Solutions indigènes contre le Covid-19 : Et pourtant elles marchent !
Au moment où l’Afrique est sous la pression des vaccins étrangers et que le Cameroun en reçoit une dose, une cure de rappel s’impose pour remettre au goût du jour la contribution des Camerounais à l’effort mondial d’éradication de la pandémie.

Selon une sagesse africaine, on reconnaît ses vrais amis lorsque l’on est dans le besoin. De ce point de vue, le Cameroun devrait se réjouir de l’avalanche d’offres et de dons de vaccins faits depuis quelques jours à son intention. Etant donné après tout, qu’il est question de venir à bout d’un virus dont la recrudescence vient d’être constatée par les autorités gouvernementales. Seulement, le problème vient de ce que, de façon volontaire ou involontaire, ces propositions d’assistance tendent à inoculer à la conscience collective camerounaise ou mondiale, le sentiment que rien n’est fait au plan endogène. Alors qu’en la matière, le Cameroun n’a pas à rougir. Bien au contraire. Sa riche pharmacopée traditionnelle lui a permis de gérer avec maestria la première année de parution du Covid-19, justifiant au passage l’admiration de l’ambassadeur de France au Cameroun.
Lors de son passage le 19 avril 2020 à Actualités hebdo sur la CRTV, Christophe Guilhou avait, en effet, déclaré que «l’épidémie au Cameroun n’a pas pris l’ampleur que l’on a connue dans d’autres régions du monde. Il faut peut-être y comprendre la particularité de ce pays. Vous êtes exposés ici à des tas de maladies, vous avez des tas de recettes traditionnelles. Et beaucoup de mes amis qui commencent à ressentir les premiers symptômes de la maladie se soignent avec la médecine traditionnelle, avec des décoctions d’écorces, etc». Dans son élan, le diplomate français avait même fini par inviter les Occidentaux à «s’inspirer de ce que font les pays régulièrement exposés à des maladies», et donc, à se mettre à l’école de la médecine traditionnelle.
Mgr Kleda
Dans la recherche de solutions endogènes à la pandémie de Covid-19, le gouvernement n’a pas hésité à solliciter les «tradithérapeutes». Par l’entremise de la ministre de la Recherche scientifique et de l’Innovation, Madeleine Tchuenté, la pharmacopée traditionnelle a alors été mise à contribution et a rapidement permis de proposer aux populations des mixtures, breuvages, infusions, décoctions et autres potions, faites ou non à base d’ikouk, de gingembre ou de fipagrass, pour ne citer que ces exemples. Mais de toutes les propositions thérapeutiques traditionnelles qui ont été recensées, c’est celle de Monseigneur Samuel Kleda qui a le plus fait parler d’elle. En véritable trait d’union entre la tradition, la foi et la médecine moderne, l’archevêque métropolitain de Douala a en effet officiellement présenté le 5 juin 2020 dans la capitale économique du Cameroun, deux produits dont l’efficacité n’a pas à ce jour été remise en cause. Et de fait, grâce à «ELIXIR COVID» et «ADSAK COVID», de nombreux Camerounais pourtant déjà en détresse respiratoire et, à ce titre, dans un état critique, ont pu être «calmés» et même, ont finalement retrouvé leur santé. Un succès du reste constaté par le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie, qui a reconnu dans un récent tweet en date du 25 février dernier, que «le taux de létalité du Covid-19 au Cameroun est de 1,54% pour un taux de guérison de 92%». Autant dire que les solutions indigènes y ont grandement contribué.
Théodore Ayissi Ayissi
Grands maux, petits secrets
Au sein des communautés étrangères basées au Cameroun, la prévention de la pandémie montre des hommes et des femmes usant de méthodes sommaires mais convaincantes.
Chez les couturiers sénégalais exerçant à Yaoundé et ses environs, les dernières actualités sur l’extension inquiétante du covid-19 au Cameroun ont favorisé un déploiement spécial. Pour Saar Jiaté par exemple, «le nombre de malades qu’on entend à la radio chaque jour» a obligé les uns et les autres à coudre les masques et les distribués dans les associations d’étrangers de Yaoundé. «On a demandé à l’ambassade si on peut le faire ; on nous a dit oui. C’est notre contribution à la lutte contre le coronavirus», renseigne ce porte-parole des couturiers sénégalais.
À l’en croire, le penchant profond de cette démarche s’exprime en un mot: «solidarité». «Il s’agit de la solidarité sénégalaise par rapport à l’action du gouvernement camerounais dans le cadre de la lutte contre le Covid-19», explique la chancellerie sénégalaise dans la capitale camerounaise ce 5 mars 2021. Selon cette source, «il s’agit d’une initiative baptisée ‘‘ Tous masqués contre le Covid’’. À ce jour, précise-t-on ici, 500 cache-nez ont déjà été remis à quelques familles rwandaises et centrafricaines installéées à Yaoundé et à Ayos (Nyong-et-Mfoumou). «On va continuer jusquà Bafia si les moyens nous le permettront», projette Saar Jiaté.
Chez les Centrafricains rencontrés à Douala, l’accent est mis sur la sensibilisation. Pour Elie Ngalle, chef de la communauté centrafricaine à Douala 5e, c’est le grand thème de son action sur le terrain. Le tout, dit-il, se décline en exhortation des autres Centrafricains au respect des mesures barrières édictées par le gouvernement camerounais. Selon le dignitaire centrafricain, le grossissement des effectifs de malades au Cameroun appelle l’adoption durable d’une posture défensive parmi ses jeunes congénères. «J’ai demandé aux étudiants de prendre au sérieux cette deuxième vague de la propagation du coronavirus afin de limiter au maximum le risque de contamination de la maladie», explique-t-il.
Au sein de la communauté nigériane de Douala, quelques personnes approchées ne se gardent de systématiser le port di masque, car «la situation devient de plus en plus critique et fait de plus en plus en peur», reconnait Jude Chineadu, commerçant.
Diane Kenfack
Patriotisme et avantages comparatifs
En matière de vaccin, une tendance semble se dégager au niveau mondial, c’est celle du «patriotisme vaccinal». Elle fait ressortir une réalité encore sous-estimée, mais qui rend bien compte de ce que désormais, chacun s’appuie sur ses propres recherches pour venir à bout du coronavirus. Et il n’y a par exemple qu’à considérer que les vaccins développés par les firmes pharmaceutiques américaine, allemande et britannique, Pfizer/BioNTECH, AstraZeneca et Moderna, sont les plus utilisés aux Etats-Unis et en Europe centrale; que pour sa part, le vaccin Spoutnik V est le seul auquel on a recours en Russie, et que les vaccins chinois sont les seuls à avoir pignon sur rue en Chine, pour regarder la guerre des vaccins en cours d’un autre œil.
En tout état de cause, le Cameroun a des arguments à faire valoir et devrait également privilégier les pistes endogènes. Surtout qu’en plus de son efficacité, cette solution est également moins coûteuse pour l’Etat. En effet, les produits tirés de la nature de Mgr Kleda sont donnés gratuitement sur simple présentation d’un test positif au Covid-19. Alors qu’en comparaison, les vaccins étrangers sont acquis à titre onéreux et sont plutôt chers. Selon l’AFP qui en a rendu compte dans un article publié le 16 février dernier et intitulé «Vaccins contre le Covid-19: la nouvelle poule aux œufs d’or», une dose de vaccin Moderna revient à 18 dollars, tandis que la dose de AstraZeneca coûte 1,78 euro. Le choix est donc vite fait, même si le principe de précaution n’interdit pas d’avoir en réserve d’autres options.
TAA