ACTUALITÉINTÉGRATION NATIONALE

Droits de l’homme : La peine de mort guillotinée par des avocats

Ils exigent simplement sa suppression au Cameroun.

«La peine de mort n’est pas une décision de justice: elle est un acte de vengeance. La peine de mort, c’est la vengeance institutionnalisée». À Douala, les 8 et 9 octobre derniers, l’Association «Droit et paix» (une coalition d’avocats affiliés au barreau du Cameroun) a enfourché une grosse trompette pour le dire. D’où l’organisation d’un atelier pour faire valoir ses arguments, les faire comprendre, les défendre, afin de faire graver l’abolition de la peine capitale dans le marbre de la loi. Profondément révoltée contre le maintien de cette forme de châtiment dans le Code pénal camerounais, Me Sandrine Dacga (présidente de la Coalition camerounaise contre la peine de mort) remet en cause son exemplarité et sa légitimité. De l’avis de l’avocate, elle est contraire aux droits de l’Homme et incompatible avec une société civilisée. «Son abolition est un impératif catégorique», scande-t-elle.

Pour Me Toko (avocat au barreau du Cameroun), «au regard de notre conscience morale, c’est une sentence aussi barbare qu’inutile par rapport à son supposé effet de dissuasion, mais surtout contraire à la Déclaration universelle des droits de l’homme et d’autres textes semblables». Parmi ces derniers, le juriste cite la Charte de Banjul. Au-delà, pense-t-il, l’analyse vaut peut-être encore plus aujourd’hui pour dénoncer, et carrément condamner, la peine de mort: «le fait que les principales causes du crime sont à rechercher, selon eux, dans la misère, avec tous les fléaux qu’elle engendre (alcoolisme, drogue, violence familiale, analphabétisme, ignorance…), mais une pauvreté sociale».

Au Cameroun, la dernière exécution a eu lieu en 1997. Toutefois, la peine de mort reste inscrite dans le Code pénal adopté en 2016. Ces textes précisent que son application est possible dans les cas d’atteinte à la sureté de l’État; assassinat ou atteinte aux biens. Par ailleurs, en 2014, la loi n° 2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme a été adoptée. Les champs d’application de la peine de mort ont été élargis par cette loi antiterroriste, qui a ajouté quatre articles prévoyant ladite peine à l’égard des personnes convaincues de complicité d’actes de terrorisme, en plus des auteurs.

Le Code de justice militaire promulgué par le président de la République le 12 juillet 2017 a institué de nouvelles infractions punies de mort. Sont passibles de la peine capitale les militaires camerounais au service du Cameroun qui commettent l’un des trois crimes suivants: la trahison, l’intelligence avec l’ennemi et l’espionnage. Dans ses derniers rapports annuels sur les «Condamnations à mort et exécutions» depuis 2010, Amnesty International a recensé pour le Cameroun au moins 91 condamnations en 2015, au moins 160 condamnations en 2016.

Rémy Biniou

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *