Chaises plastiques défectueuses : nouveau carburant de fours de cuisine à Yaoundé
Elles sont utilisées dans les marchés de la capitale camerounaise comme combustible pour chauffer l’eau destinée au nettoyage des gibiers.
Le bois de chauffe coûte de plus en plus cher dans la ville de Yaoundé. Ce qui amène certains entrepreneurs de la chaine alimentaire à la résilience. Ceux en charge du nettoyage des animaux de consommation utilisent désormais des chaises en plastique défectueuses dans leurs activités quotidiennes. Dans les marchés de la capitale camerounaise, elles sont utilisées comme bois dans la production du feu, pour chauffer de l’eau destinée à nettoyer certains gibiers comme le poulet, le porc, mais aussi la chèvre, le pangolin, les hérissons, les cobayes, les singes et bien d’autres.
L’acquisition de ces chaises est un processus très complexe. Car, elles ne se trouvent pas facilement. Seuls les détenteurs de bars et autres circuit de boissons font ce business, et ceux qui parviennent à les acheter sont pour la plupart des natifs du coin. Ces chaises cassées sont achetées à prix d’or auprès des vendeurs. Ce qui provoque en même temps l’augmentation des coûts pour les utilisateurs de l’eau de nettoyage dans les marchés de Mvog-mbi, Mvog-Atangana Mballa et bien d’autres.
Emmanuel Owona est très concentré à faire les comptes de la journée en ce mercredi de juillet au marché des poulets de Mvog-Mbi. Au total 21 personnes sont inscrites dans son cahier, soit 1 000 FCFA par personne pour un cout total de 21 000 FCFA. Il est l’un des deux propriétaires du feu dans le marché poulet. Son feu comme il l’appelle, a une particularité: il consomme, outre le bois de chauffe, les chaises en plastique. «Le bois à lui tout seul ne peut pas faire jaillir le feu, j’utilise les chaises en plastiques parce qu’elles sont aussi un bois et elles mettent long», déclare l’entrepreneur. Emmanuel Owona dit utiliser 2 chaises par jour pour la production du feu. «Les barmans viennent eux-mêmes laisser les chaises et je paye souvent après avoir utilisé celles-ci», évoque-t-il.
Ce mardi soir, dame Jorgette, tenancière d’un bar à Olezoa, vient déposer 6 chaises. Pour un coût total de 12000 FCFA, soit 2000 FCFA l’unité. Afin de ne pas avoir de différend, la dame lui rappelle qu’il y a un impayé de 2 chaises. «Je sais que nos comptes ne sont pas bons, mais je vais solder ma dette», rassure-t-il.
Qualité
Il faut se rendre sur les lieux pour voir le rôle que joue ce combustible, non seulement pour allumer le feu, mais aussi le maintenir. Quatre arguments sont mis en avant pour vanter l’utilisation de ces chaises en plastique dans le processus de production de l’eau chaude. Le premier argument est le temps, pas moins de 11 heures d’horloge pour un foyer. Ce sont ces chaises défectueuses qui augmentent la durée de vie du feu, qui se consume lentement. Le deuxième est lié à la qualité de la flamme. Jean, nettoyeur, informe: «l’eau est bien chaude, ce qui facilite le nettoyage des animaux». Le troisième argument, et non des moindre, est «qu’un feu où on a mis les chaises en plastiques résiste à l’eau», l’on constate alors que le feu est sur l’eau et ne s’éteint pas», comme l’explique Sylvie, nettoyeuse elle aussi. Le dernier argument est une comparaison avec le butane qui est trop onéreux. «Si c’était le gaz, j’utiliserais au moins 6 bouteilles par jour», conclut Emmanuel. Mais, ces entrepreneurs précisent qu’ils associent toujours le bois de chauffe comme catalysant, «même les fours utilisant la sciure ont besoin de bois».
André Gromyko Balla