Olembe : Déjà à quel stade?
Le site du chantier de l’infrastructure sportive enfourche lui-même sa trompette et fait taire les hymnes aux refrains spécialement écrits autour de son état miteux.

Un jeune Camerounais influenceur web s’amuse à jouer à l’imprésario à l’entrée ouest du complexe sportif d’Olembe. Aussitôt postée, en début de soirée ce 26 novembre 2021, la vidéo émoustille la toile. Le monde entier se gargarise de disposer enfin d’un document capable de bousculer la Confédération africaine de football (CAF) et ses plus récentes rigidités. «Voici le stade qui, hier encore, et à l’échelle de toute la planète, avait été présenté à la fois comme un conte de fées à la fin triste, et comme une tragédie qui ne peut que se terminer mal?» Entre dits et non-dits, la question que pose un internaute trouve réponse sur le site. On dirait que celui-ci a désormais tout le temps de se mirer dans sa légende.
Ce jour, deux bonnes nouvelles s’enchaînent. La première c’est qu’«il y a un état d’esprit hyper constructif», selon Jules Denis Onana, le coordonnateur du site d’Olembé. S’inspirant des simulations faites par le Canadien Magil, l’ancien défenseur des Lions indomptables est formel: «revenez ici au soir du 29 novembre 2021, cet endroit n’aura plus le même visage». Dans ce propos se profilent plusieurs informations. La plus importante est relative à la construction d’une barrière (objet de la discorde entre la CAF et le Cameroun, NDLR). Restée en jachère à cause d’autres lourds travaux d’électricité et de télécommunications, «elle est à un pouce de son achèvement; elle va épouser la configuration souhaitée par nos amis du Caire», affirme Jules Denis Onana. Deuxième information livrée par ce dernier: «nous sommes à presque 100% et le match d’ouverture de la CAN va se disputer ici !»
Dehors…
À l’approche de l’échéance du 30 novembre 2021 (fixée par Magil), les travaux sont au plus fort. Parce que Olembe est un édifice épuré où les thèmes de mouvement, de légèreté et d’universalité sont suggérés, différents corps de métier ont dû s’adapter pour ne pas se gêner et travailler ensemble. Dehors, organisation sans faille et parfaite maîtrise de la circulation des engins. Sous nos yeux, des mains s’additionnent pour planter des arbres. Pour expliquer, un expert rappelle que, dessiné par les concepteurs de l’Italien Piccini, basé sur le concept d’un «stade dans la forêt», le nouvel écrin a été conçu pour incorporer des éléments de la nature comme la verdure et les arbres, tout en étant équipé de technologies à la pointe du progrès. Sous nos yeux aussi, une importante équipe met la dernière main sur ce qu’un ouvrier désigne sous l’appellation de «l’endroit qui semble déranger la CAF». D’ores et déjà, Jules Denis Onana annonce de nouveaux lieux de vie innovants à côté de deux stades annexes à la pointe. Tout à côté, un cadre du chantier vante la suffisance de la capacité d’alimentation des points d’eau et la surveillance des lieux. «À l’heure actuelle, des centaines de chasses d’eau peuvent être actionnées en même temps et tout est contrôlé à partir de nos caméras!», appuie-t-il
Dedans…
De nombreux ouvriers se côtoient sur le site. Approchés, quelques-uns se sentent «respectés» de s’occuper de la pelouse. «Elle est faite de paspalum notatum; plus il est court, moins les joueurs se fatiguent; veiller à sa taille comme la CAF l’impose est notre travail actuel», renseigne le chef jardinier. Dans cette imposante arène, un système de tribunes inclinées à leur maximum propose la meilleure vue possible au public. «Pour assurer la qualité du jeu et surtout celle de la retransmission TV, on doit voir le terrain comme en plein jour, même la nuit, sans aucune ombre sur le gazon. En termes techniques, la luminosité doit être de 1 400 lux minimum sur tout le terrain, au mieux 2 300. Aujourd’hui, n’avons aucune inquiétude là-dessus», assure un ingénieur, présentant deux écrans géants intérieurs déjà fonctionnels.
Au premier coup d’œil, la toiture se dresse telle une auréole d’écailles de pangolin. Elle est, indique un autre ingénieur, conçue pour résister à des vitesses de vent de 145 km/h et capable de protéger toutes les places assises sans couvrir l’air de jeu. De plusieurs dizaines de mètres au-dessus de la pelouse, quelques journalistes remarquent qu’elle atténue les contrastes et répartit la lumière naturelle. «Cette lumière naturelle est nécessaire à la santé du gazon», signale un autre ingénieur.
Ce 26 novembre 2021, au détour d’une randonnée de près de trois heures, un changement d’image s’opère chez quelques confrères rencontrés sur place. Dans une incroyable formule, l’un assure: «voici un vrai stade qui, à la fois, a le mérite d’être construit au Cameroun et le premier en Afrique subsaharienne à présenter un tel standing». Au vrai, l’ouvrage ne marque pas seulement la construction d’une véritable «cathédrale du football», mais trahit aussi une volonté politique forte. Cela est d’autant plus vrai que «lorsqu’il débute effectivement en 2017, la crise financière ne laisse que peu de marge de manœuvre à l’État du Cameroun; les bailleurs de fonds sont à la dérive; la reconfiguration de la facture initiale et le sort viennent s’acharner sur le projet quand la pandémie du Covid-19 intervient», explique un cadre.
Jean-René Meva’a Amougou