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Archives des Jean-René Meva’a Amougou - Page 2 sur 14 - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : Jean-René Meva’a Amougou

  • Développement de l’Afrique centrale: Mieux explorer la voix des corridors

    Développement de l’Afrique centrale: Mieux explorer la voix des corridors

    «Comment les pays de l’Afrique centrale peuvent-ils reconfigurer les autoroutes de transport existantes qui les interconnectent, tout en construisant et en reliant de nouvelles autoroutes de manière à stimuler et soutenir des activités économiques structurellement transformatrices le long et à proximité de ces autoroutes?».

    Le corridor sous régional Yaoundé-Brazzaville,pour le développement des échanges.

    C’est une question fondamentale sur laquelle le Bureau sous-régional pour l’Afrique Centrale de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA) et les gouvernements ainsi que les partenaires au développement de la sous-région chercheront à faire la lumière, lors d’une prochaine réunion du groupe d’experts sur le thème: «Reconfigurer les corridors de développement en Afrique centrale: vers une nouvelle approche de prise de décision».

    Prendront part à cette réunion qui se tiendra virtuellement le 8 décembre 2020, des responsables de haut niveau du développement des infrastructures de transport, de la politique et de la planification; des représentants d’organismes intergouvernementaux tels que la Commission de l’Union africaine, la Cemac et la CEEAC; des dirigeants du secteur privé; des organisations de développement; des organismes partenaires des Nations unies; des membres de la société civile; et des universitaires.

    «À l’heure actuelle où tout le monde est d’accord avec nous sur la nécessité d’une transformation structurelle de nos économies, avec un accent particulier sur les gains de productivité qui découlent de la diversification économique verticale et horizontale, nous considérons les corridors de développement comme une nouvelle donne pour tous les pays de la sous-région», estime Lot Tcheeko, un responsable de la CEA qui coordonne cet exercice de réflexion.

    «Pendant des décennies, la notion de corridors en Afrique en général, et en Afrique centrale en particulier, ne concernait que les réseaux de transport consistant en de grands axes routiers reliant essentiellement les zones de production de matières premières aux ports d’exportation et reliant ces mêmes ports aux zones de consommation de produits finis importés», poursuit-il.

    La CEA pense donc que le moment est venu de changer le paradigme des corridors de « transport », en particulier ceux identifiés dans le Plan directeur consensuel des transports en Afrique centrale (PDCT-AC) adopté par la 11ème Conférence ordinaire des Chefs d’État et de gouvernement de la Communauté Economique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), tenue à Brazzaville, Congo, le 27 janvier 2004, et formulé avec l’appui technique de la CEA. Entre-temps, la 18ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement de la CEEAC tenue le 20 novembre 2020 a appelé à une refonte du programme du PDCT-AC en vue de refléter les besoins actuels du développement.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Intégration culturelle : «Messi, Messi» par-delà les frontières

    Intégration culturelle : «Messi, Messi» par-delà les frontières

    Regroupant en son sein des danseurs équato-guinéens, gabonais et camerounais, le groupe s’inscrit dans une longue histoire et un récit identitaire partagé.

    Messi Messi en action

    Dans les commentaires autour du groupe de danse «Messi Messi» (territoires différents en langue Ntoumou), on dit vouloir faire se rejoindre des Ntoumou qui s’éloigneraient. Ici à Ma’an, on explique que l’intégration ne fonctionnerait pas autrement mieux. Dans le flot des déclarations, la voix de Anselmo Zo’o Mileme se fait entendre : «Nous exécutons le ‘’Megane’’; une danse traditionnelle des peuples Ntoumou née au 16e siècle. Pour nous, c’est un bon moyen pour se considérer d’abord comme des fils d’un même ancêtre pour favoriser le mélange et non l’enferment communautaire». «À la base, ajoute l’Équato-guinéen (par ailleurs président du groupe), il est question de construire une identité, Ntoumou afin de faire la promotion d’un versant de l’intégration des peuples de 3 pays». En s’appuyant sur ce qui fait véritablement sens dans ce propos, un grand enseignement émerge : à travers la danse «Messi Messi» veut rassembler les «3 cousins» et proposer un discours ancré sur l’esprit communautaire, en finir avec les frontières perçues ici comme «subies» et non «choisies». Et voilà qui résume les thématiques des chansons composées par le groupe. D’après Anselmo Zo’o Mileme, ce choix s’attache aux processus de déconstruction des barrières mentales en essayant de créer un environnement différencié où les communautés unies par le sang sont remises ensemble malgré les différences spatiales.

    Mentalités
    Pour la Gabonaise Régine Mbatoumou (la secrétaire générale du groupe), la danse a été choisie pour dépasser bien des dérives. «C’est une affaire de mentalité et de petits moyens», explique-t-elle. Mis en lien, la volonté et les moyens disponibles sont placés au cœur du projet mis en œuvre depuis 10 ans. Et à chaque occasion heureuse ou douloureuse, le groupe se met en scène… bénévolement. «Nous venons juste là où il y a un deuil ou une fête. Nous montrons ce dont nous sommes capables et nous plions nos bagages. Nous venons juste montrer que le Ntoumou n’est pas esclave de l’argent», souligne Philémon Elono, Camerounais et maître à danser de «Messi Messi». Ce 3 décembre 2020, ce code comportemental prend corps devant l’esplanade du nouvel hôtel de ville de Ma’an. Aujourd’hui, c’est le drapeau camerounais qui sert de guipure aux costumes des danseurs. «La politique de Messi Messi est de faire flotter un drapeau à chaque cérémonie. La prochaine fois, ce sera celui de la Guinée Équatoriale ou celui du Gabon», avise Anselmo Zo’o Mileme.

    Palmarès
    À l’affiche partout dans le département de la Vallée du Ntem, «Messi Messi» connaît aussi un retentissement au Gabon et en Guinée Équatoriale où, apprend-on, des messages de soutien affluent pour saluer cette initiative. «Notre label circule partout et nos descentes sont par de hautes autorités de ces pays», renseigne le patron du groupe. Parmi les détails fournis par celui-ci, des «triomphes» se sont enchaînés ces trois dernières années : la prestation à Malabo le 12 octobre 2020 sur invitation du président Obiang Nguema ; une sortie à Oyem (Gabon) en septembre 2018 lors du Festival de la Jeunesse à l’initiative du maire de la ville et une descente à Libreville le 17 août 2017 avec le concours de la présidence gabonaise.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Esstic : Exit les soutenances

    Esstic : Exit les soutenances

    Des étudiants en fin de cycle de la division II (filière journalisme) ont présenté leurs travaux le 2 décembre dernier au campus de l’établissement.

     

    Une candidate, lors de sa soutenance

    Des élèves-journalistes de la « promotion la Jean François Nguegan », (48e cuvée de l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic) ont présenté et défendu leurs rapports de stage et réalisations professionnelles face aux jurys le 2 décembre 2020. Devant des érudits du journalisme tels Pr jean François Nguegan, Dr Nta à Bitang, Dr Doumbe ou Marc Omboui, les impétrants Théodore Ayissi Ayissi, Diane Kenfack et Suzanne Mélanie Bilo’o (tous stagiaires au journal Intégration) ont exposé sur divers sujets.

    Au titre de réalisation professionnelle, le premier candidat a promené sa plume dans les coulisses du cinéma camerounais. Jugé satisfaisant, ce travail a obtenu 11/20.

    Comme sujet, Diane Kenfack a proposé un dossier sur les enfants atteints d’IMC (Infirmité motrice cérébrale) communément appelés « enfants serpents ». Globalement, le sujet traite des difficultés quotidiennes des mômes IMC, celles de leurs parents et celles du personnel soignant rencontré dans un centre spécialisé à Yaoundé. Au compteur : 14/20.

    De son côté, Suzanne Mélanie Bilo’o n’a pas bavé sur les escargots. Elle en a fait un sujet pour sa réalisation professionnelle. De façon ramassée, il s’agit d’un état des lieux de la filière hélicicole au Cameroun. Accrocheur, le travail a engrangé 16/20 au final. Pour elle, ces résultats sont à mettre à l’actif du Journal Intégration  du Directeur de Publication Thierry Ndong Owona qui l’a beaucoup soutenu. «  Nous sommes très contente du choix que nous avons  fait, à savoir celui de faire  du journal Intégration, nous avons eu des possibilités de faire notre stage dans l’audio-visuel, étant donné que en dehors de l’école, nous avons déjà une société qui nous emploi. C’est un choix qui a porté, et nous devons dire merci au Directeur de publication pour tout le suivi, au Coordonnateur de la rédaction Jean René Meva’a Amougou, ainsi qu’à tout le personnel du journal Intégration », pavoise-t-elle.

    Olivier Mbessité, (Stagiaire)

  • L’œuvre de Dieu, la part du diable

    L’œuvre de Dieu, la part du diable

    Cela semble incroyable aujourd’hui: «entre Libreville et Kyé-Ossi, il y a une trentaine de poste de contrôle !».  Cela est pourtant vrai. Le Rwandais François Kanimba et ses collègues commissaires de la CEEAC en ont fait la triste expérience. Sur la scène de la 11e édition de la Foire transfrontalière annuelle d’Afrique centrale (Fotrac) ce 4 décembre, le récit de leur voyage entre la capitale gabonaise et le Cameroun n’est pas gai. Dans leurs carnets de route tenus entre Kyé-Ossi et Ebibeyin en Guinée Équatoriale, ils ont certainement enregistré beaucoup de chiffres et de faits, afin d’établir ou rétablir des vérités. Sauf qu’au finish, à l’image des vieillards désabusés et fourbus par une situation bizarre, leurs visages ont changé après avoir vécu ce qui se passe sur le terrain en matière de libre circulation en Afrique centrale. Face à une crise sanitaire mortifère inédite, concomitante à une succession angoissante des actualités dramatiques à l’échelle de différents pays, la sous-région s’enferme toujours plus. Après les bonnes intentions contenues dans les discours des politiques, rien en l’état actuel n’avance. Chaque jour, sur le terrain, la libre circulation connait de nombreux revers, comme si un rideau de théâtre s’était brusquement abattu sur la scène, signant la fin de la récréation et du rire. Entre-temps, la machinerie diplomatique fait valoir qu’elle tourne à plein régime

     

    Du point de vue de quelques commissaires de la CEEAC, les freins au processus sont entretenus par les citoyens de l’espace communautaire eux-mêmes.

    Sur le perron de la Maire de Kye Ossi, au terme des échanges avec les autorités camerounaises

    «Il y a quelque chose de profondément paradoxal dans l’idée que, en dépit des efforts faits ces dernières années pour abolir les barrières à la liberté de circulation en Afrique centrale, des autorités décentralisées d’États membres puissent néanmoins réintroduire des barrières par la petite porte en les instaurant à l’intérieur des États membres». Cette litanie, on l’a entendue ce 3 décembre 2020 à Kyé-Ossi. Celui qui la décline est François Kanimba, commissaire au marché commun, affaires économiques, monétaires et financières de la CEEAC. Ici sur le site de la Fotrac, il est entouré de la Congolaise Yvette Kapinga Ngandu et Mangaral Bante (respectivement  commissaire en charge de la promotion du genre et commissaire en charge des questions de paix et de sécurité de la CEEAC).  Par la description qu’ils font tous ensemble de leur voyage entre Libreville et la ville hôte de la Fotrac, nombreux sont ceux qui voient en eux une sorte de comité de salut public adapté à la situation. 

     

    Cette situation, relève François Kanimba, tient sur deux choses : «le désir d’aller chez les autres et le refus d’accepter les autres chez soi». De façon caricaturale, le Rwandais parle de «l’œuvre de Dieu et de la part du  diable». En guise d’explication, le commissaire au marché commun, affaires économiques, monétaires et financières de la CEEAC suggère de ne pas avoir peur des mots : «nous nous sentons libres, mais en même temps, nous nous déclarons prisonniers. Voilà pourquoi, nous avons instauré des barrières non tarifaires le long des corridors pour créer à nous-mêmes des obstacles à notre nature de personnes libres». 

    Pour Yvette Kapinga Ngandu, tout semble rudement bien orchestré pour entraver la libre circulation dans tous les pays de l’espace CEEAC qu’elle dit avoir visité. «Ce qui est paradoxal, dit-elle, c’est que dans ces pays-là, tous les apologistes de la bonne conscience convergent vers la libre circulation des biens  et des personnes. Mais, par leurs postures faussement généreuses, l’on décèle beaucoup d’insincérité».  

    Du haut de son poste de commissaire en charge des questions de paix et de sécurité de la CEEAC, Mangaral Bante estime que «les nombreuses barrières deviennent aux yeux de tous la démonstration éclatante que  nous avons du mal à nous défaire des sentiments malveillants des uns contre les autres. En clair, on est piégé par nos propres représentations faussement objectives». 

    Jean-René Meva’a Amougou

    Agenda à court et moyen termes…

    Des plaidoiries auprès des dirigeants politiques, c’est ce qu’envisagent les trois commissaires venus de  la CEEAC.

     

    À entendre parler Yvette Kapinga Ngandu, Mangaral Bante et François Kanimba, on dirait des clercs qui ont cumulé des positions diversifiées au carrefour du droit, de l’économie et de la politique, des praticiens aussi compétents qu’attentionnés. Ici à Kyé-Ossi, tout en évitant la surenchère populiste, ces trois « notables » venus de la CEEAC promettent de se lancer dans des discussions au niveau le plus élevé des différents États. En attendant que le lobbying de longue haleine produise ses effets, «il va falloir travailler sur la notion de frontière telle que perçue en Afrique centrale». À en croire François Kanimba, «la frontière entre la sécurité et la xénophobie reste aussi floue que poreuse partout dans la sous-région». 

    De surcroît, enchaîne Yvette Kapinga Ngandu, leur interprétation ne va pas sans poser problème. «Tout cela endosse plus ou moins le postulat d’une politique distincte et distante d’une véritable politique d’intégration sous-régionale». Alors, promet la commissaire en charge de la promotion du genre à la CEEAC, «il faut préparer la voie d’une contre-offensive idéologique».  En des mots simples, Yvette Kapinga Ngandu entend mener des démarches pour déconstruire l’image de la femme et de la jeunesse vouées à la pauvreté du fait des restrictions à la libre circulation. 

    Parce que tout semble se passer comme si les discours sur la libre circulation en Afrique centrale obéissent à des dynamiques contraires, Mangaral Bante a un programme : recueillir auprès des autorités des avis permettant de se faire une idée des tensions récurrentes au niveau des frontières entre États. Pour lui, il s’agit d’«aller au contact des frilosités et intermittences de la parole, implicites, sous-entendus, secrets et non-dits, omerta et tabous». 

     JRMA

    Zone des Trois Frontières

    La CEEAC dans le triangle des Bermudes

    Les commissaires de la CEEAC ont été foudroyés par les mythes, accusations, gravités, incompréhensions livrés par les autorités frontalières de Guinée Équatoriale, du Cameroun et du Gabon.

     

    Bouillon d’intégration régionale : c’est l’expression qui caractérise sans doute le séjour de la délégation de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) dans la zone des trois frontières (Cameroun, Gabon et Guinée Équatoriale). Elle ne l’oubliera pas surement de sitôt. En marge de leur participation à la 11ème édition de la Foire transfrontalière annuelle de l’Afrique centrale (Fotrac), les officiels de la CEEAC ont eu des rencontres avec les autorités administratives, locales, sécuritaires de la localité frontalière du Cameroun, du Gabon et de la Guinée Équatoriale. Sous la facilitation de la présidente du réseau des femmes actives de l’Afrique centrale (REFAC).

    François Kanimba, commissaire au marché commun, affaires économiques et financières ; Yvette Rapinga Ngandu, commissaire à la promotion du genre, au développement humain et social ; et Mangaral Bante, commissaire aux affaires politiques, paix et sécurité et toute leur équipe étaient en guinée équatoriale dans l’après-midi du 3 décembre. Ils ont échangé avec les autorités de gestion des flux transfrontaliers de la zone des trois frontières. Au Cameroun, dans la salle des actes de la mairie de Kyé-Ossi, les commissaires ont discuté avec les autorités camerounaises le 4 décembre dans la matinée. Dans l’après-midi, à Bitam, au Gabon, elles ont eu le même exercice dans l’après-midi du 4 décembre.

    Bouillon

    Le moins que l’on puisse dire c’est que la franchise était au rendez-vous. Dans la matinée du 4 décembre, François Kanimba ouvre les échanges face aux autorités camerounaises en leur disant «nous sommes allés dans les détails : les autorités équato-guinéennes accusent le Cameroun d’être responsable du frein à la libre circulation. Selon elles, le Cameroun a plus de 10 douanes. Lorsque les commerçants équato-guinéens viennent vendre leur poisson séché ou fumé au Cameroun, la douane leur crée toutes les misères. C’est aussi le Cameroun qui est responsable de la construction du mur car il fait passer tout le monde. On vous le dit parce que ce qui arrive à la CEEAC n’est plus un secret».

    Prenant la parole, le sous-préfet de Kyé-Ossi, au Cameroun, a lancé la riposte. «Peut-être, c’est l’unique fois que nous vous verrons, ce n’est pas le souhait, alors nous serons le plus sincère, le plus honnête et le plus franc possible. Notre première préoccupation c’est la vulgarisation des textes de la CEEAC à la base, aux acteurs de terrain. La seconde préoccupation c’est le retour. Nous souhaitons avoir le sentiment d’avoir été écouté. La troisième préoccupation, c’est la franchise en lien avec ce qui vous a été dit par nos frères équato-guinéens. Je voudrais vous dire que si vous allez en Guinée Équatoriale 10 fois, vous aurez les mêmes plaintes 10 fois. Pour l’histoire, la Guinée Équatoriale, le Gabon et le Cameroun partagent les mêmes us et coutumes. Les populations cohabitaient, elles fréquentaient les mêmes marchés, les frontières n’existaient pas. Le Cameroun a construit son poste frontalier seulement en 2015 lors de la coupe d’Afrique des nations au Gabon-Guinée Équatoriale. Avant, c’était des familles, les populations empruntaient le taxi de part et d’autre et revenaient à leur lieu d’habitation. L’armée camerounaise n’avait aucune raison d’avoir un camp à Kyé-Ossi. Elle n’y était pas d’ailleurs. Mais c’est depuis le projet de construction du mur que l’armée du Cameroun a établi une base dans la ville qui vous accueille. Et saisissez le sens, l’armée est une force de troisième catégorie. Lorsqu’elle vient c’est pour la sécurisation de l’intégrité du territoire camerounais mais en plus la maitrise des flux négatifs notamment la contrebande».

    Si les propos de l’autorité administrative tente d’expliquer le contexte d’une certaine fermeté camerounaise, elle semble trahir aussi l’incompréhension que le Cameroun a de l’attitude de la Guinée Équatoriale. D’où le besoin de restitution de la vérité des agissements réels pour dénuder la réalité construite dans l’esprit de la CEEAC par les Équato-guinéens la veille. La commissaire Yvette Ngandu avait elle aussi précisé ses préoccupations liées à la sécurisation de la femme, aux exactions et dangers sur la personne et à la santé publique. «Ce que nous vivons à Kyé-Ossi est intolérable», assène le sous-préfet pour évoquer les préoccupations liées à la sécurité sur la personne. Le Maire de Kyé-Ossi va embrayer : «nous les natifs de la localité, nous n’avons pas la notion de frontière. Mais il faut avouer que nous sommes dans l’incompréhension. La frontière, pour moi, est à l’image des rideaux de la maison. Ils peuvent s’ouvrir aisément et se fermer aisément. Si les populations camerounaises empruntent les voies non conventionnelles [brousse] pour accéder en Guinée Équatoriale c’est pour aller nourrir leur famille. La Guinée Équatoriale achète tout au Cameroun. Mais généralement, les familles équato-guinéennes affamées font la demande des denrées de premières nécessités et c’est généralement un cousin coté camerounais qui prend le risque. Or, ils arrivent qu’on lui tire dessus et qu’on vienne jeter le corps à la frontière. Ou alors qu’il soit copieusement fouetté et largué à la frontière dans un état déplorable. Concernant les violences, si 10 femmes ou jeunes filles camerounaises sont en cellule en Guinée Équatoriale, 9 sont violées. Acte commis sans protection. C’est l’œuvre des personnels. Ce sont des cas que nous recevons et réglons tous les jours. Je suis surpris que ce sont nos frères qui soulèvent ces préoccupations. Récemment, un chef de famille a été copieusement fouetté devant sa femme et ses enfants. Ils étaient sur le point de traverser la frontière. Il a regardé le drapeau camerounais et il a tendu la main en hurlant de douleur».

     Le mur de l’incompréhension

    Autre sujet, le mur en construction par la Guinée Équatoriale. Pour le commissaire Mangaral Bante, il s’agit du «mur de l’incompréhension». Le commissaire aux affaires politiques, paix et sécurité a confié son incompréhension sur l’idée de dresser un mur entre «deux pays appartenant à deux communautés africaines et une union continentale». «Sommes-nous devenus le Mexique et les USA ?».

    Dans la salle, il a été dit trois fois «le Cameroun est un grand pays» !!! Un participant a tenu à préciser le contexte pour montrer à quel point le rubicond avait été poussé. «Si on considère le tracé allemand, la frontière de la Guinée Équatoriale et tous les investissements réalisés dans cette localité se trouvent en territoire camerounais. Car la borne coloniale sur laquelle les allemands ont gravé Kamerun se trouve au niveau de la cathédrale d’Ebibéyim. Et ils le savent. Mais le Cameroun préfère les voies légales. Il est dit que la frontière s’ouvre de 6h à 18h. Mais coté Guinée Équatoriale, la frontière s’ouvre et se ferme sans logique. Généralement, ce sont les plaintes des populations qui nous alertent sur la fermeture de la frontière».

    Un véritable acte de guerre, selon ce participant, qui a requis l’anonymat. En effet, selon lui, «lorsque vous construisez un mur mitoyen qui va vous séparer de votre voisin, vous vous entendez avec celui-ci afin que même la gestion des eaux usées soit réglée. Pourtant, le projet de construction du mur a été décidé délibérément et unilatéralement par les autorités équato-guinéennes. Sans informer la partie camerounaise. Bien plus, la Guinée Équatoriale a positionné ses militaires sur le long de la frontière. En stratégie défense, cela est une déclaration de guerre».

    De son avis, tout ceci s’explique du fait que «la Guinée Équatoriale est un Etat militaire. Le militaire est plus important que l’autorité administrative. C’est lui qui décide en dernier ressort. La fermeture de la frontière profite économiquement aux militaires. Car cette situation gonfle légalement ou illégalement leur revenu».

     Barrières au commerce

    Les check-points sont également contrôlés par les militaires. Ils les installent à tort et à travers parfois. Ce sont des postes de dépenses sans facture ni justificatifs. Il est difficile pour une entreprise constituée ou un opérateur économique de justifier ces paiements. Le maire de Kyé-Ossi confirme : «dans une expérience antérieure, il m’est arrivé de constater que pour partir de la frontière ici à Kyé-Ossi et arriver à Ebibéyin (moins de 2 km), un opérateur économique pouvait se retrouver à dépenser près de 500 mille de francs CFA». Une situation qui a pour seul mérite d’étioler les échanges. Pour preuve, «le nombre de commerces à Kyé-Ossi se réduit d’année en année. Certaines boutiques ont déjà fait 2 ans sans ouvrir», confie le préfet.

    Les officiels de la CEEAC ont été heureux des échanges. François Kanimba conclura en disant : «on doit garder un dialogue régional pareil sur des problèmes comme ça. Pour voir comment bousculer les difficultés».

    Bobo Ousmanou

  • France-Cameroun : Pour le meilleur et pour l’empire

    France-Cameroun : Pour le meilleur et pour l’empire

    Selon des sources bien informées, le couple est entré en déliquescence depuis 2009. D’un côté, des politiciens et diplomates véreux, et de l’autre un artificier du génie politique. Évocation.

    Macron-Biya, grandes manoeuvres autour d’intérêts divergents

    Il y a quelques jours, le magazine Jeune Afrique (JA) a proposé, sur le haut des piles de lectures, une interview d’Emmanuel Macron. Au détour de cette sortie médiatique du président français, des Camerounais assistent, incrédules et rieurs pour les uns, exaspérés pour les autres, au triomphe d’une absurdité communicationnelle rayonnante. C’est que, tout affairé à prouver qu’il suit de près les actualités sociopolitiques camerounaises, le patron de l’Élysée a dénoncé la machine politico-administrative de Yaoundé. À lire Emmanuel Macron dans les colonnes de JA, il ne met pas de gants pour montrer que les dynamiques propres au régime de Paul Biya sont si fortes qu’elles se déploient sans maitrise, mettant autant d’obstacles sur la voie des citoyens et face aux volontés réformatrices.

    Face à Benjamin Roger et de Marwane Ben Yahmed, tous deux journalistes au journal panafricain, Emmanuel Macron a dupliqué à nouveau les éléments de langage déclinés depuis 2019. Cette année-là, il déclarait: «j’ai mis la pression sur Paul Biya pour que d’abord il traite le sujet de la zone anglophone et ses opposants. J’avais dit, je ne veux pas qu’on se voie à Lyon tant que Kamto n’est pas libéré, et il a été libéré parce qu’on a mis la pression. Là, la situation est en train de se dégrader. Je vais appeler, la semaine prochaine, le président Biya, et on mettra le maximum de pression pour que cette situation cesse». Tout dernièrement, on l’a entendu prononcer des phrases comme: «Je vous rappelle que, pendant très longtemps, le président Biya n’est pas venu en visite officielle en France. Nous avions eu des contacts par voie téléphonique, mais je lui avais demandé des gestes de confiance avant sa venue à Lyon, en octobre 2019. Il les avait faits, il y a un an, avec un certain nombre de libérations».

    Paternalisme
    Analysés restrictivement, ces mots ne permettent pas d’exclure du champ d’investigation les exemples d’une pratique ancienne aiguillonnée par une volonté paternaliste. Mieux que d’autres, historiens et spécialistes des relations entre Yaoundé et Paris sont capables d’éclairer les enjeux du débat récemment engagé via JA. «Depuis 2008, des sources diplomatiques de première main font état de désaccords entre le Cameroun et la France au sujet du renouvèlement des accords de défense passés entre les deux pays. Dès lors, tout prétexte devient utile pour étaler la colère française», théorise Pr Belinga Zambo. Pour la démonstration, le politologue cite Jean Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères. Le 25 novembre dernier, devant la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française, il a déclaré: «Nous avons des positions très claires sur la nécessité de faire en sorte que la démocratie fonctionne au Cameroun. J’ai eu l’occasion de dire, à plusieurs reprises, que je ne serais pas allé au Cameroun, si monsieur Maurice Kamto n’avait pas été libéré. J’ai attendu qu’il soit libéré pour me rendre au Cameroun».

    De son côté, l’internationaliste Daniel Nkomba surfe sur un postulat qui découle d’une réflexion sur les acteurs de la diplomatie française, pose le problème de l’unité de l’action extérieure de la France depuis près d’un siècle et soulève le problème de l’articulation du mode de négociation bilatérale entre le Cameroun et l’Hexagone. «Des curiosités révélées par certains éminents historiens indiquent que les accords de défense du 26 décembre 1959 à Yaoundé, entre le Cameroun et la France, ont été négociés, côté camerounais, par deux Français: Jacques Rousseau et Georges Becquey», signale Daniel Nkomba. Ce dernier soupçonne Paul Biya d’avoir mis son véto aux Français, «notamment en ce qui concerne certaines lignes desdits accords de défense». «À cet égard, révèle Daniel Nkomba, la consultation desdits documents top secret fournit des indications précieuses sur ce qui aurait motivé le refus de Paul Biya de les renouveler face à Nicolas Sarkozy en 2009» (voir encadré ci-après).

    Cette année-là, commencent les problèmes pour le président camerounais. «Élu président de la République française le 16 mai 2007, l’ancien ministre de l’Intérieur de Jacques Chirac, qui avait battu campagne en dénonçant la politique africaine de ses prédécesseurs, faite de “diplomatie secrète”, de “clientélisme”, de “soutien aux dictatures”, bref la “Françafrique”, esquive pendant un peu plus de deux ans Paul Biya dont il ne supporte pas la longévité au pouvoir. Il ne consentira à le recevoir que le 24 juillet 2009 à Paris. Un communiqué policé de l’Élysée, publié au terme de cette audience, indiquera que Nicolas Sarkozy a promis de maintenir le niveau de coopération entre la France et le Cameroun.

    Il a aussi évoqué “librement”, avec le président Biya, “la situation intérieure du Cameroun, y compris les questions de gouvernance, de démocratie et des droits de l’homme”. Langue de bois pour ne pas dire que Paul Biya a été sermonné sur ces questions par son homologue français», écrit le quotidien Mutations, cité par Actu du Cameroun le 26 février 2020. Fait curieux au passage: Sarkozy terminera son quinquennat en mai 2012 sans avoir foulé le sol camerounais, contrairement à ses prédécesseurs (Pompidou, Mitterrand, Chirac). Quant à François Hollande, il se paiera juste le luxe d’une brève visite officielle dans la soirée du 3 juillet 2015, avec dans sa suite, un certain Gérard Grizbec, chargé de titiller Paul Biya sur sa longévité au pouvoir. L’alors journaliste à France 2 avait obtenu que «ne dure pas au pouvoir qui veut, mais qui peut».

    Jean-René Meva’a Amougou

    Que disent les accords de défense entre le Cameroun et la France?

    1) Informer la France de la politique que les politiciens camerounais entendent suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques, ainsi que des «mesures qu’ils se proposent de prendre pour l’exécution de cette politique»; 

    2) Faciliter, au profit des forces armées françaises, le stockage des matières premières et produits stratégiques; et lorsque les intérêts de la défense l’exigent, «limiter ou interdire leur exportation à destination d’autres pays»;

    3) «Le Cameroun doit réserver, en priorité, la vente de ses matières premières et produits stratégiques à la République française, après satisfaction des besoins de sa consommation intérieure, et s’approvisionner en priorité auprès de la France», etc.

    4) Les accords mentionnent une liste de matières premières dites stratégiques qui appartiendront de fait à la France s’ils sont découverts sur le sol camerounais, notamment: les hydrocarbures liquides et gazeux, l’uranium, le thorium, le lithium, le béryllium, l’hélium, etc. De peur que dans l’avenir, la science identifie certains minerais qui ne figuraient pas sur la liste, la France a pris soin de signifier que cette liste pouvait encore s’allonger sans trop de complication, en ces termes: «les modifications à cette liste feront l’objet d’échanges de lettres entre les parties contractantes».

    En des mots plus simples, avec ces accords signés par 2 Français sous la présidence d’Amadou Ahidjo en 1960 et renouvelés en 1974, le sous-sol du Cameroun appartient à la France. On comprendra seulement après que même ce qui était au-dessus du sol appartenait aussi à la France, comme les plantations de café et de cacao, d’où le risque de prison pour toute personne qui tentait de couper ces plantes pour les remplacer par quelque chose de plus rentable pour l’alimentation villageoise ou pour l’économie nationale.

    Avec les accords signés en 2009, on va connaitre une petite avancée. Le 21 mai 2009, c’est par communiqué de presse que le public est informé de la signature à Yaoundé entre le président du Cameroun, Paul Biya et le Premier ministre français François Fillon d’un accord instituant un «partenariat de défense». C’est un texte composé de 28 articles et d’une annexe, lui-même en 11 articles.

