Penci Sport plugin only working with the Soledad theme.

Archives des Issa Tchiroma Bakary - Journal Intégration

Journal Intégration

Étiquette : Issa Tchiroma Bakary

  • 88/39… Un président, deux âges

    88/39… Un président, deux âges

    À la tête du Cameroun depuis le 6 novembre 1982, revoici Paul Biya, le chef de l’État en trois facettes.

    Que dire encore de Paul Biya en 2021 ? Des astrologues vont vite faire assaut de subtilités pour brandir la date du 13 février 1933, celle de la belle étoile. Autour de celle-ci, des statisticiens peuvent pouvoir trancher le débat en auscultant avec leurs outils les deux âges du président : 88 ans, dont 39 au pouvoir. À n’en pas douter, le 13 février 2021, ces chiffres se sont donnés la main pour prouver qu’il s’agit effectivement d’un seul et même homme. L’autre jour, un comédien local a échafaudé un scénario mettant côte à côte le portait officiel du mari de Chantal Vigouroux et celui de 2021.

    Image
    Dans une dramaturgie où les sentiments se sont mêlés aux événements, l’auteur du sketch décrivait un Paul Biya «souriant et presque surpris de se voir ici» ; «ici» à la tête du Cameroun, à 49 ans seulement. Là, Fame Ndongo conteste vigoureusement. «C’est un portrait franc et étonnant de simplicité. C’est une photo tout à fait normale, assez élégante», argue le sémioticien.

    Au finish, il y a débat. Mais s’il y a une qualité qui est souvent attribuée au successeur d’Ahmadou Ahidjo, c’est le soin avec lequel il travaille son image. L’on a entendu dire via son entourage que lors de ses anniversaires, il est très pointilleux sur un aspect: la juste dose qu’impose une tenue d’homme né presqu’au début de l’autre siècle, par rapport à celle de sa jeune épouse…

    Longtemps, on a considéré comme inébranlable le mur séparant la vie publique et la vie privée de Paul Biya. Toutefois, à la faveur de ses anniversaires, le natif de Mvomeka’a «ouvre» quand même ses appartements privés. Sans bruit et sans extravagance.

    Conformément à la voie tracée pour lui par les missionnaires, il sait quelle part joue l’image de la famille dans la conquête des «cœurs». Souvent, lors de ces occasions-là, on l’a vu avec épouse et enfants. «Des coups de com’ rigoureusement scénarisés. À décrypter leurs formats, ils s’attachent à mettre en valeur deux façons d’habiter la magistrature suprême : la jeunesse et la vieillesse», signale Claude Effila, spécialiste de la communication politique.

    Dans son propos, ce dernier décrit implicitement un Paul Biya qui sait endiguer la surenchère. Surtout celle d’une certaine presse qui taille son succès sur les échos mondains et les mille histoires croustillantes racontées depuis le Palais de l’Unité. Depuis ce haut-lieu, la chronique postule même que, le cabinet civil du fils de Mvondo Assam et d’Anastasie Eyenga ne divulge que des clichés qui n’ont rien d’autre à faire voir au public qu’un homme d’État au regard énamouré, en tenue décontractée.

    Les images montrant le président avec son âge qui avance au compteur de la vie sont systématiquement écartées. «Avant, observe Claude Effila, le public n’avait droit à aucune image d’anniversaire du président. Il y a fort à parier que son entourage l’a convaincu de procéder par glissements et infléchissements, puisque faire de la politique au sens moderne du terme, c’est savoir ménager sa vie privée comme un outil de communication politique».

    Sans doute, il aurait voulu célébrer ses 88 ans caressant la flamboyance du trophée du récent Championnat d’Afrique des Nations (CHAN). Mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Sur «la fête» de celui qu’une opinion locale a, depuis, positionné en «président des victoires», l’élimination des Lions A’ est restée comme un gros point noir. Mais à Étoudi où l’on refuse de se faire victime collatérale de la débâcle du CHAN, l’on a gardé de bons vieux réflexes pour montrer Paul Biya sous un jour radieux. Dans un exercice de style, neuf images de «l’Homme-Lion» sur un visuel ont été chargées d’incarner au maximum sa majesté. Et comme toujours, l’entourage de Paul Biya a mis le paquet le 13 février 2021. Pas moins qu’un visuel sur lequel le chef de l’État rayonne de joie de vivre.

    Tout est passé: costume sombre, personnage fort rajeuni, rides cachées et calvitie miraculeusement disparue, visage exhibant un grand sourire et fermeté. «Il y a une vraie recherche de sympathie et d’adhésion. Cette affiche, si elle semble moins sérieuse dans le faciès, est finalement plus humaine. Cela correspond à son personnage. Le mot papa est un choix intéressant, là encore synonyme de proximité», décrypte William Arsène Bivono. Selon le promoteur événementiel basé à Douala, «le choix de l’affiche est vraiment novateur, et tout à fait révolutionnaire par rapport aux anniversaires précédents.

    La posture, l’expression du visage, les accessoires, le fond, le cadrage, le choix des couleurs, etc. sont de riches porteurs de sens pour un anniversaire». Si l’on en croit le politologue Belinga Zambo, ce que ce gadget d’anniversaire évite copieusement de dire c’est qu’un «parfum inimitable se trouve dans l’intimité du pouvoir et que c’est lui qui inspire des phrases comme ne reste pas au pouvoir qui veut, mais qui peut». Claude Effila complète avec «il paraît qu’il y en a qui s’intéressent à mes funérailles. Eh bien, dites-leur que je leur donne rendez-vous dans une vingtaine d’années».

    Parler…
    En 39 ans de bail à Étoudi, Paul Biya se félicite de temps en temps d’avoir eu deux «vrais ministres de la Communication». «Augustin Kontchou Kouemegni et Issa Tchiroma Bakary ont véritablement rempli leurs cahiers de charge; comme le voulait le roi en des moments précis», glisse Claude Effila. «En bons portraitistes du maître, ces Messieurs ne sont pas passés à côté de leur travail au sein du sérail», ajoute le spécialiste de la communication politique. Exemple: lors d’une conférence de presse à Yaoundé en mars 1992, une phrase a fait sourire au moins un journaliste présent : «le président Biya parle; mais il n’aime pas trop la parole».

