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Archives des Mindef - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : Mindef

  • Corridor Douala-Ndjamena : les autorités administratives dans le viseur du Mindef

    Corridor Douala-Ndjamena : les autorités administratives dans le viseur du Mindef

    Joseph Beti Assomo les rend responsables de l’implantation de postes de contrôle irréguliers sur la partie camerounaise de cet axe commercial stratégique entre le Cameroun et le Tchad.

    Ce n’est pas un hasard si la correspondance administrative datée du 6 avril dernier et parvenue à notre rédaction est adressée au ministre camerounais de l’Administration territoriale (Minat). Elle émane du ministre délégué à la présidence de la République du Cameroun chargé de la Défense (Mindef) et elle est le reflet des forts soupçons qui pèsent sur les chefs de circonscriptions administratives. Joseph Beti Assomo les accuse auprès de Paul Atanga Nji d’être responsables de l’implantation sur la composante camerounaise du corridor Douala-Ndjamena, «de 66 postes de contrôle dont 39 postes de contrôle irréguliers». Le Mindef précise que «cette multiplicité des postes de contrôle qui constitue un véritable calvaire pour les usagers de cet axe routier, est souvent prescrite par certaines autorités administratives locales».

    Démantèlement

    Il apparaît ainsi que la gestion des postes de contrôle mixtes sur les axes routiers Douala-Maroua pose un problème au ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense. En se faisant le défenseur de la libre circulation et en référant l’affaire à son collègue de l’Administration territoriale, Joseph Beti Assomo dit attendre de ce dernier une intervention de plusieurs ordres. «Il serait souhaitable d’instruire les intéressés d’alléger significativement le nombre de postes de contrôle intermédiaires sur le corridor». Le Mindef recommande en plus l’«institution de postes regroupant toutes les administrations impliquées entre deux régions concernées sur les sections Maroua-Kousseri, Garoua-Maroua, Ngaoundéré-Garoua, Bertoua-Ngaoundéré, Yaoundé-Bertoua et Douala-Yaoundé», peut-on lire dans la correspondance administrative.

    Le Minat, Paul Atanga Nji, est en outre sollicité pour mettre en place un cadre de rencontre entre «les responsables des démembrements régionaux de toutes les structures représentées sur le terrain en vue de procéder à une vaste sensibilisation». La correspondance de Joseph Beti Assomo cible particulièrement «la Gendarmerie nationale, la Police, les ministères des Forêts et de la Faune, de l’Élevage des Pêches et des Industries animales, des Transports et des Finances (Douanes)».

    Opération coup de poing

    Tout est parti de «dénonciations faisant état  de l’existence de 65 postes de contrôle des FMO (Force de maintien de l’ordre, Ndlr) sur le corridor Douala-Maroua, retardant le flux et la fluidité du transport des personnes et des biens».  À en croire la correspondance du Mindef, une «équipe police des polices et SEMIL a alors effectué une descente inopinée sur ce corridor avec pour objectif d’identifier formellement et de s’assurer de l’opérationnalité de ces postes de contrôle dénoncés». Et sur les 66 identifiés, seulement 27 postes de contrôle mixtes sont réguliers.

    Théodore Ayissi Ayssi

  • Crise anglophone : les tortionnaires de Ndu aux arrêts

    Crise anglophone : les tortionnaires de Ndu aux arrêts

    D’après un communiqué signé ce 15 février 2021 par le Mindef, Joseph Beti Assomo, quatre policiers, deux gendarmes et deux militaires ont été interpellés et sont depuis lors à la brigade territoriale de gendarmerie de cet arrondissement du Nord-Ouest.

     

    Le professionnalisme de nos forces de défense et de sécurité a été foulé au pied par quelques éléments le 11 février 2021 dernier dans l’arrondissement de Ndu, département du Donga-Mantung, région du Nord-Ouest. Dans leur mission de sécurisation de la localité en proie à une crise sociopolitique comme c’est le cas depuis quatre ans dans les régions anglophones, huit éléments des forces de maintien de l’ordre ont interpellé à Ndu, le frère d’un présumé combattant séparatiste, un certain Jean Fai Fungong. Ce dernier va alors subir un traitement inhumain de la part desdits éléments dans le processus d’extorsion d’un aveu sur la cache du présumé séparatiste.

    Malgré la clame de la méconnaissance du lieu où serait son frère, les éléments de la police et de l’armée camerounaise vont torturer l’infortuné à l’aide d’une machette avant de l’abandonner dans un état piteux. La vidéo de ce traitement a fait le tour des réseaux sociaux depuis samedi 13 février dernier, suscitant la colère et l’indignation. Mis au parfum, le sous-préfet de l’arrondissement de Ndu a instruit dans un communiqué les chefs des différents corps des forces de maintien de l’ordre, d’ouvrir non seulement une enquête, mais aussi d’interpeller les incriminés et de les mettre à la disposition de la justice.

    Le haut commandement de l’armée a pris langue avec le sous-préfet. Les huit éléments des forces de défense et de sécurité en question, soit quatre policiers, deux gendarmes et deux militaires, ont été identifiés et mis aux arrêts, a précisé le chef de la division de la Communication au ministère de la Défense dans un communiqué. «Les concernés ont été immédiatement mis aux arrêts à la brigade de gendarmerie de Ndu sur instruction du ministre délégué à la présidence chargé de la Défense», a fait savoir le capitaine de vaisseau Cyrille Atonfack Guemo, avant d’ajouter que «les enquêtes disciplinaires, administratives et judiciaires prescrites par le haut commandement et ouvertes par les autorités administratives locales et les forces de défense et de sécurité, permettront de préciser les contours de ces intolérables agissements, en rupture d’une part avec le respect des règles d’engagement et d’autre part, avec la protection des droits humains, principes cardinaux auxquels les éléments des forces de défense et de sécurité sont fermement astreints».

    Zéphirin Fotso Kamga

  • 2200

    2200

    Teodoro Obiang Nguema Mbasogo

    C’est le nombre de commandos d’élite qui seront retenus au terme du recrutement spécial dans les rangs du Bataillon d’intervention rapide (BIR). Étalée du 1er février 2021 au 14 mars 2021, l’opération concerne les jeunes Camerounais désireux de faire carrière dans l’armée. Selon un communiqué radio-presse signé par Joseph Beti Assomo, ministre de la Défense (Mindef), les candidats doivent être du sexe masculin, âgés d’au moins 18 ans et de 23 ans au plus. «C’est-à-dire être né entre le 31 janvier et décembre 1988 pour les plus âgés et le 1er janvier 2003 pour les plus jeunes», peut-on lire dans le communiqué du Mindef. Toujours dans le cadre des conditions à remplir, le ministre indique que les candidats attendus ne doivent pas avoir d’enfants. Ils ne doivent jamais avoir été condamnés. Ils doivent avoir une bonne moralité. Ils doivent être aptes physiquement pour passer les épreuves sportives, morales et écrites. Ils doivent également au moins être détenteurs du CEP ou du FLSC ou d’un diplôme équivalent. Cependant, ils sont tenus de présenter leurs diplômes les plus élevés. En plus de tout ce qui est suscité, les candidats doivent avoir une taille minimale de 1,66 mètre.

  • La Minusca aussi sur le front  du financement des projets

    La Minusca aussi sur le front du financement des projets

    Depuis qu’elle est opérationnelle, la Minusca se déploie sur au moins deux fronts: le maintien de la paix et le financement des projets.

    Concertation au sommet entre la Minusca et la présidence de la RCA

    Entre le 15 septembre 2014 et le 15 septembre de l’année en cours, la Force onusienne a financé pas moins de 506 projets à impact rapide à hauteur de 8,8 milliards FCFA. Dans une République centrafricaine en proie à une crise politique et sécuritaire, «les projets à impact rapide sont un outil d’appui à la mise en œuvre du mandat de la Minusca au bénéfice de la population. Ils sont identifiés avec les autorités et les communautés locales dans les domaines de la protection civile, de la cohésion sociale et de la restauration de l’autorité de l’État», a confié un responsable.

