme. «Comme vous le savez, notre pays était engagé à accueillir le grand – rendez du football africain en 2019.La confédération africaine de football, au regard de certaines données, a pensé qu’il fallait procéder à un glissement de date. Nous en avons pris acte». Aucun mot sur les présumés scandales allégués. Quid d’une commission d’enquête parlementaire sur cette forfaiture ? Quid de l’audit global des marchés de la Can, comme proposé par quelque ministre au plus fort de la crise des dénonciations ? Pour Paul Biya, tout va bien dans le meilleur des mondes: «Comme je l’ai déjà dit, tous les investissements liés à l’organisation de la Can seront réalisés. Je saisis cette occasion pour vous demander de rester mobilisés afin qu’à terme, la modernisation de nos infrastructures routières, ferroviaires, hospitalières et sportives liées à ce grand événement, se concrétisent : notre pays le mérite bien».
Il en est de la Can comme des autres défis qui interpellent le pays en cette nouvelle année: la crise anglophone; l’insécurité quasi chronique dans la partie septentrionale du pays du fait de Boko Haram ou des coupeurs de route; la faillite du système éducatif du pays; la corruption rampante… A l’évidence, le fossé est grandissant entre l’établishment et le peuple, dans la façon de diagnostiquer ou percevoir les maux qui minent le pays. Aussi, les dernières phrases du discours de Paul Biya le 31 décembre 2018, sonnent faux et comme un vœu pieu : «En ces temps difficiles, croyez-moi, je consacre toute ma force et toute mon expérience au service de la paix, de l’unité et du progrès de notre cher et beau pays. Je compte sur chacun de vous pour m’y aider».
Thierry Ndong Owona
Pour l’homme du 6 novembre, l’Histoire ou la poubelle
M. Paul Biya prête serment ce 6 novembre 2018. Pour un nouveau bail de sept ans à la tête de l’Etat. Le président réélu inaugure son septième mandat dans un contexte de morosité, en contraste avec sa prise de pouvoir le 6 novembre 1982.
En effet, l’homme du 6 novembre est désormais loin de la quasi unanimité et de l’enthousiasme autour de sa personne, après le discours de démission du président Amadou Ahidjo. Au soir du 4 novembre 1982, Paul Biya hérite, dans une ferveur populaire inédite, d’un pays bien portant. Presque tous les indicateurs sont au vert. Une économie des plus florissantes. Un pays pacifié des démons de la guerre d’indépendance. L’autosuffisance alimentaire palpable. L’éducation de qualité pour tous. Évidemment, le Cameroun de 1982 n’est pas un paradis. «La rigueur et la moralisation», dont se prévaut le chantre du Renouveau national, suggère à souhait la crise de gouvernance qui travaille le pays en début des années 80.
Aujourd’hui, après 36 années de «Renouveau», la plupart des indicateurs du pays sont longtemps passés au rouge. La crise économique secoue le pays depuis deux décennies, malgré les remèdes (inopérants) des institutions de Bretton Woods. Le pays est exsangue et lessivé par des plans d’ajustements structurels ayant détruit toute la politique sociale du Gouvernement. Le chômage des jeunes atteint des pics effroyables. L’éducation et l’enseignement sont sinistrés. Il faut désormais payer le prix fort pour envoyer les enfants à la bonne école. Le panier de la ménagère n’arrête pas de maigrir, conséquence de l’érosion continue du pouvoir d’achat des populations. La classe moyenne de la population a totalement disparu. La pauvreté a pris ses quartiers partout. Selon des statistiques fiables, environ 32% de la population vit sous le seuil de la pauvreté.
Sur le plan politique, le multipartisme imposé par les vents d’Est dans les années 1990 n’a pas entraîné l’alternance démocratique souhaitée. Il y a comme un verrouillage du jeu électoral par Paul Biya, qui a réussi à concentrer l’essentiel des pouvoirs en ses mains. Ce qui met tout le monde politique à ses pieds. L’opposition, les syndicats et la société civile sont atones. La moindre contestation dans la rue est réprimée par les forces de sécurité, à défaut d’être interdite par une administration publique aux ordres. Grosso modo, le Cameroun de 2018 est comme une dictature douce parée des atours démocratiques.
