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FUSION CEMAC-CEEAC : Quelles réformes du cadre juridique et institutionnel?

Par Fadou Ndam Maïwa, Ph.D en Droit Public, Responsable Adjointe au chef de la Cellule de la Programmation, Planification et du suivi, évaluation de l’OBSIC-AC

 

La fusion entre la CEMAC et la CEEAC constitue un tournant majeur dans l’histoire de la coopération inter-Etat en Afrique Centrale. C’est à la suite des travaux menés par la Cellule des experts du COPIL̸ CER-AC entre 2020 et 2021 qu’il a été jugé nécessaire d’entreprendre la réforme du cadre juridique et institutionnel des deux CER. Par conséquent, Celles-ci sont appelées à disparaitre d’ici 2023 pour ne former qu’une seule communauté économique. Les prémices d’une telle fusion étaient déjà visibles avec les différentes initiatives internes entreprises par les deux organisations sous régionales. La CEMAC fut la première à poser les jalons d’une éventuelle fusion à travers l’actualisation de ses bases juridiques, la réorganisation de son cadre fonctionnel et institutionnel en juin 2008. Dans une perspective similaire, la CEEAC a mis en place un comité de pilotage pour sa réforme institutionnelle (décision n°83̸ CEEAC̸ CCEG̸ 17 du 2 juin 2017). L’objectif étant de procéder à la redynamisation des structures nécessaires à une plus grande intégration régionale. C’est à bon droit qu’on puisse reconnaitre que, les initiatives susmentionnées ont fortement contribué à la dynamique de création d’une nouvelle Communauté économique en Afrique centrale.

Comme tout mécanisme juridique, la création ou la naissance d’une nouvelle entité ne saurait se faire en l’absence d’un certain nombre d’instruments juridiques prédéfinis. C’est pourquoi l’adoption d’un cadre légal et règlementaire via la redéfinition des instruments juridiques et institutionnels s’avère indispensable. Il en résultera ainsi, des normes juridiques susceptibles de régir la nouvelle institution économique et monétaire en gestation. Les modalités d’organisation et de fonctionnement de la structure à venir découleront donc des différents projets de textes qui ont été examinés lors de la 5ème réunion du conseil des ministres du comité de pilotage de la rationalisation des communautés économiques régionales en Afrique centrale tenu du 11 au 12 août 2002. Il s’agit notamment de: l’avant-projet du traité constitutif de la nouvelle communauté; le protocole régissant la haute autorité monétaire de l’Afrique Centrale; les conventions relatives au parlement et à la cour de justice et des droits de l’Homme.

Au regard des enjeux qui découlent de la nécessité d’arrimer la fusion aux standards des autres communautés régionales instituées par le traité d’Abuja de 1991, il faut rappeler qu’il s’agit de deux entités économiques de configuration différentes dont les aspirations convergent de façon dispersée. La volonté manifeste des chefs d’États et de gouvernements d’adhérer à ce nouveau cadre juridique et institutionnel, se traduit par l’érection d’une union plus forte, efficace et efficiente. En effet, selon les rapports des travaux effectués autour de la question de la rationalisation des communautés d’intégration en Afrique centrale, nous assisterons dans peu de temps à l’avènement de:

• La cour de justice et des droits de l’homme, principale instance de justice qui traitera des questions judicaires, visant à assurer la protection et la garantie des droits et libertés des citoyens dans l’espace sous régional commun, à l’image de celle de l’Union Africaine;

• La haute autorité monétaire de l’Afrique centrale, qui devra avant tout harmoniser les différentes banques centrales qui existent dans les 11 États membres et par ailleurs elle se chargera de la politique économique, financière et monétaire au sein du nouvel espace afin de parvenir à l’unification de ces institutions bancaires;

• Le parlement communautaire en tant qu’organe législatif, il est perçu dans l’espace communautaire comme un organe consultatif sans réel pouvoir décisionnel. Le défi avec la fusion serait de lui donner un poids politique dans la gouvernance de la nouvelle communauté;

• Une seule commission, des organismes et institutions spécialisées.

Si l’on est d’accord avec le processus de fusion enclenché depuis quelques temps en Afrique centrale, il n’en demeure pas moins que des interrogations persistent quant à l’efficacité du projet entrepris. Qu’est-ce qu’il adviendra par exemple des acquis des anciennes CER? La jurisprudence de la Cour de Justice de la CEMAC sera-t-elle applicable au sein de la nouvelle organisation ou elle sera classée dans le musée des oubliettes historiques? L’actualité récente de la Guinée Équatoriale qui est partie prenante de l’expédition de la fusion nous parle à plus d’un titre. Peut-on véritablement envisager une fusion des communautés d’intégration économiques en Afrique centrale avec des attitudes de xénophobies?

 

Passeports des pays de la Cemac

Gabon et Guinée Équatoriale en première classe

Grâce à leurs titres de voyage et aux facilités d’ouverture sur le reste du monde, ils occupent les premières places de la sous-région dans le dernier classement du Guide Consultants.

 

La Guinée Équatoriale aurait grâce à son passeport une plus grande ouverture sur le monde que la plupart des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). C’est ce que laisse supposer le dernier classement du Guide Consultants récemment rendu public. Le passeport équato-guinéen y figure à la 92ème place. Soit en deuxième position en zone Cemac, juste derrière le Gabon (90ème). Le Guide passport ranking Index crédite en effet ce titre de voyage de la faculté d’ouvrir les frontières d’un plus grand nombre de destinations. L’élément déterminant ici est l’absence de demande de visa. Et ils sont 53 États à ne pas en réclamer au départ de leur pays d’origine aux détenteurs d’un passeport équato-guinéen. 33 pays parmi ceux-ci en exigent cependant un à l’arrivée. Les États de la Cemac n’en font pourtant pas partie. Les Équato-Guinéens peuvent par ailleurs entrer dans 149 autres pays dans le monde. Une fois la formalité du visa remplie.

 

Guide Consultants met toutefois en exergue une autre réalité. Fort de «son vaste réseau et de ses 10 années d’expérience», l’entreprise basée à Dubaï croit savoir que la Guinée Équatoriale est le seul pays de la Communauté à exiger un visa à l’entrée aux ressortissants de la sous-région. La récente actualité sur l’expulsion des Camerounais en situation irrégulière et sur la fermeture des frontières avec le Cameroun et le Gabon est là pour accréditer cette perception. Ce faisant, la Guinée Équatoriale prive les autres pays de la Cemac d’une meilleure position dans le classement.

 

Effet pervers
Tous les pays de la Communauté auraient en effet pu gagner dans une configuration différente, au moins une place dans le Guide Passport Ranking Index. À l’instar du Cameroun positionné à la 96ème place et à l’avant-dernière en zone Cemac. En raison d’un accès à seulement 49 destinations sans visa et à 151 autres pays dans le monde. Il aurait pu se retrouver au 95ème rang aux côtés de la RCA. La Centrafrique revendique en l’état 50 destinations sans visa. Une destination de plus et elle se serait aussi rapprochée du Tchad et de ses 52 destinations. Il est 93ème au classement. Le Gabon aurait également pu prétendre à la 89ème place au lieu de la 90ème où il se trouve. Puisque 55 pays reçoivent sans autres formalités ses ressortissants. Le Congo, 99ème, ferme la marche dans la sous-région et ne bénéficie de ce traitement que dans 46 États dans le monde.

TAA

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