    Lorsqu’on compare ce texte à celui de 1974, et à celui signé en même temps, ou après, entre la France et d’autres pays africains, on peut dire que c’est l’acte officiel de divorce entre le Cameroun et la France. Il s’agit en effet d’un texte très vague, composé de grands principes propres à la diplomatie de la langue de bois, reprenant pour l’essentiel les accords-cadres de Lisbonne de 2007 entre l’Union européenne et l’Union africaine. Contrairement au précédent accord qui est de 50 ans, celui-ci est de 5 ans renouvelables. Seulement, c’est en 2012 que le parlement français va valider le texte. Il expirait donc en 2017 et devait être renouvelé.

    Source: Agence Cameroun Presse

  • Direction générale des impôts du Cameroun : À voir d’un œil fermé et l’autre immobile

    Direction générale des impôts du Cameroun : À voir d’un œil fermé et l’autre immobile

    Les nouveaux locaux des services centraux de l’administration fiscale n’en finissent pas d’éblouir, en même temps qu’ils déclinent une vision moderniste.

     

    La reconnaissance d’un lieu comme ordinaire, et à fortiori son choix comme lieu potentiel de visite, implique justement de le sortir du registre de l’ordinaire. Quelqu’un qui comprend cela, c’est le comédien Kékégué international pour qui le nouvel immeuble-siège de la Direction générale des impôts (DGI) «est extraordinaire». Inauguré ce 27 novembre par le Premier ministre Chief Joseph Dion Ngute, l’édifice s’impose dans un tissu d’art, de vie et de vision. «Oui, ce bâtiment livre un récit où la construction n’est qu’un squelette qui n’a d’autre but que de servir de support au renouveau de l’immobilier urbain dans la capitale et de décliner la vision moderniste de l’administration fiscale», commente Luc Messi Atangana. À travers ce qui semble n’être qu’une remarque sur le vif, le maire de Yaoundé estime aussi que «c’est extraordinaire». Poétique, Louis Paul Motaze suggère de «regarder l’ensemble de face, à une distance déterminée, un œil fermé et l’autre immobile». En ce sens, dit le ministre des Finances (Minfi), «les lignes et couleurs du bâtiment se manifesteraient pour elles-mêmes et déploieraient leur puissance propre».

     Histoire

    Bien évidemment, toute cette prose, c’est toujours «la tour de la DGI» qui l’inspire. Le joyau architectural a une histoire. Réalisés en 50 mois par la China First Highway Engineering Co. Ltd. (CFHEC), les travaux ont impliqué un investissement de près de 22 milliards FCFA débloqués par les pouvoirs publics. Techniquement, l’immeuble est constitué d’un empilement géométrique en quinconce de 4200 modules, «avec un très haut degré de précision», selon CFHEC.

     

    Dans le détail, le tout occupe une superficie de 19 821 m². D’après l’architecte-concepteur Buban Ngu Desco du cabinet Urbatech Conseil, «c’est une tour de 11 étages et un immeuble de rapport de 4 étages, 206 bureaux, 3 niveaux de parking en sous-sol pour 1500 véhicules, une salle de réunions par étage, plus une grande salle de réunions pour les meetings avec système de rétroprojection, de visioconférence et de traduction automatique, un système de surveillance avec caméras et détecteurs de présence, un auditorium de 150 places; un restaurant de 100 places, une bibliothèque; une salle de sport avec espace aérobic, sauna, bains de vapeur, des plaques solaires pour suppléer les ruptures d’énergie, un call center pour six opérateurs dotés d’écrans et un data center ultra moderne». Et pas de risque de voir le complexe partir en fumée, précise avec insistance Buban Ngu Desco. À l’en croire, conçues selon une géométrie régulière et symétrique, l’épaisseur du plafond et celle du plancher sont telles qu’un feu ne les carboniserait que superficiellement. Flanquées de verre dichroïque, les façades sont assorties de balcons aux formes irrégulières.

    Motivations

    Regarder une œuvre aussi colossale, c’est rechercher ce qui l’a historiquement motivée, quels ont été les impératifs contextuels qui ont guidé son adoption. Ernest Christophe Atangana, chef de cellule de la communication de la DGI, répond: «Des difficultés liées entre autres à l’exigüité des locaux, à la vétusté globale du bâtiment et des installations, avaient fini par rendre nécessaire l’édification d’une infrastructure à même de donner satisfaction. C’est que, au fil du temps, la DGI, installée, depuis près de 40 ans dans les anciens locaux, s’est vue confier des missions et objectifs sans cesse croissants. De nouveaux défis ainsi définis induisaient de fait un accroissement de structures installées dans le bâtiment abritant ses services centraux. D’où la nécessité d’un cadre plus adapté». L’on apprend également que, créée par décision du Minfi et placée sous la supervision du DGI, l’équipe projet s’est constituée autour d’un comité de pilotage et d’un secrétariat technique en charge respectivement de la définition et de la mise en œuvre des modalités optimales d’exécution du projet, ainsi que du suivi efficient des opérations techniques et de procédures budgétaires y afférant.

    Projections

    Dans une lettre adressée à ses collaborateurs le 24 novembre dernier, Modeste Mopa Fatoing indique que «l’inauguration du nouvel immeuble constitue une étape d’un plan plus vaste déjà lancé». Selon le directeur des impôts, la rénovation des centres divisionnaires des impôts et la construction d’un centre de perfectionnement sont aussi des acquis qui méritent un intérêt. «Mais, avise-t-il, nous n’entendons pas en rester là. Avec l’appui constant de notre hiérarchie, un programme de construction des hôtels des impôts dans les régions à l’intérieur du pays sera bientôt lancé afin que notre administration puisse refléter en tout lieu la modernité». Pour Modeste Mopa Fatoing, l’ultime challenge demeurera la consolidation et la capitalisation des acquis, en vue de la préservation de l’ouvrage érigé dans des conditions optimales.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Covid-19 et l’Afrique : Le manifeste

    Covid-19 et l’Afrique : Le manifeste

    Peut-être n’a-t-on pas été suffisamment attentif au fait que, dans les controverses particulièrement virulentes qui se sont développées autour du coronavirus partout dans le monde, la question du médicament est au cœur des tensions les plus vives. Plus encore que la théorie causale de l’épidémie, qui focalise les attentions, c’est le problème de l’efficacité des décoctions africaines qui constitue l’enjeu essentiel, pratique mais aussi idéologique, de ces polémiques. 

     

    C’est du reste, de manière significative, autour de l’invention proclamée de traitements africains anti-Covid-19, que sont nées ces controverses. Au cours de celles-ci se sont exprimés méfiance et ressentiment à l’égard des savoirs patrimoniaux africains. Dans ce contexte, la question de l’efficacité de ceux-ci s’est trouvée posée dans l’espace public selon deux logiques presque contraires. D’une part, les produits anti-coronavirus africains contournent toutes les procédures habituelles d’évaluation scientifique des médicaments. D’autre part, un immense espoir est né, non seulement pour les malades, mais aussi, et surtout, parce qu’il est le fruit d’une recherche locale. 

    Pour porter ce dernier aspect, Charles Binam Bikoi, Secrétaire Exécutif du CERDOTOLA (Centre international de recherche et de documentation sur les traditions et les langues africaines) vient de publier un manifeste. Intitulé « La Covid-19 et l’Afrique : les médecines et les savoirs patrimoniaux dans le choc de l’Histoire… Manifeste pour une Afrique structurellement déconfinée », le document est une ode à la pharmacopée africaine. 

    Cliquer ici pour télécharger la version complète en français 

    Jean René Meva’a Amougou 

  • Croisade contre la Covid-19 : La Croix-Rouge Camerounaise cible les prisons

    Croisade contre la Covid-19 : La Croix-Rouge Camerounaise cible les prisons

    Cinq pénitenciers  figurent sur la liste de l’institution humanitaire.

    Fortement impliquée dans la lutte contre le coronavirus à l’échelle du territoire national, la Croix-Rouge Camerounaise (CRC) va descendre dans  certaines prisons du pays dans les prochains jours. L’organisation humanitaire est parée pour mener à bien la campagne de désinfection dans les prisons de Yaoundé, Eseka, Bertoua, Bafia et Ebolowa. Ce 25 novembre 2020, elle a reçu des mains du Conseil du personnel de la BAD du matériel approprié  en vue de réduire au maximum les risques d’infection à la Covid-19. Les livraisons portent sur plusieurs paires de bottes, lunettes de protection, des atomiseurs, des masques chirurgicaux, des imperméables, des pulvérisateurs, de l’hypochlorite, du savon de ménage entre autres. Le matériel sera acheminé et installé dans les prisons très prochainement.

    Lors de la cérémonie de remise au siège de la CRC à Yaoundé, Cécile Akame Mfoumou a adressé ses profonds remerciements au Conseil du personnel de la BAD pour « ce cadeau significatif ». Face à la presse ce 25 novembre 2020, la président de la CRC a  estimé qu’ « il est en important d’assurer un milieu carcéral sain afin de diminuer les risques de propagation du virus entre les détenus et entre les membres du personnel administratif, de sécurité et paramédical ». Et parlant des prisons camerounaises,  Cécile Akame Mfoumou a indiqué que l’institution dont elle a la charge travaille en étroite collaboration avec les responsables de l’administration pénitentiaire.

     De son côté, Solomane Koné, le Responsable-Pays du Groupe de la BAD au Cameroun, a tenu à préciser que c’est conformément aux pratiques de la Banque et de son  Conseil du personnel que la CRC a été classée au rang des bénéficiaires.

     Jean-René Meva’a Amougou

  • Élections régionales : Les chefs traditionnels  en colère

    Élections régionales : Les chefs traditionnels en colère

    Paru dans le quotidien Cameroon Tribune, un article montre des «Majestés» manquant d’argent pour financer leurs campagnes électorales sur le terrain.

    Des chefs traditionnels au Cameroun

    Voici la campagne en vue des élections régionales ouverte. Lancé samedi dernier, ce grand moment va régenter la vie politique nationale jusqu’au 5 décembre à minuit. Mais déjà, les dépositaires des pouvoirs traditionnels sont habités par un sentiment d’injustice. Après l’empathie et la bienveillance à l’égard des pouvoirs publics, c’est désormais la posture revendicative parmi quelques dignitaires du commandement traditionnel. À travers le pays, certains parmi eux sont sortis de leur distance et de leur surplomb en remettant en cause la loi du 19 avril 2012 portant Code électoral.

    Elle n’a pas prévu la prise en charge par l’État du financement de la campagne électorale. «Nous comprenons très mal que nous soyons exclus des financements publics de la campagne électorale. Nous sommes quelque peu dans l’embarras par rapport aux dispositions légales qui sont muettes en ce qui concerne le financement de la campagne électorale des chefs traditionnels», note Firmin Jean Benoît Etundi Atanga (candidat et chef de 2e degré du groupement Yanda de Yaoundé), approché par le quotidien Cameroon Tribune (CT) le 19 novembre 2020.

    Sous anonymat, un autre «chef-candidat» cherche ses mots, refusant de verser dans le seul registre de la colère. «En colère, on passe pour des imbéciles. Mais ils devraient se méfier là-haut, car on est loin d’être des cons et surtout, on se renseigne. On voit bien que nous sommes victimes d’une profonde injustice», peste notre interlocuteur. Dans la forme comme dans le fond, ces constatations posent comme principe le financement de la campagne de tous par le Trésor public. Seulement, il n’en est rien, si l’on s’en tient aux dispositions de l’article 285 du Code électoral. D’après ce texte en effet, «dans le cadre des élections des députés, des sénateurs, des conseillers régionaux ou des conseillers municipaux, les fonds publics destinés au financement des campagnes électorales sont répartis en deux (2) tranches d’égal montant aux partis politiques qui participent à ces élections».

    Choix
    Dans un tel contexte, les approches en termes de stratégies ont libre cours dans les cours royales. Ici et là, l’on s’engage dans un choix plus «résilient» pour battre efficacement campagne sur le terrain. Pour Roger Issa Abba, chef traditionnel et candidat dans la région de l’Adamaoua, pas besoin de lésiner sur ses propres deniers. «Nous avons l’avantage de présenter une liste consensuelle qui sera seule en compétition dans notre circonscription. Cela a favorisé la mobilisation de nos modestes moyens pour préparer les descentes sur le terrain afin de rencontrer nos électeurs», explique-t-il.

    Pour d’autres comme Gabriel Tsidie (tête de liste du commandement traditionnel du département de la Menoua dans l’Ouest du pays), trouver de l’agent pour battre campagne intègre des stratégies opérationnelles basées sur le modèle participatif. «C’est vrai que nous avons fait appel à nos élites, mais nous avons tenu à maintenir notre indépendance et notre engagement personnel lors de la campagne», avance-t-il dans les colonnes du média cité supra.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Port autonome de Kribi : Un 1000e navire accoste

    Port autonome de Kribi : Un 1000e navire accoste

    Le «Maersk Copenhagen Singapore» a jeté l’ancre au Terminal à conteneurs le 18 novembre 2020.

     

    Patrice Melom (le directeur général du PAK) et son staff, composé de Bertrand Ndi (capitaine de port) et Michael Mama (directeur des opérations), avaient la mine particulièrement heureuse ce jour. Sous leurs yeux, un porte-conteneur de 250 mètres de long a accosté ce 18 novembre 2020. Pour cet appel symbolique, une cérémonie protocolaire a été organisée au Port le jeudi 19 novembre à midi.

    À cette occasion, Patrice Melom et ses proches collègues sont allés porter un toast à l’équipage du navire. Noel S. Asuncion, capitaine du Maersk Copenhagen Singapore, a été agréablement surpris par cet accueil. «Nous avons accosté la veille et personne ne nous a soufflé que nous représentions une escale symbolique pour le port de Kribi. Notre manœuvre d’accostage a été parfaite, et nous avons tout de suite eu le plaisir de découvrir un port très fonctionnel, avec des portiques fonctionnant à un rythme particulièrement satisfaisant. Nous quitterons le port de Kribi très heureux. Heureux d’avoir pu rencontrer le directeur général, d’avoir reçu un cadeau, mais surtout heureux de marquer l’histoire de ce jeune port», a-t-il déclaré.

    Quant à Patrice Melom, il est très excité de compter le nombre d’escales des navires. «Nous sommes partis de 1, puis 10, 100, 500 pour arriver aujourd’hui à 1000. Le symbolisme est évident. En tout cas, c’est une véritable source de satisfaction pour l’autorité portuaire de Kribi. Il montre que le trafic augmente progressivement au port de Kribi. De plus, nos utilisateurs sont satisfaits de la qualité des services rendus dans notre port, ce qui devrait faire la fierté du Cameroun dans son ensemble.»

    De plus, «les installations sont encore très limitées», précise le directeur général. Allusion a été faite notamment à la ligne de quai, à moins de 700 mètres seulement. Ainsi, «si en moins de trois ans d’exploitation, on parvient encore à immatriculer 1000 navires dans cet environnement hypercompétitif, cela signifie que le potentiel est incontestable. Les prévisions restent prometteuses, ce qui a d’ailleurs motivé les travaux d’extension en cours, à disposer de 7000 mètres de quais supplémentaires, d’une meilleure capacité de stockage et d’équipements supplémentaires». Cette 1000e escale est une bonne indication de l’attractivité toujours croissante du port de Kribi, du dynamisme de tous les acteurs de sa communauté et un gage de la confiance des acteurs clés dans le domaine du transport maritime international.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Déplacés et réfugiés à l’Extrême-Nord du Cameroun : Les effectifs redeviennent pléthoriques

    Déplacés et réfugiés à l’Extrême-Nord du Cameroun : Les effectifs redeviennent pléthoriques

    Selon la Caritas du diocèse de Maroua-Mokolo, le flux fuyant les exactions de la secte djihadiste Boko Haram est aujourd’hui à 550 000 personnes.