    Les projets dits à impact rapide sont «exécutables dans un délai maximum de trois mois», selon des précisions apportées par la Minusca qui s’est du reste satisfaite d’avoir créé «quelque 7500 emplois d’urgence, dont 2000 pour les femmes». Ainsi que l’ont également souligné des responsables, «ces projets servent en priorité les jeunes, les communautés et les populations de tout bord. Ils sont exécutés dans 12 bureaux de terrain de la Mission et ont déjà permis d’établir des relations de confiance entre la Minusca et les populations».

    Au cours des six dernières années, Laurent Gueping, chef de la section des Affaires civiles, met alors volontiers à l’actif desdits projets plusieurs réalisations. Parmi celles-ci, le responsable fait figurer «202 bâtiments administratifs et 42 ponts construits, la réhabilitation de 66 écoles, de 12 radios communautaires, des marchés, des maisons des jeunes et des femmes et l’appui aux activités génératrices de revenus».

    C’est en tout cas fort de ce bilan que la Minusca poursuit ses opérations de maintien de la paix. La Force onusienne a d’ailleurs été renforcée dans ce sens par le 7e contingent de Casques bleus camerounais. La composante, riche de 1150 éléments parmi lesquels 750 militaires, 280 gendarmes, des conseillers militaires et des policiers, a reçu le 16 septembre dernier l’étendard à Motchéboum dans la région de l’Est au Cameroun. En sacrifiant à cette exigence, le Mindef, Joseph Beti Assomo, a instruit de faire «scintiller le blason de nos armées en RCA», prévenant «qu’aucune erreur ne sera tolérée», rapporte à ce propos Cameroon tribune.

    Théodore Ayissi Ayissi 

  • Frontière Cameroun-Guinée Équatoriale : Déjà une affaire de forces spéciales

    Frontière Cameroun-Guinée Équatoriale : Déjà une affaire de forces spéciales

    Le long de la ligne de séparation des deux pays, Yaoundé comme Malabo ont impliqué leurs armées respectives.

    Le Mindef sur le terrain.

    À la frontière entre le Cameroun et la Guinée Équatoriale, le brouillard de la guerre ne cesse de s’épaissir. Depuis quelque temps, la tension y est autrement plus aiguë. D’un côté comme de l’autre, l’agencement des bataillons et des chaînes de commandement révèle chaque jour un paysage stratégique qui pourrait aller jusqu’à l’ouverture du feu. Si l’on en croit des sources militaires camerounaises, des généraux et des maîtres-espions équato-guinéens ont parfois orchestré des face-à-face fortuits, mais sans débordement tragique. Les mêmes sources dénoncent les coups de boutoir quotidiens de Malabo en territoire camerounais, à Kye-Ossi (Vallée du Ntem) notamment.

    Ce «rituel», bien connu des autochtones, donne du sens aux manœuvres militaires observées ces derniers temps. «Le scénario le plus récent est le déploiement des forces spéciales équato-guinéennes le long de la frontière» renseigne Jean Marie Zue Zue, le nouveau maire de Kye-Ossi. L’édile parle d’«une mobilisation renforcée du dispositif pour sécuriser quelques portions de leur route construite abusivement l’année dernière en territoire camerounais».

    À Yaoundé, où l’on suit de près les événements, l’affaire est prise très au sérieux. Sur instructions de Paul Biya, des troupes d’élite ont été déployées depuis quelques semaines à Kye-Ossi. Ne s’abstenant pas de désigner clairement Malabo comme l’adversaire visé par les manœuvres militaires camerounaises, le haut commandement assure vouloir produire des effets psychologiques. Dans le même temps, Yaoundé compte ainsi éloigner le spectre de l’enlisement et, autant que faire se peut, rassurer des popula tions riveraines face à l’agression d’un adversaire d’autant plus zélé qu’il est plus proche. Aussi parle-t-on d’une «vigilance accrue à travers une mission de surveillance de la frontière». Selon Cameroon Tribune du 3 avril 2020, cette mission est assurée par le 11e bataillon d’infanterie motorisée.

    «Task force»
    «C’est une première mesure que nous prenons en réponse à ces attaques», a déclaré Joseph Beti Assomo, en visite sur la rocade frontalière le 2 avril dernier. Aux côtés du ministre délégué à la présidence de la République en charge de la Défense (Mindef), il y avait son collègue de l’Administration territoriale (Minat), Paul Atanga Nji. Conçue par Paul Biya, cette «task force» est allée apprécier le site qui concentre les tensions entre le Cameroun et la Guinée Équatoriale. Ensemble, les deux membres du gouvernement ont écouté les riverains et les chefs militaires. Ensemble, le Mindef et le Minat ont constaté que Malabo ne joue pas seulement la montre, mais met la pression sur le Cameroun à travers un vaste chantier de construction, de manière unilatérale et asymétrique, d’un mur («Pared de integracion», voir Intégration N° 377 du lundi 15 juillet 2019) et d’une route bitumée.

    Il est à relever que cette flambée des tensions s’inscrit en réalité dans le contexte d’une longue escalade diplomatique entre les deux pays. L’on se souvient que le 10 juin 2019, le président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo avait dépêché son ministre d’État chargé de l’Intégration régionale au palais de l’Unité. L’entretien entre Paul Biya et Baltasar Engonga Edjo’o avait duré près d’une heure. Face à la presse locale, le visiteur s’était obstiné à polariser sa déclaration sur l’esthétique (réjouissante) des relations entre la Guinée Équatoriale et ses voisins, restant soigneusement aphone sur le chantier évoqué supra.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Après les événements de Ngarbuh : L’armée camerounaise souffle le chaud et le froid

    Après les événements de Ngarbuh : L’armée camerounaise souffle le chaud et le froid

    Le regard des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sur le travail de la grande muette dans cette partie du pays.

    Le ministre de la Défense passe les troupes en revue

     

    Des éléments du Bataillon d’intervention rapide (Bir) soulagent les souffrances des populations de Benakuma (arrondissement de la Menchum-Vallée), dans le département de la Menchum, région du Nord-Ouest. Cette population, confrontée à une crise sécuritaire sans précédent, est privée des soins de santé depuis plusieurs mois. L’équipe médicale du Bir s’y est rendue et a soigné des malades en leur apportant des soins de santé gratuitement. Le même Bir vient d’offrir une ambulance à l’hôpital régional de Limbe dans le Sud-Ouest.

    L’équipe médicale de ce corps d’élite est par ailleurs au chevet des populations de la presqu’île de Bakassi, frappées par l’épidémie du choléra. La ville de Bamenda est confrontée à une insalubrité criarde du fait de la suspension il y a quelque temps des activités de la société Hysacam. Celle-ci a dû interrompre le ramassage des ordures dans la capitale régionale du Nord-Ouest à cause des attaques et enlèvements ciblés de ses employés. La même entreprise avait déjà vu incendier ses équipements par des présumés séparatistes. Pour éviter le pire sanitaire à la ville de Bamenda, les éléments du Bir se sont substitués à Hysacam en ramassant des tas d’ordures au Marché des vivres (Food Market), au Marché de Ntarinkon, au Marché central etc.

    Face à la dégradation de la voirie municipale de Bamenda, le Génie militaire est monté au créneau avec ses équipements: pelles-chargeuses, camions remplis de gravillons… Au bout du compte, les nids de poule et dos d’âne des axes Ayaba Street, Sonac Street ou Meta Quater ont retrouvé leur fluidité d’antan. Il en est également du rétablissement de la circulation sur certains axes, après la destruction des ponts par des séparatistes. C’est le cas, respectivement, sur l’axe Bamenda-Wum, plus précisément à Bafut, où des séparatistes avaient creusé une tranchée sur la voie publique. Le pont de Bamessing par Ndop sur l’axe Bamenda-Kumbo, le pont à Mbelewa desservant la ville de Bamenda à la décharge (des ordures) municipale à Magadi et Nforya par Bafut, tous détruits par des séparatistes.

