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Spéculation et manipulation des prix à Yaoundé : La pègre commerçante se dénonce

Pris la main dans le sac, certains vendeurs n’hésitent pas à livrer d’autres aux agents du ministère du Commerce.

Un boutiquier à Yaoundé

Comme dans tout bon western, le voleur de chèvres n’hésite pas à dénoncer le voleur de brebis, et vice-versa. À Mvog-Mbi, Mvog-Atangana Mballa, Ayéné, Mvan ou encore à Biyem-Assi, ce qui se passe est tissé d’un fil de dénonciation mutuelle. Ces derniers temps, lors des incursions des agents du ministère du Commerce (Mincommerce) ces derniers jours dans des boutiques à Yaoundé, ce «jeu» est déguisé, raffiné. Parmi les commerçants, chacun profile sa posture de «moins pourri du marché».

Dans ces lieux, les vendeurs, surtout les boutiquiers, se livrent des guerres, lorsqu’ils constatent que leurs collègues augmentent les prix. Au premier abord, c’est une cause noble. Sauf que pour Bakari propriétaire de boutique à la Poste centrale, Ayéné et au marché 8e à Tsinga dans le 2e arrondissement, c’est tout simplement de la jalousie. «On se connait parce qu’actuellement, le commerce se fait par communauté. Bien plus encore, les gens n’aiment pas mourir seuls. Tu trafiques les prix, on t’arrête tu demandes aux agents de venir chez ton voisin», fulmine Atango, boutiquier à Ekounou, en direction de son voisin.

Coup bas et espionnage
Jojo, tenancier d’une boutique à Mvog-Atangana Mballa, explique que des commerçants voulant être seul crédible dans un secteur combinent avec les agents pour tenter de mettre en difficulté leurs concurrents. À Ayéné, quartier estudiantin situé dans le 4e arrondissement, les échanges entre Bakari et papa Yves sont houleux. Papa Yves vient d’être attrapé la main dans le sac. Il vent le litre d’huile Mayor à 1600 FCFA au lieu de 1500 FCFA comme exigé par le Mincommerce.

Avant de s’amender, il exige que les agents du Mincommerce inspectent la boutique de son voisin. Il dit que ce dernier affiche des prix qu’il ne respecte pas. «Envoyez un enfant acheter l’huile chez mon voisin, il vend plus chère. Le prix affiché n’est pas le bon». Bakary ayant eu l’information se met dans une colère noire. «Chaque fois qu’il est pris la main dans le sac, il cherche toujours à m’impliquer. Chaque jour il envoie des indics chez moi, je ne supporte plus ça», prévient le quadragénaire.

Du côté de Mvog-Mbi non loin de la chapelle, le scénario est le même selon Alain, boutiquier lui aussi. Il explique que son voisin veut avoir le monopole sur certains produits. Il «fait appel à une de ses connaissances, agent de la mairie pour m’intimider».

Au marché centrale, Marcelo ferme sa boutique pour ouvrir une autre à l’Omnisports. «Mes frères m’ont eu! Ils appellent non seulement les agents du Mincommerce, mais aussi, ceux de la mairie de la ville. J’ai été frappé par de lourdes amendes en millions. Pour ne pas avoir des problèmes, j’ouvre à Mfandéna, même si j’ai moins de clients comme au marché central», révèle le jeune homme désenchanté.

Du côté d’Odza, les boutiquiers rwandais accusent leurs collègues camerounais de tout faire pour les pousser hors du circuit de la vente. «Au lieu de respecter les prix, ils les augmentent. Après, ils nous accusent de tuer le marché quand on veut satisfaire le client. Ils nous demandent d’augmenter les prix. Mais à la fin, les agents du Mincommerce nous inspectent plus». Disent-ils. Tout en soupçonnant les Camerounais de combines avec certains agents.

André Gromyko Balla

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