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Étiquette : Moussa Faki Mahamat
Israël, entre amis et ennemis
Ces derniers jours, l’Histoire avec sa grande hache – selon la formule de Perec -, définitivement imprévisible, s’est emballée avec l’entrée officielle d’Israël au sein de l’Union africaine (UA).
Dans la vaste assemblée panafricaine, l’État hébreu siège désormais comme «observateur». Après l’annonce, Tel-Aviv s’est intelligemment amusée en précisant que son ambassadeur à Addis-Abeba a déjà présenté ses lettres de créance. Après l’annonce, les couacs. Sept pays arabes s’opposent officiellement à cette décision et exigent qu’elle soit débattue au sein de l’UA.
En effet, dans un bel élan, l’Égypte, l’Algérie, les Comores, la Tunisie, Djibouti, la Mauritanie et la Libye disent que cela est «choquant et honteux». Une sémantique reprise par la mission permanente de la Ligue des États arabes à Addis-Abeba ainsi que par la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Tous regardent d’un œil inquiet l’accréditation d’Israël, qualifiant celle-ci de «bombe à retardement» et de «dangereux ferment haineux contre le monde arabe, chargé de provoquer, à un horizon temporel indéterminé son émiettement idéologique».
Et voici qui vient imposer une nouvelle donne géopolitique au sein de l’UA. Structurée notamment par des préjugés (arabes) bien tenaces sur l’État hébreu, cette nouvelle donne s’en prend finalement à Moussa Faki Mahamat, et à tous les États qui accompagnent le président de la commission de l’UA dans sa décision de «collaborer avec Israël». Réagissant aux feux nourris contre sa personne, le Tchadien argue qu’en vertu des textes de l’Union, l’accréditation d’un pays non régional est une prérogative réservée totalement au président de la Commission, lequel peut décider sans s’en référer à un quelconque État.
Une telle accréditation serait, selon l’interprétation que fait Moussa Faki Mahamat des textes de l’UA, une procédure simplement administrative et, insiste-t-il, exclusivement réservée au président de la Commission de l’UA. Pour ce dernier, il y a plus: «la reconnaissance d’Israël et le rétablissement de relations diplomatiques avec lui par une majorité supérieure aux deux tiers des États membres de l’UA, et à la demande expresse d’un bon nombre de ceux-ci en ce sens».
Or désormais le monde est nu, et nous n’avons pas d’autre choix que d’abandonner nos coupables pudeurs pour regarder la vérité géopolitique qu’il nous donne à voir, et les conséquences que nous devrons rapidement en tirer. Examinons les faits. Trois choses absolument frappantes se sont produites avec l’admission d’Israël au sein de l’UA. La première, c’est qu’aux premières alertes, deux camps se sont ligués l’un contre l’autre. Conséquence envisageable: lors de la réunion du Conseil exécutif des ministres des Affaires étrangères des pays de l’UA prévue en octobre prochain, un affrontement titanesque s’annonce entre l’Égypte, le Soudan et le Maroc d’une part, et l’Algérie, les Comores, la Tunisie, Djibouti, la Mauritanie et la Libye d’autre part.
Le deuxième fait frappant est la solidarité dans la haine contre Israël. L’UA devient la scène où se déroule un combat. Et les anti-Israël savent que s’affaiblir, c’est inciter l’adversaire à frapper. Il leur faut donc tout faire pour échapper à la trajectoire de décomposition de la communauté arabe africaine. Et voilà qui pourrait contredire brutalement une certaine vogue intellectuelle, selon laquelle au sein de l’UA, la force des identités ne doit pas prévaloir sur des principes généraux.
Jean-René Meva’a Amougou
Moussa Faki Mahamat
Sans opposition, le Tchadien se présente pour sa réélection, pour un second mandat (2021-2024) à la présidence de la Commission de l’Union africaine.
Pour ses détracteurs, la candidature du dirigeant est antidémocratique. Ils veulent que la date limite de nomination soit prolongée à novembre 2020. L’ancien patron de la diplomatie tchadienne (60 ans), élu le 30 janvier 2017 à la tête de la Commission, bénéficie du soutien de bon nombre de chefs d’État, issus des régions du Centre, de l’Est, du Maghreb et de la CEDEAO. Pour obtenir la reconduction du diplomate, le gouvernement de son pays multiplie les tractations secrètes avec plusieurs capitales de la sous-région. Comme mot de passe, Ndjamena démontre que son «fils» «a fait preuve de leadeurship et d’une réelle volonté de changement pour que l’Union africaine puisse faire face aux défis environnementaux, sanitaires, économiques, politiques et de lutte contre le terrorisme. Beaucoup de chefs d’État lui en sont gré et appliqueront le principe qu’«on ne change pas de capitaine, en pleine tempête».
