«Les cambistes privilégient la devise américaine»
Nombreux sont les entrepreneurs compétents, avec des business qui pourraient profiter aux pays et à la zone Cemac entière, si seulement ils avaient un interlocuteur, autre que les banques, capable de les accompagner dans leurs projets. Où serait, Facebook, Amazon, Google, Mercedes, Netflix… Sans l’effet de levier que représente la bourse ? nulle part !

L’expert du Cabinet Jure-Entrepreneur jette son regard sur les performances de la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (BVMAC) et propose des solutions pour que cette place financière serve encore plus que par le passé, de levier à l’économie sous-régionale.
Au vu des éléments d’appréciation à votre disposition, considérez-vous la BVMAC comme une place financière forte ?
Je ne voudrais pas que ma réponse soit mal interprétée, mais pour répondre simplement à votre question, je dis non. Quelques KPI le prouvent. Quel est le volume de transactions effectué ? Quel est le nombre d’entreprises cotées au moment où nous parlons ? Quel est l’apport quantitatif de la bourse dans l’économie de la zone ? Ça c’est pour le coté place financière.
Pour le côté «forte» de votre question je dirais qu’elle possède le potentiel, mais les arguments sont les mêmes malheureusement.
Pour me résumer, la BVMAC a le potentiel, mais n’est pas encore une place financière forte.
Avec l’unification des deux bourses intervenues en juin 2020, qu’est-ce qui peut encore plomber l’essor de la nouvelle BVMAC aujourd’hui ? Que manque-t-il ?
Ce qui manque… Je dirais, en premier lieu, un écosystème composé d’une multitude de partenaires, les institutions, les banques, pour le marché primaire, plus un effort collectif de la part des acteurs déjà présents, mais aussi des nouveaux acteurs. Ils sont nombreux, qui sont prêts à relever les défis intrinsèques de ce monde ultra compétitif afin de créer et développer un marché secondaire respectueux des règles, attractif et dynamique.
En second lieu, une réelle possibilité de rencontre entre la demande et l’offre. Nombreux sont les entrepreneurs compétents, avec des business qui pourraient profiter aux pays et à la zone Cemac entière, si seulement ils avaient un interlocuteur, autre que les banques, capable de les accompagner dans leurs projets. Où serait, Facebook, Amazon, Google, Mercedes, Netflix… Sans l’effet de levier que représente la bourse ? Nulle part !
Et pour finir, il est important de laisser se construire et d’accompagner la création de synergies internes capables d’apporter des solutions aux problèmes rencontrés. Pour le cas du Cameroun, la SNI ne peut porter seul cette lourde et stratégique activité. Des acteurs privés, soucieux de sortir le pays de l’immobilisme (en ce qui concerne les marchés financiers) dans laquelle il se trouve, sont capitaux. Pour exemple, les USA, plusieurs fonds d’investissements privé (ex : le fond Carlyle) participent au renfort de la politique américaine sur les marchés financiers. Pourquoi pas ici ?
Faisons œuvre de pédagogie. Dites-nous de quelle façon une bourse de valeurs dynamique peut contribuer de façon décisive au financement du développement dans un espace communautaire donné ?
Je commencerais par parler du rôle qu’elle peut jouer sur les marchés mondiaux et puis au sein même de la zone.
Sur les marchés mondiaux, à travers la création d’indices sectoriels, elle peut représenter la porte d’entrée de capitaux privés internationaux. En particuliers durant cette période de reprise de l’économie post-confinement, et non post-Covid-19, les marchés financiers mondiaux sont à la recherche de marchés et surtout d’investissent sur des valeurs plus cycliques, c’est à dire corrélée à la conjoncture et aux cycles économiques, ce qui est une des qualités internes de la région. Exemple non exhaustif, les matières premières.
Au sein même de la zone maintenant, la bourse joue un rôle de sélectionneur d’opportunités. C’est un peu comme la sélection naturelle. Les projets les plus compétitifs sont épaulés au détriment des autres. Une bourse dynamique permet aussi aux nations d’être présente, à travers leurs différents partenaires, aussi dans les secteurs qui leurs sont stratégiques.
Enfin, comment se sont portées cette semaine, les principales places financières dans le monde?
L’optimisme des investisseurs sur la reprise économique alimente à nouveau la rotation sectorielle cette semaine. Cependant, les valeurs défensives sont celles qui en ont le plus profité ces derniers jours. Il semble que la chute des actions technologiques, parfois surévaluées, inquiète durablement les opérateurs.
