Étudiants équato-guinéens au Cameroun: programmés pour un retour au bercail
Quand un Équato-Guinéen vient faire ses études au Cameroun, il sait qu’un emploi bien rémunéré l’attend chez lui. Bien plus, il sait que son statut va changer. Celui-ci est au minimum celui de cadre. Parce que bon nombre sont des cadres supérieurs et en quelques mois. Et passée cette étape, ils sont promus sous-directeurs, voire directeurs. Du coup, le comportement de ces derniers au Cameroun est très rigoureux. Bref, ils savent qu’ils sont en mission, alors pas d’excès, pas de grosse tête, ils sont focalisés sur la formation. «Un de nos compatriotes qui vient jouer au Cameroun est un mauvais soldat. Et quand nous constatons qu’un des nôtres s’égare, on le sanctionne dans un premier temps. Si ça continue, on fait appel à l’ambassade», assume Raymond Edu, président national des étudiants équato-guinéens de Yaoundé et du Cameroun.
Dans ce petit État (par la taille) d’Afrique centrale, l’offre d’emploi suffit largement aux enfants du pays. Bien plus, l’État met des moyens afin que la quasi exclusivité dans les secteurs secondaire et tertiaire leurs soit réservée de droit: ce que traduit bien la formule «l’Équato-Guinéen d’abord».
Pédro est étudiant en comptabilité à l’Institut supérieur Siantou de Yaoundé dans le 4e arrondissement. Il affirme sans détour que tous ses compatriotes une fois rentrés au pays, trouvent un très bon travail. «Tous les étudiants qui rentrent trouvent le travail, ça je t’assure. Moi-même je serais cadre à mon arrivée», s’exprime le jeune homme devant ses camarades camerounais.
C’est donc une question de temps pour ces étudiants venus étudier au Cameroun. Pour bon nombre, avant même de prendre la route pour le pays voisin, un job est déjà réservé pour eux. De telle sorte qu’ils font des études avec des profils bien définis. «Quand nous venons étudier au Cameroun, des contacts ou des opportunités au sein des entreprises et dans la fonction publique nous sont présentés.
Choix du Cameroun
Selon Raymond Edu, président national des étudiants équato-guinéens du Cameroun, le choix du Cameroun se situe à deux niveaux. Le premier est lié à la langue. Pour les Équato-Guinéens, c’est le bilinguisme et surtout la langue anglaise qui les amènent à étudier au Cameroun. Ils jettent beaucoup plus leur dévolu sur les études en anglais. Et selon leurs statistiques, «90% passaient d’abord en zone anglophone du Nord-Ouest et du Sud-Ouest avant de gagner Yaoundé. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, à cause de l’insécurité», indique notre interlocuteur. «Moi qui vous parle, poursuit ce dernier, j’ai fait un an à Bamenda avant de venir ici à Siantou».
Pour dire vrai, c’est le système anglo-saxon qui les attire au Cameroun. Dans les instituts universitaires privés où on les retrouve, c’est la section anglophone qu’ils choisissent à plus de 90%. À l’origine de ce choix bien mûri, il y a le fait que les entreprises se trouvant sur le sol équato-guinéen communiquent principalement en anglais. «C’est l’anglais qui commande le monde et le Cameroun est le seul pays de la Cemac qui a pour langue officielle l’anglais.
C’est l’une des raisons pour lesquelles nous venons étudier ici», ajoute Constantia Owono, étudiante équato-guinéenne à l’Institut Siantou. Cet institut présente d’ailleurs la particularité d’avoir le plus grand nombre d’étudiants de ce pays voisin. Ceux qui étudient dans le système francophone sont pour la plupart des boursiers d’Etat. Parmi eux, on retrouve les étudiants de l’Institut sous-régional de la statistique et de l’économie appliquée (ISSEA), l’Institut international d’assurance (IIA) et ceux qui étudient à l’Université de Ngaoundéré. Le constat fait ici est que ces derniers font des études beaucoup plus professionnelles. On ne les trouve presque pas dans les facultés. Les Universités de Yaoundé 1 et 2 ne les intéressent presque pas. On va les retrouver dans les écoles professionnelles comme Matenfen, Siantou, Iftic-Sup et la liste n’est pas exhaustive.
Le deuxième niveau de compréhension du choix des étudiants équato-guinéens est lié à la proximité géographique. Il est plus facile pour un Équato-Guinéen de s’adapter au Cameroun grâce aux langues locales similaires aux leurs. En plus, les parents n’ayant pas assez de moyens pour envoyer les enfants dans les pays en Occident, trouvent que le Cameroun est mieux. Ce d’autant plus que le Cameroun jouit d’une certaine notoriété en termes d’intellect dans la sous-région. Leur zone de résidence préférée est comprise entre Mvog-Mbi, Coron, Ayéné et Mvan dans l’arrondissement de Yaoundé 4e. Une proximité qui permet selon les dires d’Ondo Nguema, lui aussi étudiant à l’Institut universitaire Siantou, «d’être en permanence en contact». En cas de problème, l’intervention familiale peut surgir. Il n’est pas rare de voir des parents venir savoir comment les choses se passent au Cameroun.
André Gromyko Balla