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Coronavirus, leçons africaines sur une vraie-fausse escroquerie

«Le Covid-19 ne représente plus une urgence sanitaire mondiale». Après avoir consulté son tableau de bord, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a validé ce constat le 5 mai dernier. Après plus de trois ans d’une pandémie qui a fait au moins 20 millions de morts et ravagé l’économie mondiale, les experts consultés par l’OMS ont jugé qu’«il était temps de passer à une gestion à long terme de la pandémie de Covid-19».

 

Déjà au bord de la surcharge, l’Afrique se demande: de quoi parle-t-on? Pas grand-chose, en réalité comme le montre la mise en coupe réglée de l’annonce de l’OMS. Ici en Afrique, nous cherchons donc à comprendre et à penser toutes ses dimensions, toute la complexité et toute la spécificité de cette annonce. Une telle réflexion porte sur une question de fond: Pourquoi l’hécatombe annoncée en Afrique n’a-t-elle pas eu lieu, alors même qu’au début de la pandémie, l’OMS et (par effet d’entraînement) l’Union africaine envisageaient le pire pour le continent? En mars 2020, par exemple, on a eu affaire à des annonces médiatiques alarmantes comme cette étude de la London School of Hygiene and Tropical Medicine (LSHTM). Laquelle avait conclu qu’en moins d’une semaine, tous les pays africains auraient dépassé la barre des 10 000 cas! Comme cette étude-là, d’autres ont privilégié des projections mathématiques souvent fausses au détriment de l’observation de la réalité du terrain. Par exemple, lors d’une interview accordée le 27 mars 2020 à France 24 et RFI, Antonio Guterres, surenchérissait dans l’échelle des peurs. «Et même si la population est plus jeune que dans les pays développés, il y aura nécessairement des millions de morts».

L’objectif sous-jacent de son intervention était, sans doute, d’alerter la communauté internationale sur la situation africaine, et de déployer d’urgence un plan d’aide de 3 000 milliards de dollars, soulignant que le virus, lors de son transfert du Nord vers le Sud, pourrait muter au risque de gagner en virulence: «(…) s’il y a une mutation, tout l’investissement qu’on est en train de faire pour les vaccins sera perdu. Et la maladie reviendra du Sud vers le Nord», avait déclaré le Secrétaire général de l’Onu. À ce jour, on ne saurait savoir d’où sortaient ces chiffres alarmistes. On ne peut manquer de reprocher à Antonio Guterres d’avoir arrimé le soutien financier, du reste nécessaire à l’Afrique, à un autre facteur, selon lequel le continent pourrait re-contaminer le Nord, plaçant justement ce continent dans une position de coupable et d’incapable.

Au vrai, il y a eu dans cette disproportion entre réalité et bruits plusieurs éléments: l’intérêt des laboratoires qui vendent des antiviraux, l’intérêt de ceux qui produisent des vaccins par précaution (bien que l’on ne sache pas si la maladie sera encore là dans un an), l’intérêt de ceux qui étaient heureux d’être sur un plateau de télévision comme experts virtuels, l’intérêt de ceux qui pouvaient faire de l’audimat sur la peur, et l’intérêt de ceux qui se voyaient en sauveurs providentiels. Tout ce monde-là avait profité de toutes les tribunes pour projeter vers l’Afrique une image paternaliste, infantilisant le public et justifiant au nom de «l’urgence sanitaire mondiale», des mesures qui sont allées à l’encontre des traditions locales. Cela n’a rien de certain, mais par son ampleur et sa radicalité, tout cela éclaire sans doute d’une lumière neuve le Covid-19 placé dans une vitrine marchande.

Jean-René Meva’a Amougou

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