Remap-Cemac: A l’heure du bilan
Après une dizaine d’années d’activité intense dans la sous-région, ce projet a pris fin le 23 mars 2018 à Yaoundé.
Il n’en fallait pas mieux qu’un séminaire de capitalisation pour dresser le bilan et clôturer près de 10 ans d’activité du projet de renforcement de la gouvernance des matières premières (Remap-Cemac). A Yaoundé, le 23 mars 2018, cadres de la Commission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), autorités de la Coopération allemande, partenaires au développement, ainsi que des bénéficiaires du projet, ont listé les acquis.
Dix années de partenariat dans la gouvernance des matières premières en Afrique centrale, c’est le temps qu’il a fallu au projet Remap pour réaliser sa mission d’appui à la Commission de la Cemac dans l’harmonisation et l’élaboration des politiques communautaires dans le domaine des industries extractives. Parti de sa phase I dont l’objectif principal était de renforcer les capacités d’intervention de l’institution communautaire en faveur de l’Itie, le projet Remap a pu organiser dans sa phase II la durabilité des services offerts par le Secrétariat de coordination et de traitement de l’information sur les industries extractives en zone Cemac (SCTIE-Cemac) aux Etas membres, à savoir la promotion de la bonne gouvernance, la transparence et la promotion du développement durable.
Dans la logique d’une meilleure capitalisation des acquis, des phases précédentes, la phase III s’est portée vers le changement vérifiable dans la gouvernance du secteur des industries extractives, pour plus de transparence et de traçabilité des productions, et aussi en faveur d’une meilleure intégration environnementale et sociale des projets industriels. Le renforcement des capacités institutionnelles de la Commission de la Cemac, le renforcement des capacités des acteurs clés des Etats membres dans les industries extractives, sont les axes majeurs autour desquels la phase III du projet Remap s’est déclinée.
De manière visible, des réalisations importantes dont la mise sur pied du système de gestion des connaissances de la Commission de la Cemac, la réalisation d’une étude sur le genre en zone Cemac, les formations pour le renforcement des capacités de la société civile sur les industries extractives, l’élaboration du document projet sur le code minier Cemac, la création du Réseau de l’académie des matières premières en Afrique centrale, traduisent les résultats de la performance du Remap durant les différentes phases du projet. On n’oublie pas la problématique du genre. Dans un contexte où il représente à la fois un enjeu, un défi et un atout, le genre a été défini par les autorités communautaires comme thématique centrale dans le cadre des activités conjointes pour la phase d’appui en cours. Afin de matérialiser cette priorisation de la thématique du genre, la Commission de la Cemac, a sollicité l’appui du projet Remap pour l’élaboration d’une politique sur le genre en zone Cemac.
Un projet, deux axes stratégiques
Le Remap-Cemac s’était défini un cadre de travail précis pendant son existence.
I- Genre
Disposer de données actuelles sur le genre en zone Cemac afin de proposer des réponses politiques aux questions liées au genre, tel était le but de l’étude sur le genre commanditée par la Commission de la Cemac. Mené par un cabinet de consultants, ce travail avait pour objectif de présenter l’état des lieux, puis de proposer une stratégie du genre en zone Cemac. De manière spécifique, le cabinet avait pour tâches de procéder à une analyse comparative des politiques genres d’autres organisations régionales africaines; présenter le contexte général de l’élaboration d’une politique genre communautaire, la méthodologie adoptée et les propositions finales pour une meilleure politique.
II- «Démocratie et bonne gouvernance dans le secteur des industries extractives»
Tel était le thème de la formation dédiée aux organisations de la société civile tout au long du projet. Il était d’autant plus important que les ressources naturelles constituent une importante source de richesse et un pilier de la croissance économique et du développement de plusieurs pays d’Afrique centrale. C’est pour cette raison qu’en 2009 a été amorcé le volet amélioration de la transparence et la bonne gouvernance dans le secteur extractif en Afrique centrale et que la Cemac promeut la mise en œuvre de «l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives» (Itie) dans les Etats membres, en coordonnant l’échange régional.
