Sanctions des États-Unis contre le Cameroun : De la matière pour raconter une histoire
Au pays de l’Oncle Sam, depuis des années on marche avec la menace en bandoulière contre Yaoundé. Évocation.
Coup de théâtre à Genève le 19 juin 2018. Ce jour-là, les États-Unis décident de se retirer du Conseil des droits de l’homme de l’ONU (Organisation des Nations unies). Repris par l’Agence France Presse (AFP), Nikki Haley, l’ambassadeur de Washington auprès de l’instance planétaire, justifie: «nous prenons cette mesure parce que notre engagement ne nous permet pas de continuer à faire partie d’une organisation hypocrite et servant ses propres intérêts, qui fait des droits de l’homme un sujet de moquerie (…)Les pays (membres) se sont entendus pour saper la méthode actuelle de sélection des membres». «Depuis lors, commente l’internationaliste Daniel Nkomba, tous les pays se trouvant dans leur viseur subissent une fronde sans précédent des États-Unis».
Parmi ces pays se trouve le Cameroun qui, lors d’un scrutin organisé à Genève le 12 octobre de la même année, obtient une place au sein du Conseil des droits de l’homme de l’Assemblée générale de l’ONU. Entre temps, plus question pour Washington de se retenir. Au menu, quelques mots cinglants de Peter Henry Barlerin. Au sortir d’une audience avec Paul Biya le 17 mai 2018, l’ambassadeur des États-Unis critique l’armée camerounaise de commettre «des assassinats ciblés dans les régions anglophones du Cameroun».
Résultat, la question n’est plus de savoir si contre Yaoundé, la Maison Blanche et le Capitole vont faire machine arrière. «Nous ne prenons pas ces mesures à la légère, mais nous ne nous déroberons pas s’il fallait diminuer encore davantage notre aide à la lumière de l’évolution de la situation. Nous ne travaillerons qu’avec ceux qui prendront des engagements forts en matière de bonne gouvernance, parce que c’est le seul moyen de conforter la sécurité et le développement économique des populations. Nous n’apporterons notre soutien qu’à ceux qui mettront en place un cadre juridique et institutionnel respectueux de l’État de droit», avait prévenu Cyril Sartor, alors directeur Afrique du Conseil américain de sécurité nationale cité par AFP en juin 2018.
L’ambiance avait fait ressortir un long fil conducteur permanent: affaiblissement des contre-pouvoirs, embastillement d’opposants, exécutions extrajudiciaires, utilisation de la force contre des civils et des manifestants non violents, pressions sur la presse, les organisations de la société civile et de défense des droits de l’homme, élections truquées et accusations de corruption. Pour Washington, le tout est bon pour activer les mécanismes de sanctions. Successivement, les États-Unis ont retiré leurs soldats du front de la lutte contre Boko Haram, la livraison des pièces détachées pour les avions de transport militaire C-130 appartenant à la flotte camerounaise, ainsi que la livraison de quatre bateaux de patrouille, de neuf véhicules blindés et d’un système radar. Ils ont aussi retiré leur proposition faite aux forces camerounaises de défense d’être candidates à un programme américain de formation. Plus récemment, ils ont fait valoir la suspension du Cameroun de l’Agoa (African Growth Opportunities Act).
Dans ce tableau porté par l’activisme de certains parlementaires américains tels que Dick Durbin et Karen Bass, une certaine opinion complète le casting par quelques ONG en embuscade (Transparency International, d’International Crisis Group, Human Rigths Watch et autre Open Society in West Africa).
Jean-René Meva’a Amougou
Aux États-Unis, les journalistes politiques utilisent souvent l’expression «blood smell» comme pour mieux dire que lorsqu’on sent l’odeur du sang de son adversaire blessé, l’envie est forte de l’achever. Après avoir longtemps pilonné Yaoundé, Washington a, il y a quelques jours, laissé entendre que le retrait du Cameroun
de la liste des bénéficiaires
de l’AGOA n’était plus tabou. Aux yeux des observateurs, l’affaire n’est pas seulement embarrassante, elle est très compliquée. À partir de leurs scalpels, les uns et les autres décrivent l’axe Yaoundé-Washington, devenu incandescent. De chaque côté, communiqués, annonces et répliques reflétant les colères coagulées, ont parfois fait le lit d’une surenchère permanente. D’un côté, des mots violents dans la bouche d’un homme qui maîtrise la portée de ce qu’il dit. De l’autre, un pays, touché par chaque pique, s’engouffre dans la brèche pour réclamer le respect de sa souveraineté. Ici comme là-bas se lisent des tempéraments volcaniques.
Bref, le clash est officiellement acté entre Etoudi et la Maison Blanche.Si ce problème interpelle autant, c’est qu’il oppose deux façons de voir les relations internationales. En matière de droits de l’homme par exemple, peu d’atomes crochus entre le Cameroun et les États-Unis. Chez l’Oncle Sam, des convictions se sont forgées, impliquant des décisions très profondes contre le Cameroun. À l’inverse, le régime de Yaoundé expose (à chaque fois) en quelques phrases brillantesla situation sociopolitique. Il parle de dénonciations sans preuve, prolongées dans une obsédante campagne de dénigrement médiatique du pays de Paul Biya. En embuscade, une partie du personnel politique de l’opposition se réjouit de disposer d’«allié» capable
de détruire le personnage que le locataire d’Etoudi s’était construit auprès de ses compatriotes. En embuscade aussi, des ONG et des groupuscules hyper actifs sur les réseaux sociaux dessinent le même projet. Telle est la situation que votre journal tente d’éclairer.
