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Archives des Ahmadou Ahidjo - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : Ahmadou Ahidjo

  • Unité nationale: la petite histoire

    Unité nationale: la petite histoire

    Selon certains intellectuels, Ruben Um Nyobe y a pensé. Ahmadou Ahidjo, aidé par le contexte, est venu donner de la consistance et de la pertinence émotionnelle au concept.

    «Indépendant depuis le 1er janvier 1960, le Cameroun a axé son action dans la recherche persévérante de l’unité dans un pays qui a hérité de l’histoire la plus grande diversité : d’ordre ethnique, religieux, culturel. Il s’agit d’ériger, d’organiser cette mosaïque de races, de cultures, de valeurs en une «authentique nation». Conçue comme la conscience du peuple camerounais d’être engagé dans un même dessein au sein d’une patrie. Notre grand parti national, l’Union nationale camerounaise, a été le creuset au sein duquel a pu se forger l’unité nationale». Quand Ahmadou Ahidjo prononce ce discours en septembre 1971, il se taille l’image d’un grand visionnaire de la politique camerounaise. «Sauf que c’était sur un ton et avec des mots qui recyclaient un déjà entendu de la parole politique d’avant l’indépendance», nuance Bruno Teufack. Du point de vue de cet analyste sociopolitique, «le concept d’unité nationale n’était plus en germe, il vient de loin». «Le premier président du Cameroun avait saisi un sujet libellé par Ruben Um Nyobe. À ce dernier, il aurait manqué justement des termes d’accroche, propres à ouvrir les cœurs et les oreilles», postule l’universitaire.

    Contribuant à cette ligne de réflexion, Achille Mbembe tient à départager les argumentations rationnelles des argumentations fallacieuses. «On aura beau se voiler la face, user de subterfuges, organiser une amnésie de masse. C’est à Ruben Um Nyobé et à l’Union des populations du Cameroun (UPC) que l’on doit la toute première tentative d’articulation de l’idée nationale au Cameroun», écrit l’historien et politologue camerounais dans les colonnes de Jeune Afrique du 9 octobre 2015.

    Sur le même sujet, d’autres intellectuels insistent sur une autre constatation précieuse. C’est le cas de Élise Djomkam. La Camerounaise, spécialiste de communication politique a sa version de la paternité de «l’unité nationale». «Quand Ahidjo prononce, ces mots-là ne sont nullement nouveaux, sauf qu’ils sont subtilement et progressivement récupérés et répétés de manière de plus en plus fréquente», théorise-t-elle. La suite révèle que: «Après l’indépendance, le discours politique et la propagande n’ont véritablement pas forgé de nouveaux mots, mais il a changé leur valeur et leur fréquence permettant ainsi à Ahidjo de réquisitionner et de confisquer le concept d’unité nationale puisqu’il a compris que c’est ce qui pouvait faire mouche, et faire avorter tout projet upéciste».

    Autres articles du dossier

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    Le jubilé du cinquantenaire de l’Unité nationale au Cameroun 1972-2022

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  • Retrait de la Can 2019 au Cameroun : Les remugles des investissements à perte

    Retrait de la Can 2019 au Cameroun : Les remugles des investissements à perte

    Bon nombre de particuliers et leurs partenaires évaluent le coup et le coût de la non-organisation de la compétition au pays des Lions indomptables. 

    Une conférence de presse pour annoncer à l’opinion publique nationale et internationale la fermeture d’un restaurant sis au quartier Olembé (Yaoundé I). Des enseignes lumineuses parées aux couleurs de la Can 2019 se sont éteintes, en face du stade Omnisports Ahmadou Ahidjo où elles trônaient il y a quelques jours. L’ivresse commerciale qui s’était emparée de la capitale «quand le Cameroun tenait encore sa Can» retombe peu à peu. Au lendemain du retrait de l’organisation de la compétition au pays des Lions indomptables, déceptions, frustrations et regrets jalonnent le parcours émotionnel des investisseurs.

    Revers
    Si aucune étude n’évalue clairement l’impact de ce «coup de massue» sur les affaires dans lesquelles ces derniers se sont engagés, il n’en demeure pas moins que l’élan euphorique des uns et des autres n’est plus le même. «Après avoir énormément investi pour accueillir la Can, nous avions beaucoup misé sur l’effectivité de l’organisation de ce tournoi ici afin de booster nos affaires. Voilà, nous sommes repartis clairement à la baisse», peine à dire Olga, une Camerounaise de la diaspora. Son affaire : les paquets de cartes Can 2019. Sur la foi de ses propres évaluations, la trentenaire confie que dans les supermarchés de Yaoundé, entre juin et octobre 2018, son « produit » était le jouet le plus vendu avec 400.000 paquets écoulés, tous formats confondus. «L’effet Can était particulièrement perceptible sur les ventes. À ce jour, plus l’ombre d’un client alors que nos projections s’établissaient à +50 % à un ou deux mois du coup d’envoi», avance mollement la jeune femme d’affaires.

    Chez les vendeurs de maillots, on s’était déjà félicité de l’effet boule de neige de la Can féminine de 2016 au Cameroun. Fréderic Wamba, le président du Syndicat des vendeurs des articles de sport du marché central de Yaoundé (Syvasmy) avait, en compagnie des représentants d’un label international, mesuré une croissance de 80 % dans ce domaine lors de la Can masculine. «En une semaine, tout est tombé dans la sauce», feint-il d’ironiser. À la vérité, l’annonce du retrait de l’organisation de la compétition au Cameroun constitue un revers pour la stratégie commerciale des grandes firmes, avec lesquelles les locaux avaient noué de juteux partenariats. «Nos associés et nous-mêmes voyions en la Can une opportunité économique très forte au niveau national, compte tenu de la durée de la compétition et la très grande taille du marché», regrette Frédéric Wamba.

    Derrière les mots, l’on peut deviner que le retour sur investissement est désormais plus nuancé. Quelques magnats qui avaient flairé le filon se sont refroidis. Pour Marie-Noëlle Voundi, «le coup et le coût sont énormes». La Camerounaise, qui avait mis du fric dans une application de réservation de taxis dans des villes désignées pour abriter des matches, est désabusée. Pour cela, elle dit s’être appuyée sur une élite composée de banquiers d’affaires, de gérants de fonds d’investissement, de capital-risqueurs et de start-uppers à succès. Par conviction, sans aucun doute, elle savait que la Can se jouerait dans son pays. «55 millions de francs CFA… en pure perte», lâche-t-elle difficilement.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Septième mandat à la tête de l’Etat : Paul Biya, l’Histoire ou la poubelle

    Septième mandat à la tête de l’Etat : Paul Biya, l’Histoire ou la poubelle

     

    Ce 6 novembre 2018, la présidence Biya entre dans un nouveau septennat. Les puristes de la science politique évitent de parler d’installation au pouvoir. Ils préfèrent se référer au chiffre 36. Plus clairement, 36 ans de pouvoir. Parler donc d’un nouveau locataire au palais de l’Unité serait, disent-ils, absurde. Ceux qui forcent le souvenir s’arrêtent sur ses bains de foule, sur la haute stature du «héros national» dominant la marée humaine à l’issue de chacune de ses prestations de serment.

    «I do so swear !». Cette année, Paul Biya prononce ces mots pour la huitième fois. L’explication qu’en donne le Pr Joseph Owona est que le successeur d’Ahmadou Ahidjo reste «un héritier à la hauteur du legs symbolique du pouvoir». Avec plus d’entrain, cet air-là, beaucoup le reprennent chaque jour, confortant ainsi «l’Homme-Lion» à éviter de se sevrer du goût du pouvoir. Cette fois, il entame la marche vers 2025. Il aura alors 92 ans. Pour le chiffrage, on en restera là.

    Voici donc un nouveau septennat. Vu à travers le prisme du personnage Biya ou le récit des victoires et des échecs de ce dernier, le 7è mandat mérite d’être regardé avec l’œil du veau qui tète. Sans prédire le pire, Paul Biya devra faire face à l’impatience des Camerounais, à la déception des uns (les retraités, les fonctionnaires), à la colère des autres (avec le sujet épineux de la crise anglophone), à la surenchère de l’opposition, aux maladresses ou aux faiblesses de ses propres troupes. Et lorsque le moment viendra, il devra aussi évaluer les besoins des arrivants, en fonction de situations administratives et de bagages politiques extrêmement diversifiés. Grégoire Owona brandit « la force de l’expérience ». On sait bien, après près quarante ans d’efforts stériles, que les déficits publics et l’endettement faramineux du Cameroun ne vont pas disparaître par enchantement, en 7 ans. Pour l’heure, on accorde encore au « nouvel élu » le bénéfice du doute et le droit à l’expérimentation pour une période qui peut cependant se raccourcir brutalement.

     

    06 novembre 2018

    Deux événements, un acteur principal

    Au sein du parti au pouvoir, on évoque des raisons financières et d’agenda pour justifier que la prestation de serment du président élu et le 36e anniversaire de son accession à la magistrature suprême se fêtent le même jour.

    Ce 6 novembre, le Cameroun amorce une nouvelle période de sept ans sous la présidence de Paul Biya, en poste depuis 1982. Sorti vainqueur de l’élection présidentielle du 7 octobre dernier avec 71,28 % de suffrages exprimés, l’homme âgé de 85 ans se plie, une nouvelle fois au rituel de la prestation de serment. En effet, comme le commande l’article 140 du Code électoral, « le président de la République élu entre en fonction dès sa prestation de serment. Celle-ci intervient dans un délai maximal de 15 jours à compter de la proclamation des résultats par le Conseil constitutionnel. Il prête serment devant le peuple camerounais en présence des membres du Parlement, du Conseil constitutionnel et de la Cour suprême réunis en séance solennelle ».

    Pendant que des millions de Camerounais se souviendront de n’avoir jamais entendu un autre président que Paul Biya prononcer la mythique phrase «I do so swear», les militants du parti au pouvoir de leur côté vont célébrer ce geste républicain de leur champion pour la 36e fois. Ce 6 novembre marque en effet le 36e anniversaire de l’accession à la magistrature suprême de l’homme du «Renouveau». Anniversaire qui sera célébré cette année en même temps que le début du 7e mandat du deuxième président de l’histoire du Cameroun.

    Huit prestations de serment
    Aucune raison officielle n’a été donnée pour expliquer cette double célébration inédite. Mais au sein du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), le parti présidentiel, l’on évoque tant tôt des considérations économiques, tant tôt des contraintes de calendrier. «La raison est davantage une raison économique. C’est-à-dire que s’il fallait organiser la prestation de serment un jour avant ou un jour après la date anniversaire de l’accession à la magistrature suprême, cela allait davantage imposer des dépenses énormes. Parce que cela suppose, une restauration, le transport des militants, la mobilisation au plan technique en termes de préparation de la cérémonie des faire-part à envoyer de part et d’autres. Tout cela allait couter très cher. Et nous sortons d’une rentrée scolaire en début septembre pour entrer dans une longue campagne qui a été essorante pour toutes les officines politiques», explique un membre du comité central du Rdpc.

    Un autre embraye: «Il fallait faire une deux en un pour également éviter le croisement avec la rentrée parlementaire. Rentrée parlementaire, prestation de serment, et célébration du 6 novembre; cela fait trop d’acticités dans un contexte de morosité ambiante». De plus, ajoute-t-il, «les caisses de l’État sont au rouge. Même la prime des enseignants qu’on paye régulièrement connait un essoufflement. Nous sommes à cinq semaines sans prime. C’est tout cela qui fait en sorte que le 06 novembre de cette année puisse regrouper les deux manifestations».

    Après le tout premier – 6 novembre 1982 suite à la démission de son prédécesseur Ahmadou Ahidjo, c’est la huitième fois que Paul Biya va prêter serment dont sept après une victoire à l’élection : 1984, 1988, 1992, 1997, 2004 puis 2011, puis 2018.

    Ifeli Amara

     

    Le jour d’après 

    En début de mandat, les habitudes présidentielles consistent à sanctionner ou à récompenser. Dès ce 6 novembre 2018, tous les regards se tournent vers la plume de Paul Biya.