Afin d’assurer une meilleure compréhension et appropriation des objectifs, règles, exigences et les perspectives de l’Itie par toutes les parties prenantes, notamment des organisations de la société civile actives dans le secteur, le projet Remap-Cemac, en collaboration avec les secrétariats Itie nationaux, a organisé des formations modulaires pour les OSC opérant en Afrique centrale et actives dans les Comités Itie.
Une douzaine de hauts cadres des ministères des Mines et des Hydrocarbures de la Cemac ont participé à cet effet à un voyage d’études en Allemagne et en France. Là-bas, ils ont pu bénéficier d’entrevues et débats avec les décideurs politiques du secteur minier ; effectuer des visites sur le terrain et dans des entreprises actives dans le secteur extractif ; participer à des séminaires et ateliers thématiques sur différents aspects de l’exploitation minière dans des universités et grandes écoles.
Jean-René Meva’a Amougou.
Les résultats par phase du projet Remap
Phase pilote (2007-2009)
Durant celle-ci, le projet s’est attelé à renforcer les capacités des acteurs nationaux publics ou privés des Etats membres en matière de bonne gouvernance dans le domaine des industries extractives. Il a surtout été question de promouvoir l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) et d’apporter des appuis divers dans le but d’aider à l’exploitation rationnelle des matières premières. L’objectif de ces actions était d’augmenter sensiblement la proportion de la contribution des revenus de cette exploitation à la lutte contre la pauvreté, d’où la mise en place du Système d’information géographique (SIG).
Phase I (2009-2011)
Sur la base des acquis et des leçons de la phase pilote, le projet a eu pour objectif principal de renforcer les capacités d’intervention de la Commission de la Cemac en faveur de l’Itie, principalement celles du Secrétariat de coordination et de traitement de l’information sur les industries extractives en zone Cemac (SCTIE-Cemac). Dans un second temps, le projet s’est engagé dans des activités visant à étendre son champ d’intervention à la lutte contre la pauvreté.
Phase II (2011-2014)
Afin d’assurer l’opérationnalisation de l’ensemble des activités identifiées pour le renforcement des capacités internes de la Commission de la Cemac, le projet a, pendant sa seconde phase opérer une réorientation des objectifs de base. Durant cette phase, la durabilité des services offerts par le SCTIE-Cemac a pu être organisée.
Phase III (2014-2018)
L’objectif de celle-ci est d’œuvrer en faveur d’un véritable changement dans la gouvernance du secteur des industries extractives et une meilleure intégration environnementale et sociale des projets industriels. Au terme de la phase III, le Remap a enregistré les résultats suivants:
• renforcement des capacités de plus de 100 cadres de la Cemac; • élaboration d’une stratégie de communication de la Cemac;
•ouverture d’un site web pour la Cemac ; •élaboration d’une charte sur les politiques et les réformes foncières en zone Cemac;
•un standard communautaire sur la responsabilité sociale des entreprises ; •élaboration d’un projet de code minier communautaire ;
• formation de plus de 90 cadres de la société civile ;
•création d’un réseau de journalistes pour la gouvernance des matières premières.
En 2008, le ministère allemand de la Coopération Economique et du Développement (BMZ) a signé un accord-cadre avec les pays membres de la Cemac. La GIZ, son instrument de coopération, a été mandatée pour la mise en œuvre du projet de renforcement de la gouvernance des matières premières en Afrique centrale (Remap). Il s’agissait d’un projet qui s’inscrivait dans la logique du Programme économique régional (PER) de la Cemac. Ce projet a appuyé la Commission de la Cemac, son organe opérationnel, dans ses initiatives. Le projet s’est donné pour mission d’aider à améliorer la contribution de l’exploitation des richesses du sous-sol à la réduction de la pauvreté, de renforcer la transparence et la gouvernance des revenus, et d’intensifier la coopération internationale dans le secteur de la production pétrolière, gazière et minière. A l’heure où le projet est clôt, que peut-on en retenir ? Intégration répond à cette question.