    Instantané dans un camp de réfugiés dans le septentrion

    Le chiffre est soumis à l’attention de l’opinion publique internationale par Edouard Kaldapa. Repris par le site Vatican News (VN) le 18 novembre 2020, le secrétaire permanent de la Caritas du diocèse de Maroua-Mokolo évoque la situation alarmante qui prévaut actuellement à la frontière entre le Cameroun et le Nigeria. «Depuis pratiquement le début de l’année 2020, nous assistons à des attaques régulières des éléments de la secte islamiste Boko Haram, qui obligent la plupart des ménages à quitter leurs maisons et à fuir. C’est ainsi que le nombre de personnes déplacées et de réfugiés nigérians continue d’augmenter» alerte le prélat dans une interview accordée à VN. Et de poursuivre: «On peut estimer aujourd’hui à 550 000 le nombre de personnes déplacées, dont environ 100 000 réfugiés nigérians. Et le reste ce sont des déplacés internes camerounais. Or la tendance était déjà à la baisse».

    Insécurité minorée
    Selon Edouard Kaldapa, la région de l’Extrême-Nord et les villages qui sont à la frontière sont régulièrement victimes d’attaques quasiment pas connues. Les populations vivent ces menaces dans le silence et n’arrivent pas à recevoir les aides dont elles ont besoin pour mener une vie normale. «Donc, nous invitons la communauté internationale à être un peu plus attentive, même si cette communauté internationale ne fait généralement attention qu’aux actions un peu plus spectaculaires, comme des attentats kamikazes, alors que tous les jours des personnes vivent dans la précarité et dans la peur, et ne sont pas du tout soutenues. Nous lançons donc un cri d’alarme pour que les gens aient en tête que la crise de Boko Haram, dans l’Extrême-Nord du Cameroun, n’est pas terminée», insiste l’interviewé de VN.

    Par ailleurs, dans une description poignante, ce dernier fait savoir que les personnes restées dans leurs villages à la frontière continuent de vivre une situation assez alarmante. Elles sont obligées de passer des nuits dehors et se font même attraper par des éléments de Boko Haram dans leurs cachettes.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Yaoundé : Nigérians et Ghanéens «broient» du fer pour survivre

    Yaoundé : Nigérians et Ghanéens «broient» du fer pour survivre

    Sans emploi formel, ils se sont mués en récupérateurs de métaux au quartier Nkoabang.

    Mba’asan, des jeunes nigérians et ghanéens à la recherche du fer.

    Sans doute faudrait-il commencer en évoquant le lieudit Mba’asan. Niché à Nkoabang, le site sert de décharge aux populations de cette banlieue à l’est de Yaoundé. Ce 16 novembre 2020, Onwuka progresse en short sur un tas d’ordures. Tatouage d’araignée sur l’épaule gauche, il a le regard serein. À ses côtés, Awiwa, qui confesse 24 ans, dont 3 passés au Cameroun. Munis de burins, de haches et de marteaux, les deux jeunes Nigérians s’apprêtent à désosser un vieux taxi. Tout en gérant les mouvements d’un engin lourd, Onwuka insinue que ce job réclame deux choses: force physique et expertise. «Nous faisons ce métier depuis; c’est de ça que nous vivons ici au Cameroun», explique-t-il, tout en se plaignant d’un mal de hanches.

    «Ajustement»
    Malgré ce désagrément, on le comprend: Onwuka et une vingtaine d’autres jeunes parmi ses compatriotes résidant à Nkoabang sont sans-emploi. Ils se sont «ajustés» et ont fait de la profession de récupérateur informel de déchets un tremplin leur permettant de se redonner des moyens de se construire, se reconstruire une vie. «Certaines personnes pensent que (…) nous sommes fous», rigole Awiwa. Comme éléments complémentaires de sens, l’on obtient de lui qu’«il vaut mieux accepter cela que de voler». Ce qui se dit en filigrane dans ce propos englobe à la fois la peur du bien d’autrui et le génie de la récupération des métaux.

    Selon plusieurs avis glanés au sein du groupe, la collecte du fer est rythmée par les moments de décharge des camions, entre 4 h et 7 h du matin. «Nous connaissons les immatriculations des camions qui font la collecte dans les quartiers des riches», expose Igwari, un jeune Ghanéen. Dans ce ciblage de fers intéressants, tous cherchent à optimiser l’efficacité de l’ensemble de la chaine de valeur, essentiellement à deux niveaux: remarquer la tendance générale du marché, en amont et en aval, et satisfaire les clients. Dans le fond, il s’agit d’un processus consistant à analyser les opportunités existant sur le marché du fer à Yaoundé, et à définir une offre concurrentielle s’adressant à une demande identifiée.

    Difficultés
    Substances chimiques, bactéries, bruit, horaires de nuit, mais aussi souffrances psychiques liées aux incivilités et à une mauvaise image de leur métier: «des risques multiples» pèsent sur ces jeunes. La fouille, qui se fait à mains nues dans les buissons, les interstices et les creux de Nkoabang, provoque parfois des frictions avec les riverains. Pour mieux contenir les déconvenues, ces jeunes entendent s’organiser au sein d’une coopérative et à sortir de la tutelle des mafieux du recyclage, à négocier des contrats avec des importateurs de métaux basés dans leur pays d’origine. Pour l’instant, ils n’ont aucune autonomie économique, puisqu’ils sont totalement dépendants d’une longue chaine. Les déchets qu’ils récupèrent sont pris en charge par des grossistes et semi-grossistes, via des intermédiaires basés au Camp Yabassi à Douala. Toutefois, à Nkoabang, ils ont réussi à donner naissance à une nouvelle catégorie d’«entrepreneurs des déchets», éloignés de la figure classique des chiffonniers dans la jungle urbaine.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • APE Cameroun-Union européenne : Mésentente cordiale autour du démantèlement tarifaire

    APE Cameroun-Union européenne : Mésentente cordiale autour du démantèlement tarifaire

    L’une et l’autre parties n’en finissent pas d’exhaler un parfum de colère au sujet de la suspension de la mise en œuvre de la cinquième phase du calendrier de l’accord qui les lie.

    Le Minepat et le patron de l’UE au Cameroun: la flamme et la fumée

    Que le courant passe mal entre le Cameroun et l’Union européenne (UE), on le constate ces jours-ci, et un peu plus que par le passé. On n’en est pas encore aux noms d’oiseaux, mais la charge n’en est pas moins d’une violence qui laisse pantois plus d’un. Si l’on en croit «Investir au Cameroun», «en dépit des protestations de l’UE, le Cameroun va maintenir la suspension du démantèlement tarifaire prévu par l’Accord de partenariat économique (APE) qui le lie aux pays de cet espace communautaire».

    Dans une publication datée du 11 novembre 2020, le site camerounais d’informations économiques indique que Yaoundé, sous la plume d’Alamine Ousmane Mey, a porté ce message à la partie européenne le 10 novembre dernier. Dans sa correspondance, le ministre camerounais de l’Économie (Minepat) ne s’est pas contenté d’effleurer les sujets qui fâchent. Éclairé par les dispositions de l’article 57 de la Convention de Vienne de 1969 sur les traités internationaux, Alamine Ousmane Mey écrit que «celles-ci permettent en effet, à une partie au traité, de suspendre partiellement ou totalement l’application d’un accord en raison de circonstances irrésistibles et imprévisibles».

    Insensibilité
    Bien plus, le clairon de Yaoundé sonne la charge en pointant l’intransigeance égoïste de son partenaire européen, qui fait valoir une disposition insensible aux menaces qui pèsent sur l’économie camerounaise. Il s’agit notamment d’«un dommage grave à l’industrie domestique produisant des produits similaires ou directement concurrents sur le territoire de la partie importatrice»; «des perturbations dans un secteur de l’économie, en particulier si ces perturbations engendrent des problèmes sociaux importants ou des difficultés qui pourraient provoquer une détérioration sérieuse de la situation économique de la partie importatrice» ou «des perturbations des marchés des produits agricoles similaires ou directement concurrents ou des mécanismes régulant ces marchés», rapporte «Investir au Cameroun».

    Au moment où nous allions sous presse, le gouffre qui sépare les deux parties sur les enjeux de la suspension temporaire du démantèlement tarifaire n’avait pas été réduit d’un centimètre. Dans les couloirs, certains diplomates évoquent un «couac révélateur d’un APE biaisé dès le départ avec une UE décidée à ne pas rogner ses avantages depuis le 4 août 2016, date de la mise en œuvre de l’accord».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Soutien aux PME : Près de 10 milliards FCFA disponibles

    Soutien aux PME : Près de 10 milliards FCFA disponibles

    Décliné en ligne de crédit, le pactole vise à renforcer la résilience des entreprises affectées par la crise de la Covid-19.

    Mis en place à la faveur d’un partenariat stratégique noué entre la filiale camerounaise du groupe bancaire français Société Générale (SGC) et la Banque européenne d’investissement (BEI), le nouveau dispositif est disponible immédiatement et sera géré par Société Générale Cameroun. Sont éligibles : les entreprises camerounaises des secteurs de l’industrie manufacturière, du commerce, de l’agriculture, du tourisme et des transports. Grâce à cette enveloppe, elles pourront bénéficier des conditions de décaissement plus souples afin d’être plus résilientes dans un environnement économiques malmené par la crise du coronavirus.

    L’initiative  a été officiellement lancée ce 17 novembre 2020 à Douala en présence d’Achille BassilekinIII (ministre des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisanat du Cameroun), de Mareme Mbaye Ndiaye (directeur général de SGC), et de Nikolaos Milianitis (chef de la représentation de la BEI en Afrique centrale).

    Pour le gouvernement camerounais, « cet appui permet aux PME camerounaises de renforcer leurs défenses immunitaires face à la récession économique globale qui s’installe dans le sillage de la crise mondiale ».

    «Cette nouvelle aide ciblée à l’appui des investissements du secteur privé réunit l’expertise technique et la connaissance approfondie des besoins des entreprises locales de deux partenaires internationaux déterminés à promouvoir des investissements porteurs de transformations dans toute l’Afrique », a déclaré Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI.

    « Il devient primordial de continuer à assurer l’accès au financement pendant cette période de pandémie, afin de protéger les emplois, débloquer les investissements des entreprises et favoriser la croissance économique », a déclaré Mareme Mbaye Ndiaye, directeur général de SGC.

    « L’Afrique et l’Europe ont fait le choix de se donner la main pour, ensemble, faire face aux répercussions de cette pandémie, notamment avec un soutien accru au secteur privé qui est l’un des secteurs les plus sinistrés par cette crise sanitaire. L’accord conclu aujourd’hui entre la Société Générale Cameroun et la Banque européenne d’investissement, entre donc dans ce cadre. La Team Europe (l’UE et ses États membres) espère que l’enveloppe de près de 10 milliards de FCFA (15 millions d’euros), affectée au projet aidera les entreprises camerounaises à relancer leurs activités », a-t-on entendu de la bouche de Sébastien Bergeon, chargé d’affaires par intérim à la délégation de l’Union européenne au Cameroun.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Bains de minuit autour du CBF

    Bains de minuit autour du CBF

    Des silhouettes visibles et invisibles se démènent dans le marigot, espérant voir le Cameroon Business Forum changer de format.

    Le ministre du Travail et le patron du Gicam: grandes manoeuvres sur le CBF

    Le 16 décembre prochain, le Gicam (Groupement inter-patronal du Cameroun) tiendra son assemblée générale ordinaire et élective. En prélude à cette échéance cruciale pour les seigneurs des affaires, Célestin Tawamba, candidat non encore officiellement déclaré à sa propre succession, défend un projet. Le 9 novembre 2020, «le patron des patrons» a d’ailleurs porté le manifeste à Yaoundé auprès de Grégoire Owona et Achille Bassilekin III. À chacun des deux membres du gouvernement, l’agro-industriel a offert un exemplaire du Livre blanc du Gicam. Dans l’une de ses lignes fortes, le document (également offert au Premier ministre, Chief Joseph Dion Ngute le 19 octobre 2020) ne demande pas moins qu’un coup d’arrêt du Cameroon Business Forum (CBF). 

    Selon le Gicam, il faut rompre avec le passé écrit par ce gadget créé en 2006 et rendu opérationnel en 2009. «Nous pensons que tout ce qui est en préparation, l’évènement lui-même, le suivi-évaluation, doit changer», insistait Francis Sanzouango sur les antennes d’Equinoxe TV. Comme proposition, le patronat camerounais plaide pour la mise en place du Cameroon Business Council (CBC). Le directeur de cabinet du président du Gicam y voit «un mécanisme qui est plus universel, qui traite de tous les problèmes de l’environnement des affaires et de la compétitivité des entreprises», avec «des différences ou des nouveautés au niveau du mode opératoire».

    «Allié»
    Bien plus, pour le Gicam, le changement souhaité devrait entrainer un sérieux lifting et une redistribution des postes: baisse du nombre de participants à la discussion; attribution de la vice-présidence des assises au Gicam et la préparation collégiale de l’évènement. Telle que formulée, l’affaire renvoie implicitement aux propos d’Emmanuel de Tailly contenus dans le quotidien privé Mutations, édition du 12 juin 2020. «Nous avons une grande ambition pour notre économie et son secteur privé.

    C’est pourquoi nous multiplions les plaidoyers en faveur de ce dialogue public-privé puissant, fédérateur et sincère. Les exemples de ce type de partenariat en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Rwanda, au Ghana, démontrent à souhait que “seul, on va peut-être plus vite, mais ensemble, on va définitivement plus loin”. Il faut que cette crise soit l’occasion de prendre des décisions courageuses sur la fiscalité, la dette intérieure, l’environnement des affaires», avait émis le patron de la Société anonyme des brasseries du Cameroun (SABC).

    IFC?
    Au sein de l’opinion publique, l’on soupçonne une démarche pilotée depuis l’IFC (Société financière internationale). En attendant que cette information gagne en plausibilité, l’on peut d’avance retenir que «IFC n’a de cesse de demander au Premier ministre de sensibiliser le locataire du Palais d’Etoudi sur l’urgence d’accélérer les réformes bloquées à son niveau. Une décennie après sa création, la Caisse des dépôts et consignations n’est toujours pas opérationnelle, faute de responsables nommés».

    C’est en tout cas ce que croit le magazine Jeune Afrique du 30 septembre 2018. En juillet 2018, Sérgio Pimenta, le vice-président pour le Moyen-Orient et l’Afrique de cette filiale du groupe de la Banque mondiale, était au siège du Gicam. Là-bas, précise une source proche du patronat, il a pris acte de l’échec du CBF avec comme preuve le fiasco de la phase I du DSCE (Document de stratégie pour la croissance et l’emploi). Dans cette ambiance présumée de soupçons et de pressions, Yaoundé reste encore de marbre.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • RDPC-Equinoxe TV : Chouette divorce

    RDPC-Equinoxe TV : Chouette divorce

    Des cadres du parti de Paul Biya s’insurgent contre les choix éditoriaux de la chaine de Sévérin Tchounkeu.

    Au moment où nous allions sous presse, aucune réaction officielle du comité central du RDPC n’avait clairement instruit à ses militants de boycotter la chaine de télévision du groupe de presse Equinoxe. Silence radio également du côté du promoteur de cette dernière. Se targuant de parler au nom de leur parti, quelques militants habitués des plateaux de la chaine de Sévérin Tchounkeu disent que c’est pour de vrai. Au soir du 12 novembre dernier, Serge Alain Ottou, présentateur du programme Equinoxe Soir diffusé sur la chaine de télévision émettant à partir de Bonakouamoung (Douala) le faisait savoir. «Cette chaise devait être occupée par Jacqueline Koyock du RDPC. 5 minutes avant le début de l’émission, elle me fait dire que le professeur Laurent Charles Boyomo Assala a décidé de la suspension des interventions du RDPC chez nous. Je vous reprends ce qu’elle m’a dit», dixit Serge Alain Ottou.