Pas d’état de grâce
Autant l’accession de Paul Biya à la magistrature suprême en 1982 a suscité espoir et engouement ; autant l’inauguration de son nouveau mandat ce 6 novembre 2018 suscite inquiétude et scepticisme. Et pour cause, Paul Biya entame son nouveau septennat avec des handicaps préjudiciables à la bonne conduite de ses promesses de campagnes. Le malaise né d’une réélection aux résultats contestés par ses deux principaux challengers (Maurice Kamto et Cabral Libii) a laissé une population divisée. Mobiliser et remettre au travail tout le monde n’est pas gagné d’avance. La fracture sociale sans cesse grandissante, dans un environnement économique incertain, est également un facteur défavorable à l’élu aux 85 printemps. La confiance des populations au processus démocratique reste à (re) conquérir.En attendant d’y parvenir, les investisseurs resteront sur leurs gardes. Ils le seront d’autant plus que le président réélu doit adresser efficacement les problématiques sécuritaires qui secouent de toutes parts le pays: la crise dite anglophone, le débordement de la guerre civile centrafricaine sur la frontière Est du Cameroun ; les coupeurs de route dans la région de l’Adamaoua, la secte terroriste Boko Haram dans l’extrême – nord du pays… À coup sûr, des éclaircies sur le ciel ombrageux du pays sont attendues du président de la République. De quelle baguette magique va-t-il se servir pour réussir ?
À n’en point douter, Paul Biya est à un virage décisif de sa longue carrière de chef de l’État. En négociant bien ce virage, il rentrerait dans l’histoire comme «celui qui a apporté la démocratie et la prospérité au Cameroun». À défaut, il rentrera dans les poubelles de l’histoire du pays. À l’évidence, Paul Biya commence un septennat de tous les dangers. Certainement le mandat le plus compliqué de son «règne». «To be or not to be, that’s the question», lui murmure Shakespeare.Thierry Ndong Owona
Election présidentielle: Le coup de force de Paul Biya
L’élection présidentielle de cette année au Cameroun aura lieu le 07 octobre prochain. Et Paul Biya est candidat à sa succession, pour un autre bail de sept années à la tête du pays. Voilà la quintessence de l’actualité politique récente au Cameroun.
President of Cameroon Paul Biya and Chinese President Xi Jinping (not pictured) attend a signing ceremony at the Great Hall of the People in Beijing on March 22, 2018. / AFP PHOTO / POOL / Lintao Zhang Le président sortant, âgé de 85 ans, cumule déjà 35 années de magistrature suprême. Un record inédit, qui n’apaise pas pour autant son appétit insatiable du pouvoir. L’octogénaire Biya est sans état d’âme dans sa quête de conservation du fauteuil présidentiel. Sourd aux conseils avisés des pays amis (en l’occurrence les Etats-Unis d’Amérique) à passer la main, Paul Biya dans un tweet vendredi dernier répond favorablement aux «appels» à briguer une fois de plus la magistrature suprême.
Une déclaration de candidature urbi et orbi, amplifiée fort opportunément par la visite officielle à Yaoundé du patron de la commission de l’Union africaine et le matraquage médiatique de la CRTV. Le média audiovisuel à capitaux publics, prenant fait et cause en faveur du président – candidat, au mépris des normes recommandées en période pré-électorale ou électorale, a naturellement mis sous le boisseau les violations de l’article 86 du code électoral par Paul Biya.
En effet, selon Jean Marc Bikoko de Dynamique Citoyenne (coalition des acteurs et des organisations de la société civile camerounaise), le président de la République n’a pas respecté les délais de la loi électorale sur la convocation du corps électoral pour les municipales et les législatives. «Il avait jusqu’au 21 juin 2018 pour les législatives et jusqu’au 27 juin 2018 pour les municipales. Il ne l’a pas fait, pour proroger les mandats plusieurs jours plus tard», dénonce Dynamique Citoyenne.
Jean Marc Bikoko poursuit la dénonciation: «Le président de la République justifie le report des législatives et des municipales par le chevauchement des élections. Or, seul le motif de «crise grave» est reconnu par la loi pour justifier l’ajournement des élections». Le réseau des organisations de la société civile suspecte également la priorité accordée à l’élection présidentielle par l’establishment. «Paul Biya veut être le seul à avoir la légitimité du suffrage.
Il préfère que les autres, notamment les magistrats municipaux, tiennent leur légitimité de lui». Calcul politique du prince qui remet au goût du jour l’éternelle revendication de publication (au moins un an à l’avance) du calendrier électoral du pays. Cette revendication et bien d’autres sont contenues dans le code électoral alternatif proposé depuis janvier 2017 aux autorités camerounaises par la société civile.
Selon des sources crédibles, d’autres propositions de réforme du code électoral, respectivement formulées par Elections Cameroon (Elecam) et le ministère de l’administration territoriale, dorment depuis plusieurs années dans des tiroirs et placards de la présidence de la République. Paul Biya, attendu pour adresser la problématique de la réforme du système électoral camerounais, n’a pas levé le petit doigt.
Il opte d’organiser l’élection présidentielle d’octobre prochain avec le système électoral ô combien décrié par toutes les parties prenantes, et qualifié par Dynamique Citoyenne de «machine de fabrication des victoires du parti au pouvoir». Vous avez dit verrouillage électoral !
Universalité du suffrage
Comment le scrutin du 07 octobre prochain va-t-il se dérouler dans les régions anglophones du pays, en proie à une crise sécuritaire sans précédent ? La question est sur toutes les bouches au vu du durcissement des revendications séparatistes et des affrontements armés grandissants sur le terrain. «L’universalité du suffrage ne sera pas respectée sur l’ensemble du territoire, précisément dans le Sud-ouest et le Nord-ouest du pays», prédit d’emblée Dynamique Citoyenne.
L’élu du 07 octobre prochain sera-t-il auréolé de toute la légalité et de toute la légitimité pour diriger le pays ? A l’observation, les standards internationaux pour «une élection libre, crédible et transparente» seront mis à mal le 07 octobre prochain au Cameroun. Paul Biya le sait certainement. Mais, il choisit le passage en force. Comme il l’a fait dans son parti politique, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
Où l’investiture classique du champion à l’élection présidentielle n’a pas eu lieu. Le président national du RDPC a royalement snobé sa machine électorale dans le processus de préparation et déclaration de sa candidature à la présidentielle d’octobre prochain. Paul Biya a opté pour le «cavalier seul», qui ne lésine sur aucun moyen pour conserver le strapontin présidentiel. Les méthodes d’un autre âge. Son âge.
Thierry Ndong Owona
3 mai 2018: Célébration dans la douleur à Intégration
A quelques jours de la journée internationale de la liberté de la presse, le siège du journal a été cabriolé et son outil de production emporté.
Le numéro 320 de l’hebdomadaire Intégration a été produit dans des conditions difficiles. Le montage du journal s’est fait à partir d’une machine non appropriée: un ordinateur initialement consacré à la comptabilité de l’entreprise a dû être recyclé pour l’adapter à la tâche.
Deux ordinateurs, spécialement dédiés à ce travail essentiel dans la production d’un journal, ont été emportés lors du cambriolage du siège d’Intégration. Il s’agit d’un ordinateur de marque Macintosh doté d’un écran de 20 pouces et d’une capacité de 500 Giga octets et d’un autre de marque Lenovo de caractéristiques similaires.
L’acquisition des appareils de même type nécessite un investissement de plusieurs millions de francs CFA. Le journal ne peut le consentir à l’heure actuelle, au regard des tensions de trésorerie que connaissent en ce moment les entreprises de presse au Cameroun. A titre d’illustration, près de la moitié du chiffre d’affaires réalisé par Intégration en 2017 est encore non recouvrée à ce jour.
Le journal doit pourtant payer comptant toutes ses charges de fonctionnement et de productions dans un contexte où les institutions bancaires n’accordent quasiment pas de crédits aux médias, jugeant leurs activités trop risquées.
La difficulté est telle que le directeur de publication de l’hebdomadaire, spécialisé sur les problématiques d’intégration régionale, a dû avouer l’évidence: «ce coup de vol sape les fragiles acquis infrastructurels du journal et perturbe considérablement le travail des différents services au sein de notre entreprise de presse».
Dans un communiqué publié à la suite de la découverte du forfait le 30 avril dernier, Thierry Ndong Owona «sollicite par conséquent l’indulgence de ses fidèles lecteurs et partenaires en cas de manquement constaté dans ses supports de diffusion».
Le coup est d’autant plus rude que plusieurs autres objets importants ont été emportés. Il s’agit d’une console technique acquis pour un projet de radio que nourrit l’entreprise, d’un modem MTN Win max complet qui fournissait le journal en connexion internet, d’un pack téléphonique et de la caisse de l’entreprise qui contenait notamment les frais de reportage de plusieurs éditions du journal.
Pour l’heure, le mystère reste entier sur les circonstances et les motivations des auteurs du cambriolage. «Manœuvres d’intimidation ou de musèlement ? Banal coup de vol ? En l’état actuel de l’enquête, l’on ne saurait se prononcer», informe Thierry Ndong Owona. Dans la foulée de la découverte du forfait, la direction du journal a en effet déposé à la police deux plaintes contre inconnu. Et une enquête est ouverte depuis le 02 mai 2018 par les éléments de la Division régionale de police judiciaire (DRPJ). Après une audition du DP et une descente au siège du journal le même jour, la police n’a plus donné de nouvelles.
Aboudi Ottou
Opération Epervier, Tribunal criminel spécial, ADC, CDE… J’accuse
Plusieurs radios urbaines de Yaoundé (sinon toutes) ont organisé la semaine dernière des débats interactifs sur deux sujets d’actualité.
Le premier sur le «remboursement d’environ deux milliards de francs CFA» par l’homme d’affaires belge Massard, épinglé par l’Opération Epervier dans le cadre des marchés publics sur la fourniture en eau potable à Camwater. Le second sur la «fermeture annoncée de l’aéroport de Douala par l’OACI». Beaucoup de salive -et surtout de venin- a coulé au cours de ces deux débats interactifs, qui ont occupé l’antenne des autres radios et télévisions à travers le pays.
Que n’a-t-on pas entendu ? Que n’a-t-on pas dit ? Des confusions effroyables. Des règlements de comptes préparés. Des manipulations de l’opinion entretenues, etc. Et au final, le peuple naïf des auditeurs instrumentalisé et tourné en bourrique par une désinformation aux antipodes du droit universel à l’information sans parti pris. Pour toutes ces dérives dont le Cameroun est désormais coutumier, J’Accuse.
1-J’accuse la Justice camerounaise M. Massard a –t-il remboursé l’argent volé à la Cameroon water utilities ? De quoi retourne cette affaire ? Y a –t-il eu un jugement préalable ?
Qui mieux que la Justice camerounaise, à travers le Tribunal criminel spécial (TCS), pour éclairer la lanterne de l’opinion publique. Sans trahir le secret de l’instruction, les affaires inscrites au rôle du TCS méritent une communication publique, pour la bonne gouverne de tous. La justice des pays en Occident communique systématiquement sur tous les dossiers sensibles à sa charge.