Dossier réalisé par
Jean-René Meva’a Amougou.
Réactions
Jean-Louis Dieudonné Mountapmbemé, Chef du cabinet du commissaire de la Cemac en charge des droits de l’Homme et de la bonne gouvernance
«La Cemac tire pleine satisfaction de ces dix années»
La Commission de la Cemac gardera longtemps le souvenir de ces moments de travail vivifiants. Elle tire pleine satisfaction de ces dix années d’une collaboration franche, et elle salue l’expertise technique allemande déployée au travers des hommes et des femmes de haut professionnalisme et d’excellentes qualités humaines.
Notre ambition aujourd’hui est non seulement de renforcer les acquis, mais aussi de parvenir à étendre cet accompagnement à d’autres thématiques d’importance toute aussi notable : enseignement, recherche, appui à la justice, renforcement de l’Etat de droit… Il s’agit là des thématiques au cœur de nos préoccupations car elles garantissent la primauté de l’individu dans tout processus de développement. Encore faut-il que nos vœux soient entendus par la République fédérale d’Allemagne. Un dossier préparé à cet effet a été adressé aux autorités de ce pays. La Commission de la Cemac a naturellement hâte de savoir la suite réservée au dit dossier.
En tenant à être représenté aujourd’hui à la cérémonie de clôture du projet, S.E. José Antonio Edjang Ntutumu Avomo, commissaire en charge de la bonne gouvernance, entend marquer tout l’intérêt qu’il porte à cette requête dont l’objet vise le lancement des projets qui ont une incidence directe sur le développement humain, les libertés et sur la qualité de la société à bâtir.
Sylvanus Binla, secrétaire exécutif de Mining Best Practices (MBP)
«Un bon souvenir»
Je regrette sincèrement la clôture du projet Remap. Mais je garde tout de même un bon souvenir de toutes les formations reçues dans le renforcement des capacités de la société civile de la sous-région dans le domaine des matières premières.
D’autres acquis parmi lesquels les techniques d’animation des ateliers, le leadership de la société civile, le réseautage, sont autant de bénéfices pour lesquels il faut être reconnaissants. Aussi, en tant que membre de la société civile et du Comité Itie, j’ai bénéficié des formations du Remap, qui dans l’une de ses interventions, a apporté un accompagnement à certains Etats dans le processus d’admission à l’Itie en impliquant la société civile.
Ata Djaba, Association Kawtal de Batouri (Est-Cameroun)
«Le Remap m’a permis d’apprendre»
Grâce au Remap, j’ai découvert la dimension institutionnelle et politique de la gouvernance dans les industries extractives. En tant que femme rurale, je ne savais que creuser et extraire des pierres précieuses dans les sites miniers.
Le projet Remap m’a permis d’apprendre et surtout de partager mon expérience d’orpailleuse avec d’autres femmes. J’ai pu exposer mon savoir-faire et j’ai eu l’occasion de parler aux officiels de nos conditions de travail dans les sites et de nos doléances.
Michaela Braun, directrice représentante de GIZ à Yaoundé
«Je reste optimiste par rapport aux vœux de la Commission de la Cemac»
Je suis satisfaite que l’Allemagne ait concrétisé son initiative pour soutenir la Commission de la Cemac dans l’implémentation de son programme de gestion des connaissances notamment.
Les avantages que la Cemac peut tirer d’un tel système, en plus d’un archivage efficace et intelligent de l’information sont: la transparence, une vue d’ensemble des affaires, une prise décision facile et pertinente, un accès facile aux informations pratiques, une meilleure efficience des processus administratifs.
Il en est de même des autres projets que nous avons conduits. Ils permettent d’être satisfaits et personnellement je reste optimiste par rapport aux vœux de la Commission de la Cemac.