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Au commencement d’une nouvelle ère de développement

Les changements adoptés au sein de la Banque mondiale engagent le Cameroun à un changement de paradigmes dans la conception et la réalisation des programmes et projets proposés aux financements de cette instance.

 

L’augmentation de la fréquence et de l’intensité des crises sous-tend la nouvelle vision du Groupe de la Banque mondiale. Les autres facteurs énoncés par l’institution de Bretton Woods sont liés à la montée de la fragilité, aux changements climatiques, ainsi qu’à une précarité alimentaire grandissante. En conséquence de cela, la BM «cherche désormais la célérité dans la réalisation, l’efficacité et l’impact des programmes», déclarait lundi dernier Ousmane Diagana, en présence du ministre camerounais de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey.

La nouvelle donne de la Banque mondiale s’accompagne de changements dans son mode opératoire. Notamment en matière de mobilisation des fonds. L’institution a de ce fait mis sur pied un scenario qui consiste à «renforcer les garanties accordées par les actionnaires de la Banque mondiale afin d’encourager les financements; mobiliser des capitaux hybrides auprès des actionnaires et d’autres partenaires de développement; avancer le chantier du Mécanisme de gestion des crises de l’IDA (un outil qui aboutira à plus de financement concessionnel aux pays les plus pauvres)», renseigne-t-elle dans une note.

Ce qui change
En des termes propres au vice-président, les principales innovations attendues en termes d’octroi de financements portent sur la nécessité de bien «identifier les réformes clés, s’assurer que ces réformes sont bien mises en œuvre pour que, par la suite les investissements puissent être faits. C’est moins le type d’investissement que le projet va financer par la capacité à créer des conditions pour des investissements plus structurants soutenus par le secteur privé».

La Banque mondiale change d’approche en ce qui concerne sa définition de la lutte contre les changements climatiques. La nouvelle vision est contenue dans son Plan d’action sur le changement climatique 2021-2025. Lequel consacre le passage d’une approche «de projets verts à des économies vertes dans leur entièreté». L’institution poursuit sa politique de financement des déficits budgétaires. Elle planche toutefois sur des mesures d’allègement de la dette, en faveur notamment des pays en voie de développement.

Louise Nsana

 

Une histoire en pleine évolution

La Banque mondiale change à nouveau de vision. Celle-ci n’a cessé de muer depuis la création de l’institution en 1944 sous le nom de Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD). C’est tout dire sur le cahier de charges d’antan de cet organisme: aider à la reconstruction des pays dévastés par la seconde guerre mondiale. L’institution recentre plus tard sa mission sur le développement avec un accent mis sur les infrastructures. Puis en 1960, avec la création de l’Association internationale de développement (IDA), la Banque prend un nouveau virage. Elle marque un intérêt plus accru aux pays les plus pauvres du monde et se fixe pour objectif de réduire la pauvreté. Le fil d’Ariane de cette mission est définie dans sa vision de 2012: «Mettre fin à l’extrême-pauvreté et promouvoir une prospérité partagée». L’ambition ici était entre autres, de ramener l’extrême pauvreté à un taux de 3%.

L’histoire ne s’arrête pas là pour la Banque mondiale. Elle cherche désormais des solutions aux crises qui ont freiné l’élan du développement ces dernières années. C’est le fil conducteur de la nouvelle vision entrée en vigueur à Marrakech à l’occasion des Assemblées annuelles d’octobre 2023. La Banque mondiale veut désormais «mettre fin à la pauvreté sur une planète vivable». Cela passe par une réforme de ses propres modalités de fonctionnement afin de renforcer son impact sur le développement. Ousmane Diagana, vice-président de l’institution pour l’Afrique de l’ouest et du centre, s’est fait le canal de communication pour la promotion de cette vision au Cameroun du 20 au 28 novembre. «La Banque mondiale doit être meilleure, elle doit être plus forte. Elle doit être plus pertinente dans sa façon de produire, qu’elle soit plus puissante sur le plan financier et qu’elle puisse répondre avec des financements suffisants aux différentes requêtes soumises par les clients et les partenaires», a-t-il déclaré lundi dernier à Yaoundé, à l’entame de sa visite de travail. Son séjour en terre camerounaise fait office d’école pour les autorités camerounaises qui en apprennent plus sur les moyens de tirer au mieux profit de cette nouvelle opportunité.

Louise Nsana

 

 

Lutte contre le changement climatique 

Passage obligatoire pour le Cameroun

La cause constitue désormais un critère déterminant dans la sélection des projets et programmes que l’institution financera.

 

Le Cameroun peut tirer un meilleur parti du nouveau modèle stratégique de la BM. Il doit pour cela intégrer la lutte contre le changement climatique dans les projets et programmes proposés au financement de ce bailleur de fonds. Les contours de cette exigence sont contenus dans le Rapport national sur le climat et le développement 2022 de la Banque mondiale courant 2022. Celui-ci stipule que «le Cameroun est confronté au défi de changer le modèle de développement actuel de manière à créer des opportunités pour renforcer la résilience et positionner le pays sur une trajectoire de développement plus dynamique». Il constate que «les riches écosystèmes camerounais n’ont pas amené la richesse économique, et se trouvent menacés par le changement climatique et des pratiques non durables». Actuellement, Plus de 1,5 million d’hectares de forêts ont été dévastés entre 2001 et 2020. Ce qui occasionne des troubles de température, de pluviométrie et la sécheresse. Et expose 2 millions de personnes à la pauvreté et à la famine. Certaines régions comme l’Extrême-Nord subissent davantage les affres des chocs climatiques. Ce qui entraîne régulièrement des conflits autour de l’exploitation des ressources naturelles. Des menaces sur l’évolution du Produit intérieur brut du pays viennent assombrir le tableau. La BM estime que le Cameroun pourrait perdre 10% de son PIB, si rien n’est fait.
La Banque mondiale table sur une enveloppe de 58 milliards de dollars sur les dix prochaines années pour permettre au Cameroun de capitaliser sur les mesures d’adaptation et d’atténuation. Cela conduira le pays vers la réalisation d’une croissance rapide, inclusive et résiliente. Tout en lui permettant de ramener son taux de pauvreté à 3% à l’horizon 2050. Il existe cependant deux conditions pour y parvenir. La première consiste à rompre avec le modèle de développement dirigé par l’État pour mettre le secteur privé au premier plan de l’activité économique. Dans sa nouvelle vision, la Banque se propose elle-même d’exploiter au mieux les ressources du secteur privé.
Il est par ailleurs indiqué de renforcer le cadre réglementaire en matière d’environnement dans le pays. «Le Cameroun a accompli des progrès dans le développement de politiques climatiques alignées sur sa Stratégie nationale de développement (SND30), notamment à travers une série de réformes visant à créer un environnement encourageant la croissance économique, l’amélioration de la gouvernance et des institutions, et la décentralisation. Le pays s’est également engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 35% d’ici 2030. Une prochaine étape importante dans cet engagement consisterait à adopter une loi exigeant des institutions publiques qu’elles intègrent le changement climatique dans leurs instruments de politique et de planification, ainsi que dans leur processus budgétaire. À ce jour, la plupart des secteurs n’ont pas encore de législation soutenant les objectifs nationaux en matière d’adaptation et de décarbonisation», renseigne ledit document. Lequel établit une corrélation entre les changements climatiques et les questions d’énergie, ainsi que leur incidence sur la lutte contre la pauvreté, l’insécurité alimentaire et l’industrialisation du pays.

Louise Nsana

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