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Archives des Bamenda - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : Bamenda

  • Lutte contre la corruption : pour une meilleure gouvernance en Afrique centrale

    Lutte contre la corruption : pour une meilleure gouvernance en Afrique centrale

    Du 5 au 6 décembre prochain, les acteurs des secteurs publics et privés se réuniront à Yaoundé pour échanger sur la gouvernance et la lutte contre la corruption.

     

    Véritable fléau en Afrique, la corruption est un phénomène qui est presque ancré dans les mœurs des pays de la Cemac. C’est ce que donne à voir l’Indice de Perception de la Corruption (IPC). Dans son édition 2022, celui présente la Guinée Équatoriale comme l’un des pays les plus corrompus d’Afrique, avec un indice de 17. Vient ensuite le Tchad (19 contre 20 en 2021) ; le Congo (20 contre 19 en 2021) ; la Centrafrique (24 en 2021 et 2022) ; le Cameroun (26 contre 27 en 2021) et enfin le Gabon (29 contre 31 en 2022).

    Parce qu’aussi important, ce fléau constitue un frein majeur pour le développement socioéconomique de ces pays. D’ailleurs, apprend-on, la corruption concourt à l’amplification du taux de Flux financiers illicites. La situation perdure depuis des années et ne profite qu’à une poignée d’individus. Cela a un impact négatif sur la gouvernance.

    Amenuiser cette situation dans la sous-région nécessite de prendre le taureau par les cornes. C’est précisément dans cette lancée que s’inscrit l’Ong Environment For Life. En collégialité avec le ministère des Relations extérieures du Cameroun (Minrex), elle organise du 5 au 6 décembre prochain un Forum sous-régional sur la gouvernance et la corruption. D’après Stéphane Nama, l’initiative découle du fait que «dans la pratique, les activités liées à la bonne gouvernance sont très peu utilisées dans les structures, qu’elles soient privées ou publiques».

    Au cours de ces deux jours, il sera donc question de déconstruire la réalité apparente aujourd’hui imposée par les adeptes de la corruption. Pour la communicante, «il est inadmissible qu’on dise que c’est ancré dans nos mœurs, je ne pense pas que mal se comporter c’est quelque chose que nous devons promouvoir».

    Pour cela, apprend-on, le Forum sera l’occasion idéale de débattre sur « la nécessité de communiquer sur les bonnes pratiques en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption, que ce soit dans le secteur privé, le secteur public et au niveau national et sous-régional».

    Objectif ultime, trouver, à l’issue des échanges, des voies et moyens de barrer la voix au fléau, à l’effet de doper la gouvernance en zone Cemac. Ce qui, va permettre de «préserver les ressources qu’elles soient environnementales, qu’elles soient financières ou socioéconomiques pour que les générations futures puissent en jouir autant que les générations présentes» dixit la responsable de la communication de l’Ong.

    Stratégie
    Pour lutter contre la corruption, l’institution non gouvernementale ne mise pas que sur la dénonciation des corrompus. Elle compte donc, au cours de ces échanges, « encourager celles [les entreprises] qui ont du mal à véritablement implémenter des actions en la matière échanges sur les bonnes pratiques ».

    Elle envisage d’ailleurs d’aller au-delà des entreprises pour impliquer les plus jeunes, convaincus de leur rôle capital dans la lutte contre cette gangrène. La méthode est simple, mais vise des solutions durables. «Nous pensons que si très tôt, nous commençons déjà à investir sur la jeunesse, à leur dire dès le bas âge que ce genre de pratique n’est pas bon pour les générations à venir, on pense que les projets de développement seront plus porteurs. », détaille le cadre de Environment For Life.

    Joseph Julien Ondoua Owona

  • Électrifier l’Afrique de l’ouest et du centre pour un avenir plus lumineux

    Électrifier l’Afrique de l’ouest et du centre pour un avenir plus lumineux

    Si le niveau d’électrification du Sénégal est l’un des plus élevés d’Afrique de l’ouest avec un taux d’accès de 80%, de nombreux pays du continent font face à une véritable crise énergétique.

     

    En effet, 220 millions de personnes – soit près de la moitié de la population de la région – n’ont pas accès à l’électricité, limitant ainsi leur capacité d’entreprendre ou d’accéder à des services d’éducation et de santé adéquats. Pour atteindre l’accès universel à l’électricité, le rythme d’électrification en Afrique de l’Ouest et du Centre doit tripler d’ici à 2030.

    L’accès à une énergie abordable, fiable et durable constitue une condition essentielle pour améliorer la qualité de vie de chacun et aussi une nécessité pour transformer le continent.
    La bonne nouvelle, c’est la révolution amorcée dans le domaine de l’accès à l’énergie hors réseau dans nos pays. Lors de l’Appel à l’action de Dakar du 7 juillet 2022 à l’occasion de l’IDA 20, les dirigeants africains ont exprimé un engagement fort en faveur de l’accès universel à l’énergie et ont rappelé l’importance d’une transition juste et équitable pour le continent. Dans ce contexte, les pays africains comptent utiliser notamment leurs ressources en gaz naturel comme énergie de transition pour atteindre les objectifs d’accès universel à l’électricité à moindre coût tout en facilitant la création d’emplois.

    Avec un pétrole à prix élevé, l’Afrique reste dépendante des énergies fossiles surtout que les subventions aux carburants ont fortement augmenté, pesant lourdement sur le budget des États. La mauvaise qualité de la fourniture d’énergie figure en tête des préoccupations en matière d’évaluation du climat d’investissement et entrave la numérisation des économies. Le doublement des financements annuels de la Banque mondiale dans le secteur de l’énergie au cours des trois dernières années a permis des améliorations significatives dans les états fragiles.
    Par exemple, en République centrafricaine (RCA), un nouveau parc solaire de 25 Mégawatts avec batterie de stockage alimentera en électricité 250 000 personnes, doublant sa capacité de génération électrique. Ce parc solaire remplacera plus de 90% de l’énergie actuellement générée par diesel, représentant une économie annuelle de 4 millions de dollars en coûts de combustibles pour le gouvernement. La mise en service d’une centrale solaire de cette envergure en RCA, ainsi que de cinq mini-réseaux et de l’électrification de plus de 600 écoles et hôpitaux ainsi que de 50% des foyers d’ici 2030, est source d’espoir pour d’autres pays.

    Un autre exemple d’investissement à grande échelle dans le solaire, à savoir le projet régional d’intervention urgente dans le secteur de l’énergie solaire, propose un modèle d’appel d’offres concurrentielles pour augmenter l’accès à l’électricité pour des millions de consommateurs au Tchad, Liberia, Sierra Leone et au Togo, en stimulant la capacité énergétique renouvelable connectée au réseau, ainsi que la transmission et les interconnexions régionales.

    Atteindre un accès universel à l’électricité en Afrique subsaharienne nécessitera plus de 200 milliards de dollars de financements avec un rôle essentiel de l’investissement privé. Pour y parvenir il est impératif de renforcer les cadres réglementaires et de développer des compagnies d’électricité financièrement solides.

    Au Nigéria, la plateforme DARES (Distributed Access through Renewable Energy Scale-Up Nigeria) vise à étendre l’accès en développant les énergies renouvelables, tout en levant plus d’un milliard de dollars de financement privé pour donner accès à l’électricité à plus de 15 millions de personnes.

    Le Sénégal quant à lui a signé en juin 2023 avec ses partenaires, notamment l’Allemagne, le Canada, la France, le Royaume Uni et l’UE un Just Energy Transition Partnership (JETP), au titre duquel le pays s’est engagé à porter de 31 à 40% la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique d’ici 2030 avec l’accompagnement des partenaires (mobilisation de 2,5 milliards d’euros en financements nouveaux et additionnels sur une période initiale de 3 à 5 ans).
    Parmi ces projets, celui relatif à l’extension de l’accès à l’énergie permet au pays d’améliorer la résilience des infrastructures publiques essentielles, telles que les écoles et les centres de santé, ainsi que de développer les petites et moyennes entreprises en les connectant au réseau, ou à des centrales solaires off-grid.

    Par ailleurs, le pays progresse dans la mobilisation des financements des secteurs public et privé pour soutenir ses objectifs d’expansion d’accès à l’énergie. Des investissements supplémentaires se concentrent à présent sur la réduction des écarts et le raccordement de tous au réseau.
    Faciliter le commerce de l’énergie au niveau régional pour faire baisser les coûts et offrir un accès plus large et plus fiable constitue une priorité. À cet égard il faut saluer le lancement réussi de l’interconnexion des réseaux électriques de 14 de ses 15 pays membres de la CEDEAO, une initiative comportant de nombreux avantages dans le cadre du système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA). La Guinée-Bissau devrait rejoindre prochainement cette interconnexion pour en tirer les avantages en termes d’accès à une énergie régulière et fiable.
    L’accès universel à une énergie abordable est essentiel pour améliorer les conditions de vie des populations africaines et faciliter davantage le fonctionnement des services sociaux. Il est indispensable pour la transformation structurelle des économies, stimulant ainsi la compétitivité et la création d’emplois. L’utilisation appropriée de l’expertise et des ressources de la Banque mondiale dans le cadre d’une coopération élargie aux institutions bilatérales et multilatérales en collaboration étroite avec les pays de la sous-région constitue un gage pour l’électrification accélérée de notre continent – un message important à la veille de la COP28.

    Macky Sall, président de la République du Sénégal et Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre

  • Tendance : pas un pas sans « gomme » à Yaoundé

    Tendance : pas un pas sans « gomme » à Yaoundé

    Disponibles dans plusieurs formes et de toutes les couleurs, elles s’arrachent entre 1000 FCFA et 3500 FCFA dans les marchés.

    Étalage de babouches au marché mokolo

    Nous sommes au marché Ekounou dans le IV arrondissement de la ville de Yaoundé. Sur un petit périmètre, pas moins d’une dizaine de comptoirs exposent les babouches en gomme. Arthur Fokou l’un des vendeurs est en train de déballer sa cargaison. «Je reviens de Mokolo où presque nous tous ici on se ravitaille. J’ai ramené les nouveautés de toutes les tailles et de toutes les couleurs», appâte le jeune homme.

    Elles sont de tous les noms. «Babouche savonnière», «babouche piment» ou simplement «sans confiance». Voilà autant d’appellations pour désigner les tongs en gomme de plus en plus présents dans les marchés. Parmi ces nouveautés, des babouches présentant une grosse semelle de gomme d’apparence féminine, de couleur rose et rouge sont les plus prisées. En l’espace de quelques minutes, trois clientes ne se font pas prier pour débourser, les 3000 FCFA exigés, c’est le dernier prix. L’une d’elle, Carène, confie: «c’est ma grande sœur qui sort de Douala qui m’a fait découvrir le modèle de ces babouches. Tellement qu’elle crane avec à la maison que j’ai gardé mon argent de taxi pour me les offrir aussi. Je les aime, simple très souple, et pratique en plus en rose, ma couleur préférée c’est parfait», laisse éclater sa joie la jeune élève encore en tenue du lycée du coin.

    Pour être à la mode, Paulin est en négociation pour une sandale faite en gomme tout à côté. Dans le jargon ici, il s’agit de «la savonnière». Cette tong qui arbore la forme d’une savonnière. 1500 FCFA ont suffi pour s’arracher le précieux biens.
    À côté de l’effet de mode, les babouches en gommes ont aussi pignon sur rue à cause de leur résistance, renseigne Mathieu agent de service de sécurité venu lui aussi acheter sa paire de babouches dite ‘‘gomme Adidas’’». Moi j’aime les babouches gomme parce que ça dure. Tu peux facilement passer six mois avec avant de changer», souligne-t-il.

    Vendeurs
    Ils sont sans doute les premiers bénéficiaires de cette vague de tendance. Installés au lieu-dit Happy, Olivier Tsala, a laissé tomber le commerce de pomme de France pour la vente des babouches en gomme. Il détient une boutique entièrement remplie de cet artifice. Le business se porte plutôt bien et ses revenus ont augmenté». Depuis quatre mois que je suis dans ce business, je cotise 50 000 FCFA par semaine et j’épargne en moyenne 10 000 FCFA. Sans compter que je dois résoudre les problèmes ponctuels à la maison», déclare ce trentenaire d’apparence.
    La même tendance se dégage au marché Mokolo. Haut lieu de ravitaillement de cette marchandise dans la ville de Yaoundé, ici se trouvent importateurs et autres grossistes. Salifou est propriétaire d’une demi-dizaine de boutiques dans cet espace marchand. «Nous faisons venir majoritairement nos marchandises de Chine. Il y a aussi une partie qui vient du Nigeria voisin, mais beaucoup plus ce sont des babouches en caoutchouc. C’est vrai que nous observons une certaine demande de plus en plus forte de nos clients des babouches gommes», se frotte les mains l’homme d’affaires.
    Une chose est sûre, la fièvre de la babouche gomme est loin de retomber. Jeunes, vieux, hommes, femmes et enfants de tous les âges ne sont pas épargnés.

    Joseph Ndzie Effa, stagiaire

  • 1er dimanche de l’Avent/ Année B

    1er dimanche de l’Avent/ Année B

    Le mot “veiller” apparaît 3 fois dans l’évangile de ce premier dimanche de l’avent. Jésus demande à tous de veiller mais pourquoi veiller et comment veiller? 
    Nous devons veiller car nous ne savons pas quand le maître arrivera.
    Comment attendre ce maître qui peut débarquer à l’improviste? Il ne s’agit pas de croiser les bras, de rester sans rien faire. L’attente du maître ne peut être passive mais active. Nos activités quotidiennes ne doivent pas être abandonnées. En d’autres termes, nous devons nous garder d’avoir les yeux tournés uniquement vers le ciel parce que le Royaume de Dieu ne se construit pas sans nous, parce que Dieu a besoin de nos mains pour renouveler le visage du monde.
    Nos tâches, nous devons veiller à ce qu’elles soient accomplies dans le droit et la justice car veiller, c’est d’abord et avant tout veiller sur nos frères qui sont enfermés, exilés, broyés par la solitude, victimes d’exclusion, d’oppression ou d’exploitation, privés d’emploi, de logement et de papiers.
    C’est en nous engageant contre tout ce qui bafoue la dignité humaine que nous contribuerons à l’avènement d’un monde nouveau, que nous empêcherons le mal d’avoir le dernier mot.
    L’apôtre Paul affirme qu’il ne cesse de rendre grâce à Dieu au sujet des Corinthiens.
    Quant à nous, il nous est souvent difficile de remercier le Seigneur pour ce qu’il a fait dans la vie de nos frères. Il nous arrive quelquefois de nous poser la question suivante: pourquoi telle ou telle personne est-elle bénie et pas moi? Or “être homme, c’est être fier d’une victoire que les camarades ont remportée”(Antoine de Saint-Exupéry).
    En ce temps de l’Avent, nous pourrions peut-être veiller à nous réjouir avec ceux qui sont dans la joie et à pleurer avec ceux qui pleurent (Romains 12, 15).
    Jean-Claude Djéréké
  • Banditisme au Cameroun : instrumentalisation au féminin pluriel

    Banditisme au Cameroun : instrumentalisation au féminin pluriel

    Entre agressions dans les taxis, pickpockets et autres méfaits, les femmes sont de plus en plus utilisées comme appât par les réseaux mafieux ou de délinquants.

     

    Alain, jeune étudiant en médecine, a été victime d’une agression voici deux ans dans un taxi. L’un de ses «bourreaux» était une «belle et jolie jeune femme», lance-t-il avec désolation. Heureusement pour lui, il s’en est sorti. Mais le souvenir demeure. «Au départ lorsqu’elle a commencé à me demander de donner tout ce que j’ai, je n’y ai pas cru. Il a fallu qu’elle sorte un poignard et que son compagnon me tienne en respect en faisant pression, puisque j’étais assis entre les deux», se souvient-il tristement.

    Agressions dans les taxis
    «Dans la plupart des cas d’agression, la femme séduit la victime pour l’amener vers l’agresseur. Et dans les agressions perpétrées dans les taxis, sa présence vise à rassurer la potentielle victime», dévoile Fongang K, membre des forces de l’ordre. Une telle manœuvre, apprend-on, vise à déconstruire l’idée selon laquelle «un taxi dans lequel il n’y a que des hommes est un taxi de bandits», explique le policier.

    Drogues
    Présentes sur tous les fronts, elles sont également très actives dans la commercialisation de la drogue et autres psychotropes. À Douala en octobre dernier, une femme, membre d’un gang a été appréhendée avec ses complices. Celle qui prétendait vendre de l’eau officiellement, écoulait du cannabis officieusement à ses clients. Lors de l’arrestation, le gang possédait d’ailleurs 50 Kg de cannabis.

    Pickpocket
    Autrefois connues pour de simples vols dans des poissonneries, boutiques…, les «femmes gangsters» innovent dans les actes de banditisme. Au quartier Emombo deuxième, elles sont désormais des «pickpockets» professionnelles sur la voie enclavée. «Une adolescente sans maquillage, en jean, sweat-shirt et baskets, avec de longs cheveux épais, bijoux clinquants, vernis rouge écaillé sur les ongles, regard appuyé, a fait l’objet d’un signalement pour vol de matériel multimédia appartenant à un passager à bord d’un corbillard immobilisé au milieu d’un nid de poule. Une vraie irrévérence! Dans sa fuite, elle a projeté un vieillard qui a fait
    une chute mortelle», témoigne un enquêteur de la brigade de gendarmerie dans l’édition 584 de notre journal.

    Vol de bébé
    En plus des exactions, sus – évoquées, les femmes excellent également dans le vol de bébés dans des formations hospitalières. «La plupart d’entre elles travaillent dans des réseaux de trafic des bébés», souffle un membre des forces de l’ordre sous anonymat. Et la liste n’est pas exhaustive. Les femmes continuent d’explorer d’autres modes de criminalités. Difficile de donner des chiffres à ce sujet.

    Joseph Julien Ondoua Owona

  • Bayel Yaya : «Notre gouvernement a pris le taureau par les cornes»

    Bayel Yaya : «Notre gouvernement a pris le taureau par les cornes»

    Point focal genre auprès d’une Ong britannique dans la lutte contre les mariages précoces à l’Extrême-Nord, la Camerounaise donne son avis sur l’ensemble des problématiques liées aux «violences à l’égard des femmes».

     

    Qu’entend-on par «violences à l’égard des femmes»? Ou bien, de quoi parle-t-on lorsqu’on s’intéresse aux violences faites aux femmes?
    Au fil du temps, la définition des «violences à l’égard des femmes» a évolué. Dans les années 1980, cette expression renvoyait essentiellement aux violences familiales et sexuelles. De nos jours, elle désigne tout acte de violence dirigé contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou la vie privée.
    De cette définition émergent deux points qu’il est nécessaire d’expliciter afin de mieux cerner le phénomène. Le premier est que ces violences peuvent prendre de multiples formes. Elles sont physiques, sexuelles, verbales, psychologiques, économiques. Elles peuvent également être distinguées selon la sphère de vie au sein de laquelle elles ont lieu (privée, publique, professionnelle, scolaire, universitaire, etc.) et selon l’auteur (conjoint ou ex-conjoint, membre de la famille, collègue de travail, cercle amical, etc.).
    Le second point est que ces diverses manifestations de la violence à l’égard des femmes reposent sur un socle commun. En effet, qu’il s’agisse des violences conjugales, des violences sexuelles, du harcèlement sexuel ou encore des différentes formes de contraintes que l’on fait peser sur la sexualité des femmes (mutilations sexuelles féminines, mariages forcés, etc.), ces violences sont perpétrées contre des femmes précisément parce qu’elles sont des femmes et ne prennent sens que lorsqu’elles sont replacées dans un contexte plus large d’inégalités entre les hommes et les femmes.