    Dixit Augustin Kontchou Kouemegni. Un jour de juin 2011, Issa Tchiroma Bakary disait à peu près la même chose aux hommes de médias: «le président Paul Biya parle. Mais il parle à la hauteur nécessaire mais pas hautaine». L’une comme l’autre déclaration sont à situer en écho aux critiques sur l’attitude de Paul Biya de mépriser la presse locale. La communication verrouillée, ponctuée d’images-symboles et de rares interviews aux organes de presse à capitaux publics, c’est son affaire. En 39 ans, on dirait que le thermomètre de la relation entre Paul Biya et la presse à capitaux privé indique invariablement : froid polaire.

    Pseudos
    Dans un pays où les lexicographes manquent le moins, le nom Paul Biya a surtout le mérite d’être traduisible et ou adaptable. D’ailleurs, lui-même connait la chose : pour parler d’Ahmadou Ahidjo publiquement, l’homme du 6 novembre préfère «mon prédécesseur». Et pourquoi? Inutile d’enfoncer le couteau dans des plaies restées ouvertes depuis août 1983. Cette année-là, des artistes comme Marie Archangelo ou Ngalle Jojo mus par l’admiration pour l’actuel président de la République, ont fabriqué des diminutifs tels «Popol».

    Avant que Jacques Fame Ndongo ne parle de «créateur», Marie Mbala Biloa et les bayam-sellam du Cameroun étaient entrées dans leurs grimoires avant de sortir «Congélateur national». Dans ce florilège, «la force de l’expérience» sans doute le surnom le plus célèbre de Paul Biya. Entendu pour la première fois lors de la campagne pour l’élection présidentielle d’octobre 2018, il a été fabriqué pour rassurer les pessimistes et faire taire quelques bruyants opposants et tous ceux qui, à tort ou à raison, jalousent sa capacité à gérer le pays.

    Jean-René Meva’a Amougou 

  • Disparition : Wazizi comme Guérandi

    Disparition : Wazizi comme Guérandi

    Comme celle du célèbre ancien putschiste, la mort du journaliste de CMTV est révélatrice, de rapports de force entre les positions institutionnelles et celles des organisations indépendantes.

    Wazizi de son vivant

    De son vivant, il n’en avait pas encore fini avec les ennuis judiciaires, Samuel Abuwe Ajiekha alias Wazizi. Il a été rattrapé par la mort «pendant sa détention». C’est du moins ce qu’atteste un article paru sur le site de Reporters sans frontières (RSF) le 3 juin 2020 et réactualisé le 5 juin 2020.

    Citant la chaine de télévision privée Équinoxe TV basée à Douala, l’ONG internationale indique que l’ancien employé de Chillen Media Television (CMTV) est décédé de suites de torture, affirmant avoir eu accès à des photos prises quelques jours avant son décès, sur lesquelles il présente de nombreuses blessures.«La mort de ce journaliste détenu au secret par des militaires en dehors de toute procédure légale est la pire exaction commise contre un professionnel de l’information depuis dix ans au Cameroun», a déclaré Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF.

    De son côté,  la division de la communication du ministère Camerounais de la défense situe plutôt le décès au 17 août  2019 à l’hôpital militaire de Yaoundé. « Des suites de «sepsis sévère, une sorte d’inflammation généralisée dans tout le corps, selon le certificat de genre de mort; et «non pas d’un quelconque acte de torture ou de sévices corporels», indique Cyrille Atonfack dans un communiqué publié le 5 juin 2020.

    Arrêté le 3 aout 2019 à Muea (Sud-Ouest), l’homme de média avait par la suite été récupéré par les militaires de la 21e brigade d’infanterie de Buéa. Officiellement, il était accusé d’avoir tenu des propos critiques sur CMTV à l’égard des autorités, et de leur gestion de la crise dans les régions anglophones du Cameroun. Samuel Wazizi, rapporte RSF, n’avait pas été présenté devant la Haute Cour de Fako, dans la région du Sud-Ouest, le 28 mai dernier, renforçant les soupçons et les inquiétudes de ses avocats qui craignaient avant l’audience que le journaliste soit probablement mort. L’examen de l’affaire avait été rapidement ajourné et renvoyé au 9 juin 2020.

    Comme un arrière-gout de janvier 2013…
    Faut-il pour autant croire à un scénario inspiré d’un cas qui s’est produit il y a quelques années? En tout cas, à partir d’une même toile de fond, il y a lieu de décliner une autre histoire demeurée trouble dans la conscience collective. Il s’agit de l’affaire Guérandi Mbara. Traqué par les services spéciaux camerounais, l’officier supérieur, banni des forces de défense camerounaises au lendemain du putsch manqué du 6 avril 1984, avait disparu des radars jusqu’à sa mort relayée par Jeune Afrique.

    Selon le magazine panafricain, le capitaine avait discrètement été enlevé et exécuté en 2013. Yaoundé, par la voix de Issa Tchiroma Bakary (alors ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement), avait, lors d’une conférence tenue le 10 octobre 2014 affirmé que «le gouvernement ne répond pas à la rumeur». Aux oreilles de plusieurs citoyens, cette phrase ne permettait pas d’analyser séparément les composantes circonstancielles du décès de Guérandi Mbara.

    Avec la disparition de Samuel Wazizi, on peut lire une réelle similitude avec le cas ci-dessus évoqué. Elle renvoie directement au cœur du débat ayant trait aux arrestations et morts en catimini. En effet, tout comme pour Guérandi Mbara, les ancrages relatifs à la mort du journaliste de CMTV ne permettent pas de délier le vrai du faux. À la lecture de la sortie du capitaine de frégate Cyrille Atonfack, chef de la division de la communication au ministère de la Défense, l’on perçoit vite la différence entre la version officielle et celles des ONG de défense de droits de l’homme, des corporations de journalistes.

    Ongoung Zong Bella

  • Mimi Mefo : les yeux dans le rétro

    Mimi Mefo : les yeux dans le rétro

    La journaliste du groupe de presse camerounais Equinoxe est, depuis peu, la vedette d’un feuilleton ultra-enchevêtré. Portrait.

    Un tweet. Convocation chez le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire de Douala. Audition. Requalification des faits. Menottes. Détention préventive à la prison centrale de Douala. Remise en liberté. Indignations et inculpations multiformes. Comparution libre. La suite, incertaine. C’est à plus rien y comprendre. Un vrai vaudeville. Au centre de celui-ci, Mimi Mefo Takambou. Son métier est «le plus beau du monde», car bachelor en journalisme (université de Buea) depuis 2011. Un an chez Hi Tv dans le Sud-ouest et au Groupe Equinoxe à Douala. Dans cette dernière boîte la «mi-Baleng, mi-Bali Nyongha» épaissit son CV: présentation des informations télévisées et radiophoniques, réalisation de reportages sur le terrain, représentation du groupe dans certaines activités sociales et humanitaires.

