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Pour une bonne gouvernance foncière : Prêche œcuménique contre l’esprit des lois

Dans un document qu’elles viennent de remettre au Gouvernement, les communautés de foi du Cameroun pointent des ambiguïtés du dispositif réglementaire portant sur la gestion des terres à travers le pays.

Photo de famille des dignitaires des communautés de foi après la présentation du document

Vendredi 25 novembre 2022, deux images jouées des coudes au siège de la Conférence épiscopale nationale du Cameroun (CENC) à Yaoundé. Sur la première, les dignitaires catholiques, musulmans et protestants se fondent sur la Bible et le Coran pour présenter les fondements de la foi relatifs au foncier. Sur la seconde, un document d’une vingtaine de pages que les uns et les autres dévorent d’un trait. Selon Mgr Andrew Nkea, «c’est la modeste contribution des catholiques, protestants et musulmans sur la réalité du vécu quotidien de la gouvernance foncière actuelle au Cameroun». À sa suite, il y a l’argument de l’imam Ngapna Mouhamed (1er vice-président du Conseil supérieur islamique du Cameroun, CSIC) qui énonce que «depuis toujours, en matière foncière au Cameroun, ce sont les textes en vigueur qui font problème». «Il est temps que le gouvernement procède à leur transfiguration», appuie le président de la CENC. Pour le révérend Hamadou Saidou (représentant du président du Conseil des Églises protestantes du Cameroun, CEPCA), « il est urgent que l’on mette en place un dispositif réglementaire moderne et inclusif ».

Dysfonctionnements
Forts de cela, chrétiens, musulmans et protestants présentent un document qui fustige notamment l’esprit des lois sur la mise en valeur des terres, la sécurité foncière, la procédure d’attribution du titre foncier, les mécanismes d’expropriation pour cause d ‘utilité publique et la procédure d’immatriculation. À tour de rôle, les prélats pointent quelques dysfonctionnements. Pour sa part, Mgr Andrew Nkea s’emporte contre le texte relatif à la mise en valeur. Ce dernier, fait observer l’archevêque de Bamenda, exclut tous les jeunes nés après 1974 et les peuples autochtones et porte gravement atteinte aux valeurs de justice, d’équité, de paix et de solidarité.

De son côté, l’imam Ngapna Mouhamed insiste sur l’article 2 du décret N° 2005/481 du 16 décembre 2005 modifiant et complétant les dispositions du décret N° 16/165 du 27 avril 1976. Aux yeux du dignitaire musulman, « ce texte expose les citoyens à une insécurité ». « Car, poursuit-il, à quoi sert-il d’être titulaire d’un titre foncier qui peut être retiré bien qu’on dise qu’il est inattaquable, intangible et définitif ? » « L’ambiguïté de la loi sur la procédure d’attribution du titre foncier au Cameroun, sur le plan pratique, à propos des interprétations diverses », postule pour le révérend Hamadou Saidou. « Ici et là, des citoyens sont déguerpis sans déclaration d’utilité publique et en plus, le décret du Premier ministre N° 2003/418/PM du 25 février 2003 portant modification des tarifs des indemnités à verser au propriétaire ne tient pas compte de la valeur actuelle des biens ; il y a un non-respect des limitations de superficie requises par la réglementation tant pour les immatriculations directes que pour les concessions et baux», déplore-t-il. Sa Majesté Jean Marie Bendegue (inspecteur général au ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières), à qui le document est remis, dit le «transmettre à qui de droit».

Vieille lune
En 2011, lors du Comice agro-pastoral d’Ebolawa, le président Paul Biya avait annoncé une réforme foncière en vue d’une meilleure optimisation de la gestion du potentiel foncier du Cameroun. À ce jour, la réforme n’a pas toujours abouti. Entre temps, les conflits fonciers se répètent à s’amplifier entre les particuliers, entre les communautés ou des villages, entre les catégories socioprofessionnelles, autochtones et allogènes.

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