    Le rétablissement de la circulation du l’axe Bamenda-Bafoussam au lieu-dit Akum — Mile 8. Ici, des séparatistes avaient fait une excavation. Le corps des Sapeurs-pompiers, au-delà de sa mission régalienne, qui est l’intervention en cas d’incendie, met constamment à contribution son ambulance médicalisée pour sauver des personnes en détresse sanitaire. Les pompiers se déploient en outre dans la ville de Bamenda pour distribuer de l’eau potable aux populations de certains quartiers. Que dire de la libération, par l’Armée, des personnes enlevées et gardées en captivité par des séparatistes dans la forêt à Bamendankwe et ailleurs dans la région.

    Autant de faits d’armes qui ont suscité la sympathie, mieux l’appréciation à sa juste valeur des actions des forces de défense et de sécurité par la population dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (Noso). D’où la collaboration qu’apportent (en renseignement prévisionnel) certains civils aux forces de l’ordre dans ce combat acharné contre «les ennemis de la République». C’est ce que font certains comités de vigilances dans le Noso. À Nkambe centre et Misaje dans le Donga-Mantung, cette franche collaboration freine les ardeurs offensives des séparatistes. Ce qui donne du contenu au slogan «Armée-nation».

    Changer de fusil d’épaule
    Toutefois, des fausses notes sont enregistrées durant la guerre asymétrique dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (Noso) au Cameroun.. Ce qui entame l’estime qu’avait une partie de la population du Noso à l’endroit des forces de défense et de sécurité. «La perfection n’étant du monde des humains», regrette un observateur averti, «on pourra de temps en temps constater quelques errements de nos forces de l’ordre, car on à faire à une guerre asymétrique dans laquelle les combattants séparatistes se confondent à la population civile. Dans ce contexte il est difficile pour les soldats gouvernementaux au front de faire un distinguo entre les civils et les rebelles, surtout que la vie de ces forces de défense et de sécurité est en danger».

    Au sujet des exactions attribuées, à tort ou à raison, à l’armée camerounaise, on cite entre autre: le massacre de Ngarbuh, le 14 février; la fusillade, suivie de la mort du Sieur Fuh Augustine, conducteur d’un malade à Saint Mary Soledad Hospital de Mankon à Bamenda le 19 février; les incendies de certains villages dont Kwa-kwa dans le Sud-Ouest (avec des dégâts collatéraux dont sont victimes certains civils au cours des interventions des forces de défense). Les griefs formulés contre l’armée camerounaise ont très souvent suscité la réaction du gouvernement de la République. Dernier exemple en date, le 17 février dernier, après les accusations concernant les événements de Ngarbuh.

    Le ministre délégué à la Présidence, chargé de la Défense (Mindef), Joseph Beti Assomo, dans un communiqué, rapporte que «les forces de défense en opération de reconnaissance dans ladite localité ont été prises à partie par les terroristes sécessionnistes ayant transformé une habitation de la localité en place forte, véritable base logistique de marchandises illicites, d’armement et de munitions de divers calibres, de stupéfiants et amulettes». La communauté internationale demande à l’unisson l’ouverture d’une enquête pour établir la vérité des faits et partant les responsabilités. L’armée camerounaise retient son souffle. Sa crédibilité et son professionnalisme reconnus sont en jeu.

     

    Crise sociopolitique dans le Noso

    Samuel Eto’o et Mgr Samuel Kleda à cœur et à cris

    Face aux morts qui se comptent à la pelle dans la partie anglophone du Cameroun, l’ancien capitaine des Lions indomptables et l’archevêque de Douala exhortent à l’apaisement, la prière et le respect de la vie humaine.

     

    Des morts et du feu dans le village de Ntumbo, plus précisément à Ngarbuh (département du Ndonga-Mantung, région du Nord-ouest). Survenu dans la l’après-midi du 14 février 2020, le drame continue de faire couler encre et salive au sein l’opinion publique. Parce qu’ils font échos au mal-être d’un pays tout entier et s’interprètent comme la véritable souffrance que vivent les populations de la partie anglophone du Cameroun, les pleurs entendus trahissent l’envie que ça s’arrête. Cette envie est tellement oppressante que les bercements deviennent de plus en plus violents ou modérés. C’est cette dernière option qu’a choisie Samuel Eto’o dans une sortie sur la chaine de télévision privée Équinoxe, le 19 février 2020 à Douala.

    Ligne
    «Notre beau pays traverse des moments difficiles et mon plus grand rêve, c’est que nos cœurs s’apaisent. C’est vraiment important qu’on retrouve le vivre-ensemble qui nous a toujours caractérisés et qu’on a toujours enseigné aux autres nations», a déclaré le footballeur néo-retraité. La ligne développée par l’ancien buteur des Lions indomptables s’inspire des longues années au cours desquelles l’angoisse a toujours accompagné un quotidien incertain. Arrivé dans son pays à la faveur du tirage au sort du prochain Chan, Samuel Eto’o s’est dit indigné par une actualité nationale bien lourde d’évènements traumatiques. Malgré tout, le désormais membre influent de la Confédération africaine de football (Caf) pense que l’enjeu est pourtant de poser un cadre de concertation. «Le Cameroun un pays spécial qui nous appartient tous; nous ne sommes pas parfaits, moi le premier, mais j’aimerais vraiment que nos cœurs soient apaisés et que nous revenions à de meilleurs sentiments», suggère-t-il.

    Cette déclaration de la star du cuir rond vient en addition à l’initiative de Mgr Samuel Kleda, archevêque métropolitain de la ville de Douala. Il a organisé vendredi 21 février dernier, sur toute l’étendue de son diocèse, une journée de prière pour le retour de la paix dans les parties du pays en proie à la guerre: l’Extrême-nord où Boko Haram continue d’endeuiller des familles; et la zone anglophone avec des victimes à la pelle dans le cadre d’une guerre de sécession actuellement à sa quatrième année. «Nous ne devons pas oublier le caractère sacré de la vie humaine. Un seul mort, c’est trop. Nous devons tous être des artisans du retour de la paix dans toutes parties de notre pays», a indiqué l’archevêque métropolitain au sortir d’une messe de circonstance à la cathédrale de Douala vendredi dernier au petit matin. L’épiscopat mondial, quant à lui, exhorte le président Paul Biya à dialoguer avec les séparatistes. En effet, plusieurs évêques de l’Église catholique romaine ont écrit à Paul Biya, exhortant ce dernier à favoriser la mise en œuvre d’un retour à la paix au Nord-ouest et au Sud-ouest. «Chacune de ces vies est précieuse, et nous pleurons leurs souffrances et souhaitons prévenir plus de perte de vie et d’innocence», déclarent-ils.

    Vague d’indignations
    Ailleurs, l’effroi et la condamnation sont unanimes face à la tragédie de Ngarbuh. Dans un communiqué publié le 17 février 2020, l’Onu (Organisation des Nations unies) a réclamé une enquête. «Nous pressons les autorités de s’assurer que l’enquête sera indépendante, impartiale et complète, et que les responsables rendent des comptes», a déclaré, dans un communiqué, le Haut- Commissariat de l’Onu pour les droits de l’homme (HCDH).

    Sur Twitter, le 19 févier 2020, Tibor Nagy, secrétaire d’État adjoint pour les Affaires africaines au Département d’État, est monté au créneau. «Nous condamnons les meurtres de civils à Ngarbu, dans la région du Nord-ouest, et présentons nos condoléances aux familles des victimes. Nous demandons au gouvernement d’autoriser une enquête indépendante, de garantir la protection des témoins et de traduire les coupables en justice. La violence doit cesser», a-t-il écrit.