Rhétoriques sans entraves
Pour reverdir son image, Yaoundé a une idée: inviter officiellement le Haut-commissariat aux droits de l’Homme à enquêter sur son territoire. Après avoir longtemps été rétif à cette option, Paul Biya, qui signe l’invitation, la trouve bien commode et capable de détourner les oreilles sur ce que disent les États-Unis. Aux yeux des observateurs, c’est une brillante manœuvre diplomatique conçue sur une transparence proclamée. Pour René Emmanuel Sadi, le ministre de la Communication (Mincom), la politique gouvernementale en matière de droits de l’homme est particulièrement ¬lisible; les priorités sont affichées. Le pays a certes des fragilités, mais il y a des initiatives créatives. Alors, «le Cameroun n’a rien à cacher et est malicieusement accablé pour des desseins que nous soupçonnons tous», affirme le Mincom au cours d’une conférence de presse à Yaoundé.
Dans sa démarche, Etoudi bâtit une solidarité active pour brouiller les signaux américains sur le sujet. L’équation communication = conviction est largement instrumentalisée pour créer une ambiance patriotique. «Cela a été mis en œuvre depuis Niels Marquardt et Frances Dee Cook», croit savoir le politologue Njoya Moussa. Au cours d’une conférence de presse donnée à Yaoundé en janvier 2006, le premier (ambassadeur des États-Unis au Cameroun 2004-2006) avait clairement montré son indignation autour de la gestion locale des droits de l’homme et de la lutte contre la corruption. «Les actes de corruption sont devenus si communs et si banals que certains observateurs se demandent si le sens du mot “corruption” a une connotation différente au Cameroun», faisait-il alors remarquer.
Surnommée «ambassadrice de choc» (1989-1993), la seconde était devenue le symbole de la critique des actes des autorités camerounaises. Conquis par la façon de la diplomate de faire monter l’angoisse et jouer sur les peurs primales des dirigeants de son pays hôte, certains la regardaient comme une épine dans la chaussure du Cameroun. Quelques analystes pensent que le sommet est venu de la bouche de Peter Barlerin, appelant Paul Biya, à la veille de la récente élection présidentielle, à «penser à son héritage et à la façon dont il souhaite que les livres d’histoire, qui seront lus par les générations futures, se souviennent de lui».
Cette histoire d’État unitaire ne nous apportera que malheur et misère!
Qu’il est loin, le temps où de pseudo-patriotes plastronnaient, affirmant que le problème anglophone était une affaire interne qui n’allait susciter aucune ingérence!
Maintenant, les Américains menacent de nous exclure de l’AGOA. Comme d’habitude, les mêmes pseudo-patriotes aboient, qui annonçant que l’impact sera résiduel, qui d’autre évoquant la Chine et la Russie qui viendraient nous protéger, etc.
Certains se frappent même le torse, affirmant qu’ils vont se battre!
Une frange affirme que la position américaine manifeste leur soutien aux sécessionnistes. Même si c’était vrai, le dire résout quel problème? Aucun! Et vous allez vous plaindre des USA auprès de qui? Ils sont derrière les sécessionnistes, et alors?
Vous allez faire quoi?
On vous a dit d’abandonner cette folie de l’État unitaire, pour rentrer à la Fédération de 1961 éventuellement rénovée, afin d’assécher l’argumentaire de la sécession dont la ligne de raisonnement est claire: «Nous sommes venus librement au Cameroun francophone, sur la base d’un modèle fédéral à deux États dont un pour nous, un autre pour eux, le tout coiffé par un État fédéral aux avantages partagés. Mais les Francophones ont supprimé notre État pour nous absorber. Et cela nous ne l’accepterons jamais».
Au lieu d’écouter la voix du bon sens et de rentrer sagement à la Fédération de 1961, les pseudo-patriotes s’arcboutent dans leurs lubies, incapables de comprendre que nous ne pouvons pas gagner cette cause.
Car, il faut le dire très clairement, la cause des Anglophones relève du bon sens et du droit des peuples à choisir leur destin, alors que celle de l’État unitaire relève d’un simple choix idéologique, une alternative à d’autres choix. Notre cause est donc par nature perdue! Nous ne pouvons pas gagner cette guerre! Nous sommes en train de la perdre!
Et qu’on le veuille ou pas, la position américaine est un coup de semonce, qui sera très probablement suivie par des actions encore plus dures si une solution satisfaisante n’est pas trouvée au problème anglophone!
Ne nous méprenons pas sur la capacité du Cameroun à résister aux pressions américaines, car en ce qui concerne le Cameroun, il s’agit bien de prise en charge d’une économie sinistrée!
Les USA et leurs alliés contrôlent le FMI et la Banque mondiale sans lesquels nous n’aurions même plus nos salaires! Or, il suffit que les Américains demandent à la Banque mondiale et au FMI d’abandonner le Cameroun, pour que notre pays s’écroule en un instant!
Et ni la Chine ni la Russie ne peuvent rien face à cette situation! La Chine est encore au niveau des conquêtes des espaces économiques, mais elle n’a pas encore les moyens de prendre en charge le déficit extérieur des pays que son modèle consiste d’ailleurs à creuser!
Ces puissances émergentes ont tenté de créer une sorte de substitut à la Banque mondiale. Qu’est-ce que cela a donné? Rien du tout!
Ne croyez pas à la Chine ou à la Russie pour espérer maintenir votre État unitaire en résistant aux États-Unis! Ces pays auront trop à perdre en s’opposant aux USA pour le Cameroun qui n’est pas stratégique pour eux!
Ils vont laisser faire!
Rentrons à la Fédération! Asséchons l’argumentaire de la sécession, car elle ne désarmera pas, et sa cause sera de plus en plus entendue. Nous ne tirerons rien de bon de cet entêtement de mule, de cette totémisation de l’État unitaire qui ne nous apportera que malheur, échec et désespoir.
Dieudonné ESSOMBA