    Elle est aussi à la manœuvre de nombreuses enquêtes sur la crise anglophone. Quelques anecdotes valident qu’elle est passionnée de chant et de danse. Elle revendique d’ailleurs une tenue de majorette au lycée à Bali Nyongha. Justice Ako, l’un de ses camarades du département de «journalism and mass communication» dit que Mimi est «accro à l’impératif du news, de l’adrénaline de l’événement, de la révélation, du scoop». Mais son angélisme s’arrête là.

    Tourbillon
    Depuis la semaine dernière, la justice militaire lui prête des intentions anti-patriotiques et une responsabilité dans la propagation de fausses informations relatives à la mort de Charles Truman Wesco. Par rapport à ce décès survenu officiellement le 30 octobre 2018 dans la région du Nord-ouest, le commissaire du gouvernement reproche beaucoup de superficialité dans la démarche ayant précédé le tweet de Mimi.
    Fidèle à ses petites phrases, Issa Tchiroma Bakary, le ministre de la Communication, dira que l’employée d’Equinoxe a commis le pire. Puisqu’elle a déclaré péremptoirement que le missionnaire américain a été tué par l’armée camerounaise. Elle avait publié ceci le 30 octobre 2018: «Bambili in pictures! Doors destroyed, houses ransacked, animals killed. It has the picture of a war zone, where civilians are caught by «stray bullets» targeted killings. A missionary has died today after he was shot by soldiers».

    Venu de toutes parts, le mitraillage est intense, nourri, continu. Au nom de cette journaliste, chacun s’arrache à lui-même chaque geste de plus. Au nom de Mimi Defo, la surenchère se vend comme un curieux remède à l’arbitraire d’un côté, et de l’autre, les voix disent qu’il est intolérant de mettre en prison une jeune femme pour une première faute. En off, ces voix-là estiment que l’infraction commise par Mimi n’est pas de faible gravité. Mais, pour elles, la réponse n’est pas nécessairement pénale.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Conférence générale anglophone : Le point des préparatifs

    Conférence générale anglophone : Le point des préparatifs

    Malgré le silence des autorités de Yaoundé, le cardinal Christian Tumi est à pied d’œuvre pour la tenue de cette grand-messe dédiée au retour à la paix dans les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest du Cameroun.

    Le cardinal Christian Tumi

    Trente-deux millions trois cent quarante-six mille huit cents (32.346.800) francs CFA. Voilà le montant qu’il faut pour organiser la Conférence générale anglophone (AGC). Au cours d’un point de presse ce 11 octobre 2018 à Douala, le cardinal Christian Tumi assure tenir le pari de la tenue de cette Conférence. A la tête d’un collège des coordonnateurs, l’archevêque émérite de Douala réitère le lieu et la date : «A Buea, les 21 et 22 novembre 2018, tel qu’arrêté par la commission statutaire chargée de l’organisation».

    Simon Munzu, porte-parole de l’AGC, ne fait pas mystère des préparatifs de l’événement. Cité par le site d’informations Camerooninfo.net, l’assistant du secrétaire général des Nations unies (Onu) se félicite simplement des avancées. Il précise aussi que la collecte des fonds est en cours. Selon lui, l’esprit du moment est uniquement guidé par «la volonté de voir cesser les nombreuses souffrances que la crise anglophone est en train de causer aux populations du Nord-ouest et du Sud-ouest et dont l’impact commence à se faire sentir dans d’autres régions du pays». Occasion belle pour inviter les habitants des régions affectées à participer massivement à l’AGC.

    Black-out
    Reste que le prélat ne dit aucun mot sur la position du gouvernement par rapport à cette initiative soutenue par trois autres dignitaires religieux : l’imam de la mosquée centrale de Bamenda, l’imam de la mosquée centrale de Buea et le rapporteur de l’assemblée presbytérienne du Cameroun. En effet, jusqu’ici, aucune information ne filtre, à défaut d’être feutrée. À son corps défendant, le comité d’organisation évite de dire clairement si certaines questions de fond sont déjà liquidées. «Avant d’aller à ce dialogue national, il est important que les populations des deux régions anglophones se retrouvent ensemble, d’abord pour se mettre d’accord sur les principaux problèmes à aborder lors de la tenue de ce dialogue national, mais aussi pour désigner des représentants des deux régions qui participeront à ce dialogue», posait en effet Simon Munzu en juillet dernier.

    Les organisateurs de la AGC ont-ils obtenu du Gouvernement camerounais la libération des anglophones détenus dans le cadre de la crise et la facilitation du retour des exilés et des réfugiés ? A moins qu’il ne s’agisse d’ajustements de circonstance, la lente gestation de la position des autorités de Yaoundé renforce le sentiment que le cardinal Tumi et son équipe ne gardent pas l’exclusivité de l’événement. Tout au moins, est-ce là une lecture première, à défaut d’être forcément plausible, surtout en ce lendemain électoral, où toute la classe politique nationale se cherche une ligne de crête. Bien plus, l’ingénierie politico-stratégique, côté pouvoir, avait déjà décliné sa posture. «On ne peut pas non plus demander à un Etat de droit, comme le nôtre, de libérer ceux qui ont tué, massacré… Quoi qu’il arrive, parce que nous sommes dans un Etat de droit, ils seront donc traduits devant les tribunaux pour répondre de leurs forfaits», dixit Issa Tchiroma Bakary, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Yaoundé-Washington : On refait ami ami

    Yaoundé-Washington : On refait ami ami

    Après la brouille survenue à la suite des déclarations controversées de l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun en mai dernier, les deux parties fument de nouveau le calumet de la paix. 

    Issa Tchiroma et Peter Balerin: hier et aujourd’hui, c’est diffférent

    Au sortir de l’audience que vient de lui accorder Issa Tchiroma Bakary ce 04 août 2018, S.E. Peter Henry Barlerin se montre sous son meilleur jour. La tonalité bien moins agressive, le détour puis le souci de trancher sur des choses qui fâchent, c’est le cliché que le diplomate américain semble vouloir distiller devant les micros et les caméras d’une partie de la presse locale. La rencontre de ce jour à Yaoundé avec le ministre camerounais de la Communication (Mincom), sert de pont d’or aux deux parties visiblement préoccupées à enterrer la hache de guerre. Avec délectation, chacune joue le rôle, sans donner l’impression de vouloir passer à la machine à laver médiatique. Selon un déroulé convenu, Issa Tchiroma Bakary reste dans la peau de simple figurant. A l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun de faire part du contenu des «discussions franches» qu’il vient d’avoir avec le Mincom.

