Zone anglophone : Terreur et horreur in situ

Inspirée par une certaine diaspora, une ligne de pensée est rentrée dans la stratégie d’épuisement de Yaoundé. Au menu: provocations, intimidations et assassinats. 

Ikom Polycarp, séparatiste repenti, assassiné le weekend dernier

«Des circonstances coriaces et provocatrices nécessitent des actions coriaces». En balançant ce message sur la toile le 6 octobre 2019, Chris Anu se veut le porte-parole d’une diaspora obstinée à relancer durablement l’opération villes mortes dans la région du Nord-Ouest. Depuis les États-Unis où il réside, le secrétaire à la communication du gouvernement intérimaire de la République virtuelle d’Ambazonie annonce que de «gros blocages vont se remettre en place, avec le coup de pouce des populations».

Visiblement, même après le Grand dialogue national, la lassitude n’a pas atteint les activistes séparatistes résidant hors du Cameroun. Traitant les assises de Yaoundé de «provocatrices», une ligne de pensée est rentrée dans une stratégie d’épuisement du gouvernement, ce d’autant plus que Sissiku Ayuk Tabe et d’autres leaders sécessionnistes sont toujours incarcérés à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé. D’où un ultimatum incandescent. «Nous donnons trois semaines aux autorités du Cameroun français, juste trois semaines, pour se concerter et libérer sans condition, tous les Ambazoniens incarcérés dans leurs geôles, le plus tôt possible, comme ils l’ont fait avec les prisonniers politiques», tempête Chris Anu. En plaçant cette condition dans les priorités de leur mouvement, les miliciens s’obligent à des mesures concrètes: «Sans quoi, le gouvernement intérimaire va déclarer des villes mortes totales à durée indéterminée dans le territoire de l’Ambazonie. Toutes les frontières d’avec le Cameroun français seront fermées».

Sang pour sang
Dans les deux régions anglophones, la tension est montée d’un cran depuis quelques jours. Ce qui s’y joue, c’est la terreur. Provocation après provocation, intimidation après intimidation, les «Ambazoniens» gagnent du terrain et les consciences. Parce que deux semaines se sont écoulées depuis le lancement de cet ultimatum, le risque d’un nouvel exode des populations des deux régions anglophones plane. Lundi 14 octobre 2019, une bande a fait une irruption à Sonne (Tiko, région du Sud-Ouest).

Armés de machettes, des hommes ont tenu en respect l’un des campements des employés de la Cameroon Development Corporation (CDC). Dans un communiqué, Franklin Njie Ngoni, directeur général de la CDC, renseigne que les assaillants ont mutilé les oreilles, les doigts et narines de six manœuvres. Quatre autres responsables, parmi lesquels des superviseurs et chefs d’équipe du secteur Sonne-Likomba, ont été kidnappés par cette milice séparatiste et conduits vers une destination inconnue.
À Wum, chef-lieu du département de la Menchum (région du Nord-Ouest), un ex-combattant a été assassiné, 24 h seulement après sa repentance.

Ikom Polycarp avait saisi, mercredi dernier 16 octobre, l’opportunité de l’installation du nouveau préfet du département de la Menchum, pour déposer les armes et se repentir publiquement. Sans vie et complètement amoché, son corps a été découvert au matin du 17 octobre 2019. On n’avait pas encore fini d’épiloguer sur la mort de ce repenti qu’au matin 17 octobre, la nouvelle de l’assassinat de deux éléments du comité de vigilance (dont le célèbre Nkwenti alias Scorpion) du lieu- dit Hot-spot (Up station à Bamenda) a accentué la stupeur des populations. Ce qui vient confirmer le degré d’insécurité dans la ville de Bamenda et partant dans toute la région.

Sur le plan sécuritaire, les autorités locales ne reculent pas. «Il y a un contexte de menace, mais pas de menace précise, identifiée… Reste que cette menace n’est pas seulement théorique, mais bien réelle», répètent sur tous les tons les chefs de la police et de la gendarmerie. «Il y a des ajustements quotidiens», prévient-on.

Zéphyrin Fotso Kamga

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