    Avant, les téléspectateurs avaient eu droit à des plages houleuses entre les militants du RDPC et Equinoxe TV. Le 9 novembre 2020, Samuel Dieudonné Moth se montrait très amer en direct. «Votre chaine de télé a fait passer un entretien avec une femme qui, manifestement, a été payée dans Paroles de femmes (…). Des propos tendancieux, dégradants pour nos forces de défenses. (…) La direction de notre parti a souhaité qu’Equinoxe puisse présenter ses excuses aux forces de défense. Si nous ne recevons pas des explications, des excuses de la part de votre chaine, nous aurons du mal à revenir chez Equinoxe», avait alors dégainé le député RDPC du département du Nkam (région du Littoral).

    Dans ce clash, une ligne d’interprétation allie et le boycott de toutes les émissions par des cadres du parti de Paul Biya et la récente mise en demeure d’Equinoxe Tv par René Sadi, le ministre de la Communication (Mincom). Motif évoqué: au cours de l’émission «Parole de femmes», diffusée le 3 novembre 2020 sur cette chaine, l’une des panélistes, Stéphanie Djomo, a indiqué qu’elle a perdu ses jumeaux au début de la crise anglophone. Le 9 mars dernier, Sévérin Tchounkeu et son équipe essuyaient l’ire de Paul Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale (Minat) et fervent militant du RDPC. Ce membre du gouvernement accusait alors la chaine privée (et deux autres médias) d’être à la solde de certaines organisations aux desseins mafieux. Sévérin Tchounkeu, le PDG de l’entreprise incriminée, avait brandi le professionnalisme de ses journalistes.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Assassinat de Moumié à Genève : Le commanditaire court toujours

    Assassinat de Moumié à Genève : Le commanditaire court toujours

    «Innocenté» par la justice suisse, l’espion français William Bechtel reste le suspect numéro 1.

    Prix Moumié à Genève

    «C’est lui!». En énormes caractères et photo à l’appui, un tel titre en grande une d’un tabloïde aurait certainement permis de sortir du labyrinthe des incertitudes pour découvrir une silhouette, celle de William Bechtel. L’homme qui, le 3 novembre 1960 à Genève (Suisse), empoisonna au thallium Félix-Roland Moumié. 60 ans après les détails connus du drame, le Cameroun et l’Afrique entière se les répètent en une litanie écœurante. 60 ans après, parcouru par une double inspiration, un grand reportage diffusé le 3 novembre 2020 sur les ondes de Radio France Internationale (RFI) soumet le drame à la critique et au questionnement: «France-Cameroun: comment le tueur de l’indépendantiste Félix Moumié a échappé à la justice?».

    Galvaudage
    Par les outils dont elle dispose, RFI offre une matière iconographique sans précédent avec, à la clé, des rapports obscurs et équivoques. Tout ici est, du moins dans les mots utilisés, de l’ordre de l’incroyable. William Bechtel, mort en 1990 «en toute quiétude à l’hôpital du Val de Grâce, comme de nombreux grands serviteurs de l’État français», n’a jamais répondu de ses actes. Selon RFI, cette mort est sans doute ce à quoi il faudrait prêter le maximum d’attention. En tout cas, dire que le prévenu était «présumé innocent» n’offre aucun sens, puisque s’il a été mis en examen, c’est bien parce qu’il est «présumé coupable».

    «Hasard ou non? William Bechtel est finalement libéré sous caution en échange de 10 000 francs suisses. Son avocat, Marc Bonnant, n’a aucune peine à les rassembler. “Ses camarades, ses amis ont agi pour que m’afflue l’argent nécessaire, par l’intermédiaire de dizaines de donateurs anonymes”. La France a-t-elle payé? “La modestie des sommes rassemblées me donne à croire que ce n’est pas simplement l’État qui a signé un chèque, mais des particuliers suscités, mis en œuvre par l’État et par des solidarités de lutte et de combat”», relate Florence Morice, le reporter de RFI.

    Et pourtant…
    «L’accusation portée contre William Bechtel était d’avoir assassiné Moumié en tant qu’agent secret, et donc d’avoir agi sur ordre des autorités politiques françaises. Il s’agissait d’un assassinat politique», justifie l’avocat aujourd’hui. «Pasqua et Pandraud m’ont répondu qu’ils prenaient la mesure du problème et qu’ils feraient ce qu’ils avaient le pouvoir de faire et qui était légitime qu’ils fissent. Est-ce que cela s’est traduit par des interventions diplomatiques? Le dossier, en tout cas, n’en porte aucune trace», avance-t-il.

    Un dossier dont la justice suisse a longtemps répondu, y compris à la veuve de Félix Moumié, qu’il était «introuvable», et dont elle affirme aujourd’hui qu’il a été «détruit il y a longtemps», à en croire le média français. Cette description détaillée permet de dégager, en creux, l’idée que le criminel est singulièrement différent d’un homme ordinaire et qu’il porte sur lui et en lui, la lourdeur de ses fautes et les traces de son crime, et que c’est bien le système colonial lui-même qui a été capable de produire ce qu’il a produit. À la manœuvre, des noms connus de la Françafrique: Valéry Giscard d’Estaing et Charles Pasqua.

    Dans sa tonalité, le documentaire de RFI plaide pour un nouveau procès, après une procédure de révision. Celle-ci obligerait alors la justice à expliquer comment ont été comprises les charges, comment elles valent 60 ans après, et pourquoi une condamnation n’a pas été prononcée.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Propos d’Alassane Dramane Ouattara : Les hauts  et les bas en procès

    Propos d’Alassane Dramane Ouattara : Les hauts et les bas en procès

    La sortie, le 1er novembre 2020, du président proclamé élu en Côte d’Ivoire, face à la presse, est perçue à la fois comme héroïque et indigne par quelques Africains installés à Yaoundé.

    Alassane Dramane Ouattara, mauvais gagnant

    «Vous devez arrêter d’imposer les normes de l’Occident aux Africains. Nous sommes suffisamment majeurs pour gérer nos pays. Nous le faisons en fonction de nos objectifs. La Côte d’Ivoire est un pays qui est sorti de crise; qui a besoin de stabilité. Et c’est au nom de cette stabilité que j’ai personnellement accepté de faire ce mandat auquel j’avais renoncé. Donc, je crois que ça suffit comme ça»! Les mots sortent de sa bouche, telles les notes d’un instrument de musique. Et le musicien, c’est Alassane Dramane Ouattara (ADO), chauffé à blanc par les critiques internationales au sujet de ses 94% obtenus.

    Pour quelques ressortissants africains installés dans la capitale camerounaise, ces phrases sont un tacle à peine voilé contre l’Occident. Certains sont tombés de leur chaise en entendant le vainqueur de la présidentielle du 31 octobre 2020 en Côte d’Ivoire jeter son dévolu sur le sens propre plutôt que sur le sens figuré. «Quitte à surprendre, je ne suis pas sûr qu’ADO ait eu tort», se félicite le Tchadien Koye Dourang. Consultant dans une ONG internationale, il pense que «l’heure est venue de porter clairement une communication politique et diplomatique qui favorise l’émergence d’une opinion publique africaine au niveau international». «ADO a clairement signifié par là qu’il fallait reconstruire une autonomie africaine dans un environnement où les leadeurs tergiversent et semblent retarder encore et toujours l’heure d’aborder la question des rapports entre l’Occident et le continent africain», argumente Koye Dourang.

    Autrement…
    Dans ce que le Sénégalais Maal Mbow appelle «la gifle de Ouattara à la France», quelques analyses recourent à une lecture nuancée des propos du vainqueur déclaré de la présidentielle du 31 octobre 2020 en Côte d’Ivoire. «Face à un journaliste français, M. Ouattara a affiché une volonté de franchise. Il s’en défend, mais il a un ton un peu moralisateur que je trouve dérangeant. Il doit faire attention à ne pas tomber dans l’extrême inverse avec un discours moralisateur», fait entendre le Béninois Yayou Kokou. Diplomate à la retraite, à Yaoundé, ce dernier prête son expertise à un think tank spécialisé dans les relations internationales. À l’aide de ce profil, il pense autrement. «Ce dont parle ADO ne date pas d’hier, dit-il. On en débat depuis des années, mais rien n’a été fait ou presque pour que les normes démocratiques de l’Occident ne s’imposent pas en Afrique. Maintenant, ce qu’il faut espérer, c’est que la posture d’ADO ne soit pas déconstruite, d’une manière ou d’une autre, par l’Occident. Et il faut espérer aussi que ce qui a été dit soit applicable dans des situations concrètes. Parce qu’il y a la théorie, la pratique et… ce qui les sépare».

    «Chiffon verbal»
    Dans leurs analyses, d’autres ressortissants africains étrillent le «divertissement télévisuel de Alassane Dramane Ouattara», selon l’expression de Paulin N’guessan. Farouchement opposé à la réélection d’ADO, l’Ivoirien voit un «homme toujours en campagne, plutôt qu’un président digne de sa fonction». «Un homme qui clive les Ivoiriens et meurtrit le sentiment républicain en se cantonnant aux énervements de matamore pour masquer son passage en force pour un 3e mandat. Quand on est président, il y a des mots et des méthodes que l’on n’emploie pas», gronde-t-il. Même tonalité chez son compatriote Cyprien Kouamé. Pour lui, cette sortie d’ADO, le 1er novembre dernier, relève du «grand spectacle; car tenir un tel discours, c’est tenter de percer en recyclant de vieux tubes aux refrains éculés».

    Jean-René Meva’a Amougou 

  • «Élection volée» : De loin, les Africains  observent l’oncle Sam

    «Élection volée» : De loin, les Africains observent l’oncle Sam

    Face à la l’emballement des calculettes utilisées pour l’élection présidentielle américaine, quelques citoyens du continent excellent dans la dérision.

    Donald Trump, mauvais perdant

    «Élection volée aux États-Unis»? Installée en grand format au coin des débats politiques dans le monde entier, la question tape à la porte des commentaires en Afrique. «Élection volée ou victoire volée, chez nous où le logiciel démocratique se plante à chaque scrutin, c’est une vieille anthologie», s’amuse Koye Dourang. S’il chantonne la possibilité de voir le pays de l’Oncle Sam «incapable de maitriser sa démocratie», le Tchadien fait un constat désespérant: «avec cette élection, on voit bien le président sortant qui s’agite sous le soleil brulant comme une tortue obèse sur le dos». Allusion faite à Donald Trump accusant son adversaire Joe Biden de «voler l’élection» via des votes illégaux. À ce sujet justement, les langues fourchent. «Ça s’appelle l’arroseur arrosé», lance tout sourire le Guinéen Bali Diallo.

    Il dit ne pas comprendre que «ce qui fait l’ADN des élections présidentielles en Afrique mette aussi les États-Unis dans une telle panade». Dans une vision qui ne manque pas de se combiner à des références fréquentes aux actualités électorales à travers le continent, Koye Dourang fait en même temps le procès d’«une démocratie disposant de tous les moyens logistiques et des administrateurs des élections auto-proclamés intègres». «Ce qui se passe aux États-Unis laisse penser que les abus et les irrégularités en matière électorale restent fermement d’actualité partout dans le monde et que certainement, c’est là où l’Afrique inspire les démocraties dites grandes», valide le Tchadien.

    Tentant de reconfigurer l’expression à l’aune des situations souvent vécues sur le continent, Paulin N’guessan pose l’hypothèse que le duel entre Donald Trump et Joe Biden pourrait ne pas faire avancer le corpus démocratique en Afrique. «Ceux qui s’accrochent au pouvoir disposent là d’une belle excuse pour bidouiller le vote en leur faveur, en prétextant que même aux États-Unis, le décompte des votes n’est pas une chose aisée», avance l’Ivoirien.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Investissements étrangers : Corinna Fricke prospecte pour les Allemands

    Investissements étrangers : Corinna Fricke prospecte pour les Allemands

    Avant de mettre ses compatriotes au centre du jeu économique, la diplomate germanique titille l’environnement des affaires dans son pays d’accueil.

    L’ambassadrice de RFA recevant le livre blanc du Gicam

    À Douala, au siège du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), l’ambassadrice de la République fédérale d’Allemagne (RFA) a été reçue en grande pompe. Rapportée par le site officiel du patronat camerounais le 30 octobre 2020, la visite de Corinna Fricke était la toute première dans la capitale économique. La même source souligne que la diplomate germanique était accompagnée de Rico Langeheine (directeur de la GIZ) et de Alfonce Tata du Skills Initiative For Africa (SIFA).

    Face à quelques têtes du Gicam, la visiteuse s’est dite disposée à soutenir les entreprises locales via un accompagnement décliné en plusieurs points (notamment l’aménagement et l’équipement du centre d’incubation du Centre de développement de la PME; le financement d’une session de formation des formateurs sur des sujets économiques de grande envergure et l’accompagnement de la participation des PME au Salon international PROMOTE, édition 2021, afin de nouer des partenariats, créer des synergies avec d’autres organisations nationales et internationales pour ajouter de la valeur à leurs services et produits).

    Si, globalement, Corinna Fricke a jugé que les perspectives des relations entre la RFA et le Cameroun restent favorables, elle s’est inquiétée du climat local des affaires. Selon elle, du fait des difficultés d’accès aux financements et des faibles capacités managériales, les investisseurs allemands restent indécis sur les chances de fructifier leurs mises au Cameroun. En filigrane, un message: être une terre d’accueil pour les investisseurs étrangers ne suffit plus; il faut se donner les moyens de figurer parmi les premières destinations sur le carnet des investisseurs. Pour Corinna Fricke, il faut faire monter en gamme l’environnement des affaires. L’objectif est de positionner les entreprises allemandes sur les marchés camerounais.

    «Les Allemands peuvent compter sur la puissance de frappe du Groupement inter-patronal du Cameroun pour mieux prospecter. Car ce patronat regroupe 21 associations, 729 entreprises dont le chiffre d’affaires (CA) s’élève à 9860 milliards FCFA, c’est-à-dire 67% du CA des entreprises au Cameroun. Ces entreprises emploient 221 000 personnels (27% des emplois de ce pays)», a expliqué André Kwam, président de la commission PME et financement du secteur privé.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Cancer du col de l’utérus : La polémique vaccine le Gardasil

    Cancer du col de l’utérus : La polémique vaccine le Gardasil

    Des voix continuent de s’élever contre l’administration du produit aux jeunes filles. Le gouvernement interpelé pour la révision de sa communication.

    La question est claire: y a-t-il un risque à administrer le Gardasil aux gamines de 9 à 13 ans pour prévenir chez elles des lésions du col de l’utérus? La réponse de Mgr Abraham Komé, président de la Conférence épiscopale nationale du Cameroun (CENC), est simple: «Nous avons des doutes et nous partons d’un principe logique: en cas de doute il faut s’abstenir. Nous pensons que des études doivent être plus approfondies». Le 6 novembre dernier, au sortir de la 45e assemblée plénière des évêques du Cameroun, le prélat a émis un préalable tout en nuance. «Le comité d’éthique doit se prononcer (…) Il faut que ce soit bien clair: nous ne sommes pas là contre la vaccination (…) Mais pour ce vaccin-là, nous avons accueilli, venant de la base, et de façon très récurrente, des angoisses, des crispations et des récriminations de nos populations», a-t-il déclaré devant la presse à Yaoundé.