    Selon l’Américain, cité par le quotidien Cameroon Tribune (CT) le 05 août 2018, Washington n’a pas de candidat préféré au scrutin présidentiel du 07 octobre prochain au Cameroun. Au contraire, rapporte le journal, le pays de l’Oncle Sam ambitionne de se démultiplier en vue d’une élection «libre, juste et crédible». Derrière les mots, l’on voit bien S.E. Peter Henry Barlerin refusant toute catégorisation (à tort ?) de son pays. Il y a quelque temps, celui-ci avait été soupçonné d’accointances avec certains leaders politiques camerounais, candidats à la présidentielle. Une attention particulière avait même révélé la mise à disposition de ceux-ci d’un pactole financier destiné à faire tomber politiquement Paul Biya. Ce que l’ambassadeur avait bien sûr démenti.

    Félicitations post-volte-face

    Dans sa démarche, le diplomate est venu «féliciter» le Mincom. Il le dit d’ailleurs lui-même dans les colonnes de CT: «J’ai félicité monsieur le ministre sur ses déclarations et nous sommes d’accord que ces crimes sont terribles et que les coupables seront jugés et sanctionnés par la justice». En filigrane, la volte-face du porte-parole du gouvernement camerounais au sujet d’une vidéo montrant des hommes en uniforme militaire exécutant deux femmes et deux enfants, dont un nourrisson. On se souvient qu’au plus vif de ce scandale, Heather Nauert s’était fendue en une déclaration. «Nous appelons le gouvernement du Cameroun à mener une enquête avec minutie et transparence sur les événements montrés sur la vidéo, à en rendre les conclusions publiques et, si des militaires camerounais étaient impliqués dans ces atrocités, à les tenir responsables de leurs actes», lançait la porte-parole du Département d’État des États-Unis.

    «Sur plusieurs aspects, souligne Pierre Malobé Ndinda, même sans le dire clairement, le diplomate américain est allé dire au Mincom que leur amitié peut résolument reprendre son sens positif». L’internationaliste valide que le coup de froid observé entre Issa Tchiroma Bakary et S.E. Peter Henry Barlerin, qui semble aujourd’hui révolu, a eu pour source deux actualités: «ce que le Mincom qualifiait le 19 mai 2018 sur RFI (Radio France internationale) d’ingérence des Etats-Unis dans les affaires internes du Cameroun et le refus d’accepter la vérité affichée par la vidéo incriminant certains militaires camerounais en faction dans l’Extrême-nord du pays».

    Jean-René Meva’a Amougou

  • Violations des droits de l’Homme: Yaoundé lutte contre une enquête de l’Onu

    Violations des droits de l’Homme: Yaoundé lutte contre une enquête de l’Onu

    Sa démarche sur l’affaire de la vidéo montrant l’exécution des femmes et des enfants participe de ce combat. 

    Le président du Cameroun et le SG de l’Onu

    «Un revirement à 180 degrés». C’est l’expression qui revient pour qualifier le communiqué du ministre de la Communication signé le 10 août 2018. Dans ce document, Issa Tchiroma Bakary avoue implicitement que la vidéo montrant des hommes en uniforme exécutant des femmes et des enfants, qui a fait irruption sur les réseaux sociaux au début du mois de juillet, n’est pas un fake news. Plus encore, la scène se serait bien déroulée au Cameroun et les bourreaux de ces femmes et enfants pourraient bien être des soldats camerounais.

    En effet, informe le porte-parole de fait du gouvernement, l’enquête ouverte pour «élucider cette affaire et en établir les responsabilités éventuelles a conduit à l’arrestation des personnels militaires». Il s’agit d’un lieutenant de vaisseau, d’un sergent, de deux caporaux, deux soldats de 2e classe et d’un soldat de 1ère classe «mis à la disposition de la justice», précise le document.

    Cette position est aux antipodes du discours tenu par le gouvernement dès l’apparition de cette vidéo. Lors d’une rencontre avec la presse, le 11 juillet dernier, tout en annonçant l’ouverture d’une enquête, Issa Tchiroma Bakary parle alors de «fake news», «de manœuvre de désinformation grossière dont les faits projetés n’ont aucun rapport avec l’action menée par les forces de défense et de sécurité dans le cadre des missions qui leurs sont confiées», de «conspiration manifeste», de «malheureuse tentative de transfiguration de la réalité et d’intoxication du public».

    A sa suite, le ministère de la Défense (Mindef) désigne même un coupable: «L’activiste Patrice Nganang, qui en est l’auteur, a tout simplement manipulé une série d’images prise hors du Cameroun, qu’il a par la suite monté dans un scénario pour accabler les forces de défense», accuse un message publié le 18 juillet sur la page Facebook du Mindef.

    Le revirement qui surprend beaucoup de monde aujourd’hui, a commencé à se dessiner le 20 juillet. Ce jour-là, dans une déclaration que fait le Mincom, on apprend que «le chef de l’Etat, SE Paul Biya [et] le gouvernement ont été choqués et indignés par l’atrocité des images contenues dans la vidéo et expriment leur compassion à l’égard des malheureuses victimes, ainsi qu’à leurs familles respectives». Issa Tchiroma admet même la possibilité de bavures contre lesquelles «le chef de l’Etat [a] prescrit la tolérance zéro».

    Enquête de l’Onu

    Mais pourquoi ce changement? «Il s’agit d’une démarche qui vise à préserver l’image du chef de l’Etat à l’international», nous avoue une source au fait du dossier. Il faut dire que depuis le déclanchement de l’affaire, Yaoundé subit des pressions de la part, des médias, des ONG et des partenaires internationaux. Après avoir rappelé que «les médias du monde entier, Amnesty International et les organisations camerounaises de défense des droits de l’Homme attribuent les actions montrées sur la vidéo à l’armée camerounaise», les Etats-Unis par la voix de la porte-parole du Département d’Etat, appellent, le 16 juillet, «le gouvernement du Cameroun à mener une enquête avec minutie et transparence sur les événements montrés sur la vidéo, à en rendre les conclusions publiques et, si des militaires camerounais étaient impliqués dans ces atrocités, à les tenir responsables de leurs actes».

