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Plaidoyer pour une union de salut national

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  1. Une supplique indigne d’un homme d’État

Lorsque Achy Patrick, ancien ministre et ex-secrétaire général de la présidence, en vient à supplier publiquement Alassane Ouattara de « ne pas les abandonner », on assiste à une scène aussi pathétique qu’indécente. Loin d’être une déclaration d’amour patriotique ou une analyse politique lucide, cette demande traduit l’état de panique d’une élite politique corrompue, consciente que la fin de règne de leur mentor pourrait sonner le glas de leurs privilèges mal acquis. La requête d’Achy n’est pas motivée par le bien de la nation, mais par la peur de rendre des comptes et de perdre l’accès aux ressources de l’État.

Ce même Achy Patrick qui, par le passé, disait avoir quitté Henri Konan Bédié faute d’alternative crédible, soutient aujourd’hui un homme qui a déjà exercé trois mandats, dont le dernier en violation flagrante de la Constitution ivoirienne. Où est donc la cohérence politique ? Où est le courage intellectuel ? L’ancien technocrate devenu courtisan semble avoir troqué son intégrité contre la sécurité d’un poste et la promesse d’une impunité prolongée.

  1. L’hypocrisie érigée en méthode politique

Il est utile de rappeler qu’en 2010, Alassane Ouattara affirmait avec fermeté qu’un seul mandat de cinq ans lui suffirait pour transformer la Côte d’Ivoire. Quinze ans plus tard, non seulement cette promesse a été trahie, mais le pays se trouve dans un état de fracture sociale et économique aggravée. Les libertés reculent, l’économie est aux mains d’une minorité d’affairistes, et les ressources nationales sont bradées au profit de réseaux transnationaux opaques. Malgré cela, certains parmi ses soutiens appellent encore à un quatrième mandat, au mépris du droit, de la morale et de la démocratie.

Pire encore, Achy Patrick a prétendu il y a quelques années être issu d’une famille pauvre, tentant ainsi de se forger une image de “self-made man” proche du peuple. Mais ceux qui connaissent son histoire savent que cette narration relève de la fiction. Pourquoi un tel mensonge ? Pour masquer l’opportunisme et se draper dans un faux habit de vertu. Ce type de stratégie révèle le degré de duplicité d’une certaine classe politique qui instrumentalise la misère populaire tout en se servant grassement dans les caisses de l’État.

  1. La crise ivoirienne : entre prédation et terreur

Ce que vit aujourd’hui la Côte d’Ivoire est moins une crise politique ordinaire qu’une captation systémique du pouvoir par une clique motivée par la cupidité et l’égoïsme. Cette “bande” qui gravite autour d’Alassane Ouattara n’a plus pour objectif le développement ou la stabilité, mais la préservation de ses intérêts privés, fût-ce au prix de la violence et de l’illégalité.

Les Ivoiriens vivent depuis des années dans un climat de peur et de surveillance. Les opposants sont arrêtés, emprisonnés, exilés ou bâillonnés. Les médias critiques sont menacés. Les institutions sont inféodées. L’État de droit est affaibli, et la séparation des pouvoirs n’est plus qu’un souvenir. Et pourtant, dans ce contexte d’asphyxie démocratique, certains osent appeler à prolonger encore cette confiscation du pouvoir.
Comment expliquer cette obstination ? La réponse est simple : la peur de la justice, de l’audit, de la reddition de comptes. Pour ces hommes, quitter le pouvoir, c’est risquer la prison. Alors ils s’accrochent, pactisent, manipulent, suppriment les adversaires politiques et tentent d’acheter la paix sociale à coup de promesses creuses.

  1. L’urgence d’un front républicain élargi

Face à cette dérive, le sursaut national devient impératif. Il ne s’agit plus d’un simple affrontement entre partis politiques, mais d’un combat entre deux visions du pays : celle d’une Côte d’Ivoire pillée, confisquée, humiliée ; et celle d’un État démocratique, inclusif, où la justice, la solidarité et la dignité sont restaurées. C’est pourquoi l’opposition ivoirienne doit faire bloc, au-delà des rancœurs, des blessures et des rivalités.
La situation est trop grave pour que des querelles d’ego ou de leadership viennent parasiter l’essentiel. Le PDCI-RDA, le PPA-CI et les autres forces du changement doivent s’unir dans une coalition de salut national, un front républicain dont le seul objectif est de sauver le pays du naufrage annoncé. Il ne s’agit pas de construire une alliance électoraliste, mais un mouvement citoyen ancré dans la résistance, le dialogue, et le patriotisme sincère.

L’heure n’est plus à se demander qui a trahi qui, ou qui n’a pas été loyal en 2010, 2015 ou 2020. Le linge sale se lavera plus tard, si linge sale il y a. Car aujourd’hui, ce qui est en jeu, c’est la survie même de la nation. C’est la paix civile. C’est la réhabilitation de l’espoir dans les cœurs d’un peuple meurtri.

  1. Un peuple debout vaut mieux qu’un tyran assis

L’histoire nous enseigne qu’aucune dictature n’est éternelle. Aucune oppression, même couverte d’apparences légales, ne résiste à la volonté ferme d’un peuple uni. Les dictateurs passent, les peuples demeurent. Si la Côte d’Ivoire veut renouer avec la démocratie, la justice et la prospérité, elle doit faire émerger un peuple conscient, déterminé, debout et solidaire.

L’heure n’est plus à la peur. L’heure est au courage, à l’action collective, à la mobilisation pacifique, mais résolue. Que chacun mesure la gravité de l’heure. Que chaque citoyen, jeune ou vieux, cadre ou ouvrier, prenne la mesure de l’abîme vers lequel certains veulent précipiter la nation.
Il ne s’agit plus seulement de barrer la route à un quatrième mandat inconstitutionnel, mais de refonder le contrat social ivoirien, de restaurer la dignité des institutions, de rendre au peuple ce qui lui appartient : sa souveraineté.

Conclusion: L’espoir est dans l’union, pas dans la résignation
Ceux qui appellent Ouattara à se représenter ne le font pas pour le bien du peuple, mais pour se protéger de la justice et prolonger leur accès aux richesses publiques. Leur peur du changement est proportionnelle à l’ampleur de leurs compromissions. Mais cette peur ne doit pas paralyser la majorité silencieuse. La Côte d’Ivoire n’est pas condamnée à l’éternelle domination d’un clan. Elle peut se relever. Elle doit se relever.

Il est temps que l’opposition mette de côté les rancunes et les calculs mesquins. Il est temps de poser les bases d’une nouvelle Côte d’Ivoire, juste, inclusive et tournée vers l’avenir. C’est à cette condition que le pays pourra enfin sortir du cycle infernal des trahisons, des manipulations et des coups de force.

Oui, il est possible de vaincre l’arbitraire. Oui, un peuple debout est plus fort que tous les tyrans. Oui, l’avenir appartient à ceux qui osent rêver, mais surtout à ceux qui osent s’unir pour construire ce rêve.


Jean-Claude Djéréké

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