Le Christianisme en Afrique : comme un arrière – goût d’inachevé
Certes, le Christianisme a construit dispensaires et écoles d’où sont sortis des cadres et hauts cadres. Certes, on lui doit des fermes agricoles comme le projet Songhaï du dominicain nigérian Godfrey Nzamujo au Bénin.
Certes, il a pris la défense de la femme dans tel ou tel pays africain où elle était brimée, maltraitée et opprimée comme le fit l’abbé Robert Atéa dans la région de Gagnoa. Mais le même Christianisme, par l’intermédiaire du Vatican et/ou des missionnaires catholiques français, a-t-il jamais condamné l’ingérence de la France dans nos affaires, le pillage de nos richesses, les coups d’État et rébellions fomentés depuis 1960 par les gouvernements français en Afrique ? A-t-il protesté quand Um Nyobè, Olympio, Lumumba, Sankara et d’autres grands patriotes africains furent assassinés par l’Occident ? Pourquoi se tait-il lorsque la France, sous couleur de lutter contre le terrorisme, vole l’or du Mali?
On le voit : l’évaluation de l’apport ou de l’action du Christianisme en Afrique ne saurait se limiter aux œuvres sociales réalisées par les missionnaires. C’est plutôt à un bilan global ou intégral qu’il convient de se livrer. La question de la souveraineté et de la liberté devrait figurer en bonne place dans ce bilan car qu’est-ce qu’un homme instruit qui n’est pas maître de sa destinée ? Que pèse un homme sachant lire et écrire mais n’ayant aucune prise sur les richesses de son sol et sous-sol ? Si l’homme ne vit pas seulement de pain, si le développement authentique est celui qui promeut tout l’homme (Paul VI dans “Populorum progressio”, 1967), les missionnaires peuvent-ils s’investir dans une pastorale qui ne questionne pas la manière dont les dirigeants de leurs pays regardent et traitent les Africains?
Jean-Claude Djéréké