Education au Cameroun : la violence scolaire en présentiel
Elle est désormais un phénomène quotidien. Les élèves, enseignants et autres encadreurs sont mêlés à ce désastre imprévisible qui refait surface et gagne du terrain au Cameroun.
La violence scolaire frappe à nouveau aux portes des lycées et collèges du Cameroun. Au point d’inquiéter les élèves et enseignants des établissements qui en sont pour l’instant épargnés. Bachir est élève au Lycée de la Cité verte. Il justifie ce fléau par la formation des clans. «Ici au Lycée, il y a des clans. Les élèves se retrouvent par affinité, ou tout autre lien. On ne se lie pas à l’un de façon naturelle. Mais aussi, les enseignants abusent de leur autorité. Ils ne se comportent pas toujours bien, contrairement à ce qu’on croit. Et leur attitude finit par pousser l’élève à bout». Son camarade Ulrich est sur la même longueur d’onde et trouve que «le sentiment de supériorité est présent dans cet environnement. Certains méprisent et rabaissent leurs camarades. Ce qui crée des conflits, des disputes et des bagarres».
Les causes
On ne saurait parler de recrudescence, car la violence scolaire n’est pas un phénomène nouveau dans le pays. Il y a deux ans, la société a été témoin de l’assassinat d’un professeur à Nkolbisson et tout récemment, un proviseur de la place s’est fait poignarder suite à une altercation avec un élève. En 2011-2012, un enseignant avait été décapité à Bangangté par un élève. C’est un problème de société qui se manifeste simplement aussi dans les établissements scolaires.
Pendant que certains vouent un profond respect à leurs encadreurs, d’autres font le contraire. Mais ce n’est pas la seule raison. Eric affirme en effet que «lorsque vous voyez une bagarre ou une dispute, il y a deux raisons. Soit il s’agit d’argent, soit d’une copine. C’est connu ici». Il en parle car il a déjà manifesté un acte de violence envers son camarade. «Il me devait de l’argent. Je le lui ai réclamé en vain. Je n’en pouvais plus de son indifférence et ça a déclenché les disputes. Malgré cela, jusqu’à ce jour, je n’ai pas reçu mon argent». Comme quoi, la violence ne résout pas les problèmes.
Ibrahim Bakari Ateba, censeur dans le même lycée a identifié deux types de causes: «comme cause exogène, au niveau de la famille, il y a des éléments qui concourent à engendrer les violences en milieu scolaire. Pour les causes endogènes. Il arrive que ceux qui sont appelés à appliquer le règlement exagèrent. Beaucoup d’encadreurs ignorent les textes qui régissent le métier. Nombreux appliquent peu ou jamais le règlement intérieur. Il y a beaucoup de confusions dans la prise de décision. Par exemple, une faute disciplinaire ne doit pas conduire à une sanction pédagogique. Il y en a d’autres».
Esquisses de solutions
Les jeunes proposent des solutions pour éviter des altercations. Bachir pour sa part opte pour «la communication avec les camarades qui affichent des comportements déplacés. Si ça me dépasse, je vais au service de l’assistance sociale où il sera tenu et encadré». Ulrich encourage la soumission et le respect.
Certains établissements scolaires mettent en plan des stratégies pour limiter les effets de la violence. Le censeur annonce leur procédure: «au lycée de la Cité verte, nous avons d’abord le règlement intérieur lu à la rentrée dans chaque classe et par la suite inscrit dans le carnet de note et de correspondance de l’élève. À travers ce dernier, nous communiquons avec les parents. Ensuite, nous faisons un casting strict de recrutement des élèves et des enseignants par une enquête de moralité et une étude des dossiers. En outre, lors des sessions de coordination, la hiérarchie ne cesse de sensibiliser les surveillants généraux, de secteur, les censeurs et les enseignants afin de limiter les cas de violence dans cet environnement. Toutes les mesures ont été prises. En fonction de la gravité de la situation, on procède par une convocation des parents ou une sanction directe». De plus, «il y a une amitié qui s’est liée entre enseignants et élèves. Ce qui fait que lorsqu’un élève affiche un comportement déplacé, ce sont ses camarades qui le lui reprochent».
En guise de conseils pour éradiquer cette gangrène en milieu scolaire, Ibrahim Bakari Ateba se positionne comme «parent, il faut le dialogue. Il faut beaucoup de prière. Aussi, les pouvoirs publics n’aident pas beaucoup l’école dans la mesure où le système mis en place dresse l’élève contre les parents et les enseignants par le biais de la promotion collective. En tant que responsable d’établissement, il faut revoir le traitement des enseignants et le mode de recrutement des élèves. Enfin, j’interpelle les parents pour inculquer la discipline à leurs progénitures dès la maison».
Presvualie Ngo Nwaha (stagiaire)