A chaque actualité importante impliquant le travail de la justice, les procureurs de la République en France donnent une conférence de presse. Pourquoi le Cameroun, si enclin à prendre exemple chez les occidentaux, ne le fait-il pas ? C’est le meilleur moyen d’assainir l’information autour des affaires liées à l’Opération Epervier. A défaut, cette opération va continuer à refléter l’image d’une stratégie d’épuration politique voulue par le prince, pour punir tous ceux qui ont lorgné le fauteuil présidentiel.
2-J’accuse la mafia politico – administrative A l’observation, le Cameroun est vicieusement travaillé par des guerres de réseaux positionnés pour contrôler la macro -structure politico- administrative.
En fonction des enjeux et de ses intérêts, chaque réseau tire les marrons du feu en injectant des informations (très souvent fausses), pour influencer les décisions du sommet de l’Etat. L’exemple le plus éloquent est certainement la campagne actuelle d’intox contre les dirigeants des Aéroports du Cameroun (ADC). En effet, depuis quelques semaines, des manipulateurs tapis dans l’ombre soufflent sur des braises d’un feu jamais vu à l’aéroport international de Douala.
Après un inattendu préavis de grève des compagnies aériennes jamais assumé, aujourd’hui l’on agite l’épouvantail d’une fermeture programmée de l’aéroport international de Douala par l’OACI. Non sans avoir suggéré des problèmes de gouvernance dans la réhabilitation de la chaussée aéronautique de cet aéroport. Bien entendu, rien de vrai à tout cela. Question à un sou: à qui profite le crime ? Une fois de plus, le peuple camerounais est le dindon d’une farce loin de prendre en compte ses intérêts.
3-J’accuse les médias camerounais La presse camerounaise respecte-t-elle le principe de présomption d’innocence dans son traitement de l’actualité judiciaire ?
L’on serait tenté de répondre par la négative. Tellement les dérives en la matière sont devenues la règle. Une détention préventive dans le cadre de l’Opération Epervier est devenue synonyme de culpabilité pour une bonne partie de la presse camerounaise. Le paiement d’une caution par un homme d’affaires belge est assimilé au remboursement de l’argent détourné. Et l’infortuné est jeté à la vindicte populaire, alors que le Tribunal criminel spécial n’a pas encore jugé l’affaire.
Basile Atangana Kouna et certains pontes du régime sont-ils actionnaires masqués de la Camerounaise des eaux (CDE) ? Est-ce pour cela qu’il est détenu à la maison d’arrêt de Kondengui ? Pas de média pour démêler l’écheveau de la soupe. Au contraire, la confusion est à chaque fois au rendez-vous. Au grand dam des autorités marocaines. Elles affirment qu’aucun camerounais n’est actionnaire de la CDE, consortium de trois entreprises marocaines, qui a décidé de souscrire – avec succès – à un appel d’offres international lancé voici une dizaine d’années par l’Etat du Cameroun sous l’encadrement de la Banque mondiale.
Indubitablement, la presse camerounaise (une certaine presse, pour certains) a failli à sa mission. Mieux, elle a démissionné, pour verser dans la facilité et le populisme, sacrifiant au passage «le veuf, la veuve, l’orphelin et le faible» à l’autel des batailles d’appareils et de coteries décidés à faire feu de tout bois. La presse camerounaise a oublié l’Affaire Dreyfus, qui a donné à la profession toutes ses lettres de noblesse. Elle doit pourtant se ressaisir. «Bien informés, les Hommes sont des citoyens. Mal informés, ils sont des sujets», indique l’adage.
Thierry Ndong Owona
Retour de la Commission de la Cemac à Bangui : l’épreuve de feu pour Daniel Ona Ondo
Le président de la Commission de la Cemac fait certainement face à la première crise violente de son mandant. Notamment avec l’épineux dossier du retour de la Commission de la Cemac à son siège initial de Bangui.