    «Au Cameroun, l’après-prestation de serment est un moment». En insistant sur le dernier mot de cette phrase, le politologue Bernard Njeutchou se mue successivement, le temps d’une analyse, en climatologue, en géologue et en sociologue. «C’est la phase consacrée aux vents très forts. C’est un instant révélateur des tectoniques politiques très profondes. C’est le temps pendant lequel s’instaure une forme de mesure dans l’expression des rapports de force au sein de l’espace public», ajuste-t-il. Après chaque élection présidentielle, tout se construit à la fois sur l’instant et sur une dynamique imprévisible. «Voici venu le moment d’évaluation des coups d’éclats du précédent mandat. C’est un moment qui, après la campagne électorale et l’euphorie des résultats, réintroduit la politique dans ce qu’elle exprime de conflictualité et de rapports de force à vif contre une politique d’usage prioritairement technique», établit le sociopolitiste Blaise Eboumbou.

    Comme à chaque fois qu’il est réélu, Paul Biya place ses corridors. En novembre 2011, Valentin Zinga écrivait : «le septennat cristallise les urgences, dont certaines ont vocation à dissiper le malentendu électoral du 9 octobre 2011. L’opinion attend plus que des signes ; elle espère des signaux. L’une des clés pourrait dès lors s’articuler avec un renouvellement de forte amplitude des personnels gouvernementaux, dans une dynamique combinant devoirs de gratitude politique (en forme de renvoi d’ascenseur)… Le renouvellement des ingénieries et des énergies».

    Même jeu
    «En 2018, l’opinion attend à la fois des signes et des signaux», croit savoir Blaise Eboumbou, braquant ses projecteurs sur les comptes et mécomptes du dernier scrutin présidentiel. «En clair, après la prestation de serment, Paul Biya se pressera de rassembler ses vrais soutiens, de serrer les vis et de rappeler à tous qu’il est le chef, et entend le rester», conclut l’universitaire.

    Dans la faune de ceux qui «attendent», il y a les parvenus. Ils ont des visées après avoir battu campagne à gorge déployée dans leurs villages respectifs. Il y aussi les anciennes «créatures». Y compris les plus attentives et respectueuses des codes de «bonne conduite», elles sont dévorées par l’ambition de rester dans le sérail. Personne ne doit écorner les apanages de leur intouchable «souveraineté». Il y a ceux qui comptent recouvrer leur grandeur d’antan. Il y a le G20… «Là encore, avise le politologue Belinga Zambo, il faut bien comprendre que c’est le premier combat au couteau qui se joue sous nos yeux. Le reste (crise anglophone, réformes économiques et politiques, grands chantiers…) vient en second rideau».

    Jean-René Meva’a Amougou

    An 36 du magistère de Paul Biya 

    Ils jugent le Renouveau 

    A défaut de faire des projections sur son nouveau septennat, quelques Camerounais de la capitale évaluent le bail de l’homme du 6 novembre à la tête du pays depuis 1982. 

     

    Énoch Assala Ambassa, imprimeur

    «Plutôt satisfaisant»

    Le bilan de monsieur Biya à la tête du Cameroun est plutôt satisfaisant. Nous constatons qu’il y’a un développement qui est en cours sur le plan infrastructurel, la santé s’améliore, l’éducation camerounaise est rehaussée. Mais, étant donné que nous sommes dans un monde où la perfection n’existe pas, nous demandons qu’il poursuive le travail, comme il a annoncé dans son livre.

     

    Jacqueline Elomo, couturière

    «La paix, c’est grâce à lui»

    Le bilan du président est globalement positif, malgré la crise qui existe dans les deux régions anglophones. Le pays va bien ; il a une réputation de paix et c’est grâce à lui. Sur le plan économique, je ne me plains pas. J’ai mon atelier qui me met à l’aise et c’est grâce à sa politique.