    Même tonalité du côté du Quai d’Orsay. Lors d’un point de presse à Paris, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères et de l’Europe a décliné la position de l’Hexagone sur le sujet. «Nous condamnons les violences qui ont entraîné la mort d’un grand nombre d’habitants d’un village de la province du Nord-ouest du Cameroun, dont des enfants. Nous présentons nos condoléances aux familles des victimes ainsi qu’au peuple camerounais. Nous souhaitons que toute la lumière soit faite sur cet évènement tragique, et que les responsables répondent de leurs actes», a-t-il commenté.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Tragédie de Ngarbu-Ntumbaw : En quête d’enquêtes et de contre-enquêtes

    Tragédie de Ngarbu-Ntumbaw : En quête d’enquêtes et de contre-enquêtes

    La communauté internationale exige une investigation pointue sur le drame. Les autorités locales, elles, s’échinent à démontrer leur bonne foi.

     

     

    L’effroi et la condamnation sont unanimes à la suite de la tragédie survenue le 14 février 2020 à Ngarbu-Ntumbaw (département du Donga-Mantung, région du Nord-ouest du Cameroun). À travers le monde, les réactions sont nombreuses et se succèdent autant qu’elles dévoilent deux thématiques : le nombre de morts et leurs tueurs.

    Dans un communiqué publié le 17 février 2020, l’Onu (Organisation des Nations unies)  parle de 23 personnes tuées (dont 9 enfants de moins de 5 ans) par l’armée camerounaise. L’institution planétaire disait alors tenir ses informations  de ses employés déployés sur le terrain. Un précédent bilan fourni la veille par un représentant de l’Onu au Cameroun faisait état de vingt-deux civils tués, dont quatorze enfants, une femme enceinte et deux femmes portant des bébés.

    Aux autorités camerounaises, l’Onu a réclamé une enquête. « Nous pressons les autorités de s’assurer que l’enquête sera indépendante, impartiale et complète, et que les responsables rendent des comptes », a déclaré le Haut-Commissariat de l’Onu pour les droits de l’homme (HCDH) dans un communiqué.

    Sur twitter le 19 févier 2020, Tibor Nagy Secrétaire d’Etat Adjoint pour les Affaires Africaines au  Département d’Etat est monté au créneau. « Nous condamnons les meurtres de civils à Ngarbu, dans la région du Nord-Ouest, et présentons nos condoléances aux familles des victimes. Nous demandons au gouvernement d’autoriser une enquête indépendante, de garantir la protection  des témoins et de traduire les coupables en justice. La violence doit cesser», a-t-il écrit.

    Même tonalité du côté du Quai d’Orsay. Lors d’un point de presse à Paris, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères et de l’Europe a décliné la position de l’Hexagone sur le sujet. « Nous condamnons les violences qui ont entraîné la mort d’un grand nombre d’habitants d’un village de la province du Nord-Ouest du Cameroun, dont des enfants. Nous présentons nos condoléances aux familles des victimes ainsi qu’au peuple camerounais.
    Nous souhaitons que toute la lumière soit faite sur cet événement tragique et que les responsables répondent de leurs actes », a-t-il commenté

    En guise de version officielle, le ministre délégué de la Présidence, chargé de la défense (Mindef), Joseph Beti Assomo, dans un communiqué rendu public le 17 février, rapporte que « les forces de défense en opération de reconnaissance dans ladite localité, ont été prises à partie par les terroristes sécessionnistes ayant transformé une habitation de la localité en place forte, véritable base logistique de marchandises illicites, d’armement et de munitions de divers calibres, de stupéfiants et amulettes ».

    La riposte s’est soldée par la neutralisation de 7 terroristes et bandits, selon le ministre de la défense. Au cours des accrochages, poursuit-il, « un incendie s’est déclaré dans la fortification des terroristes installée dans la même habitation, provocant des explosions, avant de se propager aux habitations voisines ».

    « L’incendie aurait fait 5 victimes, dont une femme et 4 enfants, bien loin du prétendu massacre relayé dans les réseaux sociaux», s’indigne le Mindef.

    Depuis 2017, le conflit dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest peuplées principalement par la minorité anglophone camerounaise a déjà fait plus de 3 000 morts et 700 000 déplacés. L’armée camerounaise comme les séparatistes armés sont accusés par des ONG internationales de défense des droits humains d’exactions contre des civils dans ces deux régions.

    Bobo Ousmanou

  • Nord- Ouest et Sud- Ouest du Cameroun : La rentrée des batailles rangées

    Nord- Ouest et Sud- Ouest du Cameroun : La rentrée des batailles rangées

    Dans la guerre à trois autour de la rentrée scolaire dans la zone anglophone du pays, l’armée mise sur la géostratégie, les séparatistes et la rue tablent sur l’émotionnel.

    L’un des visages de l’affrontement larvé sur les réseaux sociaux

    Le chœur gouvernemental le dit : les enfants iront à l’école partout au Cameroun en cette année scolaire. «Forcément puisque tout a été orchestré pour cela !», a martelé Laurent-Serge Etoundi Ngoa. Le ministre de l’Education de base s’exprime lors d’une conférence de presse le 26 août à Yaoundé. «Le 2 septembre 2019, dans toutes les parties du territoire camerounais, l’on va assister à une rentrée scolaire effective, dans le calme et la sérénité», informe le ministère de la Défense (Mindef), juste après la réunion d’évaluation sécuritaire présidée par Joseph Beti Assomo le 30 août dernier à Yaoundé.

    Dans sa livraison du même jour, Cameroon Tribune (CT), quotidien gouvernemental, donne la parole au capitaine de frégate Cyrille Serge Atonfack. Le chef de la division de la communication du Mindef montre bien que la géostratégie est au cœur de la campagne autour de la rentrée scolaire menée par les militaires. Ils l’ont baptisée «Lundi 2 septembre 2019». Selon le communicant du ministère camerounais de la défense, elle consiste d’une part, à convaincre les populations des bienfaits de l’école ; et d’autre part, à vaincre les réticences et la peur que les citoyens éprouvent quant à la sécurité de leurs enfants.

    Dans le corpus de cette campagne, un premier coup de sonde permet de voir une armée fougueuse, en spectacle dans une rhétorique à valeur dissuasive. Dans le second, l’opération «Lundi 2 septembre 2019» entend passer «de la caricature agressive à la symbolique moralisante», selon la formule du sociologue Bruno Mbog. Dans leur déploiement, les bidasses procèdent à l’incantation au «retour à l’école». «Les forces de défense et de sécurité doivent plus que par le passé prendre toutes les dispositions pour une sécurisation optimale de la rentrée scolaire, par la protection des écoles et des enseignants», exhorte Joseph Beti Assomo, repris par CRTV Web le 30 août 2019. Il y a certes à cela une certaine logique, à en croire le capitaine de frégate Cyrille Serge Atonfack. Dans CT, il affirme: «Pour nous autres des forces de défense et de sécurité, cette mission est un combat citoyen et existentiel que nous entendons mener avec honneur et fidélité, jusqu’à son terme, partout où besoin sera».

    Réplique
    Dans le même temps, les séparatistes sont dans un grand programme de communication. Il s’agit d’un système construit depuis quelques temps (selon des sources) et qui contribue à forger une sensibilité «Dead school» partout dans le Sud-Ouest et le Nord-Ouest. À travers les réseaux sociaux, les «Amba boys» reprennent exactement le contraire de la rhétorique du Mindef ; ceci à l’aide d’images permettant à tous les parents d’identifier la situation à celle que peut vivre leur propre enfant, si jamais ce dernier désobéit aux mots d’ordre. En dehors d’accuser Etoudi d’une multitude de péchés, les sécessionnistes ne cessent de superposer détermination à imposer le solgan du «No school here this year» (Pas d’école ici cette année). Visée: provoquer le revirement de toutes les masses séduites par les pouvoirs publics, des élites et quelques acteurs de la société civile.