    Qu’est ce qui justifie que, de plus en plus, on en parle?
    Les violences faites aux femmes touchent des femmes de tous âges et de toutes catégories sociales. Elles sont longtemps restées cachées, ignorées en tant que fait de société et question de sécurité et de santé publique. Il a fallu attendre les années 1990 pour que les premières enquêtes sur le sujet soient réalisées et que leur ampleur soit révélée. Avant, la fréquence des violences envers les femmes, en public comme dans le privé, était mal connue, tant le manque de statistiques était criard. Pourtant, la plupart des femmes ont à l’esprit qu’elles encourent un risque lorsqu’elles sont dans l’espace public. Vous remarquerez que, de nos jours, chez nous au Cameroun, les violences dont les femmes sont principalement victimes commencent à apparaitre plus spécifiquement dans les chiffres officiels de la délinquance.

    Ces constats sont-ils pris en considération dans le débat public concernant l’insécurité, question devenue une problématique récurrente, tant dans les médias que dans les discours politiques?
    Si les politiques en matière de sécurité prétendent répondre à la demande sociale croissante et s’attaquer aux «violences» dans leur ensemble, une analyse en termes de genre révèle que celles-ci ne sont pas toutes traitées de la même façon. Mais, face aux proportions que le phénomène a pris au Cameroun ces cinq dernières années, notre gouvernement a pris le taureau par les cornes. Au niveau politique, on assiste à une lente reconnaissance de ces violences. Les organismes internationaux, tels que les Nations unies, ou politiques, ont largement participé à la dénonciation de tels actes, en insistant sur leur inscription dans les rapports sociaux de sexe. Mais cette reconnaissance est difficile à promouvoir et à appliquer pour plusieurs raisons. D’une part, on constate de fortes résistances à tous les niveaux face à cette notion considérée comme trop féministe. D’autre part, le terme de violences faites aux femmes couvre une multitude de situations. Si cela est extrêmement utile pour révéler le sexisme et la ségrégation encore à l’œuvre dans nos sociétés, cela peut parfois porter à confusion. En termes d’action politique notamment, on peut se demander comment intégrer toutes ses facettes. Est-ce qu’une agression sexuelle commise par un inconnu demande le même type de mobilisation que les violences conjugales? Une telle complexité dans la description ne tend elle pas à occulter la diversité des réalités exigeant une action de la part des pouvoirs publics?

    Ce faisant, ne court-on pas le risque d’essentialiser un rapport dans lequel tous les hommes seraient violents et toutes les femmes des victimes?
    Sociologiquement, ce sont des femmes qui sont majoritairement victimes de violences conjugales et de violences sexuelles, et ce sont majoritairement des hommes qui perpétuent ces actes. Il est évident que les hommes ne sont pas les seuls à commettre des violences, pas plus que les femmes seraient les seules à en subir, et que la frontière entre les sexes est floue à cet égard. Néanmoins, il reste important de replacer les violences dans les rapports sociaux à l’œuvre. Il est difficile de comparer les violences des «dominants» aux violences des «dominés», si ce n’est dans les cas où les personnes des groupes dits dominés sont dans des positions de pouvoir ou dans les cas où ces violences ont lieu à l’égard de personnes du même groupe. Ainsi, le terme de violences envers les femmes se réfère-t-il aux violences qui se déclinent dans le cadre des rapports sociaux de sexe. On ne peut comparer les violences qu’une femme infligerait à un homme à celles des hommes à l’égard des femmes, pas plus qu’on ne peut évacuer le fait que toute interaction entre un homme et une femme est en partie déterminée par les rapports sociaux de sexe. Ces violences, dont l’auteur peut être connu ou non de la victime, sont constitutives de la socialisation sexuée et participent de la construction des différences entre les sexes. Elles prennent des formes et des degrés divers: elles peuvent être physiques (coups, gifles, bourrades, pincements, torsions et autres manières plus subtiles de faire mal), sexuelles (viol, tentative de viol, insultes ou commentaires relatifs au corps ou à l’apparence) et psychologiques (insultes, menaces, intimidation, traitement dévalorisant). De plus, elles n’ont pas besoin d’être réellement perpétrées pour être efficaces. En effet, les femmes, toutes origines sociales confondues, sont exposées de façon permanente à l’éventualité de violences.

    Propos recueillis et retranscrits par Jean-René Meva’a Amougou

     

    Le Secrétaire général lance un appel à la fin de la violence contre les femmes, fruit d’une injustice cimentée par des millénaires de patriarcat

    On trouvera ci-après le message du Secrétaire général de l’Onu, M. António Guterres, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, célébrée le 25 novembre.

    La violence à l’égard des femmes constitue une ignoble violation des droits humains, une crise de santé publique et un obstacle majeur au développement durable. Elle est persistante, très répandue – et ne cesse de s’aggraver. Du harcèlement sexuel au féminicide, en passant par les mauvais traitements, cette violence prend de nombreuses formes. Mais toutes ces violences trouvent leurs racines dans une injustice structurelle, cimentée par des millénaires de patriarcat.
    Nous vivons encore dans une culture dominée par les hommes, qui rend les femmes vulnérables en leur refusant l’égalité en dignité et en droits. Nous en payons toutes et tous le prix: nos sociétés sont moins pacifiques, nos économies moins prospères, notre monde moins juste. Mais un monde différent est possible.

    Le thème choisi pour la campagne «Tous UNiS» cette année -«Investir pour prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles»- appelle chacun et chacune d’entre nous à agir, pour: Appuyer des lois et des politiques globales qui renforcent la protection des droits des femmes dans tous les domaines; Renforcer les investissements dans la prévention et le soutien aux organisations de défense des droits des femmes; Écouter les survivantes et mettre fin à l’impunité des auteurs de violences, où qu’ils se trouvent; Soutenir les militantes et mettre en avant le rôle clef des femmes à tous les stades de la prise de décision. Ensemble, levons-nous et exprimons-nous. Construisons un monde qui refuse de tolérer la violence à l’égard des femmes, où que ce soit et sous quelque forme que ce soit, une fois pour toutes.

  • Violences faites aux femmes en zone Cemac : l’horreur des chiffres

    Violences faites aux femmes en zone Cemac : l’horreur des chiffres

    La Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes nous force à passer en revue quelques données.

     

    1-Cameroun
    Il ressort que, depuis l’âge de 15 ans, plus de la moitié des femmes au Cameroun (53%) ont subi des violences physiques et dans 45% des cas, les femmes ont subi ces actes de violence au cours des douze derniers mois. En fonction de l’âge, on constate que la proportion de femmes victimes d’actes de violence récents varie d’un minimum de 30% chez les femmes de 15-19 ans à un maximum de 53% pour les 40-49 ans. L’analyse suivant l’état matrimonial montre que c’est parmi les femmes en union que ces actes de violence récents ont été les plus fréquents (55% contre 19% pour les célibataires). De plus, en fonction du milieu de résidence, on constate également des écarts: il semble que les femmes de Yaoundé/Douala soient plus fréquemment la cible d’actes de violence puisque depuis l’âge de 15 ans, 64% ont déclaré avoir été victimes de violence et qu’au cours des 12 derniers mois, cette proportion est de 51%. Dans les régions, on constate que c’est le Sud (59%), le Centre (58%) et le Sud-Ouest (54%) qui enregistrent les plus forts pourcentages de femmes victimes de violences au cours d’un passé récent.

    On constate que les femmes instruites ont été récemment, plus fréquemment victimes d’actes de violence que les femmes sans niveau d’instruction (51% parmi celles de niveau primaire et 45% parmi celles de niveau secondaire ou plus contre un minimum de 36% parmi celles sans niveau d’instruction). Les résultats selon le type de rémunération montrent que ce sont les femmes qui travaillent et qui sont payées en argent qui ont déclaré avoir subi le plus fréquemment des violences physiques, que ce soit depuis l’âge de 15 ans qu’au cours des 12 derniers mois.

    2-Tchad
    De janvier à octobre 2022, c’est au total 2 865 cas de violences basées sur le genre qui ont été rapportés, dont 11,41% de violence sexuelle. Sur un total de 860 femmes reparties entre les cinq (5) principales villes du pays enquêtées en 1999, 37,2% ont déclaré être mariées avant 15 ans et 30% n’ont pas choisi elles-mêmes leurs conjoints. Il ressort des résultats d’une étude menée en 1998 dans les cinq arrondissements de Ndjamena qu’en une année les cas de viol déclarés sont à 98. Ce chiffre n’est pas exhaustif vue le fait que les victimes elles-mêmes refusent de porter une telle affaire en publique pour ne pas se faire humilier davantage. En 1997, sur 518 cas de violence déclarés à Ndjamena, 447 ont été traités par les autorités coutumières. Pour le tchadien, la polygamie ne peut être considérée comme une violence. D’aucuns par mauvaise interprétation des Livres Saints affirment qu’elle est recommandée par Dieu.

    3-République Centrafricaine
    Pendant les quatre premiers mois de l’année 2023, 5 928 cas ont été enregistrés. 23 644 cas de VBG avaient été enregistrés en 2022, soit une augmentation de 104% par rapport au nombre de cas enregistrés en 2021. Sur les 602 points de services de soutien psychosocial et de gestion des cas de VBG requis pour répondre aux besoins des survivants dans le pays, seulement 18% sont disponibles et uniquement 26% des cas de viol signalés ont reçu les soins médicaux requis dans le délai de 72 heures. Pourtant, entre 2020 et 2023, le nombre de personnes en besoin d’assistance et de protection face aux VBG aura augmenté de 27%.

    4-Gabon
    Les femmes du Woleu-Ntem sont celles qui subissent plus les violences physiques (51,6%). Elles sont suivies par leurs homologues de l’Ogooué-Maritime (50,6%) et de la Ngounié (42,9%). En revanche, ce sont celles du Moyen-Ogooué (26,3%) qui en subissent moins. Il se dégage que les violences physiques surviennent plus en milieu urbain qu’en milieu rural quel que soit le sexe de la victime. Ainsi, en milieu urbain, on enregistre près de 9 cas de violences physiques sur 10 (87,2%, soit 57,6% chez les femmes contre 29,6% pour les hommes). Plus de la moitié des violences physiques (53,4%) au Gabon survient dans le milieu conjugal (43,5% des femmes contre 19,9% d’hommes). Puis, viennent celles enregistrées au niveau familial (12,2% de femmes contre 9,1% d’hommes), au niveau professionnel (1,4% des femmes contre 2,2% d’hommes) et dans les écoles (1,8% de femmes contre 1,5% d’hommes). Par ailleurs, les violences physiques enregistrées dans les autres lieux non identifiés sont tout de même considérables (4,7% de femmes contre 3,4% d’hommes).

    5-Congo-Brazzaville
    Dans ce pays, en 2022, 54% de filles interrogées disent avoir été victimes de violence en ligne, contre environ 40,25% des femmes. Cet écart s’explique par le fait d’abord qu’il y a plus des filles connectées à internet et aussi parce que les filles prennent moins de précautions sur l’internet; ce qui les rend plus vulnérables aux criminels sur Internet.
    L’unité de prise en charge des victimes de violences sexuelles de l’hôpital de base de Talangai fonctionnelle depuis janvier 2007 a enregistré 917 cas jusqu’en fin 2022. En 2011, cette unité a enregistré 211cas de viol dont 195 femmes, soit 92% et 06 hommes soit 8%. Chez les femmes, la plus jeune victime est âgée de 15 mois et la plus âgée de 70ans; les deux ont présenté des lésions traumatiques d’agression sexuelle.

    Les résultats de l’étude sur les violences faites auprès des étudiants des établissements d’enseignement supérieur de Brazzaville en 2010 révèlent que le harcèlement sexuel est la principale forme des violences (61%), suivie des rapports sexuels forcés (37%) et du viol (3%). Ces pourcentages sont à prendre avec réserve par rapport à la réalité, car la crainte de représailles et la honte d’avouer limitent le nombre des réponses positives lors des entretiens sur des sujets considérés par certaines comme tabou. Parmi les incidences sur les études des victimes, 29% abandonnent leurs études dont 61% en DEUG 1 et 2; vient le redoublement occasionné par l’attribution des mauvaises notes par l’enseignant et enfin l’absentéisme au cours dispensés par leurs agresseurs.

    6-Guinée Équatoriale
    En février 2022, le rapport que la Guinée équatoriale a présenté au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes faisait état du fait que, traditionnellement, l’homme a un droit de « »correction »» sur sa famille, ce qui signifie que «battre sa femme n’est pas considéré comme anormal, comme une faute ou un délit».
    Concernant l’accès aux terres, seules 12% des femmes possèdent des terres, contre 88% des hommes.

    Concert organisé par la Team Europe en faveur de la femme le 25 novembre 2023 à Yaoundé

    En 2022, les victimes de violence familiale hésitaient à signaler les mauvais traitements qu’elles subissaient. Il n’existe pas de loi en Guinée Equatoriale traitant de la violence contre les femmes et comportant des dispositions spécifiques pour l’enquête, la poursuite et la punition de l’auteur de la violence et des services de protection et de soutien aux victimes. Il n’y a pas de plan d’action ou de politique nationale de lutte contre la violence faite aux femmes.

    Sources:
    • Rapport d’enquête sur les violences à l’égard des femmes et des filles en ligne au Congo
    • Gender-Based Violence Information Management System (GBVIMS-Cameroon)
    • Demographic and Health Surveys
    • Tableau de la situation de l’égalité femme/homme en Guinée Equatoriale
    • Réseau Francophone pour l’égalité femme/homme (RF-EFH)
    • Enquête nationale sur les violences basées sur le genre au Gabon

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Extrême-Nord: voyages de noces en polygamie

    Extrême-Nord: voyages de noces en polygamie

    Panorama de la condition des femmes telle que forgée par des valeurs ancestrales et religieuses.

    Extrême-Nord Cameroun: la polygamie-invisible dans la rue, présente dans les maisons

    On dirait qu’il existe une véritable charte à partir de laquelle il est facile de lire le cycle quotidien de Souleymane Modou. Chaque jour, dans son harem, l’homme de 45 ans déjeune chez sa première épouse; prend son thé chez la deuxième, et dîne chez la dernière. Tous les jours depuis une quinzaine d’années, c’est le même rituel. Ce 8 juin 2023, Souleymane Modou propose une réflexion sur la nécessité pour un jeune garçon de se marier tôt. Dans un langage agréable et sans complaisance, il met en scène un «paradis» peuplé de femmes, vulnérables, et parfaitement heureuses de leur captivité. «Elles sont toutes sous mes ordres, à chaque instant de la journée», balance-t-il dans une exubérance joviale. Pour réussir ce «miracle», explique-t-il, il faut bien définir les rôles. Selon lui, le mari règne. «C’est d’abord çà», insiste notre interlocuteur. Pour lui, ses épouses sont bonnes pour des tâches domestiques et reproductives. «Voilà!», ponctue Souleymane Modou. À bien écouter, les femmes sont pensées comme des «objets disponibles».

    «Effet positif»
    Dans certaines contrées de l’Extrême-Nord, cette constatation a le mérite d’être empirique. On peut s’en apercevoir dans l’expérience immédiate. «Ici dans le Mayo-Sava, nous considérons la polygamie comme une institution forgée par des valeurs ancestrales et religieuses», renseigne Dr Mohamadou Bachyrou Sanoussa. Mari de 4 femmes, cet ancien proviseur des lycées est sans ambages. «Le mariage polygame a un effet positif sur la tendance des hommes à aller voir ailleurs. Les hommes n’ont plus besoin d’entretenir de liaisons extraconjugales, davantage de femmes pauvres peuvent accéder au confort matériel et la balance démographique favorable au sexe féminin peut être rééquilibrée. En outre, elle permet de résoudre les problèmes des filles qui ne trouvent pas de maris et de mieux répartir les tâches domestiques au sein du foyer», égrène l’enseignant émérite basé à Maroua.

    Harem
    En venant en appui aux explications ci-dessus, Hamandjoda Ahmadou Ahmadou résume même une certaine ligne qui parcourt une grande partie du corps social de la région de l’Extrême-Nord. «L’homme qui épouse plusieurs femmes doit vivre avec elles dans la même concession. Préférentiellement, la différence d’âge entre les épouses ne doit pas être trop grande ni la période entre leurs mariages respectifs trop longue, le contraire pouvant entraîner que l’homme se retrouve avec une épouse de l’âge de certains de ses enfants, ce qui peut générer des conflits», démontre Hamandjoda Ahmadou Ahmadou, homme d’affaires, polygame de 7 femmes, résidant à Yagoua (Mayo-Danay). Il raconte que pour faire valoir son autorité auprès de ses épouses, «il y a une ligne de vie qu’elles doivent respecter». À l’énonciation de celle-ci, l’on remarque vite que les injonctions sont pour le moins paradoxales. Les femmes sont tout à la fois sommées d’être désirables, d’être attrayantes (maquillage et autres accessoires esthétiques) et, dans le même temps, elles ne doivent pas l’être trop.

    Islam et islam
    Par ailleurs, quand diverses interprétations des préceptes religieux s’en mêlent, l’articulation entre polygamie et nécessité devient bien complexe. «Si vous parcourez les ménages polygames ici à l’Extrême-Nord, beaucoup comptent rarement plus de deux ou trois femmes. Et ce, pour une raison simple: l’islam, religion principale ici, autorise un maximum de quatre femmes. Cependant, il se peut qu’un homme hérite des veuves de l’un de ses frères, et le nombre de ses épouses peut alors s’élever à six ou sept», assure Halidou Demba. Dans l’entendement de cet islamologue rencontré à Mora, il est certain que l’islam n’a pas inventé la polygamie. «Tout ce qu’il a fait, c’est d’y mettre des restrictions. Il lui a prescrit des limites maximales. Il a posé des conditions pour la pratique de la polygamie, qui existait chez la plupart des peuples qui ont embrassé l’islam. La loi islamique interdit formellement la pratique coutumière qui consiste à fermer les yeux sur des pressions familiales exercées sur des femmes, souvent pauvres, orphelines ou sans ressources, pour leur faire accepter la clause polygamique. De même, l’islam réfute le mariage arrangé ou obligatoire».

    Réalités
    Dans cette région où le mariage semble être une priorité, la polygamie constitue une possibilité supplémentaire de ne pas rester célibataire. Selon une étude menée par la délégation régionale des Affaires sociales de l’Extrême-Nord, en 2021, la proportion de jeunes hommes et femmes mariées d’âge fécond qui vivaient déjà en union polygame était de 78,5%. La même étude révèle qu’au cours de l’année citée supra, un peu plus d’une épouse sur cinq avait moins de 20 ans le jour de ses noces, alors que seulement 1,48% des époux étaient dans cette situation. En parcourant le document, l’on se rend compte que, dans plusieurs localités, quelques familles des élites ont fait recours au mariage de très jeunes filles âgées de moins de 15 ans. «Dans tous les villages de la bande frontalière, on peut même dire que la fréquence de tels mariages est un marqueur social important», situe Oumarou Salahaddine, chef du bureau des études et des statistiques à la délégation régionale des Affaires sociales de l’Extrême-Nord. «Dans ces zones-là, souligne-t-elle encore, à l’intérieur même des chefferies, le mariage de femmes ou avec des femmes qui sont encore des adolescentes est pratiquement la règle. 19% des nombreuses épouses des chefs et des notables sont des adolescentes de moins de 20 ans. Les deux tiers des femmes mariées à 10-14 ans ont au minimum 20 ans de moins que leur mari»!