Élection présidentielle en RDC : le Burundi félicite Felix Tshisekedi
Comme un symbole de l’actualité, président Burundais Pierre Nkurunziza vient d’adresser ses félicitations au président déclaré élu par la Cour constitutionnelle de la République Démocratique du Congo (RDC).
« Par un processus électoral entièrement organisé sans influence extérieure et la sagesse du président Kabila, la RDC vient de défendre sa dignité et sa souveraineté. Le Burundi félicite le Président élu, SE Félix A. Tshisekedi ainsi que le pas franchi par le Peuple Congolais » a écrit le Président Pierre Nkurunziza sur sa page Twitter.
Le bal des félicitations est ainsi lancé. Et Bujumbura ne pouvait attendre pour témoigner son attachement au principe de souveraineté des Etats africains.
Fragilisation
Les félicitations de Bujumbura fragilisent encore plus la position de l’Union Africaine. Ce qui est sans rappeler les soubresauts entre le Burundi et la Commission de l’Union Africaine sur le cas Pierre Buyoya. Des manifestations populaires protestant contre la déclaration de Moussa Faki Mahamat ont d’ailleurs donné lieu à des marches dans les rues de la capitale burundaise le 8 décembre dernier.
Cette réaction est présentée par nombreux observateurs comme une riposte du pouvoir burundais. Comment ne pas songer en sus aux tensions transfrontalières entre le Burundi et le Rwanda ? Les autorités rwandaises ont, à moultes reprises, accusé Paul Kagame d’intenter une déstabilisation du pays.
Zacharie Roger Mbarga
Elections en RDC : l’Union africaine demande la suspension de la proclamation des résultats
Au terme du huis clos d’une réunion ad hoc, l’organisation continentale invite les autorités de Kinshasa à suspendre la proclamation des résultats jusqu’au passage de sa mission d’information.
Moussa Faki Mahamat et Paul Kagame Au moment où le dénouement annoncé du processus électoral du 30 décembre 2018 en République démocratique du Congo (RDC) suscite de plus en plus du dédain, l’Union africaine (UA) a tenu une réunion consultative de haut niveau le jeudi 17 janvier 2019.
Au terme de cette rencontre et au regard des débats en huis clos en présence du vice Premier ministre, ministre des Affaires étrangères de la RDC, « les chefs d’État et de gouvernement ont appelé à la suspension de la proclamation des résultats définitifs des élections ».
Pour parvenir à une sortie de crise post-électorale, ils « ont convenu d’envoyer une délégation de haut niveau comprenant le président de l’Union et d’autres chefs d’État et de gouvernement, ainsi que le président de la Commission de l’UA, pour dialoguer avec toutes les parties prenantes congolaises ».
Convoquée par Paul Kagame, la séance de travail réunissait Paul Kagame (Président de l’UA), Hage G. Geingob, João Lourenço, Cyril Ramaphosa et Edgar Chagwa Lungu de la SADC (organisation d’intégration de l’Afrique australe), Sassou Nguesso de la Conférence des Grands Lacs, Idriss Déby pour le compte de la CEEAC (Afrique centrale), Le ministre des Affaires étrangères de la Guinée représentait la CEDEAO, Abiy Ahmed premier ministre éthiopien pour l’IGAD, Yoweri Museveni de la CAE (Afrique de l’Est), des membres africains du Conseil de sécurité des Nations unies, de la troïka et du Président de la Commission de l’UA.
Suspicions
La décision est motivée par les suspicions des dirigeants africains sur la sincérité des résultats rendus publics. Le communiqué ayant sanctionné cette rencontre affirme que « les chefs d’État et de gouvernement présents ont exprimé leurs sérieux doutes quant à la conformité des résultats provisoires proclamés par la Commission électorale nationale indépendante ».
Le premier à en faire cas est Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’UA. En ouvrant les travaux, il déclare dans sa communication préliminaire « Même si jusqu’ici la situation sur le terrain reste fort heureusement globalement calme, il n’en reste pas moins qu’elle demeure hautement préoccupante. Pour parler franchement, de sérieux doutes sur la conformité des résultats proclamés persistent et ne cessent de hanter les esprits des congolais et de leurs frères et amis à travers le monde ».