    Pour les aider à parvenir à leurs fins, un océan d’images arrive du côté des particuliers. Aussi revigorants que puissent paraître les post de l’armée, les clichés envoyés par les «filmeurs de choses» anonymes visent à montrer que pour cette seule rentrée 2019-2020, il existe d’autres possibles, surtout dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

    C’est tout le sens de la présence d’un collège de prélats à l’Immeuble Etoile le 30 août 2019. Conduite par le cardinal Christian Tumi, la délégation qui a rendu visite à Chief Joseph Dion Ngute était venue faire part de la situation sur le terrain au Premier ministre. Equinoxe télévision rapporte qu’«une compilation d’anecdotes captées sur terrain a permis à l’archevêque émérite de Douala de plaider en faveur de la tenue rapide d’une session de dialogue politique national inclusif au Cameroun».

    Open School Now
    En addition à l’opération «Lundi 2 septembre 2019» du ministère de la défense, les hautes autorités du pays ont lancé depuis une dizaine de jours une campagne de sensibilisation baptisée «Open School Now in North West and South West». Cette campagne sur les réseaux sociaux consiste à diffuser des images de personnes présentant des messages sur l’importance de l’école pour tous les enfants du pays, et surtout la nécessité de la réouverture des écoles dans la partie anglophone du pays. Toutes les catégories socio-professionnelles du pays sont sollicitées pour cette campagne, qui ne manque d’indexer en les nommant celles des personnalités potentiellement soupçonnées d’intelligence avec l’ennemi.

    On s’en doute, une contre-campagne épinglant les hautes autorités du pays a spontanément vu le jour sur les mêmes réseaux sociaux. Elle consiste à diffuser des messages prenant le contre-pied du discours gouvernemental sur la rentrée scolaire dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Les activistes de la cause anglophone sur Internet n’hésitent pas à revendiquer le dialogue national inclusif comme préalable à un retour de l’école dans cette partie du pays. Qui gagnera cette bataille symbolique de la rentrée scolaire ? Wait and see.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Vih/Sida dans les forces de défense : Plus de 4% de sous-officiers infectés

    Vih/Sida dans les forces de défense : Plus de 4% de sous-officiers infectés

    C’est ce que révèle une enquête menée auprès des bidasses en 2018.

    Une vue du parterre d’officiels pendant la restitution du rapport

    L’étude comportementale et de séroprévalence du Vih/Sida menée au sein des forces de défense camerounaises a rendu son verdict le 18 juillet 2019 à Yaoundé. À Koumpa Issa, le secrétaire d’État à la Défense chargé des Anciens Combattants et Victimes de guerre, les résultats de ladite enquête ont été remis. Au final, indique le colonel- médecin Ambroise Emmanuel Mama, «la prévalence globale du VIH se situe à 3,3% au sein des Forces de Défense du Cameroun en 2018». D’autres détails cités par le directeur de la santé militaire au ministère de la Défense (Mindef) font état d’un taux de prévalence de 3,3% chez les hommes et 3,4% chez les femmes. Bien plus : en 2018, les militaires de rang sont infectés à hauteur de 2,4%, sous-officiers (4,6%) et officiers (2,6%). Sur la foi du rapport présenté, la tranche des 30-34 ans est la plus exposée.

    Au-delà, ces chiffres montrent qu’en l’espace de quelques années, le taux de prévalence du VIH/Sida dans la grande muette a été presque réduit de moitié. En effet En 2002, le taux était de 9,8% et en 2005 le taux était évalué à 11,3%. Mais l’étude réalisée en 2011 a permis de voir que le taux de prévalence a chuté même s’il reste important passant à 6%. En 2011, 5,9% des hommes dans l’armée était atteint alors que pour les femmes, le taux était de 6,4.

    L’étude a été financée par le programme-prévention Vih/Sida du département de défense de l’armée américaine (DHAPP) et la coordination technique a été assurée par l’organisme américain Johns Hopkins-Global Viral Forecasting Initiative (JH-GVFI). Selon le Lieutenant-Colonel Wagmene, point focal VIH au Mindef, «cette opération a permis de fournir des données sur les faits et d’obtenir une base de référence pour le suivi efficace du programme militaire de prévention du Vih/Sida». L’opération était menée par le ministère de la Défense à travers le Centre de recherches pour la santé des armées (CRESAR), la direction de la santé militaire et le point focal VIH/Sida au Mindef. Elle a concerné un échantillon de 1947 individus dont 413 femmes.

    Ongoung Zong Bella

  • Gouvernance dans l’armée : L’affaire Mebe Ngo’o ouvre la boîte de pandore

    Gouvernance dans l’armée : L’affaire Mebe Ngo’o ouvre la boîte de pandore

    La mise aux arrêts de l’ancien ministre camerounais de la Défense est en passe d’ouvrir le débat tant souhaité sur l’«immunité» de la grande muette.

    Fin mars 2017, au cours d’une édition de l’émission « Dimanche Midi » de la CRTV-Radio, Hassan, un inspecteur d’État alors en service au ministère délégué à la présidence de la République en charge du Contrôle supérieur de l’État (Consupe), est criblé de questions par un collège de journalistes. L’embarras du haut-fonctionnaire à répondre sur le socle de l’«immunité» présumée de l’armée est perceptible. Malgré les évitements, Hassan lâche quelques phrases : «Vous ne pouvez pas décider d’engager un audit des comptes comme ceux de l’armée, sans qu’il y ait un élément déclencheur pertinent. Comme vous le savez, l’armée, dans tous les pays du monde, relève de ce qu’on appelle la souveraineté».

    À ce jour, l’actualité ne peut plus se contenter de la simple caricature. Edgar Alain Mebe Ngo’o a été écroué à la prison centrale de Yaoundé-Kondengui. Comme un capitaine et ses lieutenants, le tout-puissant ministre de la Défense (2009-2015), qui doit répondre des charges de détournements et de malversations présumés de fonds publics, a entrainé avec lui quelques hauts-dignitaires de l’armée nationale. «Voilà, dit Me Adèle Asseng à Zang, l’élément déclencheur d’une procédure plus large». S’exprimant à Yaoundé le 14 mars dernier lors d’une conférence publique sur les «appendices d’une enquête judiciaire», l’avocate au barreau du Cameroun tient, avec l’arrestation de Mebe Ngo’o, une bonne matière.

    Pour beaucoup, cette matière est constituée des salaires fictifs des hommes en tenue par exemple. «C’est eux-mêmes qui nous dévoilent que l’armée est infestée d’hommes et de femmes qui touchent, non pas un ou deux, mais plusieurs salaires; c’est très grave !», peste Jean Ayi, inspecteur principal du trésor à la retraite. Il est d’autant plus amer que, selon des informations qu’il assume, «de nombreux glissements de salaires au Mindef ont eu lieu sous Mebe Ngo’o».

    Autre ligne à scruter, l’achat de matériel pour le compte de l’armée. En 2016, SCISCO, une société de maintenance d’équipements militaires basée en France, harcelait l’actuel pensionnaire de Kondengui de régler une ardoise impayée de 13 milliards de francs CFA. Dans l’une de ses éditions parues cette année-là, La Lettre du Continent relayait des informations sur les procédures de paiement sulfureuses en cours au Mindef sous Mebe Ngo’o. L’équipe d’avocats de SISCO avait révélé au journal que les règlements de factures traînent au Mindef à cause d’«un manque de traçabilité juridique». À comprendre que beaucoup de marchés, réels ou fictifs, sont donc à réexaminer.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • 289

    289

    Paul Biya a décidé, en fin de semaine dernière, l’arrêt des poursuites contre 289 personnes arrêtées pour divers délits commis dans le cadre de la crise sociopolitique dans les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest. Le ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense (Mindef) renseigne sur le nombre et les lieux de détention des prévenus. Ceux-ci sont disséminés dans les prisons de Bafoussam, Yaoundé, Bamenda et Douala. Dans les pénitenciers desdites villes, les personnes détenues sont respectivement au nombre de 6, 120, 49 et 14. Selon Joseph Beti Assomo, les bénéficiaires sont les personnes sur lesquelles pèsent des charges d’«une gravité relative». Au-delà, poursuit-il, les auteurs d’assassinats, de crimes et de terrorisme auront toujours la justice à leurs trousses.