    Lutte
    «Plus fondamentalement, intervient Bayel Yaya (point focal genre auprès d’une Ong britannique dans la lutte contre les mariages précoces), les mentalités ou les ambitions polygamiques ne sont pas des caractéristiques innées, mais des plis de pensée façonnés par l’usage d’un certain outillage culturel». «En milieu rural, les proportions de célibataires sont très faibles après 25 ans pour les femmes, et après 35 ans pour les hommes. Les hommes débutent leur vie conjugale avec une seule épouse et contractent des unions supplémentaires par la suite. La plupart des femmes passent une partie de leur vie conjugale en tant que coépouses», ajoute Bayel Yaya. Celle-ci a son commentaire sur le sujet: si ces unions peuvent sans doute donner naissance à des couples tout à fait harmonieux et aimants, nous disposons malgré tout de nombreux témoignages sur les déceptions de jeunes femmes mariées à des âges où elles n’avaient probablement pas les moyens d’exercer leur libre-arbitre. Certaines sombrent alors dans des errements dramatiques pour la réputation de leur famille».

    À côté, Bayel Yaya accepte que «le temps a évolué». À cela, se sont greffés des phénomènes comme la crise économique et l’insécurité dues à Boko Haram, la multiplication progressive des églises et des Ong. «Si la crise économique et Boko Haram ont exacerbé la précarité au sein de la population, les autres travaillent à convaincre les gens à changer leurs opinions sur la famille polygame qui devient de moins en moins acceptée. Mais cette forme familiale résiste malgré tout fortement aux différentes mutations socioculturelles dont la région de l’Extrême-Nord est l’un des théâtres au Cameroun», conclut-elle.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Violences faites aux femmes : Assener le coup de grâce

    Violences faites aux femmes : Assener le coup de grâce

    Courant ascendant

    «Une femme sur trois a été exposée, au cours de sa vie, à de la violence physique ou sexuelle», révélait une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2021. Une donnée que le Gouvernement camerounais et l’Union européenne ont choisie de mettre en avant dans le cadre de la 17e édition de la campagne «16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et aux filles». Lancée le 25 novembre dernier, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’encontre des femmes, ladite campagne durera seize jours, jusqu’au 10 décembre prochain.
    Au Cameroun, où le taux élevé de féminicides et des violences faites aux femmes et aux filles s’observe dans tous les secteurs, les différentes activités visent à provoquer un sursaut collectif, un courant ascendant. «Recrudescence des féminicides; le Gouvernement condamne», enjoint, en grande une, Femmes et Familles, le trimestriel d’information du ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille (Minproff).
    Selon cette administration publique, ces 16 jours placés sous le thème «Investir pour prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles», permettront de décider des actions à mener en vue d’améliorer la situation, selon un canevas qui sera synthétisé sous forme de fiches-action. Pour atteindre cet objectif, plusieurs étapes d’envergure sont proposées: une marche sportive, un concert de musique avec des vedettes locales, une séance de plaidoyer au parlement, la poursuite des activités HeForShe, des passages dans des médias, entre autres.

     

    C’est l’objectif d’un vaste programme qui, pendant 16 jours, va permettre d’enrichir la perspective habituelle sur le phénomène.

    Diane était souvent battue par Éric, son époux. Dans sa fureur disproportionnée par rapport au motif déclencheur d’une énième bastonnade, Éric a tué son épouse. C’était à Douala, le 18 novembre 2023. Diane était enseignante d’anglais au Lycée bilingue de Nylon Ndogpassi (Douala 3e). Elle aurait eu 31 ans le 1er janvier prochain. Elle laisse deux enfants. À Yaoundé, un autre tableau nous rappelle que le 6 mai dernier au soir, Ghislaine Ngo Nloga, présidente fondatrice de l’Association pour la Dignité de la femme (ADF), a été agressée par des inconnus alors qu’elle se rendait chez elle au quartier Minkan dans le 4e arrondissement de la capitale. «En dépouillant d’autres dossiers tout aussi macabres, l’on se rend compte que nous ne sommes plus dans une comédie, mais dans le vif des drames», commente Peace Bus Association ce 25 novembre 2023. Pour cette organisation spécialisée dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux jeunes filles, la fréquence de telles situations dont nous parlent à l’envi médias et associations de défense des femmes devient inquiétante au Cameroun. C’est que, à travers le pays, on retrouve très régulièrement ce vécu tragique. «Depuis le mois de janvier 2023, l’on dénombre près d’une trentaine de femmes et filles froidement abattues, avec un pic de 14 féminicides en avril 2023», selon le décompte du Pr Marie-Thérèse Abena Ondoa née Obama.

    Visées
    Aujourd’hui, suggère la ministre de la Promotion de la Femme et de la Famille (Minproff), la problématique doit se lier à un mouvement collectif. L’écho de ce dernier a retenti dans les rues du Cameroun ce 25 novembre 2023. «C’est le début d’un vaste programme qui, pendant 16 jours, va permettre d’enrichir la perspective habituelle sur la violence faites aux femmes et aux jeunes filles», renseigne la Team Europe, également impliquée dans l’initiative. Celle-ci, sans autre prétention que d’exposer un nouveau style d’approche par rapport au phénomène de violence faites aux femmes et aux jeunes filles, se propose aussi d’étudier les éléments complexes qui entrent en jeu dans la genèse du problème. Et du coup, les «16 jours d’activisme» prennent une signification propre. «Le corps féminin en ligne de mire dans les violences, corps exposé car corps de femme, destinataire de la violence, corps intime et corps social en même temps, conduit à chercher comment accélérer la mise en place de politiques de prévention et de répression dans notre société», avait émis la Minproff, le 7 novembre dernier à Yaoundé, lors des travaux de réflexion sur un avant-projet de loi contre les violences basées sur le genre.

    Convaincus de l’intérêt à agir, le gouvernement et ses partenaires, ainsi que des organisations de la société civile, entendent donc aller au-delà de l’adoption de stratégies pédagogiques et du ciblage des pratiques culturelles ou des structures sociales qui favorisent ou consolident ces violences. «Nous voulons amorcer un virage: le virage punitif», éclaire Pr Marie-Thérèse Abena Ondoa née Obama.

    Jean René Meva’a Amougou

     

    En Afrique centrale…

    La lumière se dessine dans l’ombre

    Au niveau sous-régional, l’on travaille contre les violences faites aux femmes et aux jeunes filles, dans l’espoir qu’un jour, elles disparaissent des faits divers.

    Agressions sexuelles, viols, harcèlement, des coups sont donnés et des vies sont détruites… «En Afrique centrale, la violence est partout», ont constaté les ministres en charge du Genre et de la Promotion de la Femme de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). «Dans cet espace géographique, aucun pays ne fait office de bon élève», ont relevé ces ministres réunies à Libreville du 25 au 27 mai dernier. Au cours d’une conférence sous-régionale (articulée autour du thème: «Bâtir en Afrique centrale un agenda commun pour la promotion des droits des femmes et leur autonomisation»), le président de la Commission de la CEEAC a souligné les avancées significatives réalisées jusqu’à présent dans la lutte contre les violences basées sur le genre dans la sous-région. Cependant, a également reconnu Gilberto Da Piedade Veríssimo, il reste encore beaucoup à faire pour relever les défis persistants. Ces derniers ont trait à l’adoption et à la mise en œuvre des lois et des politiques en faveur des droits des femmes, tout en tenant compte des obstacles culturels qui entravent leur plein épanouissement.

    Mesures
    Pour cela, les ministres ont convenu de cinq axes stratégiques. Ceux-ci incluent des mesures supplémentaires pour garantir la participation active des femmes aux processus de maintien et de consolidation de la paix, le renforcement des mécanismes de protection des droits des femmes, la mise à jour des cadres juridiques et politiques en faveur de l’égalité des sexes, l’investissement massif dans l’autonomisation économique des femmes et l’accès universel à une éducation de qualité pour les filles et les femmes.

    Au cours de ces assises, les ministres en charge du Genre et de la Promotion de la Femme de la CEEAC ont insisté sur deux points essentiels. Le premier: «le déploiement du fichier de prévention des violences intrafamiliales, pour permettre aux acteurs de terrain, forces de l’ordre et autorités judiciaires d’améliorer la connaissance et le suivi des auteurs de violences conjugales et la prise en compte des signaux faibles». Le second: «la création de pôles spécialisés dans toutes les instances judiciaires de la sous-région».

    JRMA

  • Monnaie électronique : taux d’utilisation en hausse en zone Cemac

    Monnaie électronique : taux d’utilisation en hausse en zone Cemac

    Selon le rapport de la Beac, la sous-région Afrique centrale fait des progrès dans le recours à ce moyen de paiement. Tous les 5 indicateurs sont au vert.

     

    Le rapport 2022 de la Beac montre que l’activité des services adossés à la monnaie électronique progresse. Le lien en avant a été déclenché en 2021 lors de l’apparition de la pandémie à coronavirus. Cette percée des monnaies électroniques est perceptible tant sur les plans nationaux, qu’à l’échelle sous-régionale. Cela est dû à la hausse des principaux indicateurs relatifs à l’accès et à l’utilisation de ce mode de paiement par les populations. Et le Cameroun étant la principale place financière de la Cemac, la monnaie électronique et booste cette activité. Pour comprendre cette évolution, la Beac fait une comparaison sur 2 années. Elle va de 2021 à 2022. Cinq indicateurs sont mis en avant.

    Indicateurs
    Le premier concerne l’évolution de l’activité. Dans le rapport, au soir du 31 décembre, l’on dénombre 329 911 distributeurs Mobile Money au sein de la zone Cemac. Alors qu’en 2021 on comptait 24 576 distributeurs à la même période. On enregistre une progression de +34,15%. Celle-ci découle de la suppression de l’exclusivité des points de distribution et à la vulgarisation des distributeurs de proximité lit-on dans le rapport. En termes de transactions, la zone Cemac a effectué 2,3 milliards de transactions à travers le système de paiement par monnaie électronique en 2022. En termes de pourcentage, l’on enregistre une évolution de 20,66% différemment à l’année 2021. En termes de valeur, on passe de 20 596 milliards FCFA en 2021 à 23 332 milliards FCFA en 2022.

    S’agissant de l’évolution des comptes de souscripteurs aux produits de monnaie électronique, la Cemac connaît aussi une grande. L’on compte 35 millions en décembre 2021. Alors qu’en fin 2022, l’on enregistre 37 millions de comptes. Soit une augmentation de 6,74%. Cette année-là est qualifiée par les experts de la Beac d’année de la maturité parce que le taux d’actifs est resté constant autour de 40% entre 2021 et 2020.

    Recharges de portemonnaie électronique
    Selon le rapport de l’institution bancaire, les recharges de portemonnaie électronique plus connues sous l’appellation des dépôts en espèces, ont atteint 8 015 milliards FCFA. Alors qu’ils sont de l’ordre de 7 419 milliards en 2021, soit une hausse de 8,03%. Au même moment, la valeur moyenne de l’opération de la monnaie électronique dans la Cemac passe de 10 817 FCFA en 2021 à 9 685 FCFA en 2022. Cette baisse «est une conséquence de la massification numérique et de l’inclusion financière», apprend-on.

    Quant au paiement par monnaie électronique, l’on enregistre une forte augmentation en 2022. Le mode de paiement a en effet permis aux citoyens de la Cemac de payer leurs biens et services. Soit 2172 milliards FCFA, contre 1480 milliards en 2021. Deux facteurs justifient cette évolution. Il s’agit de l’abandon progressif du crédit téléphonique comme moyen de paiement et de la multiplication des points de distribution.

    D’après le rapport, l’interopérabilité de la Gimac (Groupe interbancaire monétique de l’Afrique centrale) a traité plus de 7,303 millions de transaction de monnaie électronique en 2022. Soit un montant dépassant 224,199 milliards FCFA. Cette transaction est plus accrue entre le Cameroun et le Gabon, avec 60,5%.

    André Gromyko Balla

     

    Rapport sur les surveillances de paiement dans la zone Cemac en 2022

    Rappel des dispositifs juridiques

    Dans son rapport, la Banque des États de l’Afrique centrale fait une mise aux points pour les acteurs de son système financier.

    «Nul n’est censé ignorer la loi». Un dicton que la Beac reprend à son compte dans son rapport. Le but est de rappeler aux États membres qu’il existe certaines dispositions légales. Elle profite aussi de l’occasion pour s’arrimer aux standards de la finance internationale. Elle rappelle alors qu’elle dispose d’une série de loi permettant de ne pas être en marge de ses homologues. Pour plus de précision, le rapport fait état de cinq règlements et deux instructions.

    Règlements
    Le rapport de 2022 dénombre sept lois. Parmi ces dernières, on compte la loi sur le Règlement N03/16/CEMAC/UMAC/CM du 21 décembre 2016 relatif aux systèmes, moyens et incidents de paiement. Cette dernière définit le moyen comme un «instrument qui permet à toute personne de transférer des fonds en inscrivant le montant réglé au début d’un compte ouvert dans les livres d’un établissement assujetti». Le rapport va plus loin lorsqu’il précise les moyens de payement de la zone Cemac. On a, entre autres, le chèque, la lettre de changes, le billet d’ordre, le virement, le prélèvement, la carte de paiement et la monnaie électronique. L’article 1 définit également les différents moyens de paiement dans le texte.

    Le deuxième règlement est relatif aux services de paiement dans la Cemac. Il s’agit du règlement N04/18/CEMAC/COBAC du 21 décembre 20218. Ce dernier définit les activités entrant dans ce qu’elle appelle «service de paiement», sans oublier la typologie des ordres de paiement.
    Le rapporté évoque également l’adoption d’un règlement sur la protection des consommateurs des produits et services bancaires de la Cemac. On parle du règlement N01/20/CEMAC/UMAC/COBAC du 03 juillet 2020. Pour cela trois types d’établissements sont identifiés comme «prestataires de service de paiement». On a: les établissements de crédit; les établissements de microcrédit et les établissements de paiement qui sont des personnes morales prestataires de services de paiement autre qu’un établissement de crédit. À en croire le rapport, ces établissements de paiement sont «soumis aux mêmes réglementations que les établissements financiers».

    Le quatrième règlement est relatif à l’agrément et aux modifications de situation des prestataires de services de paiement. On parle de Règlement COBAC R-2019/01. Il est question ici de responsabiliser les opérateurs de télécommunications, «en les incitants d’une part à créer des filiales dédiées aux services de paiement et opérer par-là, une scission entre leurs activités de télécommunication et leurs activités financières».

    Le dernier règlement est relatif aux normes prudentielles applicables aux établissements de paiements. On parle de Règlement COBACR-2019/02. Ici, le numéro de téléphone portable fonctionne comme un compte de dépôt ou un compte de paiement.

    Instructions
    Deux instructions récemment introduites figurent dans le rapport. Il s’agit précisément de l’instruction N 001/GR/2018 du 10 août 2018. Cette dernière est relative à la «définition de l’étendue de l’interopérabilité et de l’interbancarité des systèmes et moyens de paiement en zone Cemac. La dernière instruction quant à elle date du 12 mai 2021. Cette dernière est relative à la normalisation et fonctionnements des comptes de paiement et du compte de cantonnement. Il s’agit de l’instruction N 002/GR/2021.

    AGB

     

    Explosion du potentiel énergétique de la CEEAC: l’étincelle de Luanda

    Le destin énergétique de la sous-région Afrique centrale s’est peut-être joué la semaine dernière à Luanda en Angola. À s’en tenir à l’objectif poursuivi par la Commission de la CEEAC bien représentée et à l’initiative de la première rencontre des organes de gouvernance du Centre pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique de l’Afrique centrale (CEREEAC) . Car pour Marie Thérèse Chantal Germaine Ngakono épse Mfoula Edjomo, «le défi majeur reste en effet l’accès aux formes modernes de l’énergie, alors que paradoxalement, la région est particulièrement bien dotée en ressources énergétiques aussi bien fossiles que renouvelables». Le commissaire de la CEEAC appelle pour cela à considérer que c’est cette « inadéquation entre le potentiel et sa mise en valeur qui explique en partie, le faible accès à l’énergie dans la région Afrique centrale (inférieur à 40% pour l’ électricité), et le faible niveau de développement économique et social, avec une industrialisation encore insignifiante».

    Jean Pierre Ndoutoume, chef de l’Unité de démarrage du CEREEAC, était partie de la délégation. Un attelage dont la mission était en définitive «d’obtenir un consensus sur l’ensemble des textes fixant les règles d’organisation et de fonctionnement du Centre». Marie Thérèse Chantal Germaine Ngakono épse Mfoula Edjomo a notamment insisté sur « l’appui et une forte implication de l’Angola qui abrite pour la première fois une institution spécialisée de la CEEAC ». Dans l’intérêt bien compris des populations et des économies de la sous-région. Et compte tenu du «potentiel en énergies renouvelables très appréciable et qui devrait permettre de satisfaire la demande en électricité de la région, voire au-delà», a souligné la responsabilité communautaire.
    Certains indicateurs lui donnent raison. Entre autres, « le gisement solaire qui offre des flux comprend entre 5 et 7,5 kWh/m²/jour ; le gisement éolien qui recèle un potentiel de développement important; et le potentiel hydroélectrique de la région qui représente environ 58% de celui de tout le continent». Son listing mentionne en outre « l’immense forêt du Bassin du Congo qui constitue une source importante de biomasse, qui demeure encore l’énergie utilisée par 80% des ménages dans la région ; et enfin, le potentiel géothermique, qui pourrait également constituer l’un des socles du développement énergétique en Afrique centrale».

    Théodore Ayissi Ayissi

  • Tête-à-tête Biya-Touadéra : le coup d’État au Gabon forcément à l’ordre du jour

    Tête-à-tête Biya-Touadéra : le coup d’État au Gabon forcément à l’ordre du jour

    Le président en exercice de la Cemac en partance pour New York aux États-Unis et en escale à Yaoundé, a échangé avec son homologue camerounais dans la nuit du 12 septembre dernier sur des sujets d’intérêt bilatéral et communautaire. Et même si rien n’a filtré de leurs discussions, tout porte à croire que le coup d’État au Gabon et le compte rendu de la mission récemment effectuée par le facilitateur de la CEEAC ont figuré au menu des échanges. Quelques indicateurs sur l’évolution de la transition militaire au Gabon présentés à Paul Biya et résumés lors d’un point de presse par le Pr Faustin Archange Touadéra à l’issue de sa visite de deux jours à Libreville.

     

    Je voudrais très sincèrement remercier le président de la transition, le Comité de la transition et de la restauration des institutions (CTRI) et le peuple gabonais pour l’accueil chaleureux qui nous a été réservé et toutes les dispositions qui ont été prises pour notre mission ici à Libreville. Et comme vous le savez, le Gabon est membre de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et depuis le 30 août, il y a eu interruption du processus électoral. Suivant nos textes, les chefs d’État ont très rapidement par solidarité et pour comprendre ce qui s’est passé ici, convoqué deux Sommets extraordinaires pour étudier les conséquences de ces actions. Et comme vous le savez, il y a nos textes, des textes qui régissent la Communauté CEEAC. Les chefs d’État ont pris un certain nombre de mesures. C’est l’ensemble de ces mesures que je suis donc venu porter au président de la transition et au CTRI.

    La Conférence des chefs d’État a décidé compte tenu de nos textes, et surtout de la décision de l’Union africaine, de suspendre le Gabon des activités de la CEEAC, ceci conformément à nos textes. Et de cette suspension, découlent un certain nombre d’actions, puisqu’avant le 30 août 2023, c’est le Gabon qui assurait la présidence de notre organisation. Avec cette suspension, la Conférence a donc désigné le président Obiang Nguema Mbasogo comme le président en exercice de notre Communauté. Le Gabon abrite aussi le siège de la CEEAC. Et compte tenu de la suspension conformément à nos textes, le siège est transféré provisoirement à Malabo, en attendant donc le retour à l’ordre constitutionnel.

    La Conférence m’a également fait l’honneur de me désigner, et de désigner la République Centrafricaine comme Facilitateur pour accompagner le Gabon par solidarité, parce que c’est l’un des objectifs de notre Communauté. Et en tant que facilitateurs,  nous avons donc la mission avec le président de la Commission de la CEEAC de pouvoir établir et d’élaborer de commun accord avec le pouvoir de la transition et le CTRI, une feuille de route permettant un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Je suis donc arrivé pour porter ces informations au CTRI et cela m’a permis de rencontrer le président à mon arrivé. Et avec tous les membres du Comité, nous avons échangé.

    Nous avons également sur autorisation du président, eu l’opportunité de rencontrer le président Ali Bongo Ondimba avec qui nous avons échangé sur sa situation et sur l’ensemble de la situation. Je crois que ces échanges étaient très fructueux. Ce matin, j’ai rencontré dans le cadre de cette facilitation les confessions religieuses et nous avons partagé leurs points de vue sur la situation qui prévaut en ce moment. Cela  a été une rencontre très intéressante et nous avons eu beaucoup d’éléments d’information. Nous avons également rencontré le corps diplomatique, pour les informer de notre mission et des mesures qui  ont été prises. Nous avons rencontré la classe politique et les partis politiques. Des échanges très fructueux ont eu lieu. Et enfin, nous avons rencontré la société civile qui nous a donné également son point de vue.

    À l’unanimité, je pense que la population a apprécié l’action posée par le Comité qui a préservé la paix et a évité le bain de sang. Mais nous devons continuer à travailler dans le cadre de cette facilitation avec le Comité de transition pour la restauration des institutions pour élaborer une feuille de route permettant donc un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Nous venons donc de faire une petite restitution avec le Comité. Nous remercions le président pour l’esprit d’ouverture et l’attention qu’il porte à cette facilitation. Ce n’est qu’un début de processus qui va nous conduire jusqu’au retour à l’ordre constitutionnel. Voilà en un mot, l’objet de cette mission à Libreville.

    Propos retranscrits par Théodore Ayissi Ayissi

  • Contre la pauvreté et l’insécurité : l’Onu et le Cameroun en cabine commune

    Contre la pauvreté et l’insécurité : l’Onu et le Cameroun en cabine commune

    Les deux parties déterminées à piloter divers programmes dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

    Photo de famille après l’ouverture de la session

    «Troisième session du Dialogue politique structuré entre le Cameroun et le Système des Nations unies». À lire ces écrits affichés à l’entrée du ministère camerounais des Relations extérieures (Minrex) ce 8 juin 2023, l’on devine bien que leur trait distinctif est de chercher l’appréhension et la résolution de certains problèmes, qui ne sont pas toujours inédits, mais qui se sont pour le moins transformés. «C’est le cas dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest», reconnaît Lejeune Mbella Mbella dans son discours d’ouverture. Selon le Minrex, «l’Onu et le Gouvernement du Cameroun se concertent une fois encore, en mettant l’accent sur les complémentarités entre les programmes du système des Nations unies et les plans de reconstruction et de développement du gouvernement pour les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême-Nord. Le cadre de coopération nous permettra de bénéficier de l’expertise de l’Onu pour dynamiser les projets de développement dans ces régions».

    Pour Matthias Naab (Coordonnateur Résident du Système des Nations unies au Cameroun), «la tenue de cette rencontre témoigne de la qualité et du niveau de nos relations avec le gouvernement». D’où le besoin de donner une impulsion politique et stratégique dans tous les secteurs de coopération. L’objectif étant de renforcer aussi bien la cohérence et l’efficacité des initiatives menées, que la cohésion parmi les acteurs impliqués.

    Dans l’immédiat…
    À l’issue de cette réunion de haut niveau, dans leur déclaration commune, le Gouvernement du Cameroun et le système des Nations unies ont décidé de convoquer une réunion restreinte, pour examen de la mise en œuvre des fonds de contrepartie du gouvernement dans la mise en œuvre des programmes appuyés par les Nations unies dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Les deux parties envisagent également d’œuvrer ensemble pour la consolidation de l’initiative «Unis dans l’action» proclamée en 2016. Elles s’engagent enfin pour une communication commune afin de parvenir à une meilleure concentration des interventions de développement des Nations unies, en privilégiant la mise en œuvre des programmes conjoints dans les secteurs stratégiques.

    Ongoung Zong Bella

  • L’OBC à son aise à Bafoussam et Bamenda

    L’OBC à son aise à Bafoussam et Bamenda

    Tout est en ordre au terme des épreuves obligatoires dans les deux capitales régionales sillonnées par la délégation de l’Office du Baccalauréat du Cameroun.

    Les antennes OBC au contrôle

    Ce 2 juin était le dernier jour de composition des épreuves écrites obligatoires du Baccalauréat de l’enseignement secondaire général. Pendant que les séries littéraires composent en histoire, les séries scientifiques, quant à elles, composent en sciences de la vie et de la terre. Le bon déroulement des opérations est un véritable ouf de soulagement pour les chargés de mission, les chefs de sous-centre et la mission de l’OBC régionale et nationale. «L’Ouest a répondu présent en organisant dans la sérénité ce Baccalauréat», affirme Fifen Abdou, le chef d’antenne régionale, satisfait que sa région ait pu remplir sa mission en termes d’organisation. L’un des motifs de satisfaction est l’effectif en hausse par rapport à 2022. «L’effectif des candidats est en hausse par rapport aux années antérieures, avec un taux de participation de plus de 99,5%», précise-t-il à la mission venue de la capitale politique.

    Pour s’assurer que cet examen s’est déroulé dans les normes édictées par l’OBC, le chef d’antenne, la délégation de l’OBC et les médias effectuent plusieurs descentes. Trois lycées représentants également les trois arrondissements de cette ville sont concernés. La première descente s’effectuée au Lycée classique de Bafoussam (Bafoussam 1er) qui accueille 531 candidats. L’ancienneté de l’établissement créé en 1964 a parlé en sa faveur.

    Ce sous-centre compte exclusivement des candidats au Baccalauréat technologie de l’information (TI). «Dans notre sous-centre, tout s’est bien déroulé. Jusqu’ici, nous avons pratiquement toutes les séries A4 et Scientifiques», indique William Towa. Geraldine Kiampi, chef du sous-centre du Lycée classique de Bafoussam, insiste pour sa part sur le volet sécuritaire. Elle salue le rôle déterminant des forces de maintien de l’ordre dans la sécurité de son établissement. «Durant cet examen, nous avons eu l’assistance des forces de l’ordre. Chaque jour, nous recevions une équipe de policiers qui venait le matin et passait toute la journée. Le soir, une autre équipe venait et passait la nuit pour surveiller», souligne la responsable.

    C’est également cet établissement qui abrite les candidats déficient. On les retrouve exclusivement en série D. Bien après, la caravane s’est rendue au Collège St François d’Aquin situé dans l’arrondissement de Bafoussam 3e. Ce sous-centre est un site d’emprunt. Il compte pour la circonstance 680 candidats dont 4 absents. Ce qui est une réussite pour Robert Tekasam, le chargé de mission du sous-centre. La troisième et dernière étape est le Lycée bilingue de Gouache. Le choix n’est pas non plus un hasard. Ici, les responsables de l’OBC veulent voir comment le secrétariat gère la fin des épreuves obligatoires. C’est en réalité un établissement spécimen qui leur permet de prendre le pouls des autres sous-centres. Ils ne sont pas déçus, au vu du sérieux avec lequel le personnel du secrétariat travaille pour sécuriser les copies. «Vous avez vous-même fait le tour des secrétariats et vous constatez que le travail est très sérieux. Tous les membres sont concentrés ce qui augure une bonne suite dans la sécurisation des copies», précise Abdou Fifen à la presse.

    Bamenda
    La ville de Bamenda est l’ultime étape pour toute la région et un site unique est choisi. Il s’agit du Lycée bilingue de Bamenda qui abrite en son sein 157 candidats. Dans cet établissement, on retrouve toutes les filières. Le dispositif sécuritaire est semblable à celui retrouvé à Buea et Tiko. Pour ne pas stresser les candidats, les forces de défense et de sécurités sont dissimulées dans les alentours du campus. Le chargé de mission est plus serein dans la mesure où nombreux parmi eux sont en civil. Côté candidats, aucun sac n’est admis dans l’enceinte de l’établissement. Les candidats sont contraints d’accrocher les sacs sur la barrière de l’établissement. Mais au bout du compte, les responsables de l’organisation sont satisfaits du déroulement du Baccalauréat de l’enseignement général dans le Nord-Ouest.

    André Gromyko Balla, envoyé spécial à Bafoussam et Bamenda

     

    Session validée dans le Sud-Ouest

    Les sous-centres de Buéa et Tiko ont rassuré la presse, ainsi que les responsables OBC venus de Yaoundé.

     

    Rendu au 4e jour du déroulement du baccalauréat de l’enseignement général, le constat est très satisfaisant. Et le choix de parcourir la région du Sud-Ouest après le démarrage des épreuves n’est pas un hasard, au vu notamment du contexte socio-politique qui y prévaut. La délégation de l’Office du Baccalauréat du Cameroun (OBC) a pu témoigner du bon déroulement de cet examen dans les villes de Buea, capitale régionale, et Tiko. L’absence d’incident fait par ailleurs le bonheur de Doris Ngolo, chef d’antenne de la région. «Nous sommes déjà au 4e jour et je peux vous assurer que tout se déroule bien dans ma région qui totalise 391 candidats, toutes les séries confondues», a-t-elle confié lors des échanges avec la presse. Ces 391 candidats sont donc pour les besoins de la cause regroupés dans deux départements. Le premier est le Fako. Ici, on a trois sous-centres à savoir: le Lycée bilingue de Molyko à Buea, celui de Limbe et celui de Tiko. Le dernier sous-centre se trouve dans le département de la Mémé. Il est situé précisément au Lycée bilingue de Kumba.

    Sur les deux sous-centres visités, la première descente est effectuée au Lycée bilingue de Molyko situé en plein centre-ville de Buea. Dans ce sous-centre, 121 candidats sont repartis en 4 séries: la série A4, C et D et la série ABI, (Allemand, Espagnol, Italien et chinois). Dans les salles d’examen, les candidats et surveillants sont chacun concentrés sur ce qui le concerne. Et depuis le début, l’examen se déroule normalement. «Nous avons commencé avec le bacc lundi et ça se déroule bien. 119 composent normalement. Actuellement, les littéraires composent en langue vivante 2, et les scientifiques en SVT», précise Cécilia Lyonga, chef de sous-centre du Lycée bilingue de Molyko. Concernant les absents, le délégué régional, ainsi que la chef d’antenne ont pris le soin d’appeler soit le candidat, soit leurs proches, afin de savoir pourquoi ces candidats sont absents. «Quand il y a des absents, on appelle les candidats ou les parents. On a appelé et les parents nous ont dit que leurs enfants sont engagés ailleurs», souligne la chef d’antenne. Du côté du sous-centre du Lycée bilingue de Tiko, le compteur affiche 100%. Tous les 21 candidats répondent présents et composent dans la sérénité.

    Mesures de sécurités
    Bien qu’invisibles, les responsables de l’organisation des examens tiennent à saluer les mesures prises par les autorités pour garantir la sécurité et la tranquillité dans la région. Ce qui réjouit Bienvenue Boum chargé de mission du sous-centre du Lycée bilingue de Molyko. «Il n’y a pas de soucis ici, les autorités de la région ont pris toutes les dispositions pour que nous puissions composer dans de très bonnes conditions. Les forces armées et de sécurité sont là, mais vous ne pouvez pas les voir, elles sont disséminées partout», avertit-il.

    AGB

  • Noso : encore un policier et une dizaine de présumés séparatistes tués

    Noso : encore un policier et une dizaine de présumés séparatistes tués

    Troisième semaine de villes mortes déjà et la population de la cité capitale du Nord-Ouest traverse des moments difficiles.

    Scène de rue dans le Noso

    Alors que l’administration locale (le préfet de la Mezam et le maire de la ville de Bamenda) a interdit la circulation des motos dans le périmètre urbain depuis le 7 septembre dernier, des séparatistes, du moins la faction du gouvernement intérimaire de la République virtuelle d’Ambazonie du Dr Samuel Sako, ont institué quant à eux des villes mortes à durée indéterminée. Selon leurs consignes, ce sont le samedi et le dimanche qui ont été retenus comme jours de ravitaillement.

    C’est dans ce contexte que le samedi 19 septembre 2020, le gardien de la paix principal (Gpp), Aba’a Raymond Calvin, a été froidement assassiné à bout portant par la milice séparatiste, au poste de contrôle de Mile 10 Mankon à Bamenda, sur la route qui mène à l’arrondissement voisin de Bafut. Malgré la battue de ses collègues, les bourreaux du Gpp ont disparu dans la nature. Cet incident intervient juste dix-huit jours après la tuerie de l’inspecteur de police, Joseph Bikoï Nlend Ndaji, abattu par des séparatistes au lieu-dit Small Mankon le 1er septembre dernier à Bamenda.

    Depuis lors, les forces de défense et de sécurité ont lancé l’opération  » Bamenda clean » qui vise à traquer les séparatistes jusqu’à leur dernier retranchement. Le mardi 22 septembre dernier, alors que les villes de Douala, Bafang, Dschang, etc. vibraient au rythme de marches pacifiques lancées par le Mrc et ses alliés, les forces de défense et de sécurité dans le cadre de l’opération spéciale de sécurisation du chef-lieu du Nord-Ouest, ont neutralisé quatre présumés séparatistes au quartier Ngomgham à Bamenda. 

    Dans la matinée du mercredi 23 septembre dernier, cinq jeunes ont été tués à bout portant, par des individus habillés en treillis, dans des circonstances non encore élucidées, dans la localité de Lysoka Wombaki, dans l’arrondissement de Buea, département du Fako, région du Sud-Ouest. La sixième victime ici est une dame. Elle se serait évanouie après avoir constaté que l’un des jeunes abattus était son fils, a-t-on appris.

    Zéphirin Fotso Kamga

  • Plan présidentiel de reconstruction et développement : Dans le tourbillon des pensées

    Plan présidentiel de reconstruction et développement : Dans le tourbillon des pensées

    Les citoyens des régions anglophones disent leurs joies et leurs déceptions par rapport aux projets à mener dans leur cadre de vie en proie à une crise sociopolitique sans précédent depuis octobre 2016.

    Réhabilitation de 350 écoles, 115 centres de santé, 45 marchés, 40 ponts, 400 points d’eau, 500 km de ligne électrique basse tension, 600 km de routes rurales, 25 mille hectares de plantations et 12 mille maisons d’habitation. Du lourd en perspective pour Paul Tasong Njukang. Par un arrêté signé par Chief Joseph Dion Ngute le 3 avril 2020, le ministre délégué auprès du ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), a été désigné pour conduire le programme de restauration du cadre de vie et des activités économiques en faveur des populations des deux régions anglophones du pays. Il sera assisté par l’ancien maire Sdf de Kumbo Donatus Njong.

    C’est donc sous leur compas que le nouveau pré va se dessiner dans les prochains jours. Au sein des populations locales, un hymne fait déjà vibrer l’air. Certains chantent de bon cœur avec le coordonnateur du PPRD-NoSo. A grands coups de joie, certains répondent positivement à l’annonce gouvernementale. John Fung est de ceux-là. Citoyen vivant à Bamenda, il dit accueillir avec beaucoup de ferveur le plan de reconstruction. «Parce que, dit-il, cela va permettre d’une part la reconstruction de plusieurs infrastructures détruites dans ces deux régions et d’autres part, cela pourra encourager ceux qui ont pris les armes contre leur propre pays à revenir à de meilleurs sentiments».

    Pour Babila Michael, un autre habitant de Bamenda, l’enjeu du plan de reconstruction est de bousculer la crise sociopolitique et sécuritaire qui a retardé voire réduit à néant le développement de ces deux régions. Vivant à Kumba, Dengu Martha se veut l’incarnation d’un peuple en attente du retour de la paix et du bien-être. «Ce plan, se félicite-t-elle, va nous faire respirer enfin !».

    Toutefois, chez d’autres citoyens, la symbolique et la définition du Plan de réhabilitation et de développement restituent davantage la complexité et l’intensité de l’affaire. Sur le terrain, cette dernière n’en finit pas de cultiver le doute et la crainte. «La population est désespérée. Le gouvernement veut exploiter cette situation pour engranger plus de soutient sans pour autant résoudre les vrais problèmes», s’emporte D. Song.

    Dans leurs multiples dimensions, les dires de ce natif de Nkambé mettent en parallèle l’ambiance actuelle et le projet à travers lequel le gouvernement entend l’apprivoiser. Selon lui, le problème n’est donc pas l’absence de projets, il est que ces projets sont de bien faible intensité, trop horizontal, relativement à celui qui assaille les régions anglophones aujourd’hui. Autrement dit, «on a offert aux populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest une raison supplémentaire de se soulever et une nouvelle cible».

    «Réserves»
    Dans le fond, le Plan annoncé pose trois questions : la question du timing, celle du contenu et celle de la finalité. Et Colbert Gwain de corroborer en termes : «il y a des aspects des résolutions du grand dialogue national qui pouvaient être implémentés sans retard, notamment le changement du nom du pays de république du Cameroun à République unie du Cameroun comme c’était le cas avant 1984. De même que ramener les deux étoiles sur notre drapeau afin de refléter notre riche héritage culturel. Les Camerounais attendent des actions dans cette direction…

    Encore le gouvernement poursuit au contraire avec la création d’un comité de reconstruction. Le gouvernement continue de fonctionner comme s’il n’a rien appris et à tout oublié. Je n’ai pas encore compris comment la reconstruction va s’opérer alors que la paix n’est pas encore de retour». Tout autant moins convaincu, John Fung a quelques appréhensions. L’une d’elles s’attarde sur le montant de 90 milliards FCFA alloué pour le projet dans les deux régions. «Je crois qu’il est insignifiant si l’on s’en tient aux besoins estimés à près de 2000 milliards. Deuxièmement les délais ne sont pas connus. Troisièmement le marché n’est pas encore passé.

    En plus, ce gouvernement a été incapable d’ouvrir ses écoles dans la région encore moins exécuté ses budgets d’investissement public de 2017 à 2019 dans les deux régions d’expression anglaise. Encore veut-il commencer à reconstruire ce qui a été détruit pendant le conflit dégénéré en cours». Dans la même veine Nke Nicodemus «espère que ce ne serait pas une histoire de tripatouillage où seuls les militants du parti au pouvoir ou encore certaines hautes personnalités du régime bénéficieront. Il faut une transparence dans le choix des bénéficiaires. Je parle de ceux dont les maisons seront reconstruites». Une manière d’interpeller les responsables à la transparence dans la gestion du projet de reconstruction du Nord-ouest et du Sud-ouest. Ojang Stephen à Wum (Menchum) estime qu’ «il faudra qu’on explique à la population ce que c’est que la reconstruction, car d’aucuns pensent qu’il va falloir reconstruire les domiciles privés».