    Onction
    Dans la forme comme dans le fond, cette sortie médiatique est venue donner son onction aux directives de Mgrs Dieudonné Espoir Atangana et Luc Onambelé, respectivement évêque du diocèse de Nkongsamba et vicaire du diocèse d’Obala. Dans une lettre signée le 5 novembre 2020, le premier martelait: «je viens par la présente, de façon formelle, vous demander de vous garder de soumettre nos enfants à ce vaccin en attendant que les évêques du Cameroun puissent donner leur accord de façon claire et officielle». Le 19 octobre dernier, le second (par ailleurs médecin) déployait un sermon identique à l’échelle de son giron sacerdotal.

    Dans cette brèche anti-vaccin, le Gardasil s’est également greffé aux prêches dans les milieux musulmans. «Nous, musulmans pour la coopération et le développement (MCD), de façon formelle et ouverte, demandons aux musulmans de ne pas soumettre nos enfants de 9 à 13 ans à ce vaccin cible de naissance pour la prospérité», peut-on lire dans le communiqué signé le 5 novembre 2020 par le secrétaire exécutif du MCD, Alihou Soule.

    Quelques jours auparavant, en posture de pro-Gardasil, Guy Sandjon, président en exercice de l’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC), scandait qu’aucun vaccin «n’a été créé avec pour objectif de stériliser la population de femmes ou pour éradiquer une race de la surface de la Terre».

    «Injection»
    «La vague contestataire montre qu’il est lointain aujourd’hui le temps où les décisions concernant la médecine et la santé ne souffraient d’aucune réticence», relève Pr Géneviève Owona. «Des autorités défiées, des experts ignorés, sans doute, dans ses plans, le gouvernement n’avait pas envisagé un tel scénario», commente la sociologue de la santé. En effet, en introduisant, le 5 octobre 2020, le Gardasil dans le Programme élargi de vaccination (PEV), comme vaccin contre le cancer du col de l’utérus et les autres infections génitales liées aux papillomavirus, l’offensive est plus rude.

    Ayant côtoyé les équipes du ministère de la Santé publique (Minsanté), Pr Géneviève Owona fait le procès de la communication autour du vaccin contre le cancer du col de l’utérus au Cameroun. «L’affaire, explique-t-elle, trop rapidement interprétée en termes de déni, a échappé à la compréhension des analystes qui se voient réduits, de leur propre aveu, à d’insatisfaisantes conjectures, souvent brouillées par des jugements passionnels ou des réflexes partisans. S’il est vrai que les enjeux en sont complexes, leur intelligibilité passe par un réexamen de la situation à partir, non plus d’inaccessibles subjectivités, qu’elles soient collectives ou individuelles, mais plus banalement, sur la base des réalités sociales du pays».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • ODD : Le zéro et l’infini de l’échec

    ODD : Le zéro et l’infini de l’échec

    Prenant acte de ce triste constat, un groupe de chercheurs a mené, au sein du cabinet Knowledge Consulting, un ensemble de recherches articulant une perspective descriptive et une perspective réformatrice.

     

    C’est devenu un lieu commun que d’évoquer aujourd’hui l’échec des politiques des Objectifs du développement durable (ODD) au Cameroun. Et s’il parait en effet difficile d’aller contre ce constat d’ensemble, il faut se demander si certains mécanismes n’appellent pas un certain redéploiement de la critique. En d’autres termes, il faut faire le point et élever le débat. En 242 pages résumées sous le titre «Le Cameroun en prospective, évaluation critique des Objectifs du développement durable», Benjamin Ombe et son équipe vont au plus près des choses pour mieux les objectiver dans leur globalité, pointer les discontinuités et exhiber leurs ressorts respectifs au prisme de l’Agenda 2030.

    Épreuve des faits
    Dans cet ouvrage sorti le 11 septembre 2020 des presses de l’Harmattan Cameroun, les auteurs évaluent la capacité des politiques camerounaises à soutenir l’investissement et la croissance à long terme, et à faire sortir les citoyens de la trappe de la pauvreté. Selon eux, l’épreuve des faits dégonfle sensiblement le discours politique parfois bâti sur des statistiques biaisées, elles-mêmes sévèrement démenties par les données de terrain. Partout, les incertitudes sur la solidité de la reprise et sur les déséquilibres persistent et empêchent une réelle atteinte des ODD à l’échelle nationale. «Les indicateurs de pauvreté au Cameroun ne sont pas rassurants.

    L’indice de développement humain (IDH) du pays était de 0,563 en 2018 (PNUD, 2019). Le Cameroun est classé 150e sur 189 économies. La part de la population pauvre a augmenté de 12% entre 2007 et 2014, pour atteindre 8,1 millions d’habitants, en raison d’une croissance démographique plus rapide que le rythme de réduction de la pauvreté. Le seuil de pauvreté du pays ne s’est pas fondamentalement amélioré à l’intervalle 2015-2018. Il est de 35,5%, très loin des 23% espérés par le pays en 2020», fait constater Benjamin Ombe, dès le chapitre 1er du livre.

    Ajustement
    Entre les lignes, l’on relève que, dans les ambitions démesurées affichées en matière de suivi des ODD au Cameroun, ce qui compte c’est de créer une représentation qui soit le support d’une conviction socialement signifiante: la course vers l’émergence dans un contexte économique et sécuritaire bien difficile. L’engagement des dirigeants du pays n’est probablement que de façade pour suivre le mouvement édicté par l’agenda des institutions internationales. En effet, il est très courant, dans le champ des politiques publiques, de «faire semblant» pour que tout reste pareil. Mais rien n’est perdu d’avance. Pour réajuster, insistent les auteurs, il convient de s’interroger sur le modèle de gouvernance au plus haut niveau.

    Même si elle est partiellement vraie, la réponse selon laquelle c’est justement parce que la gouvernance est un problème, qu’on y porte plus d’attention et qu’on est à la pointe de la recherche de solutions et du suivi des progrès réalisés, est insuffisante. Dans cet environnement soutenu par des bailleurs de fonds, «Le Cameroun en prospective, évaluation critique des Objectifs du développement durable» suggère une réappropriation critique des outils d’analyse, afin que la satisfaction des besoins sociaux soit comprise de façon plus étendue et, surtout, assortie d’objectifs économiques réalistes. Y est soulignée la nécessité de l’engagement de tous les acteurs, et notamment du secteur privé pour la mise en place de modes de production et de consommation «durables».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Modernisation des aéroports du Cameroun : Grâce à ADC, la high-tech atterrit à Douala

    Modernisation des aéroports du Cameroun : Grâce à ADC, la high-tech atterrit à Douala

    La place aéroportuaire de la ville a reçu un matériel de pointe d’une valeur d’environ 4 milliards FCFA.

    Les nouveaux matériels présentés vendredi dernier à Douala

    À Douala, ce 22 octobre 2020, Thomas Owona Assoumou s’amuse à prendre le visage d’un manager en mieux-être. Il a raison. Dans un contexte de présentation du matériel d’exploitation aéroportuaire qui est celui de ce jour, il est bon d’écouter le directeur général des Aéroports du Cameroun (ADC S.A). «4 aérobus pour le transbordement des passagers; 2 loaders d’une capacité de 7 tonnes; un autre de 14 tonnes; 10 tracteurs de manutention pour le remorquage des charriots à bagages; des unités de chargement et de stockage; 40 charriots porte-conteneurs; 26 charriots porte-palettes de 10 pieds; 5 charriots de 20 pieds; 15 charriots porte-bagages; 30 bancs de stockage de palettes; 30 bancs de stockage de conteneurs, 5 groupes d’alimentation en énergies des aéronefs; 2 camions-hôteliers; 20 barres de tractages des aéronefs de type Boeing 787, 757, 737 et Airbus A340, A330 et A350 et un tracteur de repoussage. À ces équipements et matériels sont associés d’importants lots de pièces de rechange pour leur maintenance». Pour du matériel, c’est du lourd! «Et là, la high-tech se déploie en plein jour au bénéfice de l’Aéroport international de Douala au prix d’environ 4 milliards FCFA», signale Thomas Owona Assoumou, pour mieux édifier ses invités.

    Symbole
    Lorsque l’on met bout à bout les phrases prononcées par Jean Ernest Massena Ngalle Bibehe, l’on conclut que les acquisitions antérieures de ADC S.A. n’avaient été que les gradations préliminaires de cette assomption technologique. Pris dans une spirale d’éblouissement, le ministre des Transports (Mintransports) cherche la bonne métaphore. Et puis lâche: «On est là face à un visuel qui évacue l’argumentation; cette fois, ADC a fait fort!» Et parce que ce symbole de force est désormais appelé à opérer à tous les angles des espaces aéroportuaires du pays, Thomas Owona Assoumou saisit cet instant solennel pour rappeler que Douala s’est retrouvée au centre d’une incroyable mêlée: chute vertigineuse du trafic due à la Covid-19; remarques méprisantes, des injures et même des excommunications prononcées par le haut clergé de l’aviation mondiale. «C’est fini!», jure le patron de ADC S.A. Requiem donc pour tous les détracteurs qui ont fustigé sur la place publique la vétusté des équipements à l’Aéroport de Douala.

    Objectifs
    Selon lui, cela sonne depuis comme une urgence. Raison: «dans la concurrence très vive à laquelle se livrent les grandes métropoles internationales, les plateformes aéroportuaires occupent une place essentielle. Il en va de leur attractivité, de leur capacité à obtenir l’implantation sur leur sol de nouvelles entreprises, de sièges sociaux, mais aussi d’équipements logistiques, à attirer congrès internationaux, foires professionnelles et simples touristes. Avec les grands rendez-vous qu’attend le Cameroun, l’Aéroport de Douala est appelé à devenir une plateforme d’éclatement du fret aérien».

    Par la justesse de cette déclaration, il y a surtout un double objectif: «mettre en place des infrastructures et les équipements de l’aérogare aux standards internationaux en matière de sécurité, de sureté et de confort; porter la capacité annuelle de l’aérogare de 1,5 million à 2 millions de passagers, avec une possibilité d’extension, moyennant des équipements supplémentaires».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Cameroun : Chaude fréquence sur la bande Fm

    Cameroun : Chaude fréquence sur la bande Fm

    Dès le 26 octobre 2020, une force d’intervention mènera des actions nécessaires devant conduire soit au démantèlement des équipements radioélectriques non conformes et de ceux des utilisateurs illégaux, soit à la régularisation de la situation de ces utilisateurs.

     

    Vous êtes à Yaoundé ou à Douala, allumez votre poste de radio et écoutez! Le flot des paroles et des musiques est continu. Depuis la boucle historique amorcée par la loi n° 90/052 du 19 décembre 1990 relative à la communication sociale au Cameroun, on en parle comme d’une ruche, comparaison évoquant une multitude de stations. En effet, «ça bourdonne sur les ondes!», rigole Mouhamadou Awallou. Ce 15 octobre 2020, le directeur de la gestion des fréquences à l’Agence de régulation des télécommunications (ART) passe par les chiffres pour décrire ce qui se passe sur la bande FM. «À ce jour à Yaoundé, énonce l’ingénieur principal des travaux des télécommunications, 66 stations de radiodiffusion sonore émettent en modulation de fréquence. À Douala, 38 ont été comptabilisées».

    Saturation
    Si l’on peut se féliciter de la diversité de l’expression radiophonique à Douala et à Yaoundé, l’affaire reste pour le moins entêtante. «Une suroccupation de la bande FM provoque des risques importants de perturbation: brouillage d’une radio sur une autre ou plusieurs autres, des intermodulations entre radios, un brouhaha de grésillements, une impossibilité d’écouter certaines radios dans certains lieux», indique Herman Olivier Miasse. Pour le cadre technique à l’ART, il y a plus grave encore: «l’aviation, la téléphonie mobile, les banques, les transports ferroviaires et maritimes, l’armée et tous les secteurs qui utilisent aujourd’hui les ressources hertziennes sont tous perturbés». «À Yaoundé et Douala, où chaque radio veut faire entendre sa différence, la bande FM étouffe dans une ambiance de guérilla que mènent les promoteurs avec l’État», enchaine Winfred Mfuh Fuaye Kenji, conseiller technique au ministère des Postes et Télécommunications (Minpostel). Avec cette asphyxie qui court-circuite les ondes, c’est un vrai vent de liberté qui souffle sur la bande FM. «Au nom de la tolérance administrative, un ghetto putride s’est créé dans le paysage hertzien des deux principales villes du Cameroun», regrette Pauline Tsafak Djoumessi. L’État, sonné par cette énorme brèche ouverte dans sa gouvernance, a apporté des réponses ridiculement petites.

    Traque
    Cette fois, il entend reprendre les choses en main. En tout cas, les mots sont là, volontaires dans leur tonalité. «Dès le 26 octobre 2020, une force d’intervention mènera des actions nécessaires devant conduire soit au démantèlement des équipements radioélectriques non conformes et de ceux des utilisateurs illégaux, soit à la régularisation de la situation de ces utilisateurs», annonce Pauline Tsafak Djoumessi ce 15 octobre 2020. On le devine: le défi est à la fois technique et administratif. «D’une part, avise Winfred Mfuh Fuaye Kenji, les autorisations provisoires ne constituent que des outils juridiques mis à la disposition des promoteurs par le ministère de la Communication. Là, c’est une affaire administrative. D’autre part, au niveau du Minpostel, nous insistons sur l’aspect technique».

    À partir de ce discours, qui a le mérite d’afficher clairement les enjeux actuels du débat sur «l’assainissement de la bande FM» à Douala et Yaoundé, une opposition frontale et cristallisée entre les promoteurs de radios et les pouvoirs publics se profile. Ainsi en a attesté la passion avec laquelle les échanges entre «radios» se sont déroulés le 15 octobre 2020 à la salle de conférences du Minpostel. Selon les premiers, qui se réclament connaisseurs affutés de l’ingénierie des rouages administratifs du pays, le discours du second dénonce pêle-mêle les radios illégales et celles ayant au moins une autorisation provisoire. On le voit, l’affaire pourrait, dans les prochains jours, alimenter des questionnements à portée générale sur les niveaux de transgression de la loi.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Autoroute Douala-Yaoundé : En pleines voies d’entrecroisement

    Autoroute Douala-Yaoundé : En pleines voies d’entrecroisement

    De nouveaux acteurs s’insèrent dans le chantier; d’autres le quittent. Le gouvernement à la confluence de l’accélération et de la décélération.

     

    Un tronçon de l’autoroute Douala-Yaoundé en plein chantier

    L’idée était dans les tuyaux depuis plusieurs mois. Emmanuel Nganou Djoumessi l’a confirmée lundi de la semaine dernière. À en croire Investir au Cameroun dans l’une de ses publications du 9 octobre 2020, le ministre des Travaux publics (Mintp) a, le 5 octobre dernier, signé un communiqué. Sur le document, renseigne le magazine économique, figure un classement établi à l’issue d’un travail de présélection.

    Ce dernier est inscrit dans le cadre de l’appel public à manifestation d’intérêt du 4 mars 2020 en vue de la sélection des entreprises et/ou groupements d’entreprises devant accompagner le gouvernement camerounais dans le financement, la conception, la construction, l’exploitation et la maintenance de l’autoroute Yaoundé-Douala (phase 2, Bibodi-Douala longue de 135 km) en mode partenariat public-privé (PPP).

    Par ordre de mérite, Sogea-Satom-Vinci/Razel-Fayat pointe à la très avantageuse première place. Investir au Cameroun précise que la firme française a obtenu une note de 72,5/100 points, soit plusieurs longueurs d’avance sur son suivant immédiat, le Portugais Mota Engil Engenharia Construcao Africa (60,9/100). Sinohydro-PCRB-SDHS, un groupement chinois, ferme la queue avec 60/100.

    Regards
    En première lecture de cette actualité, il apparait clairement que China First Higway Engineering (qui a construit les 60 km de l’autoroute à partir de Yaoundé jusqu’à Bibodi pour le compte de la phase I de l’infrastructure) est désormais hors course. Les retards dans l’exécution des travaux, les protestations de tous bords et d’autres polémiques auront eu raison du prestataire chinois.

