Cameroun, Bad et échangeur-trompette d’Obala : Un deal en béton de 5,5 milliards FCFA
Les deux partenaires sont désormais au carrefour de plusieurs intérêts dans le département de la Lékié où le développement local, l’accélération des échanges commerciaux et l’ouverture sur la sous-région sont à l’ordre du jour.

C’est une parole tenue pour le gouvernement camerounais. C’est aussi un rêve devenu réalité pour les populations d’Obala, dans la région du Centre au Cameroun. L’échangeur-trompette situé dans la localité de Nkolmelen est ouvert depuis ce 10 novembre 2022 à la circulation. « Le bel ouvrage fait désormais partie du patrimoine commun des habitants de Monatélé, Sa’a, Batchenga, Ebebda, Elig-Mfomo et d’Obala. Il suscite à cet égard un sentiment de légitime fierté pour tout le département de la Lékié».

À en croire Serge N’Guessan, directeur général du Groupe de la Banque africaine de développement (Bad) pour l’Afrique centrale, présent à la cérémonie de mise en service. Son institution y était représentée en qualité d’acteur majeur de l’aboutissement de ce projet. « L’ouvrage d’art a coûté à la Bad et à l’État du Cameroun 5 343 milliards FCFA toutes taxes comprises », fait en effet savoir le ministre camerounais des Travaux publics (Mintp), Emmanuel Nganou Djoumessi. Jean Ernest Masséna Ngallè Bibèhè, son collègue des Transports, se trouvait à ses côtés.
Spécificités
L’échangeur-trompette d’Obala est une infrastructure aménagée dans le cadre de la réhabilitation de la Nationale N°4, longue de 241 km entre Yaoundé et Babadjou. En plus d’être dédiée à la circulation, l’une de ses fonctions est justement d’assurer « une meilleure gestion de l’interconnexion et du croisement des nationales 4 et 1 », relève la Mission de contrôle. L’ouvrage d’art a été construit en 24 mois.
Il est composé de 3,5 km de route bitumée constituant les voies de desserte de l’échangeur ; un pont à quatre travées avec une portée totale de 51,4 mètres de linéaires ; 2327 mètres linéaires de chaînes en béton armé ; 2488 mètres linéaires de glissières métalliques ; six dalots dont cinq de 1m x 1m de section et un de 2 x 3m x 4m de section; 654 mètres linéaires de caniveaux bétonnés ; 1642 mètres linéaires de fossés en maçonnerie de moellons et 5897 mètres carrés de talus protégés par des perré-maçonnés».

Le Mintp et la Mission de contrôle mentionnent encore au rang des caractéristiques de l’infrastructure, une chaussée constituée d’une structure de fondation de grave concassée 0/31,5 d’une épaisseur de 18 cm. La couche de base est constituée de grave bitume 0/14 de 10 cm d’épaisseur et le revêtement est réalisé en béton bitumineux 0/10 d’une épaisseur de 7 cm ».
La signalisation horizontale et verticale est également déjà visible. Le maire d’Obala souhaite conserver « la création au profit des populations, des passages piétons pour leur éviter des accidents et leur permettre de vaquer à leurs occupations sans courir le risque de voir leur mobilité réduite ». L’élu local prend dans le même temps l’engagement au nom des riverains, de « préserver jalousement ce précieux patrimoine qui vient améliorer leur cadre de vie ».
Aires de repos
Une aire de repos près de l’échangeur d’Obala est également aménagée au profit des usagers des nationales 4 et 1. Les présidents et représentants des syndicats des transporteurs ont pu s’en rendre compte. Elle est construite sur « une surface de 332 m2 et elle est constituée de cinq bâtiments comprenant une salle de police, quatre boutiques, deux salles de repos, des toilettes publiques, un bloc technique, et un château d’eau ». Cette aire de repos a une capacité de 68 parkings. À raison de 34 parkings de 10 mètres et de 34 parkings de 18 mètres. Une autre bonne nouvelle pour les usagers de cet axe routier est que « d’autres aires de repos ont été créées et sont déjà prêtes à être exploitées le long de la Nationale 4 aménagées », à croire le Mintp.