     

    La reconstruction au bout du canon

    En zone anglophone, les combats ne connaissent pas de répit. La mort et la peur y imposent une loi de puissance.

    Paul Tasong Njukang, au pied du mur dans le Noso

    Spectacle éhonté sur la Nationale Kumba-Mamfe (Sud-Ouest). Depuis une semaine, cet axe routier est bloqué par des combattants, devant une population médusée. Des mobilisations éclair de sécessionnistes vêtus de noir ont eu lieu dans divers endroits, s’accompagnant d’actes de vandalisme. Kene-Mbessi par mile 4 Nkwen, une cinquante de combattants séparatistes ont pris d’assaut ce quartier de Bamenda le 10 avril 2020. Sur trois maisons d’habitation, les assaillants ont mis du feu.

    Si deux se sont consumées partiellement grâce à l’intervention des forces de l’ordre, la troisième a été vite maîtrisée. «N’eût-été l’arrivée des forces de défense et de sécurité, les hors la loi auraient probablement causé plus de dégâts voire même des morts et/ou d’enlèvement d’hommes», raconte un riverain. Selon des sources sécuritaires de premier plan, les séparatistes vengeaient un de leurs collègues qui, la veille, avait été pris à partie par la population de ce quartier pour tentative d’enlèvement d’un certain Papa Franck.

    Toujours à Bamenda, dans la matinée du 8 avril 2020, la branche Nord-Ouest du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) et l’Association camerounaise des journalistes d’expression anglaise (Cameroon Association of English Speaking Journalists, Camasej) annonçait l’enlèvement du journaliste Choves Loh. En service au quotidien Cameroon Tribune (CT), l’infortuné a reçu la visite de trois hommes lourdement armés vers 5 heures 30 à sa résidence. Ceux-ci ont tenté de l’enlever.

    Le 9 mars 2020, des unités de police de la Division Régionale de la Police Judiciaire du Nord-Ouest, le commissariat central numéro 3 et le poste de contrôle des ESIR, ont simultanément subi des attaques. Les premiers éléments des enquêtes avaient révélé que lesdites attaques visaient la libération des personnes suspectes arrêtées hier dans le cadre de l’attentat à l’explosif survenu le 8 mars à Bamenda.

    Dans une interview accordée à CT le 7 avril 2020, Paul Tasong Njukang a déclaré que l’on ne saurait attendre que la paix retourne totalement dans les deux régions pour déployer le plan de reconstruction et développement, eut égard à l’ampleur de la tâche évaluée à l’issue de la collecte des données effectuée sur le terrain sous la coordination des deux gouverneurs. «La priorité sera déterminée géographiquement et accordée aux zones où la reconstruction peut être faite avec le minimum de risque. C’est clair qu’il existe encore des poches de résistance mais de manière générale la situation est loin de ce qu’elle était il y a deux ou trois ans», a dit le membre du gouvernement. C’est dire si à l’observation, là où il y a résistance, les forces de défense et de sécurité devraient faire le ménage pour que la reconstruction voulue par le chef de l’État se poursuive jusqu’à son terme.

    ZFK

  • Bamenda : Élection du « super maire » : le SDF claque la porte

    Bamenda : Élection du « super maire » : le SDF claque la porte

    Paul Achombang Tambeng, le nouvel édile de la ville a été élu dans une ambiance chaude.

    Bamenda a son super maire depuis le 25 février 2020. Élu pour un mandat de 5 ans, Paul Achombang Tambeng préside désormais aux destinées de la capitale régionale du Nord-ouest. Reste que le nouvel édile n’y est pas parvenu de manière aisée et unanime. Au cours de la session de plein droit tenant lieu de scrutin, les 93 conseillers municipaux ont subi (ou presque) la candidature du se sont vu imposer la candidature du militant du rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) ; par ailleurs conseiller municipal à la commune d’arrondissement de Bamenda 1er. Dans une ambiance très tendue, un élu du Social Democratic Front (SDF) de la même municipalité a contesté le capital politique et social de Paul Achombang Tambeng, non sans proposer Louis Angwafo (conseiller Rdpc de la commune de Bamenda 2e) comme le candidat idéal pour ce poste. Selon le conseiller contestataire, il sera très difficile pour Paul Achombang Tambeng  d’élaborer  un programme crédible sans avoir jamais été impliqué dans le fonctionnement d’une municipalité, à tout le moins dans les villes d’une certaine taille. Plus spécifiquement, le fait de n’avoir jamais été au pouvoir à l’échelle locale implique qu’il n’a pas d’obligés et peu de réseaux à activer.

    L’élection a pris un tournant important, par la conjonction de l’entrée en scène du préfet de la Mezam. Selon l’administrateur civil, l’ordre serait venu du Comité central du RDPC. Toujours est-il qu’en prenant fait et cause pour la candidature de Paul Achombang Tambeng, le chef de terre se conformait à visage voilé, aux instructions de sa hiérarchie. Le ministre de l’administration territoriale Paul Atanga Nji, mentor de Paul Achombang Tambeng, sussurent les conseillers municipaux, a imposé la candidature de ce dernier. C’est pour mettre en déroute ce diktat que les 31 conseillers municipaux SDF de la commune de Bamenda 3e sont allé pêcher dans le camp du parti au flambeau ardent, le nommé Louis Angwafo ( conseiller municipal à la commune de Bamenda 2e). Face au refus du préfet de la Mezam d’endosser la candidature de Louis Angwafo, les conseillers municipaux SDF ont claqué la porte.

    Il est à noter que la ville de Bamenda compte trois communes d’arrondissement. Au terme des municipales du 9 février 2020, celles de Bamenda 1er et 2e sont entièrement aux couleurs Rdpc et celle de Bamenda 3e est acquise au Sdf. Chacune de ces municipalités compte 31 conseillers. 

     

    Zéphyrin Fotso Kamga

     

     

  • Bamenda : Écoliers et parents pris entre deux feux

    Bamenda : Écoliers et parents pris entre deux feux

    L’incertitude plane sur le démarrage de l’école dans la ville.

    En ce samedi 31 août 2019, la ville de Bamenda est épuisée par une semaine de ville morte. Le léger répit décrété par les activistes séparatistes ce matin signifie : «faire vite et tout, à l’exception de préparer la rentrée des enfants». Dans divers témoignages, cette ligne sécrète quelque chose à laquelle tiennent les «Amba Boys» : «No school here this year» (Pas d’école ici cette année). Cette ligne-là, d’abord différée, s’est propagée, libérant crescendo sa dose de peur. «Ou on vous tue, ou vous obéissez !», laisse entendre Berenice Ngala.

    À écouter cette ménagère, la ville croule sous deux choses : ne rien prendre pour prétexte en achetant le matériel scolaire à ses enfants d’une part, et une limite d’autre part à ne pas flâner devant une librairie.

    En se posant la seule question qui vaille (est-ce que je peux mourir en enfonçant la limite ?), chaque habitant des quartiers populeux assure le bouche-à-oreille. Autour de la rentrée scolaire, la ville est certes dévouée aux assurances gouvernementales, mais elle a peur. «Étant donné que je doute de la reprise de l’école ici. Il faut qu’ils rentrent sur Bafoussam où ils fréquentent depuis deux ans. C’est d’ailleurs à destination qu’ils vont acheter les fournitures scolaires», confie Gordy Nfon.

    Le sens du tragique, expliquent quelques personnes, c’est que chaque faction sécessionniste a mis ses «éclaireurs» près des librairies et autres points de vente de fournitures scolaires. Tout au long du Commercial Avenue, ce niveau de réalité est sournois, mais s’agence avec un sens extrême d’occupation. «Ils (les Amba Boys) sont partout ici», souffle Francis Ntaformi. Pour ce libraire, aucune audace n’est permise, car «ces gens sont au courant même lorsque vous vendez dans le noir». Il préfère fermer et ne rien risquer.

    Comme lui, beaucoup d’autres acteurs craignent pour leur vie. «Pour moi, mieux vaut fermer que de coudre les tenues et mourir», expose Florence Mbih, une couturière. C’est dans ce contexte que les évêques de la province ecclésiastique de Bamenda ont plaidé pour la reprise des cours ce lundi 2 septembre 2019 dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. Cette crise ayant causé plus de pertes avec des morts d’hommes, des frustrations, etc. Aussi ont-ils demandé aux miliciens et aux forces gouvernementales de faire preuve de retenue afin de permettre aux enfants de reprendre l’école ce lundi 2 septembre. Si l’unanimité se fait autour de cette position, il n’en demeure pas moins que les séparatistes restent toujours hostiles. Pour preuve, les trois semaines de villes mortes annoncées par les leaders séparatistes, pour empêcher la rentrée scolaire dans le Nord-ouest et le Sud-ouest.

    Certes, la première semaine de ville morte a été un succès dans le Nord-ouest. Mais, ce mot d’ordre de désobéissance civile a été partiellement suivi dans le Sud-ouest. Cependant, des tracts circulent. Ils font état d’un durcissement du mouvement ces deux prochaines semaines.

    Zéphyrin Fotso Kamga

  • Bamenda : Des coups de feu font deux morts

    Bamenda : Des coups de feu font deux morts

    D’aucuns soupçonnent une réaction des combattants séparatistes suite à la condamnation à perpétuité assortie d’une amende de 250 milliards FCFA infligée à Julius Ayuk Tabe Sissiko et Cie.

    Les populations de Bamenda  ont démarré la journée du 21 août 2019 dans la peur. Au petit matin de mardi dernier 20 août par le tribunal militaire de Yaoundé, des individus encore non identifiés ont pris la ville en otage. Au quartier dénommé Rendez-vous End of Tare Longla, des échanges de coups de feu ont fait deux morts, renseigne un habitant dudit quartier.

    Dans la zone de Nitop, hospital round about, Mulang, des détonations ont été entendues jusqu’au marché des vivres. Passant par là, des individus malfamés ont exigé la fermeture des commerces au lieu-dit  Commercial Avenue.  Le même jour, dans l’après midi, des informations faisant état de ce que des séparatistes seraient en train de bloquer la route vers Bellow Foncha se sont répandues dans la ville. Certaines sources indiquent que la nuit n’a pas été de tout repos  à Cow Street  et  Mancho Street.

    Mis au parfum, une patrouille des forces gouvernementales est descendue sur les lieux pour imposer le calme. Il est à relever que les incidents ci-dessus relatés sont survenus 24 heures seulement après la condamnation à perpétuité assortie d’une amende de 250 milliards FCFA infligée à Julius Ayuk Tabe Sissiko et Cie.

    Zéphirin Fotso Kamga

  • Bamenda : Egypte 2019 vue d’une ville en guerre

    Bamenda : Egypte 2019 vue d’une ville en guerre

    Chassé-croisé dialectique d’une population aux abois qui a vécu le plus grand événement sportif du continent avec un arrière-goût d’insatisfaction.

    La ville n’a pas vibré au rythme de la Can 2019

     

    1-Le match perdu de l’engouement populaire
    Déception pour certains, sentiment mitigé pour d’autres, voilà l’état d’esprit des populations de la cité capitale du Nord-ouest à la fin de la coupe d’Afrique des nations de football au pays des pharaons. «Je n’ai pas regardé un seul match de la Can» indique Nicodemus Nde. La faute à l’énergie électrique, jamais disponible. Rémy Cinti ne dit pas autre chose : «on a raté plusieurs matches, même ceux des Lions indomptables du Cameroun, à cause des coupures intempestives de l’énergie électrique. On ne peut pas affirmer ici à Bamenda qu’on a bien suivi la Can achevée vendredi en Egypte». Pour contourner l’obstacle, les nantis ont acquis un groupe électrogène et d’autres ont suivi les matchs sur YouTube ou d’autres applications mobiles.

    Affluence au stade
    Pierre Anoufack marque sa déception quant à l’affluence des spectateurs dans les stades en Egypte. «Les stades accueillant les matchs de l’Egypte étaient bondés de monde. Après la sortie prématurée du pays organisateur de la compétition, on a vu des gradins carrément vides», regrette-t-il. Un avis partagé par Elvis Ndi Tsembom, secrétaire général à la ligue régionale de la Fecafoot Nord-ouest : «C’est une leçon pour la Caf qui doit revoir les tarifs de la billetterie, parce que le prix du ticket d’accès au stade est exorbitant. Ceux qui aiment le football n’ont pas les moyens d’accès au stade». Rémy Cinti soulève la controverse de la Var, un autre point interpellant la Caf et la Fifa. «Parce que ayant apporté beaucoup de polémique autour des cartons distribués aux joueurs».

    Sortie regrettée des Lions indomptables
    L’une des plus grandes déceptions des populations de Bamenda au cours de cette Can 2019 est la sortie prématurée de l’équipe nationale de football du Cameroun. «En tant que Camerounais, j’ai été déçu de la prestation des Lions indomptables, surtout lors du match qui les élimine contre le Nigeria. On a eu l’impression que le sélectionneur a passé le temps à tester les joueurs au cours de la compétition» fustige Pierre Anoufack. Il est suivi par Mbah Zico Nwati: «l’élimination des Lions indomptables nous a donné un mauvais goût». Lot de consolation pour Pierre Anoufack: la finale de la Can 2019 arbitrée par un trio camerounais.

    Révélations
    La Can qui s’est achevée vendredi a mis sur orbite des supposés «petites nations de football». Ce qui ne laisse pas indifférent les amoureux du ballon rond à Bamenda. «La compétition a permis d’avoir des révélations en terme d’équipe nationale, celles de Madagascar et du Bénin, des talents aussi» remarque Pierre A. Pour le Sg de la Fecafoot Nord-ouest, cette Can a «révélé un football africain émergent, avec des pays moins capés comme le Bénin qui élimine une grande nation comme le Maroc ; ou Madagascar qui, pour sa première participation, a impressionné. Je crois que l’Afrique sort de l’ornière et nous fait découvrir des talents comme ce fût le cas dans les années 80-90. Les petites nations investissent dans le sport en général et le football en particulier. Dans les cinq prochaines éditions, on aura une Can dont on ne pourra pas prédire à l’avance de vainqueur ou de favori».

    2-Le match perdu du business économique
    La coupe d’Afrique des nations a souvent été l’occasion pour certains opérateurs économiques de se faire du beurre dans la cité capitale du Nord-ouest. Marcus S. tient un commerce en face du marché central de Bamenda. Une boutique de vente des gadgets sportifs et singulièrement des maillots de différents pays participant à Egypte 2019. Le business ne marche pas en cette édition 2019 de la Can. «A cause de la crise sociopolitique dans le Nord-ouest, Bamenda s’est vidée de sa population. Je n’ai pas pris le risque d’investir comme par le passé, car très peu s’intéressait à la Can. En plus, les délestages ont sevré de nombreux citoyens de la ville des matchs à la télévision», indique-t-il.

    A contrario, Pierre A, Directeur d’un établissement hôtelier à Up Station Bamenda, se frotte les mains surtout lors des rencontres des Lions indomptables, même si ses concurrents de Down-Town n’ont cessé de se plaindre des mauvaises affaires pendant la Can. «Je dois avouer que jusqu’à la fin du premier tour, la structure hôtelière située à Up Station que je gère faisait de très belles affaires. Les salles, snack-bar, restaurant et même l’esplanade avec ses tentes faisaient son plein d’œuf; et même jusqu’en 8e de finale avec la participation des Lions indomptables qui poussaient leurs fans à affluer ici. Après l’élimination des Lions, la pression a baissé, l’intérêt aussi». Les vendeurs des écrans de téléviseurs plasma et autres n’ont pas également fait recette.

    3- Le match à gagner de la Can 2021
    Egypte 2019 est désormais dans le rétroviseur. Les regards et les énergies sont maintenant focalisés sur la Can 2021 au pays de Roger Milla. Pour ne plus tomber sous le coup du glissement de dates, autrement appelé retrait de l’organisation de la fête footballistique au Cameroun, des citoyens de Bamenda suggèrent aux pouvoirs publics de mettre les bouchées doubles. «Il faut penser aux infrastructures. On a l’impression que 2021 c’est trop loin. Non. On avait eu la chance d’avoir plusieurs années devant nous (de 2014 à 2019).

    On a échoué. 2021 c’est proche, il faut déjà enlever 2019. On a plus que 2020. Il ne faut pas attendre la dernière minute pour faire des visites de terrain irréalistes (on parle de 95% de taux de réalisation alors que rien n’est fait absolument). Avec le retrait de la Can, il semble que beaucoup ont pris du recul et qu’il faudra attendre la dernière minute. C’est le moment de gérer la question des infrastructures avant 2020 parce qu’on est déjà en juillet» précise Pierre A. Et Elvis Ndi Tsembom de renchérir: «le Cameroun doit tout mettre en oeuvre pour éviter la précipitation de dernière minute. Concernant le ralentissent de la construction des infrastructures sportives, j’espère qu’avec le nouveau ministre des sports et de l’éducation physique, Narcisse Mouelle Kombi et le président actuel de la Fecafoot Seidou Mbombo Njoya, nous ne ferons pas l’objet d’un second embarras aux yeux du continent africain. La CAF va tester certaines de ces infrastructures en janvier 2020 avec le Chan. C’est en ce moment là qu’on saura si le Cameroun va organiser la Can».

    Quid des infrastructures hôtelières, hospitalières avec le relèvement ou la mise à niveau du plateau technique et surtout routières et aéroportuaires ? La situation sécuritaire n’échappe pas à l’attention des populations de la cité capitale du Nord-ouest. «Il faut déjà penser à la sécurité puisque ça pourra être un autre motif de retrait de la Can. Est-ce qu’en 2021, on peut être sûr que les matchs se jouant par exemple dans le Sud-ouest (Limbe) auront lieu sans problème? Quelle en est la garantie ? Qu’est-ce qui est fait pour ce dialogue inclusif qu’on attend?» interroge Pierre A. Pour Elvis Ndi Tsembom, «l’Egypte n’était pas mieux sur ce domaine avec le décès de l’ex président Morsi. Mais nous avons deux ans au Cameroun pour résoudre nos différends afin que la Can se déroule sans anicroche sur le plan sécuritaire. Avec les premiers pas de la médiation que nous avons observés en Suisse, je crois qu’on s’achemine vers la tenue du dialogue. Cette crise peut prendre fin à tout moment».

    La relève
    Sur le plan purement sportif Pierre A est d’avis qu’il faut éviter la chasse aux sorcières. «Seedorf et Kluivert auraient péché, c’est vrai, mais qu’est-ce que le Cameroun a fait depuis longtemps pour assurer la relève ? Où est la pépinière du football camerounais ? Où est le football jeune tant promis alors que la CAF et la FIFA ont tout un programme de sponsoring du football jeune?». Il ajoute : «s’il y a une pépinière, il faut penser à des coaches qui vont travailler sur la durée». Et de proposer : «on vient de se séparer des entraineurs expatriés, n’est-il pas temps de penser à des coaches nationaux?» La finale de la Can 2019 doit inspirer le Cameroun. Les deux pays finalistes, Sénégal et Algérie, étaient entraînés par les enfants du pays.

    Zéphirin Fotso Kamga

    Selon les Sénégalais

    Le «mauvais arbitrage a payé»

    Clichets de la finale de la Can au carrefour Tsinga Elobi, à Yaoundé.