Daniel Ona Ondo est depuis quelques semaines en froid avec les autorités du pays d’accueil du siège de la Commission de la Cemac. Qui l’accusent ouvertement de manœuvrer pour retarder -à défaut de reléguer aux calendes grecques- la réinstallation de la Commission de la Cemac à Bangui. Une décision de la conférence des chefs d’Etat de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale au cours de leur sommet extraordinaire de Ndjamena en octobre dernier. L’escalade verbale entre les autorités centrafricaines et le patron de la Commission de la Cemac touche son pic ce 27 mars 2018, au cours d’un comité des ministres de l’Union monétaire d’Afrique centrale (Umac), au siège de la Béac à Yaoundé. Le ministre centrafricain des Finances et du budget sonne la charge contre Daniel Ona Ondo. «Le président de la Commission n’a qu’à démissionner s’il ne veut pas venir travailler à Bangui… Un autre gabonais peut occuper le poste», rapporte le CNC citant le premier argentier centrafricain. Pour le ministre Henri-Marie Dondra, en décidant au mois de mars 2018 de la relocalisation provisoire du siège de la Cemac à Malabo, le président en exercice de la Cemac, Idriss Déby Itno, a été induit en erreur par Daniel Ona Ondo.
Politique de l’autruche
Les accusations des autorités centrafricaines appellent néanmoins à un questionnement fondamental : les conditions sont-elles réunies pour un retour effectif de la Commission de la Cemac à Bangui ? Les engagements (logistiques et sécuritaires) pris par les autorités centrafricaines pour faciliter l’installation des dirigeants et cadres de la Commission sont-ils respectés ? Où travaillent actuellement Daniel Ona Ondo et son équipe ? Voici des éléments de réponses, à la suite de nos investigations journalistiques. 1-La Commission de la Cemac ne quitte pas Bangui. Où son travail se poursuit. Chaque mois, le président Daniel Ona Ondo y tient une réunion du collège des commissaires. Les réunions de cabinet du président de la Commission de la Cémanc se tiennent également dans la capitale centrafricaine. Selon nos informations, Bangui accueille de plus en plus des séminaires et ateliers de la Cemac. 2-Ce déploiement est toutefois limité par des conditions logistiques et sécuritaires encore très en dessous des standards établis pour les commissaires et les hauts cadres de la Cemac. De fait, les infrastructures d’accueil fiables sont prises d’assaut par les hauts fonctionnaires de l’Onu et de la Minusca. Qui paient deux à trois fois plus cher le prix pratiqués habituellement. Ce qui fragilise l’accès au logement des cadres de la Commission de la Cemac appelés à travailler à Bangui, dont les salaires n’ont pas connu d’augmentation depuis au moins cinq ans. 3-D’où l’option d’une délocalisation partielle et provisoire de la Cemac à Malabo. Après validation de sa proposition par le président en exercice de la Cemac, Daniel Ona Ondo a commis une équipe pour évaluer les possibilités d’une délocalisation provisoire de la Commission dans la capitale de Guinée Equatoriale. Celle-ci présente l’avantage d’avoir déjà accueilli la délocalisation de la Commission de la Cemac les trois dernières années. Les conclusions de cette évaluation sont attendues. Elles seront étudiées. Et permettront de prendre les bonnes décisions dans l’intérêt de la Communauté. 4-En attendant, le budget 2018 de la Commission prévoit une ligne financière qui servira à la réhabilitation des logements de la cité de la Cemac à Bangui. Ce qui permettra à moyen terme d’offrir aux personnels non résidents de la Commission des meilleures conditions et facilités de travail. Autant d’initiatives et bien d’autres qui confirment la bonne volonté du patron de la Cemac à s’installer définitivement à Bangui. Ce que son prédécesseur (M. Pierre Moussa) n’a pas pu faire à cause des contraintes sécuritaires et logistiques mentionnées supra. Et c’est le lieu de souligner que les seules bonnes intentions ne suffisent pas. Chaque partie prenante doit respecter ses engagements, en posant des actes concrets. A bon entendeur, salut !
Thierry Ndong Owona