    En seconde lecture, Sogea-Satom-Vinci/Razel-Fayat, l’une des plus puissantes enseignes françaises en matière de construction d’infrastructures, tient le haut du pavé et il est peu probable que ses challengeurs aient la capacité de la rattraper. Bien sûr, l’on pourrait objecter que les possibilités de rattrapage dépendent, de façon cruciale, de la capacité des «poursuivants» à empêcher le «leader» de contrôler complètement le déroulement de la course.

    Mais, semble-t-il, au Mintp, les critères de la course vers le «marché» de l’autoroute Douala-Yaoundé ont été profondément modifiés et expurgés des dispositions les plus critiquées. «Quoi qu’il en soit, le chronogramme que nous avons élaboré conformément aux différentes étapes de la procédure suivant le cadre juridique en vigueur a conduit à la signature du contrat de partenariat le 30 mars 2021. Les travaux pourront s’exécuter en quatre ans, à la diligence du partenaire privé qui a le plus grand intérêt à les achever au plus tôt». À l’aune de cette déclaration de Emmanuel Nganou Djoumessi devant le Sénat, le 18 juin dernier, il y a fort à parier qu’un dispositif plus restrictif assène un coup de semonce sur la tête des «aventuriers».

    La dernière voie d’analyse suggère un regard sur l’ordonnancement des faits. D’aucuns comme Hervé Tadjon, avocat d’affaires, pointent notamment «le lien entre la diffusion, sur France 24, d’un reportage mettant à nu à la fois les tares managériales des autorités camerounaises et la désolation de China First Higway Engineering et les copieux suffrages engrangés par Sogea-Satom-Vinci/Razel-Fayat».

    Pour d’autres le chantier de l’autoroute Douala-Yaoundé est fréquemment réactualisé sous l’effet d’évènements internes et externes au chantier. Dans le reportage cité supra, Patrice Amba Salla (ancien MINTP et nouvellement exclu du RDPC pour une durée d’un an) dit clairement que «nous sommes dans un pays où la corruption est assez prononcée…» Et pour tout comprendre, la construction de l’autoroute est porteuse de multiples logiques: techniques, liaisons fonctionnelles, relations externes, commerciales, gestion des hommes, finances, administratives.

    Jean-René Meva’a Amougou

    La vitesse boite

    Encore ce chantier qui fait parler de lui sur la place publique. Cette fois, le journaliste Jean-Bruno Tagne a préféré en sourire. «Autoroute Yaoundé — Douala: 6 ans pour bitumer 60 km/196», a-t-il écrit sur sa page Facebook le 8 octobre dernier.

     

    Comme à son habitude, l’ancien employé de la chaine de télévision privée Canal 2 International s’interroge en sonnant l’hallali: «Qui va payer la note?» Depuis l’an dernier, Investir au Cameroun affirme que cette note est salée, trop salée même. Sous la plume d’Aboudi Ottou en effet, il n’y a aucune raison de s’embarrasser de subtilités. Bien des choses ont changé sur la maquette initiale. Citant Emmanuel Nganou Djoumessi, le journaliste spécialisé des questions économiques rapporte que des modifications ont conduit à «une énorme variation à la hausse du volume de travaux à réaliser». Il a notamment fallu élargir la plateforme des terrassements, rallonger les ouvrages transversaux et assainir le terre-plein central avec des prestations non prévues dans le contrat (mise en place des réservations pour le réseau de communication, etc.).

    Le tout dans un «relief assez accidenté, donnant à des remblais meubles de 32 m de hauteur et des déblais rocheux de 60 m de hauteur», et de conclure en citant encore le Mintp: «Comme on pouvait s’y attendre, les travaux additionnels ont renchéri le coût du projet. «Un financement supplémentaire évalué à 71 188 026 174FCFA hors taxes (HT), soit 84 891 721 212 toutes taxes comprises (TTC), est donc nécessaire pour l’achèvement de la première phase de l’autoroute Yaoundé-Douala et la réalisation des prestations additionnelles», a indiqué Emmanuel Nganou Djoumessi.

    Le coût prévisionnel des travaux passe ainsi de 338,7 milliards TTC (soit 284 milliards HT) à 423, 6 milliards (soit 355,2 milliards HT). Il faut par ailleurs signaler que l’évaluation actuelle des charges financières n’intègre pas le coût du crédit. En effet, pour financer ce projet, le Cameroun a contracté auprès de la banque publique chinoise Eximbank un prêt de 482 800 000 de dollars (soit 284 milliards FCFA) à des conditions non concessionnelles non rendues publiques. Pour trouver le financement supplémentaire nécessaire, le gouvernement discute en ce moment avec China Communications Construction Company (CCCC), maison-mère de CFHEC».

     

    Ongoung Zong Bella

  • Reconstruction du Nord-Ouest et du Sud-Ouest : Le chantier aiguise de nombreux appétits

    Reconstruction du Nord-Ouest et du Sud-Ouest : Le chantier aiguise de nombreux appétits

    Plusieurs mains étrangères se bousculent pour poser de nouvelles briques dans cette partie du Cameroun meurtrie par la crise dite anglophone.

    Un site ravagé par la guerre dans le Noso

    De nombreux villages incendiés; écoles et infrastructures routières détruites; chaines d’approvisionnement des populations rompues; stagnation de l’investissement productif; des milliers de déplacés et de morts; des assassinats en série; des attaques haineuses à l’abri de l’anonymat des réseaux sociaux. Le bilan de près de quatre années de guerre au Sud-Ouest et au Nord-Ouest donne tout simplement le vertige. À ce jour, ces régions ne sont pas sauvées, et il ne semble pas inconsidéré de penser qu’elles se portent très mal. 350 écoles, 115 centres de santé, 40 ponts, 400 points d’eau, 500 kilomètres de lignes électriques basse tension, 600 kilomètres de routes rurales, 45 marchés et 12 000 maisons à reconstruire en 10 ans. Le chantier est titanesque. «Le gouvernement et ses partenaires doivent mobiliser près de 90 milliards FCFA dans le cadre du Plan présidentiel de reconstruction et de développement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (PPRD-NO/SO)», insistait le Premier ministre, Joseph Dion Ngute, le 15 avril 2020 à Yaoundé.

    Dans ce contexte et face à cette addition plutôt salée, quelques pays sont solidaires. Via leurs entreprises, ils veulent mettre le cap sur le NoSo. Alors, au plus haut niveau, ils se pressent de répondre aux besoins du gouvernement camerounais dans les domaines des infrastructures et du bâtiment dans cette partie du pays. Pour des observateurs, cela facilite la compréhension du raout diplomatique qui a eu lieu le 6 octobre dernier au cabinet du ministre des Travaux publics (Mintp) à Yaoundé.

    Chez Emmanuel Nganou Djoumessi en effet, l’on a vu, tour à tour, leurs excellences Medhat Kamal El-Meligy, Éric Jacquemin et Vernelle Trim Fitzpatrick (officiant respectivement comme ambassadeurs d’Égypte, de Belgique et chargés d’affaires assurant l’intérim à l’ambassade des États-Unis d’Amérique au Cameroun). Comme rapporté par le site internet du Mintp, tous ces diplomates ont dit la volonté de leurs pays respectifs d’apporter leur pierre à la reconstruction des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Et selon des indiscrétions recoupées auprès de diverses sources au ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), quelques firmes turques, italiennes, tunisiennes, russes et chinoises sont à la manœuvre et déjà très bien implantées.

    Exercice
    «Nous sommes peut-être ici face à la forme la plus “civilisée” du marketing diplomatique», constate Hervé Tadjon. «Dits autrement, ajoute l’avocat d’affaires, les mots utilisés par ces diplomates dévoilent une féroce bataille au niveau diplomatique». Prise comme telle, la démarche des uns et des autres «postulants» impose l’anticipation comme une mission essentielle. En s’investissant dans ce robuste exercice, chacun construit son image en communiquant sur ses points forts. «Dans un projet comme le PPRD-NO/SO, renseigne encore Hervé Tadjon, les marchés sont à gagner, pas à prendre. Il est donc important pour les adjudicataires potentiels d’identifier les acteurs; de comprendre au préalable le fonctionnement des circuits de décision; d’analyser les contraintes règlementaires et ouvrir des discussions afin d’isoler les besoins et les mettre en relation avec leurs entreprises».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Lutte contre les cancers : La Suisse positionne sa «Roche» à Yaoundé

    Lutte contre les cancers : La Suisse positionne sa «Roche» à Yaoundé

    La firme pharmaceutique, créée il y a 120 ans et présente au Cameroun depuis 12 ans seulement, est venue présenter son offre de services en matière de prise en charge de cette pathologie.

    Arrivé en fin de séjour au Cameroun, S.E. Pietro Lazzeri, l’ambassadeur de la Confédération helvétique, a pensé à la continuité du service à la chancellerie suisse à Yaoundé. Ce 7 octobre 2020, c’est le prétexte qu’il choisit pour introduire Andreas Maager auprès de Manaouda Malachie, le ministre camerounais de la Santé publique (Minsanté). Andreas Maager, apprend-on officiellement, s’occupera de la gestion des affaires courantes à l’ambassade suisse dès novembre prochain. Dans la suite de S.E. Pietro Lazzeri, l’on a également noté la présence de Markus Gemuend.

    Venu de Côte d’Ivoire où il réside, le directeur général Afrique subsaharienne de la firme pharmaceutique et biotechnologique Roche a en profité pour faire du marketing auprès du Minsanté. Sur la foi du récit de la Crtv sur son antenne radio le 7 octobre 2020, Markus Gemuend a dit son ambition de voir s’établir un partenariat entre le gouvernement camerounais et le laboratoire suisse dans la lutte contre les cancers. «La firme Roche se propose d’apporter les 3/4 des ressources financières contre 1/4 pour le Cameroun dans la lutte contre les cancers, si le pays est disposé et prêt à s’attaquer à l’une des premières causes de décès féminins au Cameroun.

    Elle l’a fait au Ghana, au Kenya, est en train de le faire en Côte d’Ivoire et souhaite apporter cette expertise au Cameroun», a déclaré Markus Gemuend, reprit par le média d’État. Dans son propos, ce dernier a zoomé sur plusieurs références: «l’expertise de Roche en biologie moléculaire et en technologie de diagnostic au profit des patients; le dépistage précoce, la prévention, le diagnostic, la thérapie et le monitoring; le médicament personnalisé et la différence significative dans les soins de santé».
    Pour sa part, Manaouda Malachie a exprimé toute sa satisfaction et suggéré aux équipes techniques des deux parties de concevoir et proposer un calendrier de rencontres au cours desquelles la faisabilité de cette stratégie sera jaugée. Le Minsanté a ajouté que les préoccupations de Roche épousent celles du gouvernement camerounais dans son désir de construction d’un institut de cancérologie.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Paradoxe : Comment le Cameroun finance sa pauvreté

    Paradoxe : Comment le Cameroun finance sa pauvreté

    Le pays est pris par un monstre géant à plusieurs bras: évasion fiscale, blanchiment d’argent, trafics de toutes sortes, corruption, détournements de fonds, accords fiscaux bilatéraux, exonérations fiscales accordées aux multinationales et opacité dans la gestion des revenus pétroliers.

    18 000 milliards FCFA! C’est sensiblement l’équivalant de 31,5 milliards américains. Voilà de l’argent perdu par le Cameroun au cours des 10 dernières années. Le chiffre (qui représente 1,8 fois le montant de la dette du pays et 3 fois son budget 2020, selon le FMI) est brandi ce 30 septembre 2020 à Yaoundé par le Centre régional pour le développement endogène et communautaire (Cradec). Selon cette ONG (appuyée par plusieurs autres organisations de la société civile), «18 000 milliards FCFA, ce n’est qu’un euphémisme». «La réalité pourrait être bien plus grave encore», prévient Idriss Linge, consultant et présentateur du rapport sur les études sur les flux financiers illicites (FFI) et l’équité fiscale au Cameroun. Selon le journaliste financier, c’est le résultat de l’extension progressive des pratiques marquées comme illégales et illicites à l’échelle nationale entre 2008 et 2018. «Le bénéfice abusif des accords fiscaux avantageux et des exonérations fiscales accordées unilatéralement, la fausse facturation dans les échanges commerciaux, sont les facteurs de la situation», démontre-t-il.

    Commentant le document, une voix se réclamant de la représentation Cameroun du FMI (Fonds monétaire international) installe un coup de froid dans l’ambiance. «Au rythme actuel, il faudrait 135 ans au Cameroun pour atteindre l’objectif du millénaire de développement n°4 (réduire de deux tiers le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans). Si les flux financiers illicites étaient éliminés, le Cameroun pourrait atteindre cet objectif en 35 ans à peine», entend-on. Ce que dit implicitement ce discours est que le Cameroun souffre sévèrement de l’impact des FFF. Une certaine hypothèse tend à valider que partout dans le pays, c’est l’illégalité qui est la principale caractéristique dans la façon dont les fonds sont acquis, transférés et utilisés. Ce jour, le Cradec relève que l’argent «pris» au Cameroun circulerait très massivement vers un petit nombre de pays, qui s’avèrent être justement ses principaux partenaires économiques et ses principaux créanciers. On retrouve sur cette liste aussi bien des pays développés que des économies émergentes.

    De l’avis du Cradec, le Cameroun est pris par un monstre géant à plusieurs bras: évasion fiscale, blanchiment d’argent, trafic de toutes sortes, corruption, détournements de fonds et jeu opaque des multinationales. Tout y est. «Ce qui coûte le plus cher au Cameroun, en termes de FFI, ce sont les fausses facturations. En clair, le pays ne perçoit pas le montant des taxes qui lui sont dues sur près de 50% de tous ses échanges commerciaux avec les pays avancés. C’est une perte faramineuse pour un pays qui a si cruellement besoin de ressources financières pour subvenir aux besoins essentiels de ses populations et financer son développement», déplore Jean Mballa Mballa. Ce dont parle le directeur exécutif du Cradec renvoie aux FFI via la falsification des prix des échanges.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Import-Export

    Comprendre le mécanisme de fausses facturations

    Selon le Cradec, les pratiques de mauvaise facturation sont souvent constatées dans les importations. Les motivations peuvent être variées, mais les conséquences sont les mêmes.

     

    Il y a la sortie des ressources monétaires d’un pays à des fins de spéculation monétaire, mais il peut arriver que cela serve à réduire la base imposable, soit en augmentant les charges pour les entreprises et les individus, soit en réduisant les taxes d’entrées des produits qui sont importés. Le premier cas est celui où une entreprise ou un individu soumet une facture plus élevée que la normale, sur livraison de biens, ou de prestation de service, qui a été effectuée par son fournisseur de biens ou de services international. Cette surfacturation des importations est généralement effectuée dans le but de transférer de l’argent à l’étranger. Par exemple, au lieu de payer 100USD par unité pour les marchandises, un importateur peut falsifier la facture pour indiquer une valeur de 120USD par unité.

    Bien que l’importateur paie en réalité 100USD par unité pour les marchandises, la facture falsifiée lui permet de transférer 20USD sur un compte offshore. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les gens et les entreprises cherchent à déplacer de l’argent hors des pays notamment en développement. La raison la plus courante, c’est que cela permet de faire sortir sa trésorerie des pays à monnaie faible (dont la valeur fluctue et se déprécie souvent sur les marchés mondiaux) vers des pays où les devises sont plus fortes, comme le dollar américain, la livre sterling ou l’Euro de l’Union européenne (où la valeur est plus stable). Mais les intentions des fraudeurs peuvent être moins nobles. Il peut s’agir par exemple de créer de la ressource supplémentaire pour payer le prix de la corruption.

