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Monument: Mgr Ndongmo divise la Menoua

Pour ses admirateurs, il faut cimenter ce qu’il y a d’héroïque dans la posture de ce prélat décédé le 29 mai 1992 au Québec (Canada). L’initiative se heurte à des résistances.

Mgr Albert Ndongmo de son vivant.

«Porteur de cornes», «évêque du tonnerre», «un David se mesurant au Goliath colonial». Les expressions fleurissent pour désigner Mgr Albert Ndongmo, le tout premier évêque de Nkongsamba (région du Littoral). Aujourd’hui, l’œuvre de ce prêtre résonne avec une émotion redoublée par le passage des années.
Dans la région de l’Ouest, deux projets sont en itinérance: l’édification à Bafou (dans le département de la Menoua) d’une statue du défunt évêque et la relance de la Fondation Albert Ndongmo.

Si les deux idées portent les signatures des Pr. Tadadjeu et Fabien Kangue Epanne et du journaliste Célestin Lingo (tous de regrettées mémoire), elles ont fondu, comme une motte de beurre, face à la réticence de certaines autorités religieuses, traditionnelles et administratives de la Menoua. Selon celles-ci, souligne-t-on, Mgr Albert Ndongmo ne constitue pas une icône consensuelle. Calées sur cette position, avance-t-on encore, ces autorités s’échinent chaque jour à barrer la voie aux dits projets.

Le combat continue

En face, un «collège pro-Ndongmo» évolue dans le sens inverse. A l’occasion de la commémoration du décès de l’ancien évêque de Nkongsamba, Jean Baptiste Sipa a, le 29 mai dernier à Douala, remis ces idées au goût du jour. Parce que, estime le journaliste émérite, «le Cameroun doit se souvenir de Mgr Ndongmo pour son action forte ainsi que son message porteur et transgénérationnel».

«Aujourd’hui, le découragement est à ce point avancé qu’il faudra absolument un homme très charismatique pour relancer ces projets. Car qu’on l’aime ou pas, Mgr Albert Ndongmo aura été un homme d’exception, un visionnaire», confie Fabien Tsafack, membre de la défunte Fondation et congressiste.
Un prêtre, membre du conseil épiscopal du diocèse de Bafoussam enfonce: «Mgr Albert Ndongmo comme tous les révolutionnaires est sujet tout le temps à des opinions controversées.

Quand bien même les nouveaux prélats au sein de l’Eglise catholique au Cameroun épouseraient son idéologie, l’on est enferré par un ensemble de règles de fonctionnement de l’église d’aujourd’hui». Et de questionner: « Les préoccupations des carrières des uns et des au sein de l’épiscopat amènent à s’interroger si l’on a le droit de suivre des idéologies révolutionnaires comme celle de Mgr Albert Ndongmo ?»

Le Pr Emile Temgoua, 1er adjoint au maire de Dschang et en charge des grands travaux dans cette municipalité, indique que «les raisons qui freinent ces projets sont totalement vaines». Il ajoute: «par procuration, certains veulent perpétuer le principe de l’exclusion des figures marquantes de l’histoire de notre pays».

Filibert Ndongo

(correspondance particulière)

Une question, une réponse

Premier arrondissement de Douala, le lieu-dit «Mobil Njoh Njoh» se prête à la colère des chefs traditionnels du canton Bell ce 26 mai 2018. Unilatéralement, ils détruisent les installations d’un chantier. La scène contrarie l’ambition de la Communauté urbaine de Douala d’ériger un monument, en mémoire du nationaliste Ruben Um Nyobe.

Les dignitaires conduits par S.M. Jean Yves Eboumbou Manga, chef supérieur du canton Bell, insistent sur un principal grief: «Eriger un monument d’une telle envergure dans un village comme le nôtre, qu’on nous surprenne comme tout le monde, ne nous parait pas correct. Raison pour laquelle nous avons voulu qu’il soit clair que cette façon de faire n’est pas du tout appréciée par nous».

Officiellement, ces chefs doualas ne sont ni verts de jalousie, ni rouges de plaisir. Ils ne sont pas simplement contents, affirment ceux qui promènent leurs analyses dans l’underground de la vie traditionnelle dans la capitale économique du Cameroun.

Et pourquoi? Certains avaient, il y a quelque temps, posé la question autrement : «qu’est-ce qui dérange de voir un monument de l’une des figures de l’histoire du pays ?» Dans leur réponse, d’autres validaient ironiquement qu’«au Cameroun, l’histoire subit un régime très spécial et disproportionné, par rapport à la vérité; quelques fossoyeurs ornent fougueusement  le quotidien avec de faux héros nationaux».

Jean René Meva’a Amougou

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