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Débrouillardise à Yaoundé : Mokolo-Élobi, QG du recyclage des déchets électroménagers

Dans cet endroit insalubre du 2e arrondissement, les hommes gagnent leur vie en acceptant de recycler les appareils électroménagers.

Le Ghanéen en action

Comme des tôliers et mécaniciens qui remettent en état de marche des véhicules, Abdou Ghanéen, Alidou Soudanais et leurs collègues camerounais sont aux prises quotidiennes avec les milliers d’appareils électroménagers défectueux achetés auprès des vendeurs ambulants, et même des dames. À travers leurs savoir-faire, ils donnent une seconde vie, voir l’énième, aux machines envoyées dans les oubliettes. « À croire qu’une machine gâtée et jetée à la poubelle est une mauvaise idée. Nous, sans avoir été à l’école, et grâce au don que Dieu nous a donné, arrangeons les machines et les gens reviennent les acheter», se gargarise Abdou, l’électronicien ghanéen, devant son comptoir juste en face de Dubaï market à Tsinga Élobi.

Si nous sommes dans une maison, on dira qu’il est cuisinier. Parce que cet autodidacte retouche uniquement les appareils de cuisine. Beaucoup plus les réchauds à pétrole ou à gaz, d’où son surnom «Abdou réchaud». Ce mercredi 11 octobre 2023, il est 14 heures et le tôlier dit réparer son 6e réchaud à huile. Il procède aux derniers réglages, celui de la peinture en aluminium rendant l’appareil comme neuf. «J’ai acheté le petit réchaud-ci à 1000 FCFA, on te donnait ça tu refusais. J’ai acheté un petit matériel à 500 FCFA et il est à nouveau neuf. Je le vends à 6 000 FCFA».

Tout à côté de lui, se trouve Ali la soixantaine révolue. Ce dernier vend les réchauds, il veut acheter ledit appareil à 4 500 FCFA. «Je ne peux pas partir d’ici avec moins de 40 000 FCFA». Subrepticement, Abdou n’est pas d’accord avec Ali. Son embonpoint montre qu’il gagne bien sa vie ici à Tsinga Élobi. Prêt de la route, l’on voit deux machines à écraser manuellement les arachides. Une est prête à la vente 10 000 FCFA, «l’autre attend le poignet en bois pour être prête à remarcher», précise-t-il. D’autres appareils comme les réchauds à gaz dont les systèmes de conduits ou les foyers sont défectueux attendent aussi d’être réparés. Après Ali, une femme au foyer se pointe pour récupérer son réchaud à gaz acheté dans une brocante et laisse la veille. Il dit à cette dernière «qu’il faut 2 semaines pour toucher ton réchaud, j’ai 20 réchauds avant». L’homme ne chôme pas, la dame propose alors de doubler la paye. «Je te donne 8 000 au lieu de 4 000 FCFA pour prendre mon réchaud demain», Abdou sans oser rechigner accepter le deal.

Autre exemple
Alidou, Soudanais, est très content, il vient de dépanner un fer à repasser. «Trouver la solution pour faire marcher ce fer n’était pas facile. C’est depuis le matin que j’essaie de trouver la solution. Allah est grand», s’exclame-t-il. Son collègue lui demande de vendre ce fer à un prix onéreux. «Vend ça au moins à 10 000 FCFA. C’est un fer acheté aux enchères et il ne marchait pas. Il doit même taxer à 15 000 FCFA», suggère-t-il. Alidou s’occupe des autres appareils, notamment les chauffes eaux et les prises servant à brancher les appareils. Chez ce Soudanais, les chargeurs de téléphone, les écouteurs, les prises ont le même prix : 500 FCFA. «Je ne veux pas les maux de tête, on teste quelque chose tu me donnes mes 500». Au bas mot, Alidou dit gagner 35 000 FCFA par jour. «Un fonctionnaire ne me peut pas en termes d’argent et j’emploie les Camerounais», se vante le réparateur. La preuve, Amadou Camerounais, joue le rôle d’intermédiaire en recherchant les clients à ce dernier.

André Gromyko Balla

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