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La marche au canon

Jeudi 20 octobre 2022, lors d’un briefing à Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré que les livraisons d’armes de l’Union européenne (UE) à Kiev faisaient d’elle une «partie prenante du conflit» en Ukraine. Et pour mieux stigmatiser la complicité des pays de l’UE avec Kiev, Moscou a traité ces derniers de «sponsors du terrorisme».

 

Mardi 18 octobre, Richard Randriamandrato (ministre malgache des Affaires étrangères) a été limogé pour avoir pris la décision de voter en faveur de la résolution condamnant «les annexions illégales de la Russie sur l’Ukraine» le 12 octobre à l’ONU.

Mises ensemble, ces deux actualités permettent de mener autrement une réflexion qui s’était pendant longtemps contentée de taire la responsabilité indirecte et la responsabilité des pays du monde entier dans la guerre en Ukraine. De même, ces actualités, par la délibération qu’elles instituent en leur sein, montrent bien qu’une nouvelle étape vient d’être franchie dans le cadre du conflit en Ukraine et sur le front diplomatique. Elles montrent également que la guerre en Ukraine est structurée par un curieux mélange de pratique géopolitique et diplomatique. On le voit aujourd’hui: fini le temps où seule une seule partie narrait à l’encre rouge les ressorts principaux de ladite guerre.

Et lorsqu’on a pris conscience de la tension internationale à large spectre que ce conflit génère, on est tenté de songer à un avertissement souvent dissimulé par la multitude des acteurs et par l’entrecroisement de leurs trames. Les preuves: jeudi 13 octobre, l’UE a mis en garde la Russie. Elle a prévenu qu’elle ne se laissera pas faire si Moscou décidait d’utiliser l’arme nucléaire. «L’armée russe sera anéantie», a déclaré Maria Zakharova, la porte-parole de l’UE. Moscou en rit et «attend sur place».

Entre-temps, apprend-on, il y a d’autres développements. Le 13 octobre, Emmanuel Macron a promis des radars, des systèmes et des missiles antiaériens à Kiev. Le président français a même répété que la France travaillait avec le Danemark à l’envoi de six canons Caesar, en plus des 18 déjà livrés. Le Royaume-Uni a également annoncé qu’il fournirait à l’Ukraine des missiles de défense antiaérienne supplémentaires, notamment des munitions capables d’abattre des missiles de croisière. Le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov, a salué «une nouvelle ère de la défense aérienne», avec l’arrivée du système «Iris-T d’Allemagne» et la livraison prochaine de «NASAMS américains». Dans le même temps, les 27 membres de l’UE ont donné leur accord à l’organisation d’une mission militaire pour former les forces ukrainiennes dans plusieurs États membres.

De même, en examinant ce qu’il s’est passé à Madagascar, on constate effectivement qu’en Afrique les sentiments de solidarité et les alignements automatiques ou inconditionnels font place à des postures plus complexes.

De là, une donnée commence à apparaître clairement: la guerre dure; elle s’intensifie; les buts stratégiques et la rhétorique de guerre se figent, voire se durcissent. Bref, aucune issue n’est en vue. La guerre en Ukraine semble sans issue et l’on s’achemine probablement vers une impasse stratégique durable. Il est très difficile de prédire ce que sera l’issue de l’affrontement ainsi reconfiguré…

Jean-René Meva’a Amougou

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