Les espaces et les aménagements sont depuis ce 10 novembre 2022 rétrocédés au ministre des Transports. Jean Ernest Massena Ngallè Bibèhè et Emmanuel Nganou Djoumessi ont procédé au paraphe des documents y afférents. « Leur gestion sera assurée en collaboration avec la commune d’Obala et les différents utilisateurs », a prescrit le membre du gouvernement. Conformément au souhait exprimé plus tôt par le maire de la localité. Et dans la perspective d’une réduction des accidents liés à la fatigue et de la fluidification de la circulation au point d’intersection des deux nationales.
Équipes
Les travaux financés par le Groupe de la Banque africaine de développement et le gouvernement camerounais étaient exécutés par «l’entreprise CGCOC GROUP, sous la maîtrise d’œuvre technique du Groupement SAFEGE A.C./SAFEGE/SPEA». Emmanuel Nganou Djoumessi leur a adressé ses félicitations. À l’une «pour la qualité des travaux réalisés et le professionnalisme des équipes. La marque architecturale de l’échangeur est extrêmement moderne. C’est bien au Cameroun et ce n’est pas ailleurs». Et à l’autre «pour le contrôle et la surveillance efficace des travaux», a précisé le ministre des Travaux publics.
Appréciation
Pour Serge N’Guessan, l’échangeur-trompette d’Obala est bien «la réponse la plus appropriée aux préoccupations profondes des populations, en termes en particulier de routes et sur ces deux corridors importants». Eu égard aux «spécificités de l’échangeur et au vu des bénéfices du développement de proximité (local) en lien avec l’ouvrage», souligne le directeur général de la Bad pour l’Afrique centrale. L’intérêt de son institution réside toutefois aussi dans une autre dimension. Car «nous célébrons l’un des résultats les plus marquants du Programme d’appui au secteur des transports, phase II. Il s’agit d’un important programme d’investissement dans le secteur routier que le gouvernement camerounais met en œuvre de manière satisfaisante grâce au concours financier de la Bad», fait-il notamment observer. L’objectif, assure le Mintp, est d’«accompagner l’investissement privé et contribuer à l’amélioration du bien-être des populations. Mais aussi d’accroître les échanges commerciaux, tant à l’intérieur que dans la sous-région».
Théodore Ayissi Ayissi
Du bon avec la Bad
Les interventions de la Banque africaine de développement (Bad) ne cessent de se multiplier et de porter leurs fruits en Afrique centrale. Dans un contexte où l’économie mondiale se remet à peine des affres de la pandémie de Covid-19. Un contexte dans lequel elle pâtit aujourd’hui des effets de la guerre en Ukraine. Les pays de la sous-région se présentent pour leur part en victimes collatérales, mais en victimes résilientes. Leurs économies semblent retrouver des couleurs ces derniers mois. Sans pour autant gommer la trop grande dépendance aux exportations des hydrocarbures.
Individuellement et collectivement, ils ont entrepris de s’immuniser contre les chocs extérieurs. Avec l’appui technique et financier des partenaires au développement, parmi lesquels la Bad. En recourant à des politiques tournées vers la transformation structurelle de leurs économies, la diversification, l’industrialisation, l’accroissement des échanges intracommunautaires et la création des chaînes de valeur à l’échelle communautaire. Les projets infrastructurels routiers mis en œuvre ces dernières années sont conçus dans cette perspective.
La Bad s’est justement engagée aux côtés du Cameroun à densifier son réseau routier national. Le caractère intégrateur des ouvrages financés intègre la plupart du temps en ligne de compte. Il est révélateur de l’ambition de l’institution bancaire continentale de renforcer la position du Cameroun comme plaque tournante des échanges en Afrique centrale et vers l’Afrique l’ouest. La récente cérémonie de mise en service d’un échangeur dans la localité d’Obala obéit à cette logique. L’ouvrage est partie intégrante des réalisations à mettre sur le compte du Programme gouvernemental d’appui au secteur des transports. Il offre des ouvertures vers les autres pays de la Cemac et du Nigéria. La Bad ya déjà absorbé plusieurs centaines de milliards de FCFA. Lire le zoom.
Théodore Ayissi Ayissi