     

    Sylvestre Étoudi, enseignant de génie civil

    «Beaucoup a été fait»

    Le bilan des trente-six ans à la tête du pays est plutôt positif notamment sur le plan infrastructurel. Sur le plan de l’éducation beaucoup a été fait par rapport à ce qui existait avant. Nous dénombrons aujourd’hui 08 universités d’Etat. On a des collèges et lycées dans les fins fonds des arrondissements. Mais sur le plan économique, ça n’a pas beaucoup bougé et nous espérons qu’il s’y attellera. Maintenant, sur le plan sportif, je suis fier et on a eu des sacres à l’international. Et enfin le plan politique les jeunes ne s’intéressent pas à celle-ci et croyons aux changements pour le prochain mandat.

     

    Ali Mohamed, chef restaurateur

    « Tout le monde peut investir au Cameroun »

    Paul Biya est bon. Au Cameroun, c’est la liberté d’expression tout le monde parle sans regarder à côté ou avoir peur. Mon père m’a dit qu’à l’époque, tu ne pouvais pas parler n’importe comment, je parle devant toi. Tout le monde peut investir au Cameroun grâce à la paix et la démocratie. C’est le travail de 36 ans et c’est grâce à lui.

     

    Zra Ahmadou, expert en droit de l’homme

    «Il y a plus d’avancées avec la démocratie»

    Tout doit être relativisé, on ne saurait donner une réponse absolue parce qu’il y a des domaines où on a connu des évolutions et d’autres où beaucoup reste à faire. Au-delà de tout, il y a plus d’avancées avec la démocratie, l’état de droit, la cohésion sociale, la stabilité politique. Il n’en demeure pas moins qu’il reste encore beaucoup de choses à parfaire. On voit bien qu’on a des menaces sur la stabilité. Le chômage, l’emploi des jeunes, l’éducation sont des domaines qu’il faut voir dans le septennat avenir.

     

    François Xavier Mvogo, conducteur de moto

    «Au moins dans le volet de la liberté d’expression»

    Je ne suis pas politicien, mais je pense que s’il a pu être là jusqu’à ce jour c’est parce qu’il travaille bien. On construit une nation au jour le jour. Ce n’est pas d’un coup de baguette magique qu’on se développe et le président Biya a beaucoup ouvré pour que le pays progresse. Au moins dans le volet de la liberté d’expression et la stabilité malgré la présence de Boko Haram et des Ambazoniens.

     

    Mollah d’Ayéné, patriarche et retraité

    «Laissons-le continuer»

    Le président a fait du bon travail. Avant, personne ne pouvait prononcer le nom du président. Tu disais Ahidjo on t’arrêtait. Maintenant, tu insultes Paul Biya, il ne dit rien. Avant, c’était impensable. Laissons-le continuer. Mais, il doit se pencher sur le plan économique. Rien ne marche pas à cause du vol dans le pays et ces voleurs sont avec lui. C’est donc l’occasion pour lui d’avoir un bilan de 100 % positif s’il les met hors d’état de nuire.

     

    Parfait Mengue, étudiant

    «Il doit stopper le tribalisme et l’injustice»
    Le bilan des 36 ans du président Biya a des points positifs et négatifs. Les points positifs : on peut dire que c’est avec lui qu’on a la liberté d’expression avec parfois du libertinage, il y a la création de nombreuses écoles, avec les universités qui restent néanmoins sous-équipée. Au niveau infrastructurel, il a une embellie avec la construction des autoroutes, des barrages comme ceux de Lom Pangar, Mékin, Memve’ele. Comme bilan négatif on assiste encore à des arrestations arbitraires. La justice camerounaise n’est pas indépendante et il devrait s’atteler là-dessus, nous avons également une injustice sociale accompagnée du tribalisme.

     

    Francky Nkoulou, avocat stagiaire

    «Certaines ne se reconnaissent plus en lui»

    Lorsqu’on parle des 36 ans du président Biya, c’est mi-figue, mi-raisin. Mi-figue parce que ce sont les mêmes qui gouvernent le Cameroun depuis son accession au pouvoir, on dirait que ce sont des dynasties. Au niveau économique, compte tenu de notre potentiel, le pays ne devrait plus se trouver à ce niveau. On devrait parler du Cameroun comme pays émergent actuellement. Mais, il a laissé la corruption s’installer et certaines populations ne se reconnaissent plus en lui et la société a été tribalisé. Parlant du mi-raisin, on a eu la démocratie et les libertés d’expression qui sont ses plus grandes victoires et il avait lui-même dit aux caciques de son parti dans les années 90 de « s’apprêter à la concurrence ». Pour le septennat avenir, il doit oeuvrer pour le renouvèlement de la classe politique et économique même dans son propre parti.