Les suspicions de l’Union africaine s’appuient sur le rapport sa mission d’observation dirigée par l’ex président malien par interim Diouconda Traoré. Ces suspicions ont sans doute été exacerbées par les fuites attribuées à la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) et à l’équipe de la coalition Lamuka dirigée par l’opposant donné perdant Martin Fayulu. Ces fuites portent sur des compilations des résultats et donnent la coalition Lamuka pour vainqueur.
Jeu d’intérêts et d’influence
Bien avant en matinée, la SADC (communauté de développement de l’Afrique australe) avait tenu une réunion consultative sur le sujet. Au terme de laquelle l’organisation félicitait Joseph Kabila pour son leadership et la CENI pour la réussite dans l’organisation des élections malgré des obstacles et facteurs nuisibles. L’organisation a ensuite appelé les acteurs « au calme » et au respect des lois. Quant à la communauté internationale, « le Sommet demande instamment de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale » de la RDC.
Un revirement dû à l’entrée en scène de certains acteurs. Le 13 janvier dernier, Edgar Lungu, président zambien à la tête de l’organe chargé de la politique, de la défense et de la sécurité au sein de la SADC avait pris un communiqué pour le compte de l’organisation. La SADC préconisait ainsi un règlement politique négocié passant par un « un recomptage public des voix et la formation d’un gouvernement d’union nationale ».
C’était visiblement sans consultation des poids lourds de l’organisation tels que l’Afrique du Sud qui dès la publication des résultats provisoires a félicité les organisateurs, les vainqueurs et le président numériquement déclaré élu. Appelant déjà au respect des efforts de la RDC. La position de l’Angola ne s’en écarte d’ailleurs pas.
Zacharie Roger Mbarga
RDC : l’Union Africaine invite au respect du droit
Par la voix du président de la Commission, l’institution continentale engage les différents acteurs à rester légaux dans la suite des opérations électorales.
Le dénouement provisoire des élections générales et du scrutin présidentiel en particulier est un facteur de crise en République démocratique du Congo (RDC). Ni le camp du parti au pouvoir, encore celui de l’opposition la plus acerbe n’ont remporté le scrutin le plus disputé : l’élection présidentielle.
Et même si les tendances confirment une nette majorité à l’Assemblée Nationale pour la coalition au pouvoir, la perte de la fonction suprême fait craindre une radicalisation du camp au pouvoir.
Eu égard à cette appréciation, la déclaration de Moussa Faki Mahamat invite « tous les acteurs concernés » à « agir de façon à consolider la démocratie et à préserver la paix dans le pays ».
Contestations
Plusieurs contestations ou remises en cause des résultats tels que formulés par la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) ont déjà été formulées. La conférence épiscopale l’a déjà fait valoir. Les évêques prennent « acte des résultats de la CENI mais notent qu’ils ne correspondent pas aux données en possession de l’Église ». La France par la voix de son ministre des Affaires Étrangères à elle aussi mis en doute la sincérité de ce scrutin.
Après avoir qualifié les résultats de la commission électorale indépendante de « putsch électoral », Martin Fayulu, donné deuxième alors qu’il revendique une victoire avec 61% des voix, a annoncé qu’il va saisir la Cour constitutionnelle afin d’exiger le « recomptage des voix ». « Nous irons demain samedi à la Cour constitutionnelle pour exiger le recomptage des voix » a-t-il clamé lors d’un meeting devant ses partisans le 11 janvier dernier.
Une démarche qui rejoint les exhortations du top management de l’UA dans sa déclaration. Moussa Faki Mahamat déclare « dans ce contexte, il est important que toute contestation des résultats proclamés, notamment celle portant sur leur non-conformité avec la vérité des urnes, se fasse pacifiquement, par le recours aux procédures prévues par les textes en vigueur et le dialogue politique entre toutes les parties prenantes ».
Au demeurant, les chantiers de la réconciliation en RDC sont titanesques. Aussi indique-t-il : « la situation en République Démocratique du Congo exige, quelle que soit l’issue définitive des élections, la recherche d’un véritable consensus national fondé sur le respect des principes démocratiques et des droits de l’homme, ainsi que sur la préservation et la consolidation de la paix ».
Zacharie Roger Mbarga