    Mais il y a plus redoutable aux yeux des stratèges de Yaoundé. Ce sont les pressions exercées par le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies qui souhaite venir au Cameroun mener des investigations. «Nous avons dit au gouvernement camerounais: si vous affirmez que les informations qui circulent ne sont pas vraies, laissez-nous voir. (…) Clairement il faut une enquête, il faut que les gens rendent des comptes», indique le 27 juillet le Haut-Commissaire sur les antennes de RFI. Selon Zeid Ra’ad Zeid al-Hussein, jusqu’ici, le gouvernement leur oppose une fin de non-recevoir.

    Les autorités camerounaises redoutent d’autant plus la mission de cet organisme onusien qu’elle souhaite se consacrer aux accusations de tortures et d’exécutions extrajudiciaires dans l’Extrême-nord mais aussi dans les régions anglophones. En enquêtant lui-même sur les dénonciations de violation des droits de l’Homme, le régime de Yaoundé espère donc couper l’herbe sous le pied du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies. Selon nos informations, la célérité avec laquelle les enquêtes sont ouvertes, ces derniers jours, contre les soldats indélicats participe également de cette stratégie.

    Aboudi Ottou

  • Crise anglophone : La CEEAC craint une ingérence au Cameroun

    Crise anglophone : La CEEAC craint une ingérence au Cameroun

    Depuis quelque temps, l’organisation régionale ne se prive plus d’exprimer son opposition à une intervention de la communauté internationale dans le pays. 

    Tête-à-tête entre Lacroix et Allam-miLa communauté internationale miroite-t-elle quelque chose contre le Cameroun ? Difficile à dire pour l’instant. Une chose est sûre: les cris au loup se multiplient en Afrique centrale. Le 12 juillet dernier, le secrétaire général de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) s’est joint à ce concert d’inquiétude, à l’occasion d’une audience avec le secrétaire général adjoint des Nations unies pour les opérations de maintien de la paix. Le compte-rendu de cette rencontre, fait par les services de la communication du secrétariat général de la CEEAC où le fonctionnaire onusien a été reçu, apprend qu’Ahmad Allam-mi a indiqué à Jean-Pierre Lacroix que la communauté internationale devait «éviter toute ingérence» dans cadre de la crise dans les régions anglophones du Cameroun.

    En réalité, le diplomate tchadien n’a fait que rappeler au diplomate français la position des chefs d’Etat d’Afrique centrale. Position prise lors de la réunion de concertation organisée en marge du 30ème sommet de l’Union africaine, du 1er au 2 juillet 2018 à Nouakchott en Mauritanie. Selon le communiqué final de cette réunion, il en ressort que, pour les dirigeants des Etats de la sous-région, la crise anglophone est «un problème interne au Cameroun, maitrisé par les autorités camerounaises». De ce point de vue, il ne nécessite à ce stade «aucune intervention de la communauté internationale». A la même occasion, les chefs d’Etats de l’Afrique centrale ont «réaffirmé leur attachement au principe de non-ingérence dans les affaires internes des Etats et au respect de l’intégrité territoriale du Cameroun», considéré comme «un Etat uni et indivisible».

    Scénario libyen

    Pourquoi cette prise de position ? Simple mise en garde ou réaction à une action en préparation ? La CEEAC n’explique pas sa démarche. A Yaoundé, les autorités soutiennent qu’un scénario similaire à celui ayant renversé le régime de Mouammar Kadhafi est en préparation. A la suite des évènements du 1er octobre 2017 et des allusions de «génocide anglophone» qui ont suivi, le ministre camerounais de la Communication, porte-parole de fait du gouvernement, donne une conférence de presse. Issa Tchiroma Bakary explique en fait qu’un «plan diabolique» aux «conséquences déstabilisatrices» aurait été déjoué le 1er octobre. Il consisterait, selon le Mincom, à harceler les policiers et les militaires déployés dans le Nord-ouest et le Sud-ouest dans «le but de provoquer une réaction vigoureuse des forces de sécurité, entraînant un bain de sang et suscitant par là-même une hypothétique intervention internationale».

    Même si le gouvernement camerounais n’a fourni aucune preuve pour étayer ses allégations, l’hypothèse d’une intervention de la communauté internationale n’est pas complétement saugrenue. A la suite d’une insurrection déclenchée dans la ville rebelle de Bengazi et à la demande de la France de Nicolas Sarkozy, l’Organisation des Nations unies (Onu) votait, le 17 mars 2011, la résolution 1973. Elle autorise les Etats membres de l’Onu «à prendre toutes mesures nécessaires, pour protéger les populations et les zones civiles». Quelques jours plus tard, une coalition de pays (France, Etats-Unis et Grande Bretagne) attaque la Libye et assassine le colonel Mouammar Kadhafi.

    Un tel scénario est-il possible au Cameroun ? Certains experts se montrent sceptiques. Parmi les raisons avancées, le soutien affiché de Paris à Yaoundé sur la question anglophone. «Nous savons les tensions qu’il y a dans la région anglophone. Et là aussi, j’ai apporté tout mon soutien au gouvernement pour qu’il puisse aller vers la stabilité», indiquait Emmanuel Macron en début de mois de juillet. En visite au Nigéria, le président français dévoilait le contenu de l’échange téléphonique qu’il avait eu avec le président camerounais quelques jours avant.

    Aboudi Ottou

     

    Depuis bientôt un an, la crise anglophone a dégénéré en conflit armé. A ce jour, plusieurs milices d’inspiration séparatistes affrontent les forces de défense et de sécurité (FDS) camerounaises dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, où vivent à peu près 20% de la population. Pour les pouvoirs publics, l’objectif de ceux qui alimentent ces groupes armés est ni plus ni moins le renversement du régime Biya par une intervention extérieure. C’est bien-là la quintessence des sorties publiques du ministres de la communication et porte-parole du Gouvernement, depuis le début des revendications corporatistes (avocats et enseignants) pour une meilleure prise en compte de la minorité anglophone. Ainsi que l’a expliqué Issa Tchiroma Bakary le 09 octobre 2017, le scénario consisterait à harceler les FSD, «le but étant de provoquer une réaction vigoureuse des forces de sécurité, entraînant un bain de sang et suscitant par là-même une hypothétique intervention internationale». La Communauté économiques des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) semble partager cette façon de voir et dire les choses. Elle qui ne manque plus aucune occasion pour rappeler à l’Organisation des Nations unies (Onu) son opposition à une intervention de la communauté internationale.

     

    Opinion 

    Une intervention des Nations unies au Cameroun est-elle possible ?