     

    Il a suffi d’une frappe au parcours rocambolesque à la 2e minute, pour assombrir le ciel des compatriotes de Sadio Mané. Jugé inoffensif un peu hâtivement, le tir de Baghdad Bounedjah contré par Sané trompe la vigilance de Gomis (gardien) puis pénètre dans ses filets. Un silence assourdissant se fait retentir: le Sénégal est mené par 1-0.

    Les répliques de Sadio Mané et ses coéquipiers redonnent espoir aux supporters des Lions de la Terranga. «Le match c’est 90 min, nous ne sommes qu’au début de la rencontre, donc il y a encore du temps» lance Aboubakar très confiant. Cependant, les contre-attaques des poulains d’Aliou Cissé s’avèrent vaines au cours des 45 premières minutes. L’arbitre, sonne la fin de la période. Malgré tout, les supporters gardent espoir. «Le Sénégal va remonter le score pendant la deuxième mi-temps inch Allah», déclare Diallo.

    A la 60e, Adlane Guedioura manie le cuir de la main dans sa surface de réparation. «Pénalty !» s’écrient les supporters. Malheureusement, leur élan est stoppé par l’assistance vidéo: Aliou Alioum annule le pénalty et la balle est remise en jeu. « Ils veulent à tout prix nous faire perdre ce match » vocifère Diallo. Les minutes s’égrènent et l’équipe sénégalaise ne parvient pas à mettre une balle dans les filets du portier algérien. Le coup de sifflet final résonne et met fin au rêve sénégalais de remporter la Can 2019.

    Déçus les supporters se disloquent. «Je suis mécontent et triste parce que mon pays n’a pas gagné, mais je sais que nos joueurs ont fait de leur mieux», confie Aboubakar d’un air abattu. Il vient de perdre son pari de 10 000 francs. Il ne manque pas d’accuser l’arbitrage. Diallo, son compatriote, est aussi en colère : «c’est le Sénégal qui devait gagner ce match. Vous avez vu, on nous a refusé un pénalty ce n’est pas juste. Le mauvais arbitrage a payé».

    Joseph Julien Ondoua Owona, Stagiaire

  • Bamenda : Gale et obscurité en clan serré

    Bamenda : Gale et obscurité en clan serré

    Localement appelée « come no go », la gale fait des ravages dans cette ville qui broie du noir depuis des mois. Grand reportage dans la cité capitale du Nord-Ouest.

    Bamenda souffle le chaud et le froid

    1-Vivre avec la gale
    Bamenda se gratte. De plus en plus. Des sources médicales rapportent une augmentation des cas dans la ville et ses environs. «À travers l’analyse des ventes de produits contre la gale, on estime aujourd’hui qu’une bonne partie de la population, des enfants notamment, est touchée», affirme Albert Nduh Ako, épidémiologiste au Sacred Heart Center (SHC) de Nkwen. Entre février et juin 2019, les ventes de flacons de benzoate de benzyle et de comprimés d’ivermectine, arsenal thérapeutique contre la pathologie, ont bondi de 11 et 25 %, selon les données compilées par le SHC. Une recrudescence encore difficile à expliquer et qui déborde certaines officines, en rupture de stock. «La gale, c’est une maladie de la promiscuité, qui peut se transmettre à tout le monde», explique le Dr Marcus Che Makia, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales.

    Partout, on parle du «come no go». Oubliée, l’affection s’incruste à nouveau, grandement encouragée par la précarisation ambiante. «Aujourd’hui, il y a des quartiers où l’on vit cette gale comme en 1990. Cela doit interroger l’État», s’alarme Marcus Che Makia. Il ajoute : «À l’heure où le changement climatique fait planer de nouvelles menaces épidémiques, il est peut-être temps d’en tenir compte». À travers son relief, Bamenda est un damier saisissant où alternent mansardes et ordures. Sur le terrain, la promiscuité a élu domicile. Dans la rue, entre les habitations, des rats évoluent en escouades au pied des bâtiments, tout au long de la journée. Dans les cours de jeux, les enfants ne peuvent éviter de piétiner leurs excréments. Dans les ménages, les récits se construisent au gré d’énormes tas d’immondices. Ceux-ci jouxtent le pied des habitations. «C’est là que les gamins attrapent la gale», assure Albert Nduh Ako.

    À cause de la situation sociopolitique actuelle, le processus de ramassage d’ordures est à l’arrêt «depuis de longues semaines», évalue Vanessa Mbih, coordonnatrice de l’Ong «Save our selves», impliquée dans le nettoyage des rues.

    2- Vivre sans électricité
    L’environnementaliste associe le tableau actuel au manque d’énergie électrique dans la ville. «Ainsi va le calvaire des citoyens de la ville de Bamenda! Depuis environ un mois, certains quartiers n’ont pas d’électricité la nuit», témoigne notre interlocutrice. Elle montre aussi que dans ce «noir», les risques de pillages augmentent. Dans cette ville à l’économie dévastée par près de deux ans de crise sociopolitique, où l’inflation est hors de contrôle, les répercussions du manque d’énergie électrique sont énormes.

    «Le poisson frais que j’avais stocké dans mon congélateur s’est tout gâté, faute de l’énergie électrique. Ceci constitue une énorme perte pour moi», se plaint Marcus Ngufor, détaillant du poisson surgelé dans une surface commerciale autrement appelée boutique à Mile 4 Nkwen. Wirka Venatius, coiffeur à quelques encablures de l’avenue commerciale ne dit pas autrement: «ce que nous traversons actuellement à Bamenda est extrêmement difficile. Je ne peux plus compter le nombre de clients que j’ai coiffé à moitié et l’énergie électrique est partie pour ne revenir que le lendemain, ce qui met mal à l’aise le client, surtout qu’il doit se déplacer dans la rue. Avec un tel look, on peut confondre ce dernier à un écervelé; certains de ces clients étant des personnalités respectées bref au-dessus de la classe dans la ville».

    Son collègue Suh Tangie, au lieudit behind Santa Park, est dans le même pétrin : «c’est à peine si on peut coiffer deux clients sans interruption du courant électrique, même dans le régime de rationnement de l’énergie actuellement en cours dans la ville». Ces désagréments ont un impact financier négatif chez de nombreux opérateurs économiques donc les activités dépendent exclusivement de l’utilisation de l’énergie électrique. Mumbari Elevinus, fanatique de football, est inconsolable: «je n’ai visionné aucun match de la dernière Coupe du monde féminine de football organisée en France.

    C’est la même situation avec la Coupe d’Afrique des nations en cours en Egypte; parce que les rencontres sont programmées en soirée et en nocturne, au moment où mon quartier est dans un black-out total». Ignatius Nji, habitant du quartier New-layout, est extrêmement remonté : «je ne peux plus regarder les journaux télévisés, encore moins les débats sur les différentes chaînes ou plateaux de télévision. Mes enfants, qui affectionnent les séries, sont mangés à la même sauce que moi. Mes appareils et autres gadgets électroniques sont exposés à des risques d’explosion au regard des interruptions et rétablissements inattendus de l’énergie électrique».

    Ville aux générateurs
    Les habitants de la cité capitale du Nord-ouest se sont reconvertis à l’énergie alternative. Des vrombissements à rompre le tympan, Bamenda est devenue une ville aux générateurs. Les plus nantis se ont acquis des groupes électrogènes. Parmi eux, Maryline, gérante d’un secrétariat bureautique en face de l’hôtel des finances au quartier Old-town: «je suis obligé de doubler le prix de tout service rendu pour amortir les frais du carburant consommé par le générateur. Par exemple, la page de photographie passe de 25F en temps normal à 50F quand le groupe électrogène est utilisé». La plupart des familles utilisent la lampe tempête. D’autres familles utilisent par contre à la bougie pour éclairer leurs maisons dès la tombée de la nuit. Certains font usage de lampes rechargeables à l’énergie solaire.

    Bamenda souffle le chaud et le froid

    Pour Martin Esong: «la nuit tombée, j’utilise l’un de mes téléphones portables pour éclairer ma pièce. Étant donné que j’en ai deux, je m’arrange toujours à remettre l’autre téléphone en rentrant chez moi le soir, à une connaissance qui vie vers l’hôpital régional, l’unique endroit de la ville qui ne connaît pas d’interruption de l’électricité. Je récupère ledit téléphone le matin et lui remet l’autre ; cela dure depuis pratiquement un mois».

    Eneo, l’entreprise de distribution de l’énergie électrique, n’a pas encore communiqué officiellement sur ce rationnement du courant électrique à Bamenda. Officieusement, une source introduite au sein de cette entreprise renseigne que des individus ont vandalisé la ligne haute tension principale entrante. Située vers Mbatu, cette ligne haute tension ravitaille en énergie électrique la cité capitale du Nord-ouest et ses environs. Actuellement, la centrale thermique à fuel de Ntarinkon est mise à contribution pour le rationnement de la ville en énergie électrique. Pour combien de temps encore?

    Zéphirin Fotso Kamga

  • Crise anglophone : L’archevêque de Bamenda élargi après douze heures de captivité

    Crise anglophone : L’archevêque de Bamenda élargi après douze heures de captivité

    Monseigneur Cornelus Fontem Esua, archevêque de Bamenda, n’a pas regagné son presbytère dans la cité capitale du Nord-ouest mardi dernier 25 juin 2019, comme il projetait.

     

    De retour d’une visite pastorale à Esu par Wum, dans le département de la Menchum, l’homme de Dieu et trois de ses collaborateurs ont été happés par des éléments de la milice séparatiste Adf à Njinekejem dans le département du Boyo. Le chef de l’église catholique dans l’archidiocèse de Bamenda et sa suite ont été conduits dans le camp des ravisseurs, où ils ont passé nuit. Si l’archevêque a passé la nuit sur un matelas de fortune, ses collaborateurs n’ont pas bénéficié de ce supposé privilège. A en croire le prélat, ils n’ont pas été menacés par leurs ravisseurs. L’archevêque dit avoir prié avec eux, et leur a remis le rosaire et la Bible.

    Monseigneur Cornelius Fontem Esua a plaidé auprès de ses ravisseurs pour la reprise de l’école dans le Nord-ouest et le Sud-ouest, dès la rentrée scolaire prochaine. Après douze heures de captivité, l’archevêque de Bamenda et sa suite ont été libérés en matinée du mercredi 26 juin 2019. Ils ont par la suite regagné Bamenda. Depuis lors, le presbytère ne désemplit pas. Chrétiens et autres laïcs engagés, en file indienne, passent prendre des nouvelles et remercier le ciel pour la libération du prince de l’Eglise et de sa délégation.

    Monseigneur George Nkuo, évêque du diocèse de Kumbo, en partance pour Njinikom, où il allait célébrer une messe, avait croisé ladite milice. Il n’avait pas connu la même mésaventure que l’archevêque. L’évêque de Kumbo avait prié au check-point avec les séparatistes avant de poursuivre son chemin.

     

    Zéphirin Fotso Kamga

  • Crise anglophone : les méthodes de l’armée embarrassent le gouvernement

    Crise anglophone : les méthodes de l’armée embarrassent le gouvernement

    En appliquant la tactique de la terre brulée, les soldats obligent le gouvernement à se défendre d’accusations d’exactions dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
    Des boutiques incendiées dans le Nord-Ouest.

    Le jeudi 21 février, le ministre de la Communication du Cameroun se fend d’un « communiqué de presse » dans lequel il vole au secours de l’armée. Celle-ci est en effet accusée par des ONG internationales d’avoir incendié des maisons d’habitation dans les environs de Kumbo, une ville de la région du Nord-Ouest, dans le cadre de la crise anglophone.

    « Le gouvernement dément formellement ces allégations et tient à préciser que les forces de défense et de sécurité présentes dans cette région en proie aux attaques régulières des hordes de sécessionnistes ont essentiellement vocation à assurer la protection du territoire national ainsi que celle des personnes et des biens » pose d’emblée René Emmanuel Sadi.

    Lire aussi : la maison de Paul Elung Che incendiée par des séparatistes dans le Sud-Ouest

    Des unités de l’armée sont accusées d’user de la tactique de la terre brulée, en incendiant maisons, écoles, marchés, villages et même hôpitaux. Des témoignages d’habitants des régions ont souvent fait état de ce que des soldats mènent régulièrement des descentes dans des formations sanitaires et interpellent durement le personnel sur des combattants qui y recevraient des soins. « Nous sommes sous pression », avait confié un responsable médical de l’hôpital de Shisong, à Bamenda, sans dire davantage sur d’où vient cette pression.

    La sortie du ministre de la Communication laisse entendre en filigrane que les témoignages ne sont pas si éloignés que cela de la vérité.  Car René Emmanuel Sadi avoue que pour répondre à une intrusion de combattants séparatistes, les forces de défense et de sécurité sont intervenues et ont mis les assaillants en déroute « en procédant, par ailleurs, à des actions ciblées, détruisant les abris leur servant de refuge ».

    Des habitants ont en effet reconnu que les infrastructures détruites servent de refuge aux bandes armées. Cependant, le ministre de la Communication rejette toute destruction de maisons par l’armée.

    Mais le porte-parole du gouvernement ajoute : « en aucun cas, les forces camerounaises de défense n’ont incendié des maisons d’habitation ».

    Il y a quelques semaines, le colonel Didier Badjeck chef de la division de la communication du ministère de le Défense confirmait ces méthodes de l’armée aux journalistes américains du Washington Post « L’armée brule les camps des sécessionnistes. Lorsque nous trouvons un camp de sécessionnistes dans la forêt, ne croyez pas qu’on ne va pas le brûler. On va le bruler ».

    Bobo Ousmanou

  • Bamenda : Tractations sur la conférence générale anglophone

    Bamenda : Tractations sur la conférence générale anglophone

    Les leaders religieux, initiateurs de ce conclave sur la question anglophone étaient dans la capitale régionale du Nord Ouest le weekend dernier. 

    Quelques leaders religieux initiateurs de la réunion de Bamenda

    Le Cardinal Christian Tumi et les autres leaders religieux, concepteurs de la conférence générale anglophone, initiative visant à juguler la crise anglophone, se sont retrouvés à Bamenda ce samedi 12 janvier 2019. Il était question de trouver une nouvelle date à l’organisation de cette conférence. Programmée au mois de novembre l’an dernier, la Conference n’a pas pu se tenir à Buéa à cause du mutisme de l’administration publique. Par prudence, les initiateurs de ces assises n’avaient pas voulu engager un bras de fer avec l’administration, surtout que la question à débattre était très sensible.

    Missions à l’étranger
    Samedi dernier à Bamenda, l’ancien archevêque de Douala et les membres du comité d’organisation n’ont pas toujours trouvé une date pour cette conférence générale anglophone. Et pour cause, selon Christian cardinal Tumi: «Nous avons changé de date et aujourd’hui (12 janvier 2019 Ndlr) nous pensions annoncer une nouvelle. Malheureusement nous avons constaté qu’on n’avait pas fait assez de consultation. C’est pourquoi nous allons envoyer des missions à l’étranger. A la suite des résultats obtenus de ces missions, nous allons annoncer une nouvelle date».

    Elie Smith, secrétaire général de Conférence générale anglophone (CGA), souligne quelques résolutions prises au cours de la réunion de samedi: «les leaders religieux réaffirment leur engagement à contribuer à la paix définitive dans notre pays. Ainsi, alors qu’ils restent engagés dans la planification de la réunion imminente de l’CGA, les organisateurs affirment également leur rôle consultatif en matière de paix et la cohésion sociale. La crise actuelle a fait beaucoup de victimes et continue d’en faire. D’où l’urgence d’engager toutes les parties concernées et des gens de bonne volonté pour un dialogue sincère qui va garantir la paix définitive.

    Les organisateurs ont passé en revue les consultations en cours et ont accordé leur violon sur la nécessité d’étendre ces consultations afin d’inclure toutes les parties concernées, singulièrement la diaspora Camerounaise anglophone d’opinions diverses et variées. Pour ces raisons, des missions consultatives ont été assignées en Amérique du nord, en Europe et ailleurs dans le monde. D’autres missions consultatives ont été commises au niveau national pour donner l’opportunité à tout Camerounais de bonne volonté de se faire entendre à la conférence imminente».

    Le critère de choix de différents participants à cette conférence imminente a été également dévoilé. Etre anglophone de souche, ou du moins ceux dont les parents vivent dans ces deux régions avant 1961, car ceux-ci maitrisent parfaitement le problème anglophone. Toutefois étant entendu que la question ne se limite pas seulement aux anglophones, précise Elie Smith, certains francophones seront consultés et leurs avis pris en compte.

    Zéphirin Fotso Kamga

     

    Crise anglophone : Le calvaire des populations du Nord Ouest

    Six jours de « ville morte ». Voilà le supplice qu’ont enduré les populations des deux régions anglophones la semaine dernière. 

    Samedi 5 janvier 2019 marquait la commémoration du premier anniversaire de l’arrestation au Nigéria et de l’extradition à Yaoundé au Cameroun de Sissiku Ayuk Tabe Julius et d’autres leaders du mouvement séparatiste de la république virtuelle de l’ambazonie. A cet effet, les leaders du gouvernement intérimaire dudit mouvement tapis à l’étranger avait imposé samedi dernier «une journée de ville morte» aux populations des deux régions anglophones. Cette journée s’était soldée avec des véhicules et motos calcinés dans certains endroits de la ville de Bamenda. Des coups de feu avaient été également entendus.

    Sur le terrain, la milice séparatiste avait quant à elle imposé pratiquement six jours de «ville morte», rompant avec la décision des leaders de la diaspora. Même la clarification sur les réseaux sociaux de Mark Bareta, porte-parole du gouvernement intérimaire, faisant état de ce que les «villes mortes» s’observent seulement les lundis et les jours où les leaders incarcérés à Kondengui vont au tribunal, n’a pas été entendue de cette oreille. Par conséquent, les populations du Nord-ouest et du Sud-ouest ont été contraintes d’observer ce mouvement de désobéissance civile jusqu’à jeudi dernier 10 janvier.

    Ce jour-là, Sissiku Ayuk tabe Julius et compagnie étaient au tribunal militaire. Six jours sans activité, les populations se sont terrées à domicile. Bamenda, Buea, les villes secondaires, les villages, bref tout était complètement aux arrêts dans ces deux régions. On eût dit des régions cimetières. Le silence de la nuit et du jour était parfois interrompu par les échanges de coups de feu à certains endroits entre la milice ambazonienne et les forces de défense et de sécurité. Bilan: des morts d’hommes dans la Manyu, à Bolifamba, à Nanga Street Bamenda, à Jakari, à Ekona.

    Ces deux régions étaient coupées du reste du pays pendant six jours. Ce n’est que vendredi dernier que les activités ont repris dans ces deux régions. Pour combien de temps ? Selon les séparatistes, le pire est à venir.

    Zéphirin Fotso Kamga

  • Conférence générale anglophone : Le point des préparatifs

    Conférence générale anglophone : Le point des préparatifs

    Malgré le silence des autorités de Yaoundé, le cardinal Christian Tumi est à pied d’œuvre pour la tenue de cette grand-messe dédiée au retour à la paix dans les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest du Cameroun.

    Le cardinal Christian Tumi

    Trente-deux millions trois cent quarante-six mille huit cents (32.346.800) francs CFA. Voilà le montant qu’il faut pour organiser la Conférence générale anglophone (AGC). Au cours d’un point de presse ce 11 octobre 2018 à Douala, le cardinal Christian Tumi assure tenir le pari de la tenue de cette Conférence. A la tête d’un collège des coordonnateurs, l’archevêque émérite de Douala réitère le lieu et la date : «A Buea, les 21 et 22 novembre 2018, tel qu’arrêté par la commission statutaire chargée de l’organisation».

