INTÉGRATION RÉGIONALEMAIN COURANTE

Relance économique post-Covid19 : La BDEAC s’offusque contre les refus de financement

Le président de l’institution sous régionale de financement du développement qualifie de contreproductif le choix de certains bailleurs de fonds de ne pas octroyer des ressources à la réalisation des projets du secteur productif sur le prétexte de la crise sanitaire. Profitant d’une bonne dynamique de restructuration, la BDEAC s’est engagée à financer 13 projets pour un montant de 155 milliards FCFA.

En marge du Conseil d’administration de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) qui s’est tenu en visioconférence le 10 juillet dernier, le président Fortunato-Efa Mba Nchama a marqué sa désapprobation et celle de son institution face à l’attitude de certains bailleurs de fonds. Au moment où toutes les économies du monde sont en quête de choc de relance et de choc de croissance pour se relever des incidences économiques, financières, sociales, culturelles et humaines, quelques institutions de financement ont pris le prétexte de la crise pour ne pas octroyer les financements. Un choix incompréhensible.

Il déclare que «la pandémie va se terminer, mais la crise économique qui lui est parallèle va s’étaler sur plusieurs mois voire sur plusieurs années. Il faudra bien en sortir. Ailleurs, certaines institutions ont choisi de profiter de la situation de la pandémie pour refuser le financement des projets. Nous pensons le contraire. Après la pandémie, il faudra que les économies remontent et que les emplois, contrairement aux perspectives actuelles, soient de nouveau créés».

Ce désaccord, le chef de l’exécutif communautaire le partage. Le 16 juillet dernier, alors qu’il prenait part par visioconférence au lancement des perspectives économiques régionales en Afrique centrale de la Banque africaine de développement (Bad), le président de la commission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) l’a martelé. Daniel Ona Ondo a exprimé son incompréhension, questionnant d’ailleurs la solidarité internationale et multilatérale face à la crise mondiale qui a cours. Pour lui, en tout cas, certains organismes n’ont pas répondu à l’appel des grandes dynamiques telles que le G7 ou le G20. Ce d’autant plus que les économistes de la Bad n’ont aucune idée sur les scénarios de vigueur de la reprise. Toutefois, avec l’optimisme des économistes et des marchés financiers, c’est une reprise en V qui serait la meilleure. Elle suppose un cantonnement de la crise sur le seul deuxième trimestre 2020.

Positionnement
La BDEAC ne s’est pas limitée à expectorer. Elle s’est positionnée pour le financement du secteur productif. Son Conseil d’administration a approuvé un financement de 155 milliards 05 millions francs CFA. Dans cette enveloppe, 65 milliards FCFA sont alloués à 7 projets de développement dans les secteurs de l’eau et l’assainissement, l’agro-industrie, les transports et la finance. «Nous n’avons pas abandonné le financement du secteur productif. Ce qui fait que le volume de financement que le conseil d’administration a approuvé est un peu plus de 155 milliards FCFA. Donc on a 90 milliards pour le secteur public et le reste pour le secteur privé», a précisé le président de l’institution au sortir de l’Assemblée générale.

Il s’agit donc de préparer la relance économique au regard de l’impact de la crise sanitaire sur le tissu économique des pays de la sous-région. Une aubaine pour le président de la BDEAC, Fortunato-Efa Mbo Nchama. La banque est restée sur la continuité de ses exercices sociaux précédents (voir répartition de portefeuille 2019).

Viabilité
La Banque peut s’appuyer sur une notoriété en hausse et une bonne viabilité financière. La Banque arabe pour le développement économique de l’Afrique (Badea) et le Fonds de solidarité africain (FSA) viennent d’être approuvés comme nouveaux actionnaires. Ce dénouement important pour la banque vient ainsi diminuer une partie du capital non souscrit de la BDEAC (voir tableau). À ce jour, la banque compte 13 actionnaires, dont 6 membres régionaux (pays de la Cemac) et 7 non régionaux (voir tableau sur la répartition du capital). Or, juste 86,38% des parts du capital ont été prises par les actionnaires. 13,62% cherchaient preneurs.

Pour le président de la BDEAC Fortunato-Efa Mbo Nchama, cette entrée en capital peut être appréciée à double titre. D’abord, la confiance: «il y a quelques années personne ne voulait faire partie de la BDEAC. Le fait qu’aujourd’hui des institutions prestigieuses demandent à rejoindre le capital, cela signifie que l’institution de financement du développement est en train de se réaffirmer dans l’échiquier financier international comme une banque de développement digne de ce nom». Aussi, il était question de boucler le paramétrage de la dernière augmentation de capital. «Avec l’augmentation de capital survenue en 2014, 13% des parts des actionnaires de la catégorie B n’étaient pas souscrites jusqu’ici. Notre mission était de trouver des partenaires à même de combler ces parts». Le communiqué de presse rendu public au terme de l’Assemblée générale révèle que l’arrivée des deux actionnaires «constitue une pierre imposante dans l’opération d’augmentation du capital de la banque».

L’incidence de cette évolution est le renforcement des capacités d’intervention de la BDEAC sur le développement des économies de la Cemac. Le président Mbo Nchama l’a expliqué: «le choix des partenaires n’est pas anodin. La Badea est une institution avec laquelle nous entretenons des relations très importantes. Elle apporte des ressources à notre institution depuis plusieurs années. On va déjà vers le 4e prêt. Lorsque cette institution analyse l’évolution de la BDEAC, son entrée en capital signifie qu’elle se rapproche pour suivre l’évolution, car il y a désormais plus intéressant. C’est une marque de confiance, mais surtout une prémonition que les volumes de financements que nous pourrons tirer de cette institution seront beaucoup plus grands. Pour le FSA, il vient pour offrir plus de facilité aux opérateurs économiques. En Afrique, les opérateurs économiques ont du mal à produire les garanties. Avec le FSA, les structures n’auront plus de difficultés à boucler leur financement auprès de la BDEAC faute de garanties. Ainsi, notre volume de financement à accorder aux économies de la Cemac va croître».

Pour ce qui est de la viabilité financière, les agrégats financiers de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) traduisent une certaine embellie. Les comptes annuels de la banque, arrêtés au 31 décembre 2019, dévoilent que la BDEAC affiche des indicateurs clés en hausse. «Un résultat net bénéficiaire de 15 milliards 245 millions FCFA, contre 11 milliards 530 millions FCFA à la fin 2018, soit une hausse de 32%. Le produit net bancaire est en hausse de 4%. Il est porté à 20 milliards 156 millions FCFA contre 19 401 millions FCFA au titre de l’exercice 2018. Quant au total du bilan, il s’établit à 459 milliards 879 millions FCFA contre 428 milliards 639 millions FCFA à la clôture de l’exercice précédent, soit un accroissement de 7%», précise le communiqué de presse qui a sanctionné le conseil d’administration de l’institution. Il s’est tenu le 10 juillet par visioconférence.

En conférence de presse, le président Mbo Nchama a confié que «les actionnaires se sont félicités de l’évolution des indicateurs de la BDEAC. Ils se sont rappelé qu’il y a deux ou trois ans, on parlait plutôt de la liquidation de cette institution. Aujourd’hui, tous les indicateurs se sont consolidés et la Banque donne des résultats bénéficiaires depuis trois années consécutives. Ces résultats sont toujours en augmentation par rapport à l’exercice antérieur».

Bobo Ousmanou

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