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Après l’interdiction des produits éclaircissants : Les lobbies entrent en scène

Galvanisés par des réseaux multiples d’ici et d’ailleurs, des hommes et des femmes entendent redynamiser un élan collectif autour des ingrédients cosmétiques interdits par le ministre de la Santé publique (Minsanté).

 

«Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de coups de fil et de menaces que j’ai reçus depuis que ces communiqués sont sortis!» En entendant ces mots sortir de la bouche de Manouada Malachie, au cours d’une interview accordée à Naja TV (chaîne de télévision en ligne émettant à partir du Cameroun) le 18 août 2022, tout citoyen a pu faire le constat: le Minsanté a voulu intégrer dans sa déclaration une pluralité de récits. «Principalement celui relatif à l’accueil réservé à sa décision d’interdire le commerce des boissons éclaircissantes au Cameroun ; celui présentant les effets positifs ou neutres de ladite décision et enfin celui des effets négatifs», analyse-t-on à la cellule de communication du Minsanté ce 20 août 2022.

Mobilisation
En fait, par leurs libellés et le timing même de leurs publications, les communiqués signés respectivement les 10 et 19 août dernier ont fini par structurer une dynamique d’acteurs de la sphère du cosmétique dans le pays et à l’étranger. Selon des informations de première main, la situation révèle deux réalités. «D’une part, la volonté certains lobbies de la mode et du racisme de chambouler de fond en comble le corpus de l’interdiction des substances considérées comme détonateurs des maladies de la peau. D’autre part, elle montre comment se mobilisent des gens pour réajuster le marché camerounais des produits cosmétiques nocifs au mieux de leurs intérêts», souffle un proche du dossier.

Anticipation
D’après la même source, d’importantes activités d’influence ont été déployées auprès de quelques organisations de la société civile et de la recherche scientifique basées au Cameroun. À la base, apprend-on, il s’agit d’organiser le déraillement d’un débat annoncé très prochainement au niveau du parlement. Les lobbyistes chercheraient donc à prendre de l’avance sur le filet législatif qui, au cas où il serait adopté, pourrait mettre à mal les intérêts économiques des producteurs des produits décapants.

Au même moment, indique-t-on encore, ces derniers s’activent dans le but d’obtenir une étude d’impact économique, un moyen fort commode de gagner un délai supplémentaire pour influencer une quelconque nouvelle réglementation. Jouant sur les dissensions entre certaines administrations (Mincommerce, Mindmit et Mincommerce), leur stratégie est celle de l’encerclement pour effet de finir d’isoler Manaouda Malachie. Sur le coup, l’idée d’une controverse scientifique sur la gravité des effets de certains produits de beauté sur le corps humain se murmure, à en croire un expert du Conseil scientifique du Cameroun. À la manœuvre d’une part, des fonds d’investissement et le lobby pharmaceutique et, d’autre part, les universités étrangères pourvoyeuses de brevets et d’expertise en matière de propriété intellectuelle.

En rappel, c’est le 19 août dernier que Manaouda Malachie a interdit l’importation au Cameroun de certaines substances qui entrent dans la composition des produits cosmétiques. «Sont et demeurent interdits, à compter de la date de signataire de la présente décision, l’importation, la fabrication et la distribution des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle contenant les substances ci-après: l’hydroquinone et ses dérivées ; le mercure et ses dérivées; les collagènes», a instruit le Minsanté qui a également proscrit toute publicité des produits contenant ces substances.

Jean-René Meva’a Amougou

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