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Cameroun-Guinée Équatoriale : La frontière à palabre… de la Cemac
Chez quelques observateurs, la signature par les deux pays du seul accord de coopération en matière de défense et de sécurité transfrontalière attire une moue dubitative. Ils regrettent la non prise en compte de la question relative à la libre circulation des biens et des personnes entre les deux pays.
Les ministres de la Défense du Cameroun (à droite) et de la Guinée Equatoriale scellent le pacte de non-agression frontalier Frontière terrestre Cameroun-Guinée Équatoriale, chaque jour les experts débattent entre eux et répondent aux questions qui influencent le cours de la vie dans cet espace. La dernière actualité en date fait état de la signature par les deux pays d’un accord de coopération en matière de défense et de sécurité transfrontalière. Bien que ses dispositions exactes ne soient pas encore clairement dévoilées, Yaoundé et Malabo semblent avoir trouvé des points de convergence, notamment sur la question du respect mutuel, un des points de tension du couple ces derniers mois. En effet, ledit accord prévoit «la prohibition de l’usage de la force entre les deux pays et la non-ingérence dans les affaires intérieures de l’autre», selon le communiqué publié à l’issue de la réunion entre les deux parties.
Le marathon diplomatique de ces dernières semaines en dit long sur le réchauffement de l’axe Yaoundé-Malabo. «Les nuages qui s’étaient formés progressivement ces derniers mois au niveau de nos deux frontières sont désormais dissipés» a réagi le ministre délégué à la présidence camerounaise chargé de la Défense, Joseph Beti Assomo. «C’est un pas positif (…) un jour heureux pour nos deux peuples. «Le temps est venu pour notre nouveau départ, le temps pour nous d’embrasser un nouveau destin communautaire», a renchéri le ministre équato-guinéen Leandro Nkogo Bakale. Globalement, les représentants respectifs de la Guinée Équatoriale et du Cameroun sont d’accord pour éviter que les choses dégénèrent plus au niveau de la frontière.
L’une et l’autre partie vont évoluer avec des canaux communs de de prévention. Autrement dit, Yaoundé et Malabo entretiennent désormais un dialogue militaire en temps réel pour éviter que leurs deux armées soient au contact. «À travers cet accord qu’ils viennent de signer, le Cameroun et la Guinée Équatoriale ont émis des propositions d’actions à mener immédiatement dans le domaine militaire», laisse entre Aloys Mpessa. Pour l’internationaliste, «il faut saluer cet énième pas. Mais, on n’a pas encore trouvé le meilleur moyen de résoudre la question de la frontière».
Explications
Pour mieux faire comprendre, Françoise Mouyenga, expert des questions de sécurité au Centre de recherche et d’études politiques et stratégiques de l’Université de Yaoundé- II (Creps) mise sur «une frontière aux allures de gruyère». «Longue de plusieurs kilomètres et parsemée de plusieurs check-points, la frontière entre les deux pays, qui court à travers une zone de petites vallées où alternent champs, forêts, canaux et une conurbation autochtone d’une extrême densité, a toujours été très difficile à contrôler», dit-elle. En filigrane, le propos libère le constat d’une mobilité énorme qui a toujours été là. «Depuis Yaoundé jusqu’à Malabo, ce point d’observation semble avoir été évité. Car il aurait permis de scruter d’un peu plus près la thématique de «la frontière» au ras du réel».Craintes
Sur la foi d’une tribune libre publiée par feu Yves Alexandre Chouala, officiant alors au GRAPS (Groupe de recherches administratives, politiques et sociales de l’Université de Yaoundé-II), il y a encore à craindre. «Les expulsions quasi-inhumaines et les exactions diverses commises par les forces de sécurité sur les ressortissants camerounais relèvent de « l’ordre de la banalité »; c’est-à-dire « ce qui est attendu, parce qu’il se répète sans surprise, dans les faits et gestes de tous les jours», dénonce-t-il.Et de poursuivre: «Celles-ci remplissent les notes quotidiennes de l’ambassade et du consulat du Cameroun respectivement à Malabo et à Bata en direction de Yaoundé et n’ont jamais suscité de la part des autorités camerounaises une réaction ferme et véhémente. Au regard de la tension diplomatique qui va naître entre Yaoundé et Malabo suite à une nième vague d’expulsion des ressortissants camerounais, on ne peut manquer de faire l’hypothèse d’un simple concours de circonstance qui masque une situation objective d’amoncellement de nombreux nuages et de multiplication des malentendus entre les deux capitales».
Prudent, Pr Daniel Ona Ondo joue les équilibristes sur le sujet: «Au demeurant, avance le président de la Com-mission de la Cemac, il est normal que les pays partageant des frontières communes échangent notamment sur des questions sécuritaires. L’enjeu est la sécurité des citoyens des deux pays ; la qualité de la libre circulation en dépend. Toute supputation sur de supposées prétentions d’empiètement est exagérée et relève à mon avis d’une fiction».
Jean-René Meva’a Amougou
De vieux ennemis intimes
Entre la Guinée Équatoriale et le Cameroun, le voisinage est régi par divers instruments juridiques signés il y a plus de 30 ans.
La Guinée-Équatoriale entretient des relations diplomatiques avec le Cameroun depuis le 27 octobre 1968. Ces relations ont connu un tournant décisif en 1970 avec la signature d’un accord de coopération économique et technique. En son article 7, ce texte crée la Commission mixte Cameroun- Guinée équatoriale. Plusieurs lignes du même texte font mention, entre autres, «d’un cadre d’évaluation, de perspectives pour la promotion et l’approfondissement des relations entre les deux pays, elle vise à donner une impulsion nouvelle à la coopération transfrontalière entre les deux pays. Elle est organisée régulièrement tous les deux ans et en alternativement soit au Cameroun ou Guinée-Équatoriale».
Un nouvel accord a été négocié et signé le 6 novembre 1980. Il remplace celui conclu à Yaoundé le 1er janvier 1970. Il est entré en vigueur provisoirement dès sa signature et définitivement après échange des instruments de ratification. En outre, le règlement intérieur de la Grande Commission mixte a été également signé le 6 novembre 1980. Il est entré en vigueur le même jour et a remplacé celui conclu en 1972.
Le 30 août 2012, huit nouveaux accords de coopération sont signés à Yaoundé, au terme des travaux de la 8e session de la grande Commission mixte de coopération entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale. Ils portent sur les domaines scientifique, technique, agricole, culturel et la sécurité transfrontalière (partenariat avec le ministère des Relations extérieures (Minrex) du Cameroun pour la formation, le recyclage et le perfectionnement à l’Ecole nationale d’administration et de magistrature de Yaoundé, du personnel de la Fonction publique et de la réforme administrative de Guinée Equatoriale).
«Huit accords. C’est un record. Les résultats de ces tra-vaux démontrent la volonté des présidents camerounais Paul Biya et équato-guinéen Obiang Nguema, de pro-mouvoir une coopération bilatérale qui va intensifier les relations commerciales, techniques et scientifiques entre Yaoundé et Malabo», avait déclaré Agapito Mba Mokuy, alors ministre des Affaires étrangères et de la Coopéra-tion de la Guinée Equatoriale.
«Le cadre juridique de la coopération Cameroun-Guinée Equatoriale s’est enrichi de huit nouveaux accords. Il s’agissait de procéder à une évaluation depuis la tenue de la 7e session de la Commission mixte et explorer de nouvelles voies pour une coopération toujours plus dy-namique», avait énoncé l’ex-ministre camerounais des Relations extérieures, Pierre Moukoko Mbonjo.
Source : Minrex