     

    Félix Wéré, maçon

    «L’économie est un problème»

    Vu le paysage camerounais actuel, le président Paul Biya a promis beaucoup de choses et il a tenu parole. Dans notre pays, il y a la liberté d’expression, avec la presse qui travaille. La dernière élection est une preuve. Mais, l’économie est un problème et il doit y travailler la et bien mener l’opération épervier. Mais globalement je suis un peu satisfait.

     

    Géraldine Mengue, ménagère

    «Notre pays est même envié en Afrique»

    Globalement, tout ne peut être parfait. En tant que femme, le président Biya a beaucoup œuvré pour nous les femmes que ça soit dans la succession, ou dans l’éducation. Il a permis à tous les Camerounais de pouvoir s’exprimer sans être inquiété. Notre pays est même envié en Afrique. Malgré les attaques à Buea et Bamenda, il veut toujours le dialogue. Aujourd’hui, il doit favoriser l’accès des jeunes dans le monde des emplois.

    Propos recueillis par

    André Balla (Stagiaire)

     

  • Unité nationale : Paul Biya noie le poisson

    Unité nationale : Paul Biya noie le poisson

    A l’approche du 20 mai, Etoudi a engagé une campagne de propagande pour embrouiller le débat sur la construction de cet idéal.

     

    Depuis le début du mois de mai, les comptes Facebook et Tweeter de Paul Biya sont particulièrement actifs. Chaque jour désormais, des messages en français et en anglais, les deux langues officielles du pays, y sont postés. Fil conducteur unique: l’unité nationale. En analysant ces messages, le président de la République semble préoccupé par trois choses: positionner l’unité nationale comme un acquis, «une condition et un facteur de la paix et du progrès» et inviter «tous les Camerounaises et Camerounais à réaffirmer dans les faits leur attachement à cette grande œuvre». Le thème choisi pour la célébration de la fête nationale cette année est dans la même veine. Il est en effet un appel aux «citoyens camerounais» à rester «unis dans la diversité» et à préserver «la paix sociale, pour un Cameroun stable, indivisible et prospère».

    Parallèlement à cette campagne menée via les comptes officiels du président de République et de la présidence de la République sur les réseaux sociaux, une autre est en branle dans les médias publics. Les choses ont été bien organisées, les messages sont synchronisés et les éléments de langage identiques. Aussi en lançant la série sur la CRTV, la radio gouvernementale, son directeur général parle du Cameroun comme «d’un modèle de construction patiente d’une nation sur des bases improbables». Pour Charles Ndongo, du fait de la montée des velléités séparatistes dans les régions anglophones, le 20 mai 2018 devrait être pour toute la nation, «comme un premier test de respect et d’attachement au contrat d’unité scellé depuis 46 ans».

    Problème anglophone

    La méprise est justement là. Car comme l’on souvent indiqué à moult reprises de nombreux experts d’horizons divers, l’unité du Cameroun repose sur des bases fragiles. La construction de l’Etat unitaire qu’on célèbre cette semaine est et a toujours été contestée. La crise anglophone qui secoue actuellement le pays, est une métastase de cette contestation que l’on nomme le problème anglophone. Il est né de la réunification du Cameroun oriental, francophone, d’avec le Cameroun occidental, anglophone et minoritaire (2 régions sur 10), auparavant séparés par la colonisation. Non sans raisons, une partie des citoyens originaires des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest y ont toujours vu un processus «d’assimilation» mené avec l’aide de la France.

