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Double nationalité : Les traits généraux du débat

Si la toile de fond est assez démonstrative de la volonté des uns et des autres de trancher définitivement sur la question, l’on s’avance vers des discussions houleuses à l’Assemblée nationale.

Séance plénière au Palais des congrès de Yaoundé

Alors, s’achemine-t-on vers la suppression de l’alinéa 1 de l’article 31 de la loi 68‐LF‐3 du 11 juin 1968 interdisant la double nationalité au Cameroun? Sans doute, à l’Assemblée nationale, c’est «la question de cette session de juin». Selon des informations qui s’échappent de l’hémicycle de Ngoa-Ekelle, l’exécutif s’apprête à déposer un avant-projet de loi portant code des personnes et de la famille devant les députés. Riche de 421 pages traitant de 1245 articles, le document vise à reformer le Code civil, le Code de la nationalité, l’organisation de l’État civil au Cameroun. Sauf «glissement» de dernière minute, le débat parlementaire va donc s’articuler autour de l’examen de ce texte traversé par un souffle résolument nouveau sur la double nationalité.

Rebonds
Reste que le rythme des débats peut avoir un «côté addictif», selon un témoin privilégié des joutes parlementaires. À la vérité, les rebonds sur certains aspects ne vont pas manquer d’exacerber le fractionnement politique de l’hémicycle et les types d’intérêts défendus par les uns et les autres. Selon nos informations, l’impasse dans laquelle le texte risque de se retrouver naît du rétrécissement ou de l’élargissement sémantique de l’article 81.

D’après cette ligne, «tout Camerounais justifiant d’une autre nationalité conserve la nationalité camerounaise, sauf répudiation de celle-ci». Pour une bonne frange de députés, cet article camoufle la braderie de la nationalité camerounaise par des «dénominations nouvelles». À Yaoundé, dans les couloirs et coins du Palais des congrès ce 27 juin 2020, les surenchères moralistes se multiplient dans les causeries entre parlementaires. Chez certains, le texte bourdonne déjà. Chez d’autres, mises en garde et analogies pathétiques foisonnent autour du sujet.

Au-delà, la toile de fond est assez démonstrative de la volonté des uns et des autres de trancher définitivement les différentes thématiques soulevées par cet avant-projet de loi. C’est le cas de Joshua Nambangi Oshi. Le député du Social Democratic Front (SDF) a à cœur d’être à l’avant-scène d’un combat qu’il dit mener à l’Assemblée nationale depuis 2014. Cette année-là, il avait déposé au bureau de l’hémicycle une proposition de loi modifiant et complétant la loi n° 1968‐LF‐3 du 11 juin 1968 portant code de nationalité camerounaise. Depuis lors, sa démarche n’a pas prospéré.

Pour Cabral Libii, il est important de faire la différence entre «la double nationalité légitime et la double nationalité illégitime». Nul doute qu’on attend voir le député et président du PCRN (Parti camerounais pour la réconciliation nationale) remettre au goût du jour le «bénéfice» que pourraient tirer certains délinquants économiques de la double nationalité.

Subtilement évoquée lors d’une visite officielle en France en juillet 2009, la question de la double nationalité au Cameroun avait refait surface (sur insistance de quelques Camerounais de la diaspora) lors du Grand dialogue national tenu du 30 septembre au 4 octobre 2019 à Yaoundé. Entre autres recommandations de cette grand-messe sociopolitique, l’on retient la reconnaissance de la double nationalité par une loi. Selon Dr Déli Tizé Téri, enseignant-chercheur en migrations internationales, la double nationalité signifie que «vous êtes à la fois ici et là-bas. C’est être un Camerounais transnational qui a une vie dans le pays d’accueil et une vie dans le pays. C’est-à-dire, bénéficier des opportunités des deux côtés».

Jean-René Meva’a Amougou

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