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Habitat à Yaoundé : la solution des chantiers inachevés

Pour certains groupes sociaux, le choix des maisons en construction constitue une panacée dans la capitale.

 

Ce n’est pas un euphémisme d’appeler les bâtisses en construction dans la capitale camerounaise, «maisons Tupuri». Pour bon nombre de propriétaires, il n’y a pas lieu de paniquer, si les moyens de poursuivre les travaux manquent. Ils savent pouvoir compter sur les membres de cette communauté. Ceux-ci sont souvent prêts à assurer la sécurité des bâtisses. Ce qui est compréhensible, puisque lesdits logements sont gratuits.

André Yoro, la quarantaine, est sommé de libérer le duplex qu’il occupe à Meyo, non loin de l’autoroute Yaoundé-Nsimalen. Les travaux doivent redémarrer après 10 ans d’arrêt. Avec sa femme et ses huit enfants, il s’active à trouver une autre maison en chantier. Apollinaire son voisin lui pose la question de savoir pourquoi il ne loue pas une maison achevée? André donne deux raisons. La première, répond-t-il, est l’absence de moyens. «Je n’ai pas les moyens pour payer une maison de 100 mille francs. Je ne gagne pas grand-chose comme gardien de nuit», argumente-t-il. La deuxième raison est stratégique, selon les explications de son épouse. «Dans les maisons en chantier, il y a toujours de l’espace à côté où on peut faire des champs».
Jeanne, vendeuse de whisky local (Odontol), n’est pas de cet avis et évoque le surpeuplement. Dans la plupart des cas, dit-elle, «un Tupuri vient seul et en quelques mois on voit 25 personnes». Elle veut dissuader son cousin qui cherche un gardien d’en trouver un qui soit originaire d’une autre communauté. C’est d’ailleurs ce qui lui vaut d’être traité de détracteur des Tupuris. Mais, apprend-on, le refus de la dame est lié à la peur de la concurrence dans le commerce. «Elle a déjà peur de voir la femme d’André vendre le Bili-Bili», murmure le conjoint de Jeanne.

Sécurité
Selon Mani Etoungou, notable à la chefferie de Toutouli (Yaoundé 4e), l’occupation des maisons en construction contribue à lutter contre le vol de fer, du ciment et surtout des tôles. «Dans un passé récent, c’est-à-dire dans les années 2000, il fallait entrer dans ta maison le jour que tu tôles, sinon les tôles étaient arrachées. Aujourd’hui, nos frères Tupuri sécurisent les maisons en chantiers et même le quartier est déjà sécurisé», se félicite le notable. C’est la même satisfaction qu’exprime Hervé Zambo, habitant au petit marché Odza. «Notre secteur est déjà en paix. Les maisons inachevées étaient occupées autrefois par des brigands. Ma mère avait été agressée près d’une maison inachevée. Mais aujourd’hui, le fait que les Tupuri habitent dans ces maisons est sécurisant», justifie-t-il.

André Gromyko Balla

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