    Le Cameroun s’enfonce inexorablement et de manière irréversible dans une trappe à conflits dont les conséquences humaines, économiques et sociales inquiètent ses partenaires internationaux. En juin dernier, les diplomates onusiens ont exprimé leur extrême préoccupation devant la flambée de violence et les nombreuses violations des droits humains signalées dans la partie anglophone du pays. Cette sortie n’a pas manqué d’alimenter les rumeurs les plus folles sur une imminente intervention onusienne au Cameroun.

    L’envoi des Casques bleus au Cameroun ? C’est ce qu’on peut lire en grand titre à la Une de certains tabloïds et de la presse en ligne. Cependant cette information repose sur une mauvaise interprétation de la déclaration des responsables onusiens et d’une méconnaissance du protocole des Nations unies en matière d’intervention armée.

    Tout part d’une correspondance adressée par la coordonnatrice du système des Nations unies au Cameroun, où elle dit vouloir «renforcer la présence des Nations unies au Cameroun afin de répondre au besoin d’assistance et de protection des personnes déplacées, dans le strict respect des principes humanitaires et en coordination avec l’effort du gouvernement». Nous sommes ici dans le registre d’une assistance humanitaire comme le pays en connait à l’Extrême-nord, plus précisément dans le camp de Minawao, où l’UNHCR assiste environs 60.000 réfugiés nigérians et une partie des déplacés internes camerounais. La même assistance est délivrée aux 200.000 rescapés centrafricains qui séjournent dans les régions de l’Est et de l’Adamaoua.
    L’intervention des Casques bleus entre à contrario dans le registre des Opérations de maintien de la Paix (OMP) qui sont extrêmement codifiées dans les chapitres VI (relatif au règlement pacifique des conflits) et VII (en cas d’agression contre un Etat) de la charte des Nations unies. L’enjeu d’une telle intervention est de contenir la situation explosive et d’actionner le processus politique pour un règlement rapide du conflit.

    On en est loin, en ce qui concerne le Cameroun. Ce d’autant plus qu’une intervention engagée sans la demande/accord du gouvernement camerounais violerait la doctrine onusienne de la paix, qui repose sur trois principes : le non-usage de la force (les Casques bleus ne disposent que d’armes défensives légères), l’impartialité (ils ne jouent que le rôle d’une force d’interposition entre 02 belligérants) et le consentement des parties (y compris celui de l’État dont le territoire servira de théâtre d’opération). Au-delà du respect de cette doctrine, les membres du conseil de sécurité doivent tomber d’accord pour adopter une résolution qui légitime et finance une telle intervention au Cameroun. Chose difficile à obtenir pour 02 raisons :

    1. les Etats-Unis veulent réduire les missions de paix en Afrique et s’attaquent au budget de la Monusco (RDC) et de la Minusma (Mali);

    2. Dans l’hypothèse où les Etats – Unis seraient favorables, la France, gardienne des dictatures africaines, opposerait un véto qui paralysera l’action du Conseil de sécurité. Quid des positions chinoises et russes dans un contexte marqué par l’intensification des rapports diplomatiques entre le Cameroun et ces puissances de l’est.

    Dans tous les cas de figure, la présence onusienne au Cameroun ne pourra être qu’humanitaire. Même si les Etats – Unis le souhaitaient, une intervention multilatérale sous la bannière des Nations unies ne saurait voir les jours. Car Paris, en plein désaccord avec Washington sur le dossier du climat, des accords commerciaux et le nucléaire Iranien, bloquera toute intervention dans ce qu’elle considère toujours comme son pré – carré, où règne un autocrate soumis à ses injonctions.

    Il est en revanche possible d’envisager l’hypothèse d’une intervention unilatérale sur le long terme, portée par le couple anglo-saxon (USA-UK) qui a déjà longuement tiré sur le gouvernement camerounais (même si la colère de Londres a été récemment tempérée par une concession gazière). Aussi des sanctions individuelles dirigées contre les dignitaires du régime soupçonnés de violation grave des droits humains et du droit international humanitaire sont de plus en plus plausibles sur le court terme. Il n’y a pas deux solutions que l’alternance politique pour barrer la voie au déploiement d’une puissance étrangère sur le sol camerounais.

    Joseph Léa Ngoula
    Analyste politique, coordonnateur national

    à la mobilisation du mouvement NOW!

    Front contre l’ingérence 

    Un autre allié nommé Union africaine 

    Dans son nouveau positionnement, Addis-Abeba est contre la moindre immixtion d’une entité étrangère dans les problèmes du continent. 

    Moussa Faki et Paul Biya à Etoudi

    L’instabilité dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest du Cameroun s’est imposée en sujet vedette de la dernière visite à Yaoundé du président de la Commission de l’Union africaine (UA), les 12, 13 et 14 juillet dernier. Sans doute du fait de sa gravité ! Au cours de leur huis clos, Paul Biya et Moussa Faki Mahamat ont, longuement échangé, sur la situation qui prévaut dans les régions anglophones. Du moins à en juger l’esprit de l’échange des toasts lors du déjeuner d’Etat offert par le couple présidentiel à l’illustre hôte. A cette occasion, le président de la Commission de l’UA a eu ces mots: «les éclairages pertinents dont vous avez bien voulu me faire profiter sur les évènements qui se déroulent dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest du Cameroun me sont particulièrement instructifs». Et de poursuivre: «Je voudrais à cette occasion réitérer le ferme attachement à l’unité, l’intégrité territoriale, la stabilité politique et sociale de tous nos Etats membres au sein desquels le Cameroun représente un symbole de diversité linguistique, culturelle et religieuse certes, mais d’unité, d’harmonie et de concorde également».

    Véto

    En vertu de l’article 4 de l’acte constitutif de l’UA, la promotion de l’auto-dépendance collective dans le cadre de l’Union est un principe de l’organisation continentale. Ce principe est désormais très appliqué depuis l’échec du continent à s’interposer contre l’ingérence étrangère en Côte d’Ivoire (2010) et Libye (2011). Les Etats africains essaient tant bien que mal de s’opposer aux agressions extérieures, aux interventions politiques, militaires et même humanitaires non validées par les autorités politiques des pays en situation de sinistre politique et/ou sécuritaire.

    Bien plus, depuis 2016, l’UA, sous la présidence en exercice du Guinéen Alpha Condé a réussi à imposer un logiciel de pensée et d’action: «les problèmes africains se règlent en Afrique par les Africains». Même si les capacités d’opérationnalisation sont encore limitées sur le continent, la réforme de l’UA amorcée depuis 2016 par le trio Deby-Conde-Kagame a amélioré les choses. Désormais, il faudra se référer à l’UA pour tout déploiement politique et sécuritaire en Afrique. C’est dans la dynamique du positionnement stratégique du continent dans le système multilatéral international. Le stratégique dialogue de «continent à continent» implémenté par l’actuel chef de l’exécutif de l’UA. Sur le dossier Cameroun, il faudra donc compter avec l’organisation continentale. Toute volonté d’actions devra l’intégrer.

    Appui

    La contribution de l’UA à la résolution de la situation actuelle n’est pas précisément connue. Pour sa part, le président de la Commission «a appelé à un dialogue inclusif et engagé tous les acteurs concernés à privilégier cette voie pour une sortie de crise durable fondée sur le leadership et l’implication des camerounais de manière à renforcer l’unité du Cameroun dans le respect de sa diversité», mentionne la déclaration faite à la suite de sa visite à Yaoundé. «L’Union africaine est disposée à accompagner tout effort déployé à cette fin, conformément aux responsabilités qui sont les siennes au terme de ses instruments pertinents», peut-on y lire. La proposition de l’UA serait donc un dialogue plus engageant, davantage susceptible de porter des solutions structurelles. Voilà pourquoi dans son toast, Moussa Faki Mahamat déclarait: «seuls la concertation, le dialogue et le traitement pacifique sont la voie juste à poursuivre». L’UA pourrait assurer une mission de bons offices à cet effet et en aurait toute la crédibilité !

    Matériellement, l’UA s’insère dans le logiciel de réponse de Yaoundé. Dans le cadre du plan d’assistance humanitaire, une conférence d’appel de fonds est organisée pour mobiliser un soutien plus important, à la mesure des besoins des populations affectées. Le patron de l’UA adéjà promis qu’il fera prendre «des mesures idoines pour que cette solidarité et compassion se traduisent dans les faits à travers une initiative pertinente qu’appelle la situation».

    Zacharie Roger Mbarga

    Verbatim 

    Issa Tchiroma Bakary

    «Provoquer une hypothétique intervention internationale»

    Extrait du propos liminaire du ministre camerounais de la Communication lors d’une conférence de presse donnée le 09 octobre 2017

    «Les événements qu’ont vécus nos compatriotes dans certaines localités du Nord-ouest et du Sud-ouest le 1er octobre dernier sont le fait de ces extrémistes violents qui avaient déjà prédit et planifié un bain de sang et pire encore, – je les cite – «un génocide anglophone», fin de citation.

    De fait, la stratégie mise en place par ces dangereux fauteurs de troubles consistait, au moyen de correspondances adressées au secrétaire général des Nations unies par les nommés Julius Sisiku Ayuk Tabe, Wilfried Tassang et AkereMuna, à préparer les esprits à la survenance d’un génocide planifié par le Gouvernement camerounais à l’encontre de compatriotes d’origine anglophone.

    Pour ce faire, des centaines de mercenaires ont été recrutés et formés à l’étranger, des cargaisons d’armes blanches – en l’occurrence plus de 500 machettes parfaitement aiguisées – d’importantes quantités d’armes à feu et d’engins explosifs ont ainsi été provisionnés et placés en lieux surs par les sécessionnistes.

    Cet arsenal devait servir à l’exécution de tueries en masse, perpétrées par ces mercenaires.

    À cette occasion, des attaques armées devaient être lancées contre les Forces de Défense et de Sécurité, des services publics, des édifices et des biens publics et privés. Parallèlement, des groupes de personnes armées, fanatisés, drogués et que l’on avait conditionnés et revêtus d’amulettes pour leur faire croire à leur invulnérabilité, allaient être jetés contre les Forces de maintien de l’ordre ; le but étant de provoquer une réaction vigoureuse des Forces de Sécurité, entraînant un bain de sang et suscitant par là-même une hypothétique intervention internationale.

    Fort heureusement, les renseignements recueillis par nos Forces de Défense et de Sécurité ont permis de prévenir suffisamment à temps, la réalisation ce plan diabolique et de déjouer les conséquences déstabilisatrices de ce stratagème.»

    Cavaye Yeguie

    «Toute interférence ne peut être que volonté de déstabilisation»

    Extrait du discours du président de l’Assemblée nationale à l’occasion de la clôture le 06 juillet dernier de la session parlementaire du mois de juin.

    «Je ne saurais clore mon propos sans dire l’indignation, mais alors toute l’indignation de la représentation nationale, face aux ingérences d’où qu’elles viennent dans les affaires internes du Cameroun (…) Laissez les Camerounaises et les Camerounais décider de leur destin. Toute interférence ne peut être que manipulation et volonté de déstabilisation. Ce que je dénonce et condamne avec la dernière énergie du haut de cette tribune du peuple souverain (…) A plus de 70 ans de parlementarisme et après près de 60 ans d’indépendance, le Cameroun doit pouvoir assumer librement la conduite de sa propre politique (…) Nous disons oui à des relations de coopération saines et mutuellement bénéfiques mais nous réfutons toute tentative de manipulation de l’opinion.»

     

  • 25ème édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse: L’UPF met les journalistes dans la mouvance électorale

    25ème édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse: L’UPF met les journalistes dans la mouvance électorale

    La section camerounaise de l’Union internationale de la presse francophone a organisé le 03 mai dernier à Yaoundé un symposium sur la couverture journalistique des élections. Comme pour anticiper sur l’agenda politique national, très chargé en cette année.

    Au terme de la cérémonie d’ouverture du symposium.

    2018 est une année essentiellement électorale au Cameroun. Après les élections sénatoriales tenues en mars dernier, on attend notamment les élections législatives et présidentielle. Et pour assurer une bonne couverture médiatique de ces évènements politiques majeurs, la section camerounaise de l’Union internationale de la presse francophone (UPF-Cameroun) a saisi la balle au bond à Yaoundé, le 03 mai 2018.

    A l’occasion de la célébration de la 25e édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse, l’UPF – Cameroun, sous la férule de son président Aimé Robert Bihina, a organisé à Yaoundé, avec l’appui de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), un symposium international sur la couverture des élections par les médias. Une rencontre présidée par le ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary en présence du représentant personnel de la Secrétaire générale de la Francophonie, le Pr Tidiane Dioh, par ailleurs chargé des programmes médias à l’OIF.