    Toujours dans le cadre des importations, il n’est pas exclu que les fausses factures commerciales permettent également aux acteurs d’importer les fonds illicites dans les pays. Mais généralement, la sous-facturation des importations dans un pays comme le Cameroun est surtout utilisée pour échapper au paiement des droits de douane et des Taxes sur la valeur ajoutée (TVA) payés sur les importations. Par exemple, au lieu de payer des droits et des taxes sur un bien évalué à 100USD par unité, un importateur peut falsifier la facture pour que les services de Douane n’y voient que 50USD par unité et économiser sur les droits et la TVA qui auraient dû être payés au prix unitaire plus élevé, lors du paiement de la facture à 50USD.

    Les formes et pratiques ici sont multiples. Si le fournisseur de l’importateur est complice, il fournit les documents et peut recevoir des frais de corruption. Il peut aussi avoir intérêt à dissimuler ses revenus dans son pays. Dans ce dernier cas, les 50USD restants sont toujours dus au producteur d’origine à l’étranger et, par conséquent, l’importateur doit également disposer d’un moyen séparé pour transférer de l’argent à l’étranger (généralement détenu sur un compte offshore) afin de conclure la transaction. En d’autres termes, la sous-facturation des importations se fait parfois avec un mécanisme supplémentaire pour déplacer l’argent non imposé hors du pays afin de respecter le solde dû.

    Source: Cradec, Études sur les flux financiers illicites

    en matière de commerce international au Cameroun,

    une contribution à la relance économique

    post-Covid-19, septembre 2020.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Jean Mballa Mballa

    «Stopper l’hémorragie par une volonté politique»

    Le directeur exécutif du Cradec étale la gravité du phénomène de sorties d’argent hors du Cameroun. En même temps, il esquisse quelques solutions.

     

    «Le Cameroun est loin d’être le seul pays dont des FFI sortent massivement, loin de là. Mais il est indispensable de mettre en perspective deux réalités contradictoires: nous “exportons” en FFI plus que nous ne recevons en aide! C’est un paradoxe, une aberration économique. Les pistes de solutions sont nombreuses, et bien que leur mise en œuvre ne soit pas facile, une prise de conscience générale est indispensable, aussi bien au niveau des gouvernants africains que de la société civile. Là plus que partout ailleurs, une forte volonté politique est indispensable pour stopper cette hémorragie.

    Le pays ne peut plus se permettre de continuer à perdre, chaque année, près de 100 milliards de dollars en flux financiers illicites, alors que, par rapport aux années 90, le nombre de Camerounais vivant dans l’extrême pauvreté a augmenté de plusieurs millions. Tous ces milliards, qui sortent très souvent à cause de la complicité, la cupidité et le silence coupable de certains dirigeants corrompus, devraient être affectés au financement du développement en général, et au financement des services qui amélioreront la vie des citoyens en particulier. Au Cradec, nous pensons que le rapatriement des avoirs volés dans leur juridiction d’origine peut fournir des ressources supplémentaires au Cameroun, tout en exerçant un effet dissuasif, et en faisant justice aux communautés bénéficiaires des fonds rapatriés.

    Les systèmes fiscaux des pays en développement pâtissent de la corruption et de capacités insuffisantes, et se montrent donc souvent incapables de participer à des échanges d’informations efficaces. La priorité réside dans le renforcement des institutions et des systèmes pour juguler l’évasion fiscale. Réduire la corruption diminue les possibilités de gains illicites et donc les mouvements illicites de capitaux. Au niveau international, il y a un certain frémissement. Dans les pays de l’OCDE, les sanctions pour des infractions de corruption transnationale se multiplient. Certains rapports d’examens confirment que les pays de l’OCDE adoptent aujourd’hui une position plus dure à l’égard de la corruption. Certains pays possèdent des cadres juridiques contenant des lacunes en ce qui concerne les payeurs de pots-de-vin, mais les avancées sont là».

    Propos rassemblés par JRMA

  • Demi-journée de cours : Dans l’inconnu  de l’après-midi

    Demi-journée de cours : Dans l’inconnu de l’après-midi

    Compilation compliquée

    Tous les élèves devraient reprendre, ce 5 octobre 2020, le chemin de l’école. Des millions d’élèves camerounais vont faire leur rentrée, après de longs mois sans école ou presque. Parce que cette séquence importante de la vie nationale est escortée par l’épidémie de coronavirus, il s’agit d’une rentrée inédite. Mais, espère le gouvernement, elle se veut «la plus normale possible». Elle a été «bien préparée», ont sereinement affirmé Pauline Nalova Lyonga et Manaouda Malachie lors de la cérémonie d’ouverture de l’atelier d’harmonisation des activités de santé scolaire, le 18 septembre 2020 à Yaoundé.

    En tout cas, à l’aune de la crise du Covid-19, une mécanique a été élaborée. Elle a entrainé des choix… et une longue liste d’incertitudes: transports, aménagements dans les écoles, jauges dans les activités sportives ou culturelles, retour au rythme de l’école compliqué pour certains enfants, etc. Ici et là, les uns et les autres dénoncent les nombreuses réformes mises en place en urgence, faites sans moyens, dans des écoles, collèges et lycées du pays.

    Ici et là, le flou des modalités agace, parce que laissé à l’interprétation en fonction des moyens localement disponibles. Coronavirus oblige, les élèves prétendront au mieux à un enseignement hybride, en présentiel et à distance. Avec tout ce que cet enseignement comporte comme failles dans l’application du programme, difficultés d’adaptation pour les enseignants, de compréhension pour les élèves, sans compter les problèmes techniques liés à la connexion internet, à la pénurie d’électricité, au coût élevé des équipements électroniques…

    raisemblablement, les autorités ont fondé leur scénario sur la base d’une «année scolaire normale» en privilégiant par exemple la présence alternée des élèves dans les salles, le matin et l’après-midi.

    Chez les parents, le stress est à son summum. Les pédagogues alertent quant à l’expansion du phénomène de décrochage. Sur les réseaux sociaux, certains enseignants dénoncent cette impréparation. Dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, c’est la peur. «On ne sait pas ce qu’il va se passer. On est là!». Une compilation compliquée qui nécessite des mesures d’accompagnement et l’investissement de tous.

    Jean-René Meva’a Amougou

     

    Les enseignants et élèves du second groupe de la journée devront composer avec des défis tels que le climat, la charge de travail, la nutrition, la mobilité urbaine, la sécurité…

    Sortie des classes, phase délicate du système de la mi-temps

    La deuxième demi-journée de cours ira de 13 h à 16 h 30, selon la ministre des Enseignements secondaires, Pr Pauline Nalova Lyonga. C’était le 23 septembre dernier à Yaoundé, au cours de la cérémonie de la rentrée pédagogique solennelle couplée au lancement de l’année scolaire 2020/2021. Des parents d’élèves, enseignants et sociologues rencontrés confient leurs inquiétudes face à la grande inconnue que revêt le changement introduit pour cette année scolaire.

    Un enseignant de mathématiques en service au Lycée d’Ekounou à Yaoundé (Cameroun), ayant requis l’anonymat, indique: «jusqu’à ce jour (mercredi 30 septembre 2020), à 4 jours de la rentrée, nous n’avons pas encore les emplois de temps ni les horaires de cours. Les conditions ne sont pas précises. On ne sait pas comment ça va se passer pour les élèves qui n’ont eu que 6 mois cumulés de cours». Le pédagogue ne manque pas d’évoquer ses doutes quant à la clôture des cours à 16h30.

    La chaine d’anxiété s’étend aux parents d’élèves. Anne Messomo, habite le quartier Mimboman à Yaoundé. Son fils va en classe de 2de au Lycée d’Anguissa, un autre quartier dans le 4e arrondissement de la ville de Yaoundé. Ce parent d’élève avoue dire le chapelet afin que l’année scolaire s’achève bien. «J’espère qu’on ne va pas augmenter la pension. J’espère qu’il va fréquenter en journée. Parce que j’ai peur des histoires qu’on entendait l’année passée comme les drogues, l’insécurité», lance-t-elle, angoissée.

    Sécurité
    La préoccupation de ce parent rejoint ce que le doctorant en sociologie de l’Université de Douala, Yves Mbede Nsizoa, qualifie d’«éléments parallèles de construction». Il fait référence à la mobilité urbaine et à la sécurité des élèves et écoliers. En effet, désormais, les cours au secondaire et au primaire, pour les écoles qui appliquent le système de mi-temps, vont officiellement s’achever à 16 h 30, voire plus. «Pour des villes comme Yaoundé, Douala, Bafoussam, Ebolowa, Buea et Bamenda, la mi-temps a des implications de sociétés.

    La préparation de la rentrée à Douala donne déjà lieu à des embouteillages monstres. Imaginez un tant soit peu, ce qu’annonce le rythme scolaire nouveau». Il y aura désormais 3 grands «moments de pointe» comme les appellent les professionnels de taxi: 7 h, 12 h 30 et 16 h 30. Une situation qui entraine toujours une sursollicitation des artères des villes. Pour le sociologue, «les forces de police compétentes de la régulation de la circulation, doivent être intégrées dans la gestion de l’année académique». Elles pourront également être utiles pour prévenir «le danger d’insécurité qui plane sur ces enfants qui vont être obligés de rentrer à la maison après 17 heures voire 18 heures».

    Autres
    Dans l’après-midi, les enfants auront sans doute l’obligation de se nourrir à la maison. Car la cantine scolaire aura besoin de s’adapter aussi au retour à la mi-temps. Chez les enseignants, on est bien conscient qu’un recrutement conséquent n’a pas accompagné la décision de passer à la demi-journée. M. Essama, enseignant vacataire d’histoire au collège Frantz Fanon, campus de Kondengui, nous confie: «on aura chaud dans l’après-midi avec le cumul de charge de travail, la chaleur et peut-être l’absence de l’énergie électrique en cas de pluie».

    Catherine Awoundja Nsata, inspecteur général des enseignements au ministère des Enseignements secondaires, rassure: «avec les inspecteurs pédagogiques, nous avons concrètement examiné dans quelles mesures les enseignants vont gérer cette année dans les salles de classe, quelles sont leurs difficultés, comment ils peuvent aller au-delà et avoir les résultats que nous attendons tous».

     

    Niveau des élèves

    Géomètres ou pas, tous entrent ici!

    Sur la base de quelques indicateurs globaux dégagés, certains responsables d’établissements scolaires de Yaoundé et ses environs montrent l’impact du confinement sur les performances des apprenants.

     

    C’est une réalité factuelle, établie statistiquement par un groupe scolaire primaire et secondaire basé à Nkongoa (sur l’axe routier Yaoundé-Mfou). «À l’issue d’un test de sélection que nous avons organisé la semaine dernière, seulement 15% des candidats ont obtenu une moyenne proche de 11/20 au cours de l’année dernière. Pour le reste, nous déplorons que le niveau soit désormais proche du néant. Mais il faut bien faire du chiffre et nous avons délibéré et avons accepté environ 40% d’entre eux en classes supérieures», confesse le préfet des études.

    S’il y a bien une chose qui respire le doute en cette rentrée scolaire au Cameroun, c’est bien le niveau des élèves. Assis sur la résignation, le ressenti des enseignants trahit leur désillusion. «À l’annonce de la fermeture des établissements, on ne va pas se mentir; au début beaucoup étaient contents de ne plus avoir cours. Moi-même je me suis dit que c’était pas mal, que ça permettait de faire une pause. Mais là, le nombre de cancres a presque doublé», affirme Xavier Simo. Selon cet enseignant de mathématiques, la continuité pédagogique a «vraiment crashé avec la pandémie du coronavirus».

    Effet de contexte
    Loin de les remettre en selle, la crise sanitaire a considérablement entravé la progression des élèves. Bref, le chef d’accusation contre une année scolaire qui s’est plus ou moins arrêtée à mi-mars est lourd: «le niveau des élèves a vraiment baissé», reconnait Protais Assomo, professeur des lycées. Pour lui, parce que l’impact du confinement s’est uniformément répandu, la seule issue qui pourrait contenter les parents et les élèves eux-mêmes est d’admettre ces derniers en classes supérieures en cette rentrée 2020/2021.

    Sur ce point, il s’agit donc clairement d’une perspective tournée vers «la récupération de tout le monde». Dans un groupe scolaire basé au quartier Nkomkana (Yaoundé II), l’on admet aujourd’hui qu’il faut «ajuster» les effets du Covid-19 dans les différents degrés de scolarisation. «Nos indicateurs montrent que nos anciens élèves du primaire sont allés très bas. De même, ceux du secondaire, dans les classes intermédiaires notamment, méritent une mise à niveau très soutenue, parce qu’ils n’ont pas achevé les programmes», renseigne le principal.

    Ongoung Zong Bella

  • Ambassade d’Allemagne au Cameroun : Le temps de «l’omni-diplomatie»

    Ambassade d’Allemagne au Cameroun : Le temps de «l’omni-diplomatie»

    Depuis son arrivée, S.E. Corinna Fricke, la patronne de la chancellerie germanique à Yaoundé, a un gros œil sur tous les projets dans lesquels son pays est impliqué.

    S.E. Corinna Fricke au cours d’une audience avec Alamine Ousmane Mey

    S.E. Corinna Fricke! Depuis quelques jours, le nom de l’ambassadrice de la République fédérale d’Allemagne (RFA) au Cameroun claque dans l’actualité diplomatique à Yaoundé. De manière révélatrice, la diplomate germanique exprime son goût de la proximité et des gens. «La mission la plus importante et exaltante de l’ambassade d’Allemagne au Cameroun est de raffermir les relations déjà intenses et multiformes entre nos deux pays. Pour cela nous avons besoin de vous – votre intérêt, votre opinion, vos idées», écrit-elle grandement sur le site officiel de la chancellerie dont elle a officiellement la charge depuis le 14 août 2020.

    Jetée dans le bain d’une offensive diplomatique dans son pays d’accueil, S.E. Corinna Fricke a déjà fait le tour de plusieurs administrations publiques. Le 29 septembre dernier, elle a rendu visite à Mounouna Foutsou. Avant de débarquer chez le ministre de la Jeunesse et de l’Éducation civique, l’ambassadrice de RFA au Cameroun était chez le Premier ministre, Chief Joseph Dion Ngute, le 16 septembre 2020. Cette étape a été suivie d’une audience que Louis-Paul Motaze (ministre des Finances) a accordée à la plénipotentiaire allemande le 18 septembre 2020. L’on n’oublie pas l’escale de la représentante d’Angela Merkel chez Jules Doret Ndongo (ministre des Forêts et de la Faune) le 8 août 2020.

    Motivations
    «Cette dame endosse pleinement le costume inhérent à sa charge», constate un observateur sous anonymat. Cette charge, c’est un portefeuille d’environ 34 milliards FCFA injectés dans 13 projets au Cameroun, à en croire une évaluation faite le 2 octobre 2020 par Mittelafrika.com, le portail digital sur l’information diplomatique et stratégique entre l’Allemagne et l’Afrique. Au-delà de tout cela, le «périple» de S.E. Corinna Fricke est perçu par certains comme l’installation progressive d’une forme d’adéquation entre le discours et l’action allemands au Cameroun.

    Complétant ces mots, l’internationaliste Elvira Mbatoumou suggère d’y voir «la fin de la sacrosainte culture de retenue allemande partout dans le monde». «En effet, il y a dans cette démarche une volonté d’assumer des responsabilités internationales élargies dans une perspective d’un nouvel ordre économique mondial post-Covid-19», appuie-t-il. On se souvient qu’en janvier 2014, le la a été donné lors de la conférence sur la sécurité à Munich. À cette occasion, Joachim Gauck, le président allemand d’alors, insistait sur le fait qu’«il faut que l’Allemagne s’implique plus rapidement, de façon plus résolue et plus fondamentalement dans les affaires du monde. L’Allemagne est trop grande pour se contenter de faire des commentaires sur la politique internationale en simple spectatrice».

    Jean-René Meva’a Amougou