    Simon Munzu, porte-parole de l’AGC, ne fait pas mystère des préparatifs de l’événement. Cité par le site d’informations Camerooninfo.net, l’assistant du secrétaire général des Nations unies (Onu) se félicite simplement des avancées. Il précise aussi que la collecte des fonds est en cours. Selon lui, l’esprit du moment est uniquement guidé par «la volonté de voir cesser les nombreuses souffrances que la crise anglophone est en train de causer aux populations du Nord-ouest et du Sud-ouest et dont l’impact commence à se faire sentir dans d’autres régions du pays». Occasion belle pour inviter les habitants des régions affectées à participer massivement à l’AGC.

    Black-out
    Reste que le prélat ne dit aucun mot sur la position du gouvernement par rapport à cette initiative soutenue par trois autres dignitaires religieux : l’imam de la mosquée centrale de Bamenda, l’imam de la mosquée centrale de Buea et le rapporteur de l’assemblée presbytérienne du Cameroun. En effet, jusqu’ici, aucune information ne filtre, à défaut d’être feutrée. À son corps défendant, le comité d’organisation évite de dire clairement si certaines questions de fond sont déjà liquidées. «Avant d’aller à ce dialogue national, il est important que les populations des deux régions anglophones se retrouvent ensemble, d’abord pour se mettre d’accord sur les principaux problèmes à aborder lors de la tenue de ce dialogue national, mais aussi pour désigner des représentants des deux régions qui participeront à ce dialogue», posait en effet Simon Munzu en juillet dernier.

    Les organisateurs de la AGC ont-ils obtenu du Gouvernement camerounais la libération des anglophones détenus dans le cadre de la crise et la facilitation du retour des exilés et des réfugiés ? A moins qu’il ne s’agisse d’ajustements de circonstance, la lente gestation de la position des autorités de Yaoundé renforce le sentiment que le cardinal Tumi et son équipe ne gardent pas l’exclusivité de l’événement. Tout au moins, est-ce là une lecture première, à défaut d’être forcément plausible, surtout en ce lendemain électoral, où toute la classe politique nationale se cherche une ligne de crête. Bien plus, l’ingénierie politico-stratégique, côté pouvoir, avait déjà décliné sa posture. «On ne peut pas non plus demander à un Etat de droit, comme le nôtre, de libérer ceux qui ont tué, massacré… Quoi qu’il arrive, parce que nous sommes dans un Etat de droit, ils seront donc traduits devant les tribunaux pour répondre de leurs forfaits», dixit Issa Tchiroma Bakary, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Bamenda : Paul Biya défie les sécessionnistes

    Bamenda : Paul Biya défie les sécessionnistes

    Les hiérarques du parti de Paul Biya ont tenu leur meeting de lancement de campagne samedi dernier dans le chef-lieu de la région du Nord – Ouest. Malgré les menaces formulées par des séparatistes. 

    Les responsables du RDPC dans le Nord-ouest lors du meeting de lancement de la campagne présidentielle

    C’est une ville de Bamenda, avec des banderoles et panneaux publicitaires par endroits à l’effigie de Paul Biya, en français et en anglais «la force de l’expérience, the force of experience», qui accueille l’élite du Rdpc ce samedi 22 septembre 2018, jour de lancement officiel de la campagne. Philémon Yang avec à ses côtés les autres ministres et élites de la région du Nord-Ouest, bravent les menaces de la milice sécessionniste Adf, pour donner le coup d’envoi de la campagne de leur champion à Bamenda. Une campagne qui, selon le chef de la délégation permanente régionale, doit se faire par le porte-à-porte. Le Premier ministre chef du gouvernement demande aux militants de ne pas céder à la provocation. Il invite à convaincre les indécis sur la pertinence du choix à porter à leur champion Paul Biya le 7 octobre prochain.

    Il tend la perche aux sécessionnistes, en les invitant à déposer leurs armes et à revenir à de meilleurs sentiments. À ce sujet, il les invite à venir exprimer leurs doléances à travers les urnes, voie royale d’une transition démocratique dans tous les pays civilisés. «Le terrorisme, les tueries, les kidnappings et les menaces constantes ne sont pas nécessaires. Le terrorisme est brutal et ne peut solutionner un problème dans une nation moderne». Sans détour, le locataire de l’immeuble étoile affirme : «les terroristes sont les ennemis du progrès, de la paix et de la prospérité au Cameroun. Le Rdpc promeut la paix, l’unité, le progrès, le développement et l’intégrité territoriale du Cameroun». Pour lui, le Cameroun ne connaitra pas de sécession «ceux qui soutiennent la partition du pays ont fait un mauvais choix».

    Le leader de l’UDP et militants roulent pour Paul Biya dans le Nord-ouest

    C’est pourquoi il voit en la pluralité linguistique et culturelle du Cameroun un atout qui a besoin d’un système de gouvernement unitaire décentralisé inscrit dans la constitution. Aux militants, il rappelle que le boycott de l’école est un moyen facile de détruire le socle solide du système éducationnel. Or le président Paul Biya promeut constamment les valeurs éducationnelles. Raisons pour lesquelles il faut lui accorder un nouveau septennat à la tête du Cameroun. «Un suffrage exprimé en faveur de Paul Biya est un vote irréversible au processus de décentralisation, à la promotion d’un standard élevé de l’éducation de nos enfants, un vote pour la paix ; le vivre ensemble ; le développement et la stabilité».

    Hormis le Rdpc et de la United Democratic Party (Udp) d’El Hadj Lawan Bako (un parti allié à la majorité présidentielle), qui ont organisé simultanément le lancement de campagne, Bamenda est resté un terrain en friche samedi dernier, premier jour de la campagne pour la présidentielle. Nulle part on a vu dans la cité capitale du Nord-Ouest les lieutenants des huit autres challengeurs de Paul Biya. Vont-ils également dominer la peur et se jeter à l’eau ? Wait and see.

    Zéphirin Fotso Kamga

    Eséka

    Une partie à deux entre le RDPC et l’Univers

    Lors d’un meeting organisé la semaine dernière à l’intention des jeunes du Nyong-et-Kelle, la scène a été occupée par des gladiateurs très inspirés contre le candidat Cabral Libii.

    Eséka ce 16 septembre 2018. La salle des Actes d’une église est pleine comme un œuf. Anciens et nouveaux militants s’époumonent à reprendre ce qui, pour eux, tient lieu actuellement de slogan identitaire du parti: «Paul Biya ! Encore 7 ans». En ce dimanche ensoleillé, c’est le fil conducteur du «méga-meeting des jeunes du Nyong-et-Kelle». Occasion pour l’élite politique locale du RDPC (dix présidents de sections) d’évoquer une nostalgie d’anciennes civilités. Selon les orateurs, ces civilités sont toutes structurées autour du «vote massif comme la fois dernière». Pour cela, ils rédigent et lisent une déclaration appelant les fils et les filles du Nyong-et-Kelle à voter pour le «candidat naturel du RDPC». L’Union des populations du Cameroun (UPC-faction Bapooh Lipot) est parmi ceux qui tiennent le stylo.

    Pour le député Parfait Gwodo Kouang, cela se décline autrement: «Il est temps que notre département ne s’égare pas ; même si nous avons un fils du terroir qui s’est porté candidat, sans avoir de l’expérience». Pour Agnès Mbeng, présidente de la sous-section OFRDPC de Makak, «on dit non aux jeunes sans expérience, avec des discours creux et des divisions». Les mots sont certes épurés, voire ciselés, mais ils cognent fort dans ce département où, finalement se joue une partie à deux entre Paul Biya et Cabral Libii.

    Les jeunes du Nyong-et-Kelle apprécient. Ils sont au centre de toutes les précautions. Les discours ne révèlent pas tout dans la brutalité de la forme. Seuls des détails intimes servent d’éléments implicites de langage. Bienvenu Bitom Tjomb renseigne que «la fibre affective du peuple Bassa’a risque contrarier les ambitions du RDPC dans le département». En clair, la menace vient de ce que Cabral Libii est l’un des neveux de Mpondol Ruben Um Nyobe. «Alors, pour faire gagner Paul Biya ici, dit Bienvenu Bitom Tjomb, le RDPC doit procéder à l’effacement du côté partisan de ce symbole ; décloisonner un rituel souvent perçu comme propre aux Bassa’a. Pour y parvenir, le parti doit se débarrasser des faux militants, car « dans les rangs, il y a en qui veulent saboter le parti de l’intérieur».

    André Balla (Stagiaire)

    Pour Akere Muna 

    Le changement, «c’est maintenant !»

    Le leader du « Mouvement Now » a lancé sa campagne électorale par une convention de présentation de son programme, samedi 22 septembre au palais des congrès de Yaoundé. 

     

    Dans la «salle des 1500 places» du palais des congrès de Yaoundé, le show se veut à l’américaine: écran géant, prompteurs, partisans en arrière-plan sur l’estrade, traducteurs pour les malentendants, ballons gonflables et confettis jetés à la fin du discours, etc. Pour le lancement de sa campagne présidentielle doublée de la présentation officielle de son programme, le candidat Akere Muna a vu les choses en grand. «Tout le monde ne peut pas se payer le palais des congrès», commente, plutôt impressionné, un membre du comité central du Rdpc qui sort d’une réunion du parti au pouvoir au quatrième étage.

    Pendant près de sept heures d’horloge, les partisans de l’ancien Bâtonnier «chauffent le public» composé en majorité de jeunes. Ce sont d’ailleurs ces jeunes qui seront les premiers à se succéder sur le podium pour justifier leur soutien au porte-fanion du «Mouvement Now». Suivront ensuite des personnalités, à l’instar de Me Yondo Black, puis des leaders des différentes formations politiques qui ont choisi de rejoindre «La plateforme». Issa Habiba de l’Union des populations du Cameroun (UPC) ou encore Alice Sadio de l’Alliance des forces progressistes (AFP) pensent toutes comme l’assistance : Akere Muna est le seul candidat capable d’apporter «La nouvelle République».

    «7 octobre 2025»

    La vedette du jour arrive alors qu’il est un peu plus de 17 h. «Le moment est venu pour nous de construire un nouveau Cameroun. Le Cameroun mérite mieux. Les Camerounais méritent mieux», déclare l’ancien bâtonnier en justifiant une fois de plus sa candidature. Pendant près d’une heure, Akere Muna va dérouler son programme pour les sept prochaines années. Intitulé «C’est maintenant! Ce que je veux pour le Cameroun», le programme du candidat Akere Muna a trois grands axes : État et politiques étrangères, social, puis économie. Chacun de ses axes est divisé en plusieurs chapitres pour un total de 117 pages.

    En «État et politiques étrangères» par exemple, le candidat propose de «consolider la démocratie constitutionnelle», d’assurer l’efficience de la politique du genre, ou de promouvoir la paix et la démocratie au niveau panafricain. Au plan économique, de la réforme agraire au développement du réseau ferroviaire, en passant par l’économie digitale, le candidat ne fait pas l’économie des promesses. En société, l’ancien président de Transparency international Cameroon promet de venir à bout de la corruption. Un fait qui révèle l’état d’esprit du candidat et de ses partisans : l’écran géant de la salle affichait pour la présidentielle du «7 octobre 2025». Pour Akere Muna, 2018 semble être un acquis…

    André Balla (Stagiaire)

    Tendance 

    Paul Biya, tête à claps et à claques

    En 2018, le président de la République passe, à la fois, à l’encre des plumes vénéneuses et à celle des écrivains militants… en de toile de fond, le scrutin du 07 octobre prochain.

    «Paul Biya». Vraiment âpre, le titre. Au moins avec ça, Oswald Baboké, son auteur, a tout dit en un coffret de deux tomes bilingues. Dans les colonnes de Cameroon Tribune ce 4 septembre 2018, le directeur adjoint du cabinet civil de la présidence de la République revendique simplement sa volonté de révéler l’itinéraire biographique de l’actuel chef de l’État. «Ce n’est pas une trouvaille !» rétorque Laurent Essomé. L’universitaire et critique littéraire camerounais tourne plutôt son regard sur deux référentiels: le temps et l’espace. «C’est concomitant à la période électorale au Cameroun, comme d’autres publications de la même veine d’ailleurs», situe-t-il.

    «La présidentielle aidant, certains parmi nos concitoyens se syndiquent soit pour pondre des livres à la gloire de Paul Biya ; soit pour écrire au vitriol contre son régime. Cela est une tendance», assume Pulchérie Bassega. Pour décrire «la tendance», cette spécialiste du marketing associée à plusieurs maisons d’édition de la place orne son propos de chiffres. «La balance donne une indication de taille. Pour cette année consacrée à l’élection présidentielle, juste quelque deux auteurs sont restés collés à la nuque et aux talons de Paul Biya», évalue-t-elle. Il s’agit, indique Pulchérie Bassega, de «la toute récente production Baboké» et de «2018 Renouveler la confiance à Paul Biya» de Faustin Balla, dédicacé en grande pompe le 26 juillet 2018 à Yaoundé. Accessoirement, notre interlocutrice évoque la nouvelle édition de «Pour le libéralisme communautaire», officiellement écrit par Paul Biya lui-même en 1987, chez Fabre.

    «À travers un jeu de combinaisons sans fin, ces trois livres ne consacrent autre personne que le président de la République, sans autre piment nouveau». En clair, dans le gratin des écrivains militants, tel qu’ils se revendiquent, le discours s’énonce plus dans le travail de la forme, moyennant quelques aménagements esthétiques, aboutissant à trahir le seul souci de présence dans l’espace politique et social du moment.

    Chez ceux qui trempent leur plume dans de l’acide, «ils visent Paul Biya pour empuantir sa campagne, même s’ils l’avouent difficilement», selon le constat de Valéry Foka. De l’avis de ce stratège événementiel, proche du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), «la période de campagne électorale et la sortie de leurs livres au vitriol, tout cela n’est pas anodin». Dans cette mouvance, Pulchérie Bassega estime que «comme ailleurs, ceux qui souscrivent à l’idée que la révolution constitue l’horizon historique de la lutte à mener contre un candidat sortant se créent aussi un espace littéraire». Dans cette palette, l’on retrouve «Urgence d’un Nouveau Pacte Républicain et Social». L’ouvrage récemment commis par l’ancien ministre de la Santé publique Urbain Olanguena Awono et préfacé par Mgr Samuel Kléda, l’archevêque de Douala, passe à la moulinette les années Biya. Titus Edzoa, un autre ex-membre du gouvernement, s’accommode aussi à cela dans «Cameroun, combat pour mon pays», paru cette année aux éditions Duboiris.

    Jean René Meva’a Amougou

     

    Voici pourquoi la coprésidence du Cuppire ad-hoc de l’Aprabmu Cameroun, s’adresse aux neuf candidats à l’élection présidentielle en cours, par la lettre d’invitation du cinq de ce mois 

    (Soit la coprésidence du comité ad-hoc d’urgence patriotique de préservation des Institutions Républicaines de l’Etat du Cameroun, qui émane de l’Association Professionnelle de Ramification d’Actions de Bilinguisme et de Multiculturalisme d’Unification).

    Il est question pour nous, patriotes actifs, de solliciter l’interférence pour notre base-arrière pluridisciplinaire, afin d’assurer la préservation des Institutions républicaines, en ces périodes pré-post élection présidentielle et CAN 2019.
    D’après nos appréhensions patriotiques, les désespoirs et méfiances massifs, exacerbés par le statu quo et l’alternance sans alternative, sont à l’origine des tensions sociales explosives pré-post électorales ; et avec surtout, l’exploitation opportuniste.
    Convaincus que prévenir , vaut mieux que guérir, la crainte de tensions sociales explosives, ne saurait laisser tout patriote indiffèrent. Et la façon rassurante de préservation consiste à faire restaurer immédiatement l’espoir à la majorité de la frange active des populations. D’où cette nécessité impérieuse de constituer la présente base-arrière, d’actions directes-rapides.
    Pour parvenir à la restauration d’espoir immédiat à ladite majorité, il va falloir en aval, programmer la mise sur pied des concepts-plans ASS, d’établissement de l’autosatisfaction tous azimuts par pouvoirs d’achat ; et en amont, ceux de résorption des autres problématiques autodestructrices, telle que celle de la grande et moyenne corruption, par réajustement.

    La principale cause de la criarde insatisfaction du Cameroun et de ses environs étant systémique, l’application des mesures correctives de résorption des effets-causes sociaux, s’avèrent indispensables et prioritaires. Et surtout, celles d’établissement de l’autosatisfaction gageant la croissance économique soutenue-continue et les emplois décents, nécessitant préalablement la reconnaissance et l’adoption du système logique naturel d’inter dépendance saine.

    Cela signifie en d’autres termes, que les systèmes de souveraineté et de libéralisation simpliste, sont devenus inefficaces et périlleux. Parce que à cette ère de l’irréversible mondialisation/globalisation, les technologies de communications et d’information déterritorialisent ou créent l’extraterritorialité.

    Il va sans dire, que c’était cette profonde appréhension qui avait poussé les gouvernants de certaines puissances européennes, à abandonner leurs monnaies de souveraineté. Notre base-arrière soutient mordicus, que ces très fiables monnaies communes FCFA-Euro en amarrage de surcroît, ne déçoivent massivement qu’à cause de non- ramification et du manque de lotissements des inters espaces de création des richesses communes.

    pour faire automatiser et pérenniser l’esprit patriotique de préservation desdites Institutions, les gouvernants de l’Etat du Cameroun et de ses environs, sont priés de faire instaurer les systèmes d’éducation intégrale et intégrée, consistant notamment à institutionnaliser l’interférence éducationnelle inclusive, afin de fusionner et adapter intégrer les systèmes d’éducation/conscientisation-façonnage et d’instruction/enseignement, tout en faisant de l’enseignant et de l’enseignante, l’éducateur et l’éducatrice bis, en traitant comme tel ; mettre l’accent sur l’inter dépendance saine du genre, avec l’intégration professionnelle de la femme.

    Et aussi, faire amener les Organismes spécialisés de L’ONU, à soutenir l’instauration des devoirs universels de l’individu dont les droits constituent automatiquement la contrepartie respective, et de la diplomatie de rapprochement des peuples et de la coopération inter professionnelle de bases, en lieu et place de celle qui anime les relations favorisant les systèmes d’auto destruction et de la corruption, dont notre base-arrière est aussi victime en ce moment, avec forte soupçon de disparition forcée d’un membre.

    Outre son importance capitale dans la préservation des institutions républicaines, la reconnaissance et l’adoption dudit système d’inter dépendance saine, rassure l’établissement de l’autosatisfaction tous azimuts par pouvoirs d’achat, est aussi susceptible de faire temporiser et/ou résorber notamment l’esprit d’égoïsme et d’égocentrisme.

    Et surtout, avec le système d’inter dépendance saine, scellant le multilatéralisme, les secteurs essentiels, les domaines de services stratégiques et le secteur capital et vital comme celui de l’agriculture, feront l’objet de structurations adéquates. Parce que le partage de revenus, en cas d’exploitation, soit institutionnalisé afin de faire assurer la part logique nationale-permanente, de trente pour cent ; contre moins de cinq pour cent, en ce moment.

