OMC : Donald Trump joue les trouble-fêtes pour l’Afrique!
L’Organisation mondiale du commerce (OMC) est désormais une organisation acéphale, et ce, pour une période indéterminée. Aussitôt que la candidate africaine Dr Ngozi Okonjo-Iweala du Nigéria a été désignée comme la finaliste réunissant le plus de soutien pour devenir directrice générale, le blocus américain sur le processus d’élection s’est mis en branle.
Il est désormais improbable que les représentants des États membres de l’OMC arrivent à un dénouement, tant que l’actuel locataire de la maison blanche est en poste, c’est-à-dire jusqu’en janvier. Des diplomates en poste à Genève l’ont exprimé. Le président du comité de sélection et président du Conseil général, le Néozélandais David Walker, a fini par s’y résoudre. Il a reporté la réunion prévue aujourd’hui 9 novembre «sine die». Déjà en crise du fait de l’opprobre jetée sur elle par Donald Trump et compte tenu des tensions commerciales (USA, Chine, Canada, Europe…) et de la démission de son directeur général en août, le report va dans le sens de l’accalmie. Même si elle consolide la marche mortifère de l’organisation et retarde surtout l’accès du tout premier fils du continent noir aux commandes de l’OMC.
L’Union africaine au créneau
L’organisation continentale, bien au fait des développements à Genève (siège de l’OMC), a publié une déclaration signée par le président en exercice, le Sud-Africain Cyrille Ramaphosa. Pour l’Afrique, il faut saluer le processus qui s’est jusqu’ici bien déroulé. Toutefois, le chef d’État sud-africain a rappelé qu’au moment où le discrédit de l’OMC se retrouve sur la place publique, il faut tout de même sauver ce qui peut encore l’être pour démontrer que la place de l’organisation ne se trouve pas parmi les détritus.
Ce coup de pression de l’Union africaine appelle surtout l’organisation au respect de ses propres règles édictées dans le manuel de procédures. Le chantage américain ne faisant pas partie d’une des dérogations prévues, l’Union africaine pense que l’organisation aurait survécu si elle n’avait pas accordé de suite au blocus américain.
Joe Biden, l’espoir du continent
Porteur d’un projet d’une Amérique leader du monde dans le système multilatéral, Joe Biden incarne l’espoir du continent à voir sa fille accéder à la tête de l’OMC. Une double première pour le monde: elle serait la première femme à ce poste et le premier ressortissant africain à l’occuper. Le candidat démocrate à la Maison blanche était en pole position dans le dépouillement des bulletins de vote au moment où nous allions sous presse.
Ce qui tranchera nettement avec la politique de son prédécesseur s’il est élu. Donald Trump a mis le multilatéralisme à genou en seulement 4 ans. Après la sortie de l’Accord de Paris sur le climat, il a mis à sac le système commercial multilatéral porté par l’OMC et son homologue des questions douanières, l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Ceci est dû aux représailles fiscalo-douanières envers la Chine, le Canada et les pays européens. Une attitude qui a accéléré la crise au sein de l’OMC, provoquant la démission de son directeur général, le brésilien Roberto Azevêdo.
Lorsqu’il s’est agi de choisir un intérimaire parmi les quatre adjoints au directeur général démissionnaire, les USA ont imposé leur compatriote Alan Wolff, alors que l’Allemand Karl Brauner était celui qui rencontrait les faveurs des États membres. Aujourd’hui, l’intérim est assumé concomitamment par quatre directeurs généraux adjoints de l’OMC. Inédit!
Le processus de sélection du directeur général devait s’achever aux alentours du 7 novembre, mais c’était sans compter sur le refus des États-Unis, seul pays à avoir ouvertement refusé de soutenir Mme Ngozi. L’administration Trump, soutenant sa rivale la Sud-Coréenne Yoo Myung-hee, veut à tout prix éviter l’élection de la candidate africaine.
Il s’agirait, pour certains, d’un prolongement de la guerre Chine-Amérique, les États-Unis d’Amérique estimant que la Chine est le principal soutien de la candidature africaine.
Rémy Biniou