  • Présidentielle 2018 au Cameroun : Résultats et controverses d’un scrutin

    Présidentielle 2018 au Cameroun : Résultats et controverses d’un scrutin

     

    Le président sortant rempile pour un septième mandat, avec un principal défi politique à relever : renforcer la transparence électorale, pour éviter à l’avenir des résultats suspects provenant de 32 départements sur les 58 que compte le pays.

    À 85 ans, dont bientôt 36 passées à la tête de l’État, Paul Biya entame un septième mandat, dès sa prestation de serment (qui interviendra au plus tard le 7 novembre). Un nouveau septennat qui ne sera pas de tout repos. Le président réélu devra commencer par se faire accepter par tous les Camerounais. Pourtant proclamé vainqueur de la présidentielle du 7 octobre avec 71 % des suffrages, certains de ses compatriotes ne semblent pas reconnaitre cette victoire, un peu comme en 1992. Cette année-là, le président Biya avait été déclaré élu face Ni Jonh Fru par une avance de quelques milliers de voix.

    « Subversion »
    Le contentieux post électoral ne semble pas avoir mis fin à la contestation. « Nous rejetons en bloc tout ce qui vient d’être fait et nous rejetterons en même temps les résultats qui vont sortir de ce Conseil constitutionnel, qui, je dis, reste une excroissance du RDPC », a déclaré Paul Éric Kingue. Le directeur de campagne de Maurice Kamto s’exprimait après le rejet de la requête du candidat du MRC. Ce vendredi 20 octobre, après la clôture du contentieux électoral, des personnes réclamant un lien avec le Cameroun manifestent en Allemagne. Elles disent dénoncer « le hold-up politico-électoral en cours au Cameroun ». Dimanche, veille de proclamation des résultats, une autre manifestation publique est étouffée à Douala.

    Organisée par Jean Michel Nintcheu, député du SDF, elle a pour objectif « de dénoncer les fraudes massives et honteuses ayant émaillé l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 ». Plusieurs personnes, dont des journalistes, sont aux arrêts.
    Jusqu’où ira cette défiance ? Difficile à dire. Une évidence cependant, le régime de Yaoundé prend l’affaire très au sérieux. Des SMS appelant à une manifestation le 22 octobre au centre de la ville de Yaoundé ont même provoqué une réaction du ministère de la Défense (Mindef). « Des individus mal intentionnés envoient des messages de subversion à travers vos téléphones. Cette nouvelle opération démontre que ceux qui veulent déstabiliser le Cameroun n’ont pas désemparé malgré les camouflets qui se superposent. Ne suivez aucun de ces messages », écrit colonel Didier Badjeck, chef de la division de la communication du Mindef.

    Intimidations
    Pour étouffer la contestation, les autorités jouent à la fois la carte de la manipulation et de l’intimidation. Au lendemain de l’élection du 7 octobre, les candidats Maurice Kamto et Cabral Libii sont placés sous haute surveillance. Des unités mixtes (police et gendarmerie) campent devant leur QG de campagne. À Douala, la police entoure depuis dimanche matin le domicile de Kah Walla et l’empêche de sortir. La fondatrice du Cameroon People’s Party (CPP) n’a pourtant pas pris part à cette élection présidentielle.

    Au même moment, des appels au calme et à la paix se multiplient sous l’initiative distraite du pouvoir de Yaoundé. Au petit matin du 19 octobre, la photo, le passeport et la carte d’embarquement du fils de Maurice Kamto se publiés sur les réseaux sociaux. A quelle fin ? Certainement pour tenter de dissuader les jeunes de descendre dans la rue, en indiquant que le candidat du MRC met ses enfants à l’abri.

    Chèque en blanc
    En sollicitant ce septième mandat, Paul Biya a pris très peu d’engagements. Qu’est – ce qui attend les Camerounais dans les sept prochaines années ? Difficile de lire dans une boule de cristal. Le candidat du RDPC s’est clairement prononcé pour le statu quo actuel : un État unitaire décentralisé tel qu’on le connait aujourd’hui avec la promesse d’accélérer la décentralisation. Cela suffira-t-il à mettre un terme à la crise anglophone ? Rien n’est moins sûr. Une seule certitude : moins de cent mille inscrits dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest ont participé à la réélection de Paul Biya le 7 octobre. Ces régions ont pourtant 20 % de la population et un peu plus d’un million d’inscrits.

    Aboudi Ottou

    Élections présidentielles au Cameroun

    Même rengaine, même gangrène

    I— 11 octobre 1992, vol… à la victoire
    Des grésillements terribles autour des 39,98 % des suffrages engrangés par Paul Biya à cette élection présidentielle, organisée pour la première fois avec plus d’un candidat au Cameroun. Ni John Fru Ndi, le candidat du SDF (Social Democratic Front) parle, au superlatif, du « vol » de sa victoire. Il dit alors avoir percé des brèches dans la machine à frauder du président sortant. Crédité de 35,97 % seulement (selon la Cour suprême), le libraire ne peut accéder à la magistrature suprême. En bonne intelligence avec certaines chancelleries étrangères et la presse, Fru Ndi tente de s’éreinter dans un face-à-face avec Paul Biya. Cela ne change rien. Témoin actif des faits, Maître Akere Muna tranche, face à la presse à Yaoundé, le 18 octobre 2017: « En 1992, c’étaient les premières élections multipartites au Cameroun. Je gérais l’assemblage et le découpage des voix. Et je peux vous dire en 92, Fru Ndi a bel et bien gagné ».

    II—12 octobre 1997, adroit dans le boycott
    Cette année-là, le curseur se déplace simplement vers le code électoral. Parce que celui-ci empoisonne le débat public, trois formations politiques (SDF, UNDP et UDC) décident de ne pas prendre part au scrutin. Entre temps, la durée du mandat présidentiel passe de 5 à 7 ans. Paul Biya, une fois encore, tient le haut du pavé avec…92,7 %. Même si les ferments de contestation sont présents, le RDPC préfère en rire. La preuve : le 3 novembre, dans un hémicycle déserté par les 63 députés de l’opposition radicale, Paul Biya prête serment comme président de la République.

    III—11 octobre 2004, l’âge d’or des faux-semblants
    Le 25 octobre 2004, la Cour suprême siégeant comme Conseil constitutionnel proclame les résultats définitifs de l’élection présidentielle. Paul Biya glane 70,92 % des voix. L’opposition crie à la «fraude massive», tandis que l’Onel (Observatoire national des élections), «gendarme électoral», témoigne d’une élection régulière et transparente. Marafa Hamidou Yaya, alors ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (Minatd) parle d’incidents mineurs qui ne sont pas susceptibles de remettre en cause la validité du scrutin. Sauf que, écrite depuis la prison centrale de Yaoundé où il purge une peine de 25 ans pour détournement de fonds publics, l’une des lettres de l’ex-Minatd dit clairement que « Paul Biya n’a jamais gagné aucune élection ».

    IV—9 octobre 2011, encore Biya malgré les désordres lumineux
    Contre lui, 22 candidats. Paul Biya est réélu avec 77,98% devant John Fru Ndi. Les réactions de la France et des États-Unis retiennent l’attention. La première, par la voix de Bernard Valero (ex-porte-parole du Quai d’Orsay), estime que «lors du scrutin, de nombreuses défaillances et irrégularités ont été constatées. La France souhaite que des mesures soient prises pour que celles-ci ne se reproduisent pas lors des scrutins législatifs et municipaux de 2012». Une posture en rupture avec les félicitations officielles de la France. Les seconds, par le truchement de Robert Jackson, l’ambassadeur des États-Unis au Cameroun, concluent que «le jour du scrutin, nos observateurs ont noté des incohérences et des irrégularités à tous les niveaux, ainsi que des difficultés techniques de la part d’Elecam dans l’administration de l’élection». Rien n’y fait jusqu’en 2018, malgré ces avis catastrophés.

    V— 7 octobre 2018, gris-gris du Conseil constitutionnel
    Voici venu le temps d’expérimenter l’une des matrices de la démocratie : la «publicisation» des débats. On se félicite que le Conseil constitutionnel soit enfin un espace de confrontations à ciel ouvert. Tout s’y interroge, s’y débat, s’y affronte. Sauf que lors des discussions retransmises en direct sur les antennes de la télévision nationale, tout se passe comme si le «collège des sages» s’efforçait, par un usage effréné des techniques juridiques, de susciter une surface plane. Avec une durée inédite, Clément Atangana et son équipe ont nourri un faux suspense, un vrai buzz. Au finish, tous les recours sont rejetés.

    Jean-René Meva’a Amougou

    Présidentielle 2018

    Les leçons à tirer du scrutin du 7 octobre

    Le président sortant rempile pour un septième mandat, avec un principal défi politique à relever : renforcer la transparence électorale, pour éviter à l’avenir des résultats suspects provenant de 32 départements sur les 58 que compte le pays.

    Tranche de vie pendant la période post-électorale au Cameroun

    La présidentielle du 7 octobre 2018 a-t-elle été fiable et sincère ? En vidant le contentieux post-électoral vendredi de la semaine dernière, le Conseil constitutionnel (juge de «la régularité de l’élection présidentielle», selon l’article 132 alinéa 1 du code électoral) est loin d’avoir rassuré tous les Camerounais. En rejetant les 18 recours (en annulation partielle dans certains cas et totale dans d’autres), la haute juridiction n’a pas levé les soupçons qui pèsent sur l’authenticité de 32 procès-verbaux (PV) provenant des commissions départementales de supervision (CDS). Le CDS est l’instance où l’on compile les résultats des bureaux de vote d’un département.

    Ce lundi 22 octobre, le Conseil constitutionnel s’est pourtant appuyé notamment sur ces documents pour proclamer la victoire du candidat Biya Paul à ce scrutin. Au cours de l’audience solennelle de proclamation des résultats par Clément Atangana, le président sortant s’est vu attribuer 71,28 % des suffrages valablement exprimés (2 521 934 de voix), loin devant Maurice Kamto son suivant immédiat. Le candidat du Mouvement pour la renaissance (MRC) s’en tire avec 14,23 % (503 384 voix, résultats complets ci-dessous).

    Irrégularités
    La question de la transparence électorale est pourtant l’enjeu crucial du scrutin du 7 octobre dernier. Contrairement à l’avis des membres du Conseil, les chiffres montrent que les 32 procès-verbaux querellés auraient pu changer les résultats définitifs du scrutin. Selon les statistiques communiquées lors des débats devant la juridiction et non remises en cause, les 32 PV représenteraient plus de trois millions d’inscrits pour un total d’un peu plus de six millions, soit la moitié du corps électoral. Et dans ces unités administratives, 1,3 million de suffrages auraient été valablement exprimés et en écrasante majorité en faveur de Paul Biya, soit plus de 50 % du nombre de voix octroyées au candidat du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).

    «L’examen de ces documents montre qu’il ne s’agit pas de PV dans onze départements, mais des simples tableaux sur lesquels des fiches de présence ont souvent été agrafées», soutient Me Michelle Ndoki. Et l’avocate de Maurice Kamto, l’un des requérants, d’ajouter : «sans ces PV, nous pouvons dire, en tant que juristes, que la Commission nationale de recensement général des votes n’a pas statué sur des bases légales. Et donc, elle ne vous met pas en capacité de proclamer des résultats fiables». Elle relève aussi un écart entre le nombre d’inscrits figurant dans nombre de ces PV et celui rendu public par Elecam, l’organe chargé d’organiser les élections. Dans certains documents, le nombre de suffrages valablement exprimés est aussi supérieur au nombre de votants, rajoutant à la suspicion.

    Esquives
    En réponse, les défenses du RDPC et d’Elecam, conduites respectivement par Me Eyango et Me Atangana Amougou, bottent en touche les griefs formulés par le candidat Maurice Kamto. Elles estiment qu’il s’agit d’un nouveau moyen non contenu dans la requête introduite par Maurice Kamto. Me Eyango et Me Atangana Amougou ne font d’ailleurs que suivre une position exprimée par le Conseil constitutionnel. Au deuxième jour de l’examen de la requête du candidat du MRC, la juridiction a refusé de statuer sur l’authenticité de ces PV et la fiabilité des données contenues dans ces documents. Elle réserve une fin de non-recevoir à la demande des conseils de l’agrégé des facultés françaises de droit. Celui-ci souhaitait la confrontation desdits documents aux listes d’émargement en vertu de l’article 107 du code électoral. «Les listes électorales émargées sont conservées par le démembrement communal d’Élections Cameroon. En cas de contestation, elles sont transmises pour consultation au Conseil constitutionnel (…) sur sa demande», dispose-t-il.

    Lors de l’examen de son recours, la défense de Joshua Osih, candidat du Social Democratic Front (SDF), est revenue à la charge sur cette question. En rendant sa décision, le Conseil constitutionnel semble convaincu de la pertinence de ces irrégularités. En effet, il estime que seul le premier moyen de la requête du candidat n’était «pas justifié», l’élection, de l’avis du Conseil, ayant eu lieu dans les régions du Nord-ouest et le Sud-ouest. «Sur le reste des moyens, les griefs soulevés sont sans incidence sur le résultat de l’élection, au sens de l’article 134 du code électoral, compte tenu du nombre de suffrages exprimés en faveur du requérant», poursuivit Clément Atangana. Selon l’article 134, «le Conseil constitutionnel peut rejeter les requêtes ne contenant que des griefs ne pouvant avoir aucune incidence sur les résultats de l’élection». Mais question: comment des griefs concernant notamment les suffrages exprimés par la moitié du corps électoral peuvent n’avoir aucune incidence sur les résultats de l’élection ? Le président réélu devrait sérieusement adressé une réponse fiable à cette question. A ce sujet, la réforme du système électoral en général, et du code électoral en particulier est la première voie à défricher

    Aboudi Ottou

     

  • Violations des droits de l’Homme: Yaoundé lutte contre une enquête de l’Onu

    Violations des droits de l’Homme: Yaoundé lutte contre une enquête de l’Onu

    Sa démarche sur l’affaire de la vidéo montrant l’exécution des femmes et des enfants participe de ce combat. 

    Le président du Cameroun et le SG de l’Onu

    «Un revirement à 180 degrés». C’est l’expression qui revient pour qualifier le communiqué du ministre de la Communication signé le 10 août 2018. Dans ce document, Issa Tchiroma Bakary avoue implicitement que la vidéo montrant des hommes en uniforme exécutant des femmes et des enfants, qui a fait irruption sur les réseaux sociaux au début du mois de juillet, n’est pas un fake news. Plus encore, la scène se serait bien déroulée au Cameroun et les bourreaux de ces femmes et enfants pourraient bien être des soldats camerounais.

    En effet, informe le porte-parole de fait du gouvernement, l’enquête ouverte pour «élucider cette affaire et en établir les responsabilités éventuelles a conduit à l’arrestation des personnels militaires». Il s’agit d’un lieutenant de vaisseau, d’un sergent, de deux caporaux, deux soldats de 2e classe et d’un soldat de 1ère classe «mis à la disposition de la justice», précise le document.

    Cette position est aux antipodes du discours tenu par le gouvernement dès l’apparition de cette vidéo. Lors d’une rencontre avec la presse, le 11 juillet dernier, tout en annonçant l’ouverture d’une enquête, Issa Tchiroma Bakary parle alors de «fake news», «de manœuvre de désinformation grossière dont les faits projetés n’ont aucun rapport avec l’action menée par les forces de défense et de sécurité dans le cadre des missions qui leurs sont confiées», de «conspiration manifeste», de «malheureuse tentative de transfiguration de la réalité et d’intoxication du public».

