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Potentiel d’un aliment fonctionnel camerounais, la « soupe d’Achu »/Sauce jaune (Star Yellow), dans la gestion de la propagation de Covid-19.

 

 

By Julius OBEN, PhD*

Professeur de Biochimie Nutritionnelle

Co-président, Groupe de Travail de la Cameroon Academy of Science (CAS) sur le rôle de l’Alimentation et la Nutrition dans la lutte contre la COVID- 19 au Cameroun

Alors que le monde continue à chercher des moyens d’arrêter la propagation du nouveau SARS-CoV-2 et de contenir la pandémie de COVID-19, il est important que nous facilitions tous ce processus pour les scientifiques en respectant les prescriptions sanitaires et d’éloignement social visant à limiter la transmission par les sécrétions nasales et respiratoires des personnes infectées. Comme les chercheurs comprennent mieux certains aspects du virus, il existe maintenant des preuves de l’apparition et de l’excrétion du virus COVID-19 actif dans les selles des personnes infectées.

La présence du virus vivant dans les selles indique également sa présence dans le tractus gastro-intestinal humain, où se trouvent des milliards d’autres microorganismes (principalement des bactéries de différentes espèces) constituant le microbiome humain.  Les bactéries qui composent le microbiome humain sont beaucoup plus grandes que le CoV-2 du SARS et pourraient servir d’hôtes au virus, favorisant ainsi sa réplication. 

Des travaux de recherche antérieurs ont rapporté que le « virus de la grippe » (un parent du SARS-CoV-2) infectait le Streptococcus pneumoniae (bactérie qui provoque des infections des voies respiratoires), ce qui aggravait les infections des voies respiratoires.  Il est donc possible que le microbiome humain puisse servir de bon hôte au SARS-CoV-2. L’élimination du coronavirus du tractus gastro-intestinal ou l’arrêt de sa réplication constituera donc un moyen efficace d’arrêter l’excrétion du virus actif par les selles, en supprimant cette voie de transmission potentielle.

Il n’existe actuellement aucun traitement bien étudié, et il est peu probable qu’un vaccin acceptable soit disponible à court terme.  Nous devons garder à l’esprit qu’il s’agit d’un nouveau virus, auquel le système immunitaire humain n’avait pas été exposé avant fin 2019.  Au contraire, notre microbiome est présent depuis notre naissance et change constamment en fonction des aliments auxquels nous sommes exposés. Cela signifie donc que les habitudes alimentaires d’une personne déterminent les bactéries qu’elle héberge, ainsi que le fonctionnement de son système immunitaire et sa capacité à gérer certaines infections.  En cette période de pandémie COVID-19, il est peut-être plus important que jamais de prêter davantage attention à ce qui pénètre dans notre tube digestif, sachant que nos aliments devraient être notre médicament le plus important.

Compte tenu de la variété et de la richesse de la cuisine camerounaise, il est probable que le microbiome des Camerounais soit tout aussi riche et varié.  La détermination du rôle protecteur de ce microbiome constitue donc un axe majeur de nos travaux de recherche à la Fondation J & A Oben.  Depuis l’apparition du COVID-19, la Fondation J & A Oben a travaillé en collaboration avec d’autres chercheurs (Jude Bigoga, Guy Takuissu, Ismael Teta et Rose Leke) pour étudier le potentiel d’une « sauce jaune » enrichie appelée « STAR YELLOW » pour limiter la propagation du SARS-CoV-2 par les matières fécales.

Star Yellow diffère de la célèbre sauce jaune largement consommée et vendue dans les restaurants camerounais, par l’ajout de graines de melon moulues (egusi) et d’ail, connus respectivement pour leur forte teneur en zinc et leur activité antibactérienne.  La forte teneur en zinc inhibe la réplication virale. Outre l’activité antibactérienne, antioxydante et anticoagulante de l’ail, sa forte teneur en inuline favorise la croissance de « bonnes bactéries » dans le microbiome. 

En plus de la présence de tous les ingrédients fonctionnels dans le « Star Yellow », ce qui le distingue est sa chimie, qui, bien que basique, pourrait être importante dans la gestion de la propagation de COVID-19. Les premières étapes de la préparation de « Star Yellow » consistent à mélanger de l’huile de palme (un lipide) et du calcaire ou du bicarbonate de sodium (une base) en présence d’eau. Ce processus est appelé « saponification » en termes de chimie simple.

Le SARS-CoV-2 est sphérique et se compose d’acide ribonucléique (ARN), de lipides et de protéines (des pics dépassant de leur surface donnant l’apparence d’une couronne). Il n’y a pas de liens solides qui maintiennent ces unités ensemble, ce qui signifie que même des produits chimiques doux comme « Star Yellow » les séparent.  En gros, « Star Yellow » dissout la membrane graisseuse du virus et le virus se désintègre. Si ce processus se produit dans le tractus gastro-intestinal, l’ARN du SARS-CoV-2 est exposé au zinc du régime alimentaire qui arrête sa réplication, rendant le virus inactif. 

Si les travaux en cours de notre groupe de recherche s’avèrent concluants, « Star Yellow » pourrait être utile pour débarrasser le tractus gastro-intestinal des virus actifs, tout comme d’autres produits de saponification agissent sur la peau.  Cela pourrait limiter la propagation du COVID-19 par les selles dans les zones où les conditions d’hygiène sont mauvaises. Ce qui précède me rappelle une conversation que j’ai eue avec feu le professeur Victor Anoma Ngu, au cours de laquelle il a déclaré : « Une bonne science ne doit pas nécessairement être une science compliquée…mais un bon chercheur doit être capable de trouver des solutions simples à des problèmes complexes ».  En attendant, les Camerounais devraient se protéger en se lavant régulièrement les mains, en portant des masques de protection, en pratiquant la distanciation sociale et en ayant une alimentation équilibrée qui renforcera leur système immunitaire et leur fournira un microbiome sain.

*Le Professeur Julius Oben est également Co-fondateur de la J&A Oben Foundation, dont il est directeur de son Centre de Recherche en Diététique et Nutrition (CANDIREC), superviseur de son Centre de Bien-être et de Nutrition, et Fondateur de son Centre de Formation Professionnelle en Diététique et Aliments Fonctionnels (CEFOPDIET)

 

 

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