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Étiquette : Issa Tchiroma Bakary
88/39… Un président, deux âges
À la tête du Cameroun depuis le 6 novembre 1982, revoici Paul Biya, le chef de l’État en trois facettes.
Que dire encore de Paul Biya en 2021 ? Des astrologues vont vite faire assaut de subtilités pour brandir la date du 13 février 1933, celle de la belle étoile. Autour de celle-ci, des statisticiens peuvent pouvoir trancher le débat en auscultant avec leurs outils les deux âges du président : 88 ans, dont 39 au pouvoir. À n’en pas douter, le 13 février 2021, ces chiffres se sont donnés la main pour prouver qu’il s’agit effectivement d’un seul et même homme. L’autre jour, un comédien local a échafaudé un scénario mettant côte à côte le portait officiel du mari de Chantal Vigouroux et celui de 2021.
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Dans une dramaturgie où les sentiments se sont mêlés aux événements, l’auteur du sketch décrivait un Paul Biya «souriant et presque surpris de se voir ici» ; «ici» à la tête du Cameroun, à 49 ans seulement. Là, Fame Ndongo conteste vigoureusement. «C’est un portrait franc et étonnant de simplicité. C’est une photo tout à fait normale, assez élégante», argue le sémioticien.Au finish, il y a débat. Mais s’il y a une qualité qui est souvent attribuée au successeur d’Ahmadou Ahidjo, c’est le soin avec lequel il travaille son image. L’on a entendu dire via son entourage que lors de ses anniversaires, il est très pointilleux sur un aspect: la juste dose qu’impose une tenue d’homme né presqu’au début de l’autre siècle, par rapport à celle de sa jeune épouse…
Longtemps, on a considéré comme inébranlable le mur séparant la vie publique et la vie privée de Paul Biya. Toutefois, à la faveur de ses anniversaires, le natif de Mvomeka’a «ouvre» quand même ses appartements privés. Sans bruit et sans extravagance.
Conformément à la voie tracée pour lui par les missionnaires, il sait quelle part joue l’image de la famille dans la conquête des «cœurs». Souvent, lors de ces occasions-là, on l’a vu avec épouse et enfants. «Des coups de com’ rigoureusement scénarisés. À décrypter leurs formats, ils s’attachent à mettre en valeur deux façons d’habiter la magistrature suprême : la jeunesse et la vieillesse», signale Claude Effila, spécialiste de la communication politique.
Dans son propos, ce dernier décrit implicitement un Paul Biya qui sait endiguer la surenchère. Surtout celle d’une certaine presse qui taille son succès sur les échos mondains et les mille histoires croustillantes racontées depuis le Palais de l’Unité. Depuis ce haut-lieu, la chronique postule même que, le cabinet civil du fils de Mvondo Assam et d’Anastasie Eyenga ne divulge que des clichés qui n’ont rien d’autre à faire voir au public qu’un homme d’État au regard énamouré, en tenue décontractée.
Les images montrant le président avec son âge qui avance au compteur de la vie sont systématiquement écartées. «Avant, observe Claude Effila, le public n’avait droit à aucune image d’anniversaire du président. Il y a fort à parier que son entourage l’a convaincu de procéder par glissements et infléchissements, puisque faire de la politique au sens moderne du terme, c’est savoir ménager sa vie privée comme un outil de communication politique».
Sans doute, il aurait voulu célébrer ses 88 ans caressant la flamboyance du trophée du récent Championnat d’Afrique des Nations (CHAN). Mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Sur «la fête» de celui qu’une opinion locale a, depuis, positionné en «président des victoires», l’élimination des Lions A’ est restée comme un gros point noir. Mais à Étoudi où l’on refuse de se faire victime collatérale de la débâcle du CHAN, l’on a gardé de bons vieux réflexes pour montrer Paul Biya sous un jour radieux. Dans un exercice de style, neuf images de «l’Homme-Lion» sur un visuel ont été chargées d’incarner au maximum sa majesté. Et comme toujours, l’entourage de Paul Biya a mis le paquet le 13 février 2021. Pas moins qu’un visuel sur lequel le chef de l’État rayonne de joie de vivre.
Tout est passé: costume sombre, personnage fort rajeuni, rides cachées et calvitie miraculeusement disparue, visage exhibant un grand sourire et fermeté. «Il y a une vraie recherche de sympathie et d’adhésion. Cette affiche, si elle semble moins sérieuse dans le faciès, est finalement plus humaine. Cela correspond à son personnage. Le mot papa est un choix intéressant, là encore synonyme de proximité», décrypte William Arsène Bivono. Selon le promoteur événementiel basé à Douala, «le choix de l’affiche est vraiment novateur, et tout à fait révolutionnaire par rapport aux anniversaires précédents.
La posture, l’expression du visage, les accessoires, le fond, le cadrage, le choix des couleurs, etc. sont de riches porteurs de sens pour un anniversaire». Si l’on en croit le politologue Belinga Zambo, ce que ce gadget d’anniversaire évite copieusement de dire c’est qu’un «parfum inimitable se trouve dans l’intimité du pouvoir et que c’est lui qui inspire des phrases comme ne reste pas au pouvoir qui veut, mais qui peut». Claude Effila complète avec «il paraît qu’il y en a qui s’intéressent à mes funérailles. Eh bien, dites-leur que je leur donne rendez-vous dans une vingtaine d’années».
Parler…
En 39 ans de bail à Étoudi, Paul Biya se félicite de temps en temps d’avoir eu deux «vrais ministres de la Communication». «Augustin Kontchou Kouemegni et Issa Tchiroma Bakary ont véritablement rempli leurs cahiers de charge; comme le voulait le roi en des moments précis», glisse Claude Effila. «En bons portraitistes du maître, ces Messieurs ne sont pas passés à côté de leur travail au sein du sérail», ajoute le spécialiste de la communication politique. Exemple: lors d’une conférence de presse à Yaoundé en mars 1992, une phrase a fait sourire au moins un journaliste présent : «