    A sa suite, le ministère de la Défense (Mindef) désigne même un coupable: «L’activiste Patrice Nganang, qui en est l’auteur, a tout simplement manipulé une série d’images prise hors du Cameroun, qu’il a par la suite monté dans un scénario pour accabler les forces de défense», accuse un message publié le 18 juillet sur la page Facebook du Mindef.

    Le revirement qui surprend beaucoup de monde aujourd’hui, a commencé à se dessiner le 20 juillet. Ce jour-là, dans une déclaration que fait le Mincom, on apprend que «le chef de l’Etat, SE Paul Biya [et] le gouvernement ont été choqués et indignés par l’atrocité des images contenues dans la vidéo et expriment leur compassion à l’égard des malheureuses victimes, ainsi qu’à leurs familles respectives». Issa Tchiroma admet même la possibilité de bavures contre lesquelles «le chef de l’Etat [a] prescrit la tolérance zéro».

    Enquête de l’Onu

    Mais pourquoi ce changement? «Il s’agit d’une démarche qui vise à préserver l’image du chef de l’Etat à l’international», nous avoue une source au fait du dossier. Il faut dire que depuis le déclanchement de l’affaire, Yaoundé subit des pressions de la part, des médias, des ONG et des partenaires internationaux. Après avoir rappelé que «les médias du monde entier, Amnesty International et les organisations camerounaises de défense des droits de l’Homme attribuent les actions montrées sur la vidéo à l’armée camerounaise», les Etats-Unis par la voix de la porte-parole du Département d’Etat, appellent, le 16 juillet, «le gouvernement du Cameroun à mener une enquête avec minutie et transparence sur les événements montrés sur la vidéo, à en rendre les conclusions publiques et, si des militaires camerounais étaient impliqués dans ces atrocités, à les tenir responsables de leurs actes».

    Mais il y a plus redoutable aux yeux des stratèges de Yaoundé. Ce sont les pressions exercées par le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies qui souhaite venir au Cameroun mener des investigations. «Nous avons dit au gouvernement camerounais: si vous affirmez que les informations qui circulent ne sont pas vraies, laissez-nous voir. (…) Clairement il faut une enquête, il faut que les gens rendent des comptes», indique le 27 juillet le Haut-Commissaire sur les antennes de RFI. Selon Zeid Ra’ad Zeid al-Hussein, jusqu’ici, le gouvernement leur oppose une fin de non-recevoir.

    Les autorités camerounaises redoutent d’autant plus la mission de cet organisme onusien qu’elle souhaite se consacrer aux accusations de tortures et d’exécutions extrajudiciaires dans l’Extrême-nord mais aussi dans les régions anglophones. En enquêtant lui-même sur les dénonciations de violation des droits de l’Homme, le régime de Yaoundé espère donc couper l’herbe sous le pied du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies. Selon nos informations, la célérité avec laquelle les enquêtes sont ouvertes, ces derniers jours, contre les soldats indélicats participe également de cette stratégie.

    Aboudi Ottou

  • Joseph Beti Assomo

    Joseph Beti Assomo

    On n’est plus tranquille nulle part dans la partie anglophone du Cameroun. Le 12 juillet 2018 à Kumba, l’une des localités de cette zone, c’est là que se trouvait le ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense (Mindef) lorsque des hommes armes au poing, s’attaquent au convoi.

    Si Joseph Beti Assomo a dû avoir une belle frayeur, les assaillants ne sont, quant à eux, pas tous repartis. En dehors des morts, beaucoup ont été neutralisés. Désormais, apprend-on de sources crédibles, le Mindef a pris en compte les «menaces intentionnelles» contre l’armée camerounaise et les représentants du pouvoir de Yaoundé. Dans cet environnement, l’ancien gouverneur ne se console pas d’avoir échappé belle.

    D’office, il ne peut que convoquer vigilance des bidasses pour empêcher que le Nord-ouest et le Sud-ouest ne deviennent des arènes de gladiateurs, où les brigands de toutes natures pourraient se croire en droit de faire exercer leurs vengeances, rendant vaine toute possibilité d’alternative à la guerre, méprisant même ceux qui œuvrent à trouver les moyens de résoudre pacifiquement la question dite anglophone.

  • Crise anglophone: Ces milices qui font face à l’armée

    Crise anglophone: Ces milices qui font face à l’armée

    Milices en activité dans les régions anglophones

    Depuis octobre 2017, les autorités camerounaises disent avoir répertorié six groupes armés en activité dans les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest.

    «Nous avons identifié les terroristes décidés à diviser l’Etat du Cameroun, en créant ce que je ne vais pas nommer ici ». Ainsi parlait, Joseph Beti Assomo, ministre délégué à la présidence de la République en charge de la Défense (Mindef), au terme d’une mission à Buea (région du Sud-ouest) le 12 octobre 2017. Pour qui s’applique à décrypter les mots de ce membre du gouvernement, ils indiquent qu’un travail exploratoire a été mené. Il a permis de repérer les «bataillons séparatistes» qui entrent en jeu dans la construction et la dynamique d’entretien de la crise anglophone. «On connaît maintenant assez bien le profil de la plupart de ces groupes ; nous disposons d’un maximum d’informations sur ces brigands et leur mode opératoire. Nos conclusions nous ont permis d’acquérir la conviction que leur organisation est complexe mais bien coordonnée», souffle, ce 22 février 2018, une source rencontrée au secrétariat d’Etat à la Défense (SED) en charge de la gendarmerie.

     

    Visages

    Selon des relevés de terrain compilés par les services spéciaux de la gendarmerie, six groupes armés seraient en activité dans la partie anglophone du Cameroun. Il s’agit  des «Tigers of Ambazonia», des «Vipers»,  de l’«Ambazonia Restoration Army (Ara)», des «Ambaland Forces», de l’«Ambazonia Defense Forces (ADF)» et de la «Southern Cameroons Defence Forces (Socadef)». «S’ils évoluent tous sous la bannière de l’Ambazonie,  ceux-là semblent s’être juré de se mettre d’accord sur leurs formules contre le calme et le vivre-ensemble dans les zones où ils ambitionnent d’augmenter la teneur mortifère de la crise», établit un officier de gendarmerie.

    A comprendre qu’entre ces «six cracheurs», il y a probablement des nuances idéologiques, mais pas de grosses différences opérationnelles. Des informations picorées sur le terrain par des services spécialisés allèguent que ces radicaux œuvreraient à une union. Ces derniers temps, ils travailleraient à gommer les petites différences pour fixer un cadre commun combinant poids lourds expérimentés et visages neufs dans la pratique de la guérilla.

    A côté, il y a  l’aile inscrite dans un dessein sécessionniste modéré, prônant le recours à la pression politique au travers de concessions progressives. Elle est incarnée par le Scacuf (Southern Cameroons Ambazonia Consortium United Front).  Pour cette branche, le dialogue pourrait servir de repoussoir à toute dérive incontrôlée de groupes utilisant la violence armée.

    Réorganisation

    Au plus haut sommet de l’Etat, on dispose donc de la matière pour quelques arbitrages majeurs. En décrétant, le 21 février dernier, la création d’une cinquième région militaire basée à Bamenda (Nord-ouest), Paul Biya, le chef des armées camerounaises, juge d’une stratégie, d’une action sur le long terme. Pour tenter d’expliquer cet ajustement et en souligner les enjeux, un colonel de gendarmerie estime que, statistiquement, les groupes dits radicaux sont plus nombreux et causent plus de dégâts dans cette région.

    A mi-voix, le même haut-gradé  dit que cet ajustement dans la chaîne de commandement renvoie à l’actualité immédiate, notamment les élections sénatoriales prévues le 25 mars prochain. «Cette échéance politique et le tempo actuel de la crise peuvent précipiter des événements nouveaux… Il ne faudra pas les courir après. Le président a donc anticipé», murmure-t-il.

     

    Jean-René Meva’a Amougou