    Le fil conducteur retenu à cette occasion: «La qualité du traitement de l’information en période électorale», a permis aux journalistes de mesurer leur responsabilité en périodes électorales. Pour éviter certaines dérives, il a été question de rappeler aux hommes de médias certains fondamentaux afin de mettre à mal les velléités d’instrumentalisation et de manipulation des médias.

    Pour une couverture impartiale et équilibrée du processus électoral, le Pr. Tidiane Dioh a partagé une réflexion sur la base de ses trois années d’expérience dans l’exercice du journalisme et en sa qualité d’enseignant d’université. De ses propos, l’on retient qu’il n’y a aucune convention régissant la couverture médiatique électorale.

    Pourtant, cette couverture reste un élément important dans la vie d’une nation, car une élection mobilise toutes les composantes d’une nation. «La couverture d’une élection s’apprend. Le journaliste est l’historien du présent, c’est-à-dire qu’il raconte ce qui se déroule sous ses yeux. Il ne doit pas se constituer en état médiatique», a expliqué le Pr Tidiane Dioh. Et d’ajouter : «Le journaliste ne doit pas perdre de vue que le jour du scrutin n’est pas le jour de vérité et doit disposer d’un minimum de recul historique basé sur la vérité des faits».

    Cette initiative de l’UPF-Cameroun a été saluée par le Ministre camerounais de la communication. Issa Tchiroma Bakary en a profité pour rappeler que le Cameroun a une presse libre et diversifiée. Il a invité les journalistes camerounais à être les ambassadeurs dignes du traitement de l’information partout où besoin est, précisément en période électorale.

    «Vous avez le devoir de protection des intérêts supérieurs en tant que citoyen dans le respect éditorial des médias qui constituent le paysage médiatique de notre pays», a conclu le Mincom. Issa Tchiroma Bakary a annoncé que les prochaines assises mondiales de l’UPF en novembre de l’année prochaine au Cameroun ont reçu le parrainage du chef de l’Etat, S.E Paul Biya.

    Une quarantaine de participants, journalistes politiques dans en service dans les médias camerounais, ont pris part à ce symposium qui a développé les thèmes ci- après: «les enjeux et défis des élections 2018 au Cameroun», par le socio-politiste Pr Owona Nguini Eric Mathias ; «La chasse aux fake news et l’équilibre dans la couverture médiatique des élections», par le Pr Thomas Essono; «Droits et devoirs des journalistes en période électorale», par le Pr Albert Mbida.

    De l’avis des participants, le symposium sur «la qualité du traitement de l’information en période électorale» aura été un grand moment de renforcement de capacités en matière de couverture des éléctions au Cameroun.

    Jean-René Meva’a Amougou

    SNJC : guerre contre la presse à gage

    Le syndicat menace d’exclure désormais de ses rangs, tous les journalistes qui se rendront coupables de chantage, dénigrement et de plagiat.

    Le 03 mai dernier, dans sa déclaration solennelle faite à l’occasion de la célébration de la 25e édition de la Journée internationale de la liberté de presse, la condamnation du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) est claire: «Le SNJC dit non à la presse à gages. Non au journalisme de haine et de division sociale. Non au chantage médiatique. Non à la presse des mallettes. Non à la presse aux ordres des groupuscules occultes».

    Son président se veut même menaçant : «seront désormais exclus du syndicat, les confrères qui se sont rendus coupable de chantage, dénigrement et de plagiat», a met en garde Denis Nkwebo lors des universités du SNJC organisé à l’occasion sous le thème, «le SNJC d’aujourd’hui, le SNJC de demain, la liberté et le professionnalisme au service du public». «Tous les membres du SNJC ont l’obligation morale, syndicale, professionnelle de respecter les règles d’éthique et de déontologie. Nous devons produire un travail de bonne qualité professionnelle», a-t-il prescrit.

    Mais le syndicaliste n’est pas dupe. Il sait très bien qu’un travail de qualité peut difficilement se faire dans un environnement précaire. C’est pourquoi le SNJC a aussi appelé «à l’émancipation économique des femmes et des hommes des médias». Pour défendre leurs droits, les journalistes ont donc été invités à se syndiquer. «L’employé seul face au patron est faible. Le patron est tout puissant.

    Il peut renier certains acquis et chercher à le mettre à la porte. Or rassemblé dans un syndicat, on devient fort, fort pour défendre les intérêts et bien formuler les doléances. Nous regardons vers la même direction et nous sommes capables de demander les meilleures conditions de travail de sécurité», explique Hilaire Ham Ekoue, le vice-président SNJC.

    Dans le même sens, Denis Nkwebo, par ailleurs rédacteur en chef adjoint du quotidien Le Jour attire l’attention des uns et des autres sur ceux qu’il considère comme des «marionnettes visibles»: «le Conseil national de la communication et la Commission de délivrance de la carte de presse sont tant de pièges tendus. Il y a des institutions taillées sur mesure pour démontrer l’incapacité des journalistes camerounais à se prendre en charge et assumer leur mission sociale».

    Alain Biyong

  • Marcel Namata Diteng

    Marcel Namata Diteng

    Au moment où nous mettions sous presse, l’on est sans nouvelle du sous-préfet de Batibo (département de la Momo dans le Nord-ouest du pays). Victime d’un enlèvement depuis le 11 février au matin, sa voiture a été retrouvée brûlée à Batibo, avant le défilé de la Fête de la jeunesse, qu’il devait présider et qui, de fait, a été annulé.  Des nouvelles de son exécution ont foisonné. Un vidéogramme posté le même jour sur la page Facebook de Ayaba Cho Lucas,  commandant en chef de la branche armée des séparatistes anglophones semblaient confirmer  la mort de cette autorité administrative. Yaoundé, qui poursuit les recherches, a démenti par le canal du ministre de la communication Issa Tchiroma Bakary, porte-parole du gouvernement. Néanmoins, le gouvernement dit prendre cela  avec le plus grand sérieux, d’autant plus que c’est le même qui avait, quelques minutes après la capture du sous-préfet, publié les images de son véhicule incinéré, et surtout une photographie de l’intéressé grillant une cigarette dans un bosquet. Les noms de ses ravisseurs, ou à tout le moins des commanditaires de l’enlèvement, sont déjà dévoilés. Il s’agit de Tenyong Mbah Divine alias Fon Neymar et Brainand Fongoh alias Fiango. Selon des sources sécuritaires, Acha Ivo, concepteur présumé du plan d’enlèvement de Batibo, est originaire du village Ashang près de Batibo.