    Le cardinal Christian Tumi, originaire du Nord‐Ouest, raconte dans son ouvrage «Ma foi: un Cameroun à remettre à neuf», paru aux éditions Veritas en 2011, une anecdote fort saisissante : «(…) Nous étions invités, d’autres évêques d’Afrique centrale et moi, à l’ambassade de France auprès du Saint‐Siège. (…) Un fonctionnaire de l’ambassade m’approcha (…) sans le moindre soupçon de sa part que je pouvais être un camerounais anglophone, il me dit : nous (la France bien sûr) sommes contents que vous soyez en train de réussir l’assimilation culturelle des anglophones».

    Yves Mintoogue, historien: «La suppression par M. Biya (?) en février 1984 de l’adjectif « Unie » et le retour à l’expression « République du Cameroun » (nom du Cameroun francophone avant la réunification) ont été perçus par les anglophones comme l’acte final du processus d’assimilation historique de leur identité particulière»

    La façon dont le pays passe de la République fédérale issue de la conférence de Foumban d’octobre 1961, à la République du Cameroun tout court en février 1984, aide à renforcer ce sentiment. «Le référendum du 20 mai 1972 sur l’unification a lui‐même été dénoncé à posteriori comme un acte imposé par son seul initiateur, Ahmadou Ahidjo. La suppression par M. Biya (?) en février 1984 de l’adjectif « Unie » et le retour à l’expression « République du Cameroun » (nom du Cameroun francophone avant la réunification) ont été perçus par les anglophones comme l’acte final du processus d’assimilation historique de leur identité particulière», soutient l’historien Yves Mintoogue dans une tribune libre publiée en 2004.

    «Le chef de l’Etat continue d’enregistrer des opinions qui semblent ne voir comme issue à cette grave crise, que ce qu’elles appellent un dialogue franc et sincère. Allons donc. Si l’on admet ce principe, quelles en seraient les modalités opérationnelles? Quels visages les représentants de l’Etat auraient-ils en face d’eux? Et puis voyons, quels problèmes cet éventuel dialogue prétendrait-il résoudre autres que ceux clairement identifiés et que le chef de l’Etat a depuis méthodiquement et systématiquement résolus?», interroge Charles Ndongo.

    Nombre d’experts (Jean Koufan, Vivianne Ondoua Biwole, Christian Pout …), de hauts commis d’Etat (David Abouem à Tchoyi, Garga Haman Adji, Abakar Ahmat…) et des hommes d’église (Mgr Samuel Kleda, cardinal Christina Tumi…) se sont pourtant maintes fois exprimés sur la question. Et une constance se dégage: le dialogue dont il est question ici, devra permettre de revisiter la marche du Cameroun vers l’Etat unitaire dans le but de construire des compris sur les points de divergence.

    Perversion du droit

    La vérité est que, de ce dialogue-là, Paul Biya n’en veut pas. Il l’a lui-même clairement dit lors de son discours à la Nation le 31 décembre 2016: «Le peuple camerounais, comme un seul homme, s’est engagé à construire une nation unie, inclusive et bilingue. Il s’agit là d’une expérience unique en Afrique. Comme toute entreprise humaine, notre expérience n’est pas parfaite. Elle a des aspects perfectibles. Nous devons donc rester à l’écoute les uns des autres. Nous devons rester ouverts aux idées mélioratives, à l’exclusion toutefois, de celles qui viendraient à toucher à la forme de notre Etat». «Nous sommes disposés, à la suite et dans l’esprit des artisans de la Réunification, à créer une structure nationale dont la mission sera de nous proposer des solutions pour maintenir la paix, consolider l’unité de notre pays et renforcer notre volonté et notre pratique quotidienne du vivre ensemble. Et cela, dans le strict respect de notre Constitution et de nos institutions», avait-il ajouté.

    Pour Paul Biya, le Cameroun ne peut donc être rien d’autre qu’un Etat uni et décentralisé d’où le blocage actuel. Pourtant, lorsqu’il a fallu supprimer la limitation des mandats présidentiels, c’est le même Paul Biya qui affirmait que «les constitutions ne sont pas faites ne varietur, le peuple lui-même détermine ce qui est bon pour lui». Cette attitude, Fabien Nkot l’appelle la «perversion politique du droit». L’actuel conseiller technique au Premier ministère théorise le concept dans sa thèse intitulée «Perversion politique du droit et construction de l’Etat unitaire au Cameroun» soutenue en février 2001 à l’université de Laval au Québec. Le travail de recherche montre notamment que dans le cadre de l’instauration de l’Etat unitaire, «les dépositaires du pouvoir imaginent et élaborent un ensemble de techniques de tricheries juridiques qu’ils mobilisent progressivement et systématique pour atteindre des objectifs politique qu’ils se sont préalablement fixés».

