Franc CFA, crypto-monnaie et projets : la Cemac en consultation à Paris et Washington
C’était dans le cadre des Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, et de la réunion des gouverneurs et ministres des Finances Cemac-France. Les deux assises ont permis à ces différents responsables, ainsi qu’à la Commission de la Cemac, de traduire dans les faits la volonté de réforme manifestée par les chefs d’État lors de leur dernier sommet de Yaoundé.

A la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), l’heure est déjà à la concrétisation de la volonté de réforme manifestée par les chefs d’État le 17 mars dernier à Yaoundé. Et deux occasions ont justement servi de prétexte aux représentants de la sous-région pour amorcer, avec leurs partenaires, des réflexions sur le franc CFA, la cryptomonnaie, ainsi que sur le deuxième programme de projets intégrateurs prioritaires de la Communauté. En l’occurrence les Assemblées de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale d’une part, et la réunion des gouverneurs et ministres des Finances Cemac-France, d’autre part. L’une et l’autre se sont respectivement tenues du 10 au 16 avril dernier à Washington DC et le 25 avril dernier à Paris. L’opportunité pour les ministres de l’Économie et des Finances,
Paris
À en croire le communiqué final, le gouverneur de la Beac, Abbas Mahamat Tolli, et les autres plénipotentiaires de la sous-région se trouvant dans la capitale française ce 25 avril 2023 « à l’invitation de Bruno Le Maire, ministre de l’ Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique de la République française et de Jean Baptiste Ondaye, ministre de l’Économie et des Finances de la République du Congo ». Alamine Ousmane Mey, ministre camerounais et président sortant du Conseil des ministres de l’Union économique de l’Afrique centrale (UEAC) a fait le déplacement de Paris. Le Pr Daniel Ona Ondo, président sortant de la Commission de la Cemac, était aussi de la partie. Leurs contributions à ces échanges ont permis de déboucher sur un certain nombre de décisions.
Stabilité monétaire
La révolution autour du franc CFA n’est pas pour maintenant, peut-on conclure à l’issue de ce premier tour de discussions avec la France. En grande partie du fait de la conjoncture internationale et sous-régionale. « Les présidents des institutions régionales et les gouverneurs des Banques centrales ont relevé que l’économie mondiale et celle de la Cemac sont confrontées à une multitude de chocs exogènes économiques et financiers, climatiques et sécuritaires ». Ils ont ainsi décidé d’un commun accord « de réaffirmer leur engagement, en ligne avec leur mandat et l’indépendance de la politique monétaire, de garantir la stabilité de la monnaie ». Leur conviction, à en croire le communiqué final, est que «l’intégration régionale de la Cemac et sa coopération monétaire avec la France, s’appuyant sur des institutions régionales solides,

Projets intégrateurs
« Les participants ont interprété le succès enregistré dans la mise en œuvre du premier programme de projets intégrateurs de la Cemac ». Le communiqué final souligne surtout qu’ils ont aussi « accueilli avec intérêt l’annonce de la tenue de la table – ronde à Paris au mois de novembre 2023, sur le financement du deuxième programme de projets intégrateurs de la sous-région ». C’est en effet la grande annonce au terme de la rencontre de la capitale française.
Et pour cause, les projets intégrateurs de la Cemac font partie des solutions apportées par les représentants de la Communauté pour faire face aux chocs exogènes. L’idée est de travailler « à renforcer l’intégration économique régionale, facteur de résilience et de solidarité des États ». À les croire, cette évolution devrait aller de pair avec la stratégie de diversification de nos économies. Ce qui devrait conduire «à la diversification du tissu productif, à l’adaptation aux changements climatiques, et à maintenir la soutenabilité des finances publiques», ont-ils entre autres convenus à Paris.
Washington et les crypto-actifs
La délégation de la Commission de la Cemac conduite à Washington par le Pr Daniel Ona Ondo a fait plusieurs plaidoyers auprès des responsables des institutions de Bretton Woods. L’un d’eux a trait à la crypto-monnaie. Conformément à l’une des résolutions du dernier Sommet des chefs d’État. Lesquels ont opté à Yaoundé pour une régulation. Et de fait, « la rencontre avec le département des Marchés monétaires et des capitaux du FMI, à laquelle participait également la Cosumaf, a consisté pour ces deux institutions sous-régionales (…) à solliciter l’assistance du FMI dans le projet de mise en place d’un cadre règlementaire responsable des crypto-actifs en zone Cemac, ainsi que dans la définition d’une cartographie de risques inhérents au marché financier sous-régional ». À en croire le compte rendu de la Commission de la Cemac, plusieurs autres dossiers ont été évoqués en terre américaine. Notamment au cours du séminaire sur l’état de la région Afrique avec un focus sur comment exploiter les ressources naturelles pour un avenir durable ; ou du séminaire sur le renforcement des capacités en gestion de la dette publique.
« La rencontre avec le Département des Finances publiques du FMI a consisté pour la Commission de la Cemac à exprimer sa satisfaction pour les appuis multiformes que ne cesse de lui apporter ce Département dans la Réforme des Finances publiques, dans la révision des Directives communautaires en matière de fiscalité, ainsi que dans le renforcement de l’administration fiscale dans la sous-région. Elle a aussi mis à profit cette rencontre pour exprimer des besoins supplémentaires en matière d’assistance technique dans ces divers domaines », apprend-on.
La délégation de la Commission de la Cemac était constituée de Clément Belibanga, commissaire en charge des Politiques économiques, monétaires et financières ; Lionel Ngwessy Malaga, directeur de cabinet du président de la Commission de la Cemac par intérim ; Jean-Claude Nguemeni, directeur de la Surveillance multilatérale ; Roland Marc Lontchi, directeur de la Statistique et Mme Joëlle Rebecca Zoua Ona, représentante de la Cemac au Gabon.
Théodore Ayissi Ayissi
Nouvelle gamme de francs CFA
Des réseaux de faux-monnayeurs au pays-siège de la Beac
Au moins deux d’entre – eux ont déjà été démantelés dans l’espace de deux mois au Cameroun. La dernière alerte en date vient de Pitoa dans la région du Nord. Elle prévient de la circulation sur notre territoire de fausses coupures de 10 000 FCFA et 5000 FCFA.
Le pays siège de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) est en passe de devenir un sanctuaire pour faux-monnayeurs. Au moins deux réseaux de faussaires sont déjà démantelés depuis la mise en circulation, le 15 décembre dernier, de la nouvelle gamme de billets. Leur dernier fait d’armes est signalé ce 24 avril 2023 à Pitoa, un arrondissement de la région du Nord. Le sous-préfet compétent y fait état « d’un vaste réseau de faux billets en coupures de 10 000 FCFA et 5000 FCFA de la gamme de 2022, en circulation dans les marchés ». Joseph Densou rassure toutefois qu’« il a été démantelé le 23 avril 2023 grâce à la bonne collaboration entre les autorités locales ». Sans donner plus de précisions aux « populations de son unité administrative, aux services financiers de l’État,
Cette fausse monnaie reste cependant en circulation, malgré l’opération coup de poing. « Les coupures de 10 000 FCFA série 01776324B5 et de 5000 FCFA série 02059119A1 » sont particulièrement concernées. L’autorité administrative en appelle « à la vigilance au quotidien des populations lors de leurs transactions financières ». Joseph Densou les invite également à « dénoncer auprès des autorités publiques, toute personne impliquée dans un tel réseau qui nuit gravement à l’économie tant au niveau national que local ».
D’autant que le flou persiste toujours autour de l’identité, la nationalité et le statut des suspects, ainsi que sur la quantité et la valeur des billets saisis ou déjà échangés.
Yaoundé
La ville siège de l’Institut sous-régional d’émission de la monnaie en Afrique centrale a déjà aussi défrayé la chronique. Sylvain Oscarion Tchapseu est interpellé le 14 février au quartier Meyong en possession de faux billets. Les gendarmes sont tombés sur des preuves démontrant que le Camerounais de 43 ans les contrefaisait lui-même. Il est depuis lors aux arrêts.
TAA
Coopération Cameroun-Centrafrique
Au cœur du face-à-face Biya-Touadéra
La rencontre au sommet a réuni les deux chefs d’État le 29 avril dernier à Yaoundé, au cours d’une visite d’amitié et de travail du président centrafricain auprès de son homologue camerounais.
C’est la première rencontre entre les deux dirigeants depuis le dernier Sommet des chefs d’État de la Cemac à Yaoundé. La rencontre de ce 29 avril 2023 entre Paul Biya et Faustin-Archange Touadéra s’inscrit cette fois dans le cadre d’une visite de travail et d’amitié. Très peu d’informations filtrent sur les sujets au menu de leurs discussions. On peut toutefois affirmer, à la suite d’un tweet du président centrafricain, que «les échanges fructueux ont porté sur le renforcement de la coopération bilatérale et sur des sujets d’intérêts communs». Un sentiment confirmé par un autre tweet du président camerounais. Il indique des «échanges fructueux ce jour au Palais de l’Unité avec le président de la République Centrafricaine, en visite d’amitié et de travail au Cameroun».
Paix, sécurité et corridors
Remerciements et consolidation pourraient bien résumer l’intérêt de la présence en terre camerounaise de Faustin- Archange Touadéra. La Centrafrique est en effet au centre de plusieurs actualités, jusqu’à l’invitation du président Paul Biya. Le président centrafricain a par exemple personnellement présidé, la veille du tête-à-tête, «la cérémonie de dissolution de cinq groupes armés». Un tweet en rend compte. Il se fait fort d’indiquer que «ce processus, qui a été enclenché depuis le 14 septembre 2022 avec la cessation définitive d’activité de quatre groupes armés, suit son cours». C’est une nouvelle avancée pour la paix et la sécurité en RCA. Un critère parmi d’autres certainement pris en compte par le Conseil d’administration du FMI. L’instance a «approuvé ce 27 avril 2023 un programme d’une durée de 38 mois, assorti d’un financement d’environ 189,5 millions de dollars», apprend-on. L’intervention multiforme de Yaoundé est à chaque fois déterminante. La visite de travail était donc une occasion de réitérer au Cameroun la gratitude du peuple centrafricain. En même temps qu’elle permettait d’évoquer d’autres questions. À l’instar de la gestion commune du corridor Douala-Bangui, souvent pris à partie par les groupes armés.
Cemac
Difficile enfin d’imaginer que les deux heures d’échanges entre les deux chefs d’État n’ont pas été mises à profit pour parler des problématiques communautaires. Notamment de la récente poussée de fièvre entre le Cameroun et le Tchad sur l’acquisition par la Société nationale des hydrocarbures (SNH) des parts dans la société londonienne Savannah Energy. La Commission sur la concurrence dans l’espace Cémac sera –t-elle activé pour faire donner l’avis requis par le Tchad? Le Pr Faustin-Archange Touadéra vient d’hériter de la présidence en exercice de la Cemac. L’expérience du président camerounais est en la matière inépuisable, en l’occurrence dans la gestion des conflits économiques comme celui sur l’évacuation par pipeline du pétrole tchadien.
TAA