    Pour ledit secteur capital vital, doit être d’abord reconnu institutionnellement comme celui de la solidarité nationale ; et en suite, il devient semi-marchand, en faisant des vendeurs des produits de grande consommation et de premières nécessités, et de certains concitoyens et sympathisants dévoués, des opérateurs-modérateurs et d’agriculteurs véritables, soit des acteurs socioéconomiques professionnels et spécialisés, avec le soutien étatique et multilatéral multiforme.

    Afin de parvenir à assurer la sécurité et l’autosatisfaction alimentaire tous azimuts, constituant le soubassement du reste des attentes principales, le secteur agricole est à mesure de jouer aussi le rôle de canal des augmentations étatiques spontanées de revenus sans discrimination, à la frange active des populations.

    Et éventuellement, pour atteindre les objectifs de développement conjoint-intégré, multisectoriel-durable, d’ordre économique, social-et environnemental tous azimuts, la culture de l’inter dépendance saine, doit faire l’objet d’incarnation, de la cellule familiale jusqu’à la diplomatie, en passant par toutes les administrations publiques, la société civile organisée, les corps socioprofessionnels.

    Pour la coprésidence garante,
    Antoinette Tangono
    Mebiame Aboubakar KOERE

    Serge Espoir Matomba 

    Un self-made président ! 

    Le jeune entrepreneur veut transformer ses succès en affaires en succès politiques. 

    La silhouette fluette de jeune cadre dynamique, en bras de chemise dans les meetings ou sur les plateaux de télévision. Serge Espoir Matomba est le prototype du jeune leader politique «new generation». Mais ne le comparez surtout pas à Obama, Trudeau ou Macron. «Matomba ne s’inspire de personne. Il fait du Matomba», reprécise fièrement un membre de son équipe de campagne.

    Mais ne l’assimilez pas non plus au «Trump camerounais», car le jeune prodige des affaires ne s’identifie qu’à une seule personne: lui-même. Fier et sûr de lui, Serge Espoir Matomba l’est. Lui qui a en 1997, alors qu’il n’a que 17 ans, met sur pied sa première entreprise, au nom de «l’esprit d’entreprenariat qu’on développe très tôt». A l’en croire, «Mes parents ont été d’un très grands apport là-dessus». «Espoir Lda» est sa première entreprise. «Une entreprise d’étude et de viabilisation des projets» au Portugal, où il est installé. Quelques années plus tard, il monte une autre société, «Tom super qui facilite l’intermédiation des offres des hydrocarbures entre plusieurs entités morales et les Etats».

    C’est à la faveur de la création de cette entreprise, et par le truchement de l’ancien président Kumba Yala (Guinée Bissau), qu’il est présenté à Hugo Chavez, le charismatique président vénézuélien, de regretté mémoire. Hugo Chavez charge Matomba de vendre le pétrole de son pays aux pays européens. «Aujourd’hui je peux compter une dizaine d’entreprises que je possède», vante Serges Espoir Matomba. La plupart de ces entreprises se trouvent hors du Cameroun. Seules trois sont basées à Douala. Des filiales camerounaises de «Tom Super». A Yaoundé, au quartier Olezoa, l’homme d’affaires possède une agence qui propose des services dans les domaines de la vente des billets d’avion, du tourisme et la réservation hôtelière.

    Séduction

    Né le 30 septembre 1979 à Douala, d’un père agent de police et d’une mère au foyer, les parents de Serge Espoir Matomba ne se mêlent pourtant pas de politique. Selon sa biographie officielle, sa mère Naomie Mondj préfère lui parler de la culture Banen dont il est héritier. Emmanuel Didier Baboulek, son père, lui vante ses racines Yingui, dont il est originaire dans le département du Nkam (région du Littoral).

    Installé au Portugal dès 1997, Serge Espoir Matomba a l’âme, les racines et les rêves à plus de 2000 km de là. En 2008, il décide de rentrer au Cameroun. «Lorsqu’on est à l’étranger, on a une grosse difficulté à communiquer avec les siens restés au pays parce que la plupart des communications tournent autour de l’argent. Envoyer de l’argent pour ceci ou pour cela. J’ai eu l’habitude de faire des transferts d’argent vers le Cameroun», développe-t-il. Il poursuit: «Je suis même venu au pays pour apporter mon soutien à certains, sous forme de financements. Après un ou deux ans. Vous vous rendez compte que la personne que vous avez soutenue il y a quelque temps à coups de millions régresse plutôt. Je me suis posé la question: qu’est-ce qui ne marche pas? Vous vous rendez compte après qu’il y a un problème d’environnement», relate-t-il pour justifier son engagement en politique.

    Seulement, en politique, c’est moins la capacité à entreprendre que les aptitudes de séduction qui font recette. Et depuis que l’homme s’est engagé à briguer la magistrature suprême le 7 octobre 2018, l’entrepreneur distant et un tantinet condescendant s’est mué en véritable séducteur politique. Il faut séduire un électorat qui ne le connait que très peu, sinon pas. «Les gens ne le connaissent pas, c’est pour cela que certains le trouvent hautain et distant. Le voyez-vous distant?» tente de défendre René Bonono Bakota, secrétaire national aux relations presse du parti Peuple Uni pour la Rénovation sociale (Purs).

    Conseiller politique

    En 2010, l’homme d’affaires à succès crée le Peuple uni pour la rénovation sociale (Purs). Il en devient le Premier secrétaire. «Le parti est jeune. Ses leaders aussi». Et le Purs entend prôner «la citoyenneté, le dialogue avec la jeunesse, mais surtout […] fait des propositions pour une meilleure perspective d’avenir et une alternance politique, gage d’un meilleur Cameroun», peut-on lire dans les textes fondateurs de cette formation politique. Mais cette migration vers la politique ne va pas sans incompréhensions. «Le projet est mal perçu par son entourage. Ses parents lui demandent pourquoi un jeune chef d’entreprise prodigieux prend le risque de se jeter dans l’arène politique», renseigne sa biographie officielle.

    Serges Espoir Matomba semble toutefois avoir une idée précise de ce qu’il veut. Il rejette les accusations de novice en politique. En 2000, rappelle-t-il, «j’ai compté parmi les conseillers de l’ancien président de Guinée Bissau, Kumba Yala, renversé en 2003 par un coup d’Etat». «Lorsque je parle de politique les gens ont tendance à croire que je me lance par improvisation. J’ai touché du doigt les réalités de la politique. Je sais de quoi je parle. Je sais ce que c’est que l’impact d’une décision politique dans la vie d’un citoyen», se défend-t-il. En 2017, Le Premier secrétaire du Purs décide de se lancer dans la course à Etoudi. Il refuse de s’effacer au profit de Cabral Libii, alors en quête d’un parti politique disposant d’élus locaux pour l’investir. Les négociations entre les deux jeunes leaders politiques échouent et Matomba décide de faire cavalier seul.

    Self made man

    Et lorsqu’il décide de franchir le rubicond, l’homme ne regarde désormais plus la dépense, pour marquer une fois pour toute son entrée en politique. Les rues de la ville de Douala portent encore les souvenirs de ses longues caravanes formées par endroits de rutilantes. Dès 2010, il lance une campagne dénommée «Un jeune, un vote», et une autre sur le thème de la sensibilisation contre le choléra. En 2011, il fait des propositions à Elecam pour favoriser le bon déroulement de l’élection présidentielle d’octobre. A l’occasion, il affirme avoir offert 300 véhicules à l’organisme en charge de l’organisation des scrutins au Cameroun.

    L’un de ses faits d’arme les plus marquants est la grève de la faim en juillet 2014, pour protester contre l’augmentation des prix des hydrocarbures et la signature des Accords de partenariat économique (Ape) avec l’Union européenne. «Je pourrais recommencer aujourd’hui», rassure celui qui convoite pour la première fois le fauteuil présidentiel.

    Devenu conseiller municipal de la marie de Douala 4ème au terme du scrutin législatif et municipal de septembre 2013, Serge Espoir Matomba se garde de toute ambition personnelle. «Je suis un entrepreneur politique […]. Je ne crée pas des entreprises pour devenir riche», clame-t-il. Pour le Cameroun, le jeune homme d’affaires veut «inverser les priorités [et] récréer un autre type de Camerounais». Car, constate-t-il, les «Camerounais ne sont pas assez lucides». L’exercice semble périlleux pour ce «self made man», qui veut éviter d’être à la fois populiste et élitiste.

    Mais la campagne électorale est avant tout une affaire de charme et de promesses. Et Serges Espoir Matomba fait des promesses. Son programme économique et social est une valse de chiffres : création de 5 millions d’emplois en 5 ans ; création d’un million d’entreprises en 5 ans ; accompagnement des entreprises à hauteur de 100 milliards Fcfa par an ; organisation des états généraux des finances pour dégager 4000 milliards Fcfa ; 1200 milliards Fcfa prélevés pour le système éducatif ; 100 milliards Fcfa de dotation annuelle pour l’enseignement supérieur, etc.

    Eloigné depuis cinq ans de la gestion de ses entreprises, il croit en «sa responsabilité sur le Cameroun» et entend bien devenir, après le scrutin du 7 octobre 2018, le troisième président de l’histoire du Cameroun.

    Ifeli Amara 

    Le candidat et l’intégration 

    Repositionner le Cameroun dans le monde 

    Sur le plan diplomatique, Le Premier secrétaire du Purs entend mener une « diplomatie offensive et dynamique visant la contribution au développement économique (la production à travers l’industrialisation), la projection à l’extérieur de l’identité et les valeurs portées par le Cameroun ».

    Au niveau de la sous-région Afrique centrale, Serges Espoir Matomba fait un procès sans complaisance de la Cemac. Il reconnait cependant que l’institution sous – régionale a quelques « points positifs » et dispose d’une « technostructure qui fonctionne ». A l’en croire, la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale « souffre de plusieurs maux qui plombent son opérationnalisation ». Notamment, la libre circulation des personnes et des biens transformée par les Etats ; la « liberté de séjour » ; les égos surdimensionnés des chefs d’Etat; l’absence de capitalisation et de l’action du statut de leader du Cameroun ; l’absence de gouvernance de qualité dans le fonctionnement des structures de la Cemac…

    Le Purs projette par conséquent la « diplomatie offensive qui permettra au Cameroun de jouer son rôle de leader et de locomotive de la sous-région ». Le gouvernement du Purs ambitionne par ailleurs de sortir du Fcfa au bout de « deux ans ». Serge Espoir Matomba trouve la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (Ceeac) encore moins viable que la Cemac. Il compte actionner ses leviers de développement pour profiter d’un marché plus étendu.

    AO

    Bio-Express

    Nom: Serge Espoir Matomba

    Age : 39 ans
    Expérience professionnelle: Homme d’affaires, Pdg des entreprises «Tom super» spécialisées dans l’intermédiation pétrolière. Promoteur de nombreuses autres entreprises dans divers services.
    Parcours politique: 2010, Fondateur et Premier secrétaire du parti politique «Purs». Conseiller municipal à la marie de Douala 4ème.
    Niveau académique : maitrise en sciences économiques
    Situation matrimoniale: Marié et père de plusieurs enfants.
    Traits particuliers: Parle six langues, dont le portugais.

     

  • Couvre-feu : Bamenda, la vie en 12 heures…

    Couvre-feu : Bamenda, la vie en 12 heures…

    Le durcissement de la restriction des mouvements des biens et des personnes, désormais autorisé seulement entre 6 et 18 heures, crée une ville fantôme de fait. Tranches de vie.

    Bamenda se vide au jour le jour

    Bamenda, capitale régionale du Nord-ouest, ce jeudi 13 septembre 2018. Il est environ 17h. Le portail du marché central de la ville vient de fermer. Au pas de course, chacun essaie de regagner son domicile avant 18 heures. Initialement fixé à 21 heures, c’est désormais à cette heure que débute le couvre-feu selon une décision d’Adolphe Lele Lafrique Deben Tchoffo, gouverneur de la région, prise le 9 septembre 2018.

    En fait, cette décision renforce le couvre-feu en vigueur dans la région. Lequel passe de 21h à 5h à 18h à 6h du matin. La veille, des hommes armés ont coupé la ville pendant des heures du reste du pays en creusant une tranchée sur la chaussée sur la nationale N°6 au niveau d’Akum. Les assaillants dont certains brandissaient le drapeau de l’Ambazonie, s’en sont également pris à des bus de transport, tuant un chauffeur et faisant de nombreux otages.

    Soudain, le ciel s’assombrit et une forte averse dégringole, poussant la majorité des personnes à s’agglutiner quelques parts. C’est la même situation du côté du marché des vivres et même au marché de Nkwen. Les plus téméraires foncent dans la pluie afin d’arriver chez eux avant l’heure H. Tout le monde n’y réussira pas.

    Ville fantôme

    Au lieudit Mile 4 Junction, il est 18h13mn, des gouttelettes de pluies tombent encore après l’orage qui vient de s’achever. L’on observe encore des mouvements de personnes et de véhicule. Sur ces entrefaites, les pandores de la brigade de recherche de Mile 4 envahissent la route et tirent de façon continue en l’air. Un moyen dissuasif pour pousser les retardataires encore dans la rue à retourner à la maison. C’est la débande totale, chacun prend ses pieds à son cou. En un laps de temps la rue se vide. La ville fantôme prend droit de cité.

    En cette période de couvre-feu, les mouvements des véhicules et des personnes sont prohibés. Le lieutenant-colonel Edgar David Petatoa Poufong, commandant du 50e groupement des sapeurs-pompiers annonce la disponibilité de ses services à venir à la rescousse des personnes en détresse. «Si quelqu’un est malade, si une femme enceinte est en travail, si quelqu’un a un AVC, s’il y a un incendie déclaré, s’il y a un accident, il faut appeler le 118, se présenter, donner son numéro de téléphone, décrire la nature du problème afin que nous prenons des dispositions pour lui apporter l’assistance adéquate une fois sur le terrain». Toutefois, il met en garde contre les appels fantaisistes.

    Abus

    La veille, au check point de mile 4, Michael Ngwa, un taximan est surpris par le couvre-feu. «J’ai pris des passagers de Bambui pour Bamenda hier (mercredi dernier Ndlr). Je suis arrivé à Mile 4 à 18h 02mn alors que des gendarmes venaient à peine de s’installer au poste de contrôle. Ils m’ont interpellé. Chaque passager dans mon véhicule était obligé de négocier sa libération avec un billet de 1000 F et moi j’ai dû payer 2000 F», raconte-t-il. Une attitude que réprimande le général de Brigade Agha Robinson Ndong, commandant de la 5e région militaire interarmées (RMIA). Le haut-gradé avise notamment: «tous ceux qui sont coupables d’exaction, d’arnaque sont punis et extirpés de la région du Nord-ouest. Le haut commandement ne cautionne pas des attitudes déviantes». Il ajoute «sur instruction du haut commandement, nous avons à notre niveau, conseillé à nos éléments déployés sur le terrain d’être amical, proche des populations. De ne pas extorquer, nuire les populations, de les accompagner dans leurs activités quotidiennes».

    Muma Peter, un autre taximan a manqué de juste d’être parmi les premières victimes de cette mesure de l’autorité administrative: «je rentrais de Bambili pour la ville de Bamenda le 9 septembre. J’ai eu une crevaison au niveau de la pharmacie Andreg à Mile 4 Nkwen. Il était 17h45mn. Pendant que je remplaçais la roue, j’ai vu des gens courir et j’ai demandé ce qui se passait. C’est alors que l’un m’a demandé tu n’es pas au courant? J’étais perplexe et ne comprenais rien. C’est alors que j’ai reçu un coup de fils de mon voisin m’informant de l’arrêté du gouverneur prohibant la circulation à partir de 18h. J’étais obligé de garer mon véhicule à la station-service et regagner à pas de course mon domicile».

    Impact économique

    Du fait de ce couvre-feu, l’activité économique déjà fortement perturbée par l’insécurité a pris un nouveau coup. «C’est généralement à partir de 18h que je commençais à recevoir des clients parce qu’en journée chacun est occupé. Je ne fais plus de recette. Avant quand le couvre-feu débutait à 21h, je pouvais en moins de 2h de temps faire une recette de 50 mille francs. Voilà qu’aujourd’hui je ne peux même pas avoir 5 mille. Je risque faire banqueroute. Je me demande comment vais-je faire pour rembourser le prêt contracté auprès d’un établissement de micro-finance», s’inquiète Rayim Kemegni, gérant de débit de boissons au lieu-dit City-Chemist Round-about. Les propriétaires des lieux ludiques sont dans la même situation.

    Autrefois, une ville bouillonnante dans la nuit, avec ses cabarets, bars, night-clubs et autre points chauds dont le coin de débauche par excellence Mobil Nkwen, Bamenda est aujourd’hui à l’image d’un cimetière. A partir de 18h, les flonflons de véhicules et motos se taisent. Les haut-parleurs des églises réveillées et autres baffles de sonorités cèdent la place à un silence de mort. Même dans les chaumières, les volumes des écrans téléviseurs sont réduits au minimum, s’ils ne sont simplement pas éteins. Chacun est sur le qui-vive. Certains vont au lit très tôt. «Je dors moins de 5h de temps chaque nuit parce qu’on se sait jamais par où le danger peut venir» lâche Willibroad Vedzenyuy pour qui «si je suis encore à Bamenda, c’est parce que je n’ai pas de relation dans une autre région». Michel Taboula ne dit pas autre chose «c’est mon emploi qui me retient encore ici. J’ai envoyé les enfants poursuivre leur éducation à Bafoussam, Douala et Yaoundé».

    Vague d’exode

    Après la journée de ville morte observée lundi 10 septembre, les agences de voyage de transport interurbain faisant la ligne Bamenda- Bafoussam, Douala et Yaoundé sont submergées. Ce qui a fait dire à un observateur averti que le degré d’exode à Bamenda est supérieur à celui contenu dans le livre d’exode dans la bible. Dans l’une de ces agences visitées jeudi matin autour de 11h, l’un des responsables qui a requis l’anonymat nous fait dire qu’une dizaine de bus sont déjà partis mais les passagers ne font qu’affluer. «Nous sommes débordés, nous leur expliquons qu’il n’ya plus de bus mais ils ne veulent pas entendre. Certains ont même passé la nuit à l’agence afin de s’acheter un ticket tôt ce matin» laisse-t-il entendre.

    Du coup le prix des tickets de transport entre Bamenda et Yaoundé ou encore Bamenda et Douala a été revu à la hausse. Il faut débourser entre 8 et 10 mille francs CFA désormais, loin des 5600 et 5000 exigés en temps normal. A finance Junction, les transporteurs individuels exigent 4 à 5 mille francs aux passagers en partance pour Bafoussam. Or le prix homologué est de 1500 francs. Ici les passagers se bousculent lorsqu’un véhicule en provenance de Bafoussam gare. Les responsables d’agence justifient cette augmentation par le fait que les bus reviennent vides de Douala, Yaoundé, Bafoussam. Par conséquent, l’additif vise à compenser le carburant utilisé sur ce trajet retour.

    Ce flux de la population qui quitte Bamenda a caracolé avec la sortie des leaders séparatistes dont Ivo Tapang Tanku sur les réseaux sociaux. Ce dernier enjoint à population du Nord-ouest et singulièrement celle de Bamenda de se terrer à domicile du 16 septembre au 10 octobre. Il affirme que ses éléments vont empêcher toute entrée de véhicule dans la région du Nord-ouest à partir du péage de Matazen par Santa pendant la période indiquée. Ceci afin de bloquer les charters de vote et partant, empêcher le déroulement de la présidentielle dans la région.

    Zéphirin Fotso Kamga à Bamenda