    Aboudi Ottou

     

     

     

  • Voie publique: Yaoundé a mal à ses feux

    Voie publique: Yaoundé a mal à ses feux

    Observé ces derniers temps, leur dérèglement créé plusieurs désagréments auprès des usagers de la capitale.

     

    Yaoundé, à une heure de pointe.

     

    Yaoundé, Place Ahmadou Ahidjo (communément appelée «Poste centrale»). «Ici, c’est une agora dangereuse. Une place publique où les usagers échangent des formules lapidaires chaque jour», décrit un officier du Groupement mobile d’intervention N° I. «Automobilistes ou piétons, chacun croit être prioritaire dès lors que scintille le vert… Pendant ce temps, de l’autre côté, c’est la même chose. Au final, d’interminables bouchons surtout aux heures de pointe», ajoute le flic. Un peu comme un pêcheur doit se préoccuper des marées, ce policier dit aussi gérer le dérèglement des feux de signalisation. A son avis, ces derniers sont devenus les mauvais alliés de la sécurité routière à cet endroit qui, selon l’ONG Centre d’études et d’expertise sur la mobilité et l’aménagement, accueille quotidiennement environ 05 millions de voitures et autant de personnes entre 07 heures et 10 heures.

    A ces chiffres, Diane Yemele, sa coordonnatrice, associe une moyenne de 06 accidents (toutes les heures) dus au dérèglement des feux de signalisation. «A divers carrefours de la capitale, dit-elle, la situation n’est pas très différente ; certains feux virent au rouge juste après 20 secondes. D’autres alternent le rouge et le vert dans le même laps de temps. D’autres encore sont éternellement au vert. Pendant que sur le flanc opposé du carrefour, c’est le jaune qui clignote». «Un désordre!», peste Rodrigue Tuenkam, un promoteur d’auto-école. A l’en croire, sur le plan international, on prévoit systématiquement un temps pour le feu rouge pour les autos, on ajoute du temps en fonction de la largeur de l’axe traversé. Il est anormal qu’un feu reste plus de 120 secondes au rouge à 07 heures et moins à midi, au même endroit.

     

    Explications

    A la communauté urbaine de Yaoundé (CUY) chargé de la gestion des feux de signalisation de la capitale, on relativise. «Ces chiffres ne disent rien sur le nombre d’accidents que ces carrefours auraient pu provoquer s’ils n’avaient pas été protégés par des feux de signalisation», allègue-t-on. Prétextant qu’on se trompe de débat, l’on assure que «ce ne sont pas les feux qui sont responsables des accidents de circulation : c’est le non-respect des feux par l’usager au carrefour». Tout au plus, l’on insiste sur les critères qui gouvernent l’installation de feux. «Ils sont basés sur le volume total des voitures et des piétons traversant un carrefour, les délais subis par les véhicules et les piétons venant des rues transversales et le nombre de collisions à ce carrefour. A la Place Ahmadou Ahidjo où les feux sont coordonnés, le feu vert d’une rue transversale pourra être retardé davantage afin de permettre un meilleur écoulement de la circulation dans la rue principale».

    Même si à côté on reconnaît toute l’urgence qu’il y a à repenser et favoriser une utilisation rationnelle et intelligente de tous les équipements de la route, afin de garantir à chacun les meilleures conditions de mobilité. Sur cet aspect, la CUY a déjà, apprend-on, lancé en procédure d’urgence, un appel d’offres national pour les travaux d’équipement en feux tricolores à certains carrefours de Yaoundé. Chiffré à 100 millions de francs CFA, ledit avis d’appel d’offres se résume au phasage actualisé et permanent (logigramme) des feux en fonctions du trafic du carrefour et des différentes heures de pointe.

     

    Jean-René Meva’a Amougou