Ballotés entre les espoirs «d’ultime» vague de Covid-19, l’attente des résultats du T1 et les possibles risques de bulle boursière sur certains secteurs, les intervenants se concentrent plus que jamais sur des dossiers de qualité.
S’agissant des indices, en Asie, le Hang Seng et le Nikkei enregistrent des pertes hebdomadaires de 2.1% alors que le Shanghai composite s’adjuge 0.4%. En Europe, le CAC40 perd 0.3% sur les cinq dernières séances, tandis que DAX grimpe de 0.8% et le Footsie de 0.3%. Pour les pays périphériques de la zone euro, l’Espagne cède 0.15%, le Portugal 0.3% mais l’Italie gagne 0.7%. Outre-Atlantique, à l’heure de la rédaction de ce point hebdomadaire, les performances sont proches de l’équilibre. Le Dow Jones réalise une avancée de 0.5% sur la semaine, tout comme le S&P500 et le Nasdaq-100 recule de 0.25%.
Pour ce qui est des matières premières, les cours pétroliers ont littéralement fait du yoyo cette semaine, évoluant soit en forte hausse, soit en forte baisse. Le blocage du stratégique canal du Suez perturbe l’approvisionnement en pétrole de l’Europe, de quoi inciter certains opérateurs à spéculer sur une hausse de l’or noir. Malgré cette volatilité, le baril s’échange sur ses niveaux de vendredi dernier, à 64 USD pour le Brent et 60 USD pour la référence américaine.
La volatilité est en revanche totalement absente sur l’or, dont le cours glisse lentement mais sûrement vers 1700 USD. Le métal doré reste boudé par les investisseurs, qui ne jurent que par l’orientation des taux d’intérêt réels des grandes signatures des marchés obligataires. L’argent quant à lui se négocie à 25 USD.
Du côté des métaux de base, le cuivre poursuit sa phase de respiration à 8700 USD, tandis que l’aluminium se stabilise à 2200 USD.
Qu’en est-il du marché obligataire ?
La présidente de la FED de San Francisco, Mary Daly, a exprimé la nécessité pour l’institut de continuer à supporter une économie qui est loin des objectifs fixés. Elle a ajouté n’avoir observé aucune tension sur les salaires et prône la patience, avant de retrouver des taux d’intérêts plus élevés. Dans cette ambiance, le Tbond arrive à se stabiliser autour des 1.65%.
En Europe, le calme prédomine avec un bund qui a reculé jusqu’à un niveau légèrement inférieur à -0,35%, ce qui le place dans la partie inférieure de sa fourchette de négociation pour le mois en cours. Les autres références obligataires ont évolué sans direction sur la semaine, sans que les haussiers ou les baissiers ne gagnent de terrain. L’OAT française garde ses niveaux à -0.10%, tout comme l’Italie (0.60%) ou encore la Suisse (-0.32%).
De son côté, la Banque de Russie a remonté son taux directeur de 25 points de base à 4.5 %, une première depuis 2018, prenant ainsi par surprise les économistes. Elle a justifié sa décision par une augmentation de l’inflation au premier trimestre plus élevée qu’attendu.
Et que nous a réservé le marché des changes cette semaine ?
Les préoccupations liées à l’inflation augmentent dans le monde entier alors que les gouvernements dépensent pour lutter contre la pandémie et adoptent des mesures de circulation plus strictes. Ce contexte déplace les intérêts vers les devises refuges, comme le yen et le franc suisse.
La séquence hebdomadaire qui se termine aura également permis de confirmer la progression du dollar. Le différentiel de perspectives entre les Etats-Unis et l’Europe avantage le billet vert, qui en profite pour revenir tester la zone support des 1.1780/1.18 USD. Les cambistes privilégient la devise américaine dans un contexte d’inquiétudes concernant la crise sanitaire sur le «vieux continent».
De l’autre côté de la Manche, les prises de bénéfices caractérisent le parcours de la livre sterling, qui se négocie à 1.16 contre l’euro (-100 points de base) et à 1.37 (-300 points de base) face au dollar. En Turquie, la monnaie locale s’échange avec une volatilité extrême, pour finir la semaine à 7.90, après avoir cotée 8.2 TRY pour un dollar. La décision du président turc, Erdogan, de remplacer le responsable de la Banque centrale a considérablement agité le marché monétaire local. (Sources: zone bourse)
Propos recueillis
par Théodore Ayissi Ayissi