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Brexit : le vin est tiré, l’Afrique doit boire !

Vinum trahitur sorberi disent les latins (le vin est tiré, il faut le boire). Les 27 + ou – 1 sont parvenus à un accord ! Dans les termes de l’article 50 du traité de Lisbonne, et même si la grosse bataille se jouera désormais au parlement britannique, le «divorce maitrisé» est consommé ! 

 

Géopolitiques du développement
Malgré le flegme de Bruxelles, l’Union européenne (UE) ne sera plus la même. L’organisation vient de perdre un poids qui va considérablement abaisser son influence mondiale. La Grande-Bretagne représentait la deuxième puissance économique européenne, le troisième contributeur au budget européen, une force militaire centrale en Europe (détention de la bombe atomique avec la France), la principale place financière européenne, la troisième densité démographique européenne et, non des moindres, le deuxième membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU en Europe.

Sur le continent, on ne voit pas bien venir la bourrasque. Les désengagements viendront d’ici peu. À vrai dire, ils ont été échelonnés. Compte tenu des nombreuses relations commerciales existantes entre l’UE et différents pays ou régions d’Afrique, l’Afrique devrait revoir son positionnement ! Les accords de partenariat économique, l’ALE euro-méditerranéen, l’accord de coopération de développement et de commerce UE-Afrique… l’essentiel de ces accords a été conclu avec une Grande-Bretagne sous le giron européen. «Il faudrait s’attendre à une renégociation de plusieurs de ces accords, au fur et à mesure que les intérêts vont diverger sur le terrain, c’est-à-dire dans les 7- 10 ans» assertait Philipe Hugon il y a 1 an.

L’adhésion de l’Afrique au groupe des ACP s’est construite sur l’histoire de l’UE. La coopération elle aussi ! Deuxième plus gros pourvoyeur européen d’IDE vers l’Afrique, le volume d’investissement du Royaume-Uni sur le continent pourrait baisser. Le pays était aussi l’un des plus généreux contributeurs au Fonds européen de développement (Fed), avec 509 millions d’euros, soit 15 % du volume total du fonds en valeur relative. Toutefois, le Brexit ouvre la voie à un versement direct de l’aide vers les pays en développement. Cette situation aurait une portée géographique plus étroite que l’assistance déboursée à travers le Fed.

Africa first!
Qui plus est, une chute de l’activité au Royaume-Uni induirait une incertitude généralisée auprès des investisseurs et opérateurs économiques installés dans ce pays. Sortie de l’Union douanière, la Grande-Bretagne s’expose à la réinstauration de certaines taxes entre elle et ses anciens frères européens.

Les coûts de production de nombre de ses produits, souvent sous-traités dans d’autres pays européens dans le processus de fabrication, verraient augmenter le prix à l’exportation. Le risque d’une hausse de sa monnaie, la livre sterling, par rapport aux monnaies africaines n’arrangerait pas les choses.

Pour les 18 pays africains du Commonwealth, Londres pourrait privilégier la coopération bilatérale. Déjà débarrassée des contraintes européennes, la relation pourrait même s’intensifier. Soit ! Mais en Afrique, Londres ce n’est pas que le Commonwealth ! C’est l’Égypte, la Libye, le Maroc…

L’Afrique a besoin de son intraproductivité. Cela passe aussi par l’atténuation de l’externalité européenne ! La Chine a suffisamment profité des négociations du Brexit et des tensions intereuropéennes. L’Afrique a besoin de se construire en elle-même ! Face à l’incertitude économique internationale marquée par le Brexit, l’Iran, la réforme de l’Organisation mondiale du Commerce et la guerre commerciale autour du pacifique et de la Chine, l’Afrique devrait mettre sur pied son marché unique.

Zacharie Roger Mbarga

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