Acier-aluminium : l’Afrique dans le tourbillon de la nouvelle guerre commerciale !
Les relations commerciales entre les Etats-Unis et ses partenaires traversent une importante zone de turbulences.
Après une première hausse des droits de douane qui affecte depuis mars l’acier chinois, Washington a mis en application sa décision de taxer ses importations d’acier et d’aluminium en provenance d’Europe, du Mexique et du Canada. Depuis le 1er juin, il est exigé 25% de taxe en plus sur l’acier et 10% en plus pour l’aluminium. Une décision qui risque de remettre en cause l’équilibre de l’économie mondiale.
Car en riposte, les partenaires américains ont annoncé des représailles. Le Canada a décrété ses propres tarifs douaniers sur divers produits importés des États-Unis dont la valeur pourrait atteindre 16,6 milliards dollars. Identiques au nouveau tarifaire américain, les taxes canadiennes concerneront en plus des produits de consommation (cigarette, papier hygiénique, soupes préparées). Le Mexique, lui, a indiqué que ses rétorsions consisteraient à la taxation de certains métaux mais aussi des denrées alimentaires comme des fruits et des fromages.
Bruxelles, pour sa part, a déjà prévenu d’accroitre l’imposition sur des produits américains emblématiques, comme les motos Harley Davidson, les cigarettes, les jeans ou encore le beurre de cacahuète. Un conseil extraordinaire des ministres du Commerce est en gestation à cet effet. L’Union européenne a également porté plainte aux USA à l’organisation mondiale du commerce (OMC).
Afrique noyée
L’Afrique est le premier réservoir mondial des principaux minerais concourant à la production de l’acier (fer) et de l’aluminium (bauxite). Le continent noir assiste pantois à cette guerre commerciale sans mot dire. Bien que l’Afrique soit le réservoir mondial des minerais, son statut de sujet de l’industrie sidérurgique mondiale semble l’avoir cantonné au silence. Même pas un communiqué de l’Union africaine pour une position continentale.
En dépit de la conjoncture morose des minerais sur le marché international, l’industrie extractive de fer et de bauxite sur le continent africain demeure courue. Des pays comme la RDC, le Cameroun, la Guinée, le Congo, Tanzanie, Malawi, Mozambique continuent de faire des projections de développement en comptant mobiliser la rente de l’industrie extractive.
D’autres, plus avancés comme l’Afrique du Sud et l’Egypte disposent déjà d’une industrie sidérurgique pourvoyeuse d’emplois et de savoir-faire. Cette hausse des tarifs pourraient retarder la reprise des cours mondiaux sur les minerais. Plus loin, l’impact pourrait s’avérer encore plus préoccupant si les investissements attendus pour la reprise des chantiers extractifs n’étaient pas bouclés.
Aujourd’hui, la Chine et l’Australie sont de gros exploitants miniers en Afrique. Ils exportent principalement vers l’Europe et les Etats Unis d’Amérique. Pékin, à lui seul, produit près de la moitié de l’acier mondial. En la matière, la Chine est le premier partenaire des pays africains. Ses achats de minerais ont tiré la croissance de nombre de ces pays entre 2005 et 2013. Les taxes américaines sur l’acier chinois pourraient atteindre 53% rapporte le secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross. Si la Chine réalisait un manque sur l’acier, il y a un risque de dépréciation des prix des minerais en Afrique.
«America first»
L’urgence est à une réelle intégration économique pour une libre circulation des facteurs de production sur le continent africain. Afin que l’Afrique puisse enfin transformer elle-même ses matières premières et gagner la bataille des devises, de l’industrie très stratégique de l’acier (armement, automobile, aéronautique, électronique…).
Pour l’administration américaine, le nouveau régime d’imposition sur l’acier et l’aluminium importé vise à privilégier la production nationale. L’objectif est de relancer la sidérurgie et de protéger les entreprises et les emplois aux Etats-Unis face aux marchandises importées. Il s’agit aussi de lutter contre le déficit commercial américain, qui atteignait 566 milliards de dollars en 2017. C’est l’une des multiples déclinaisons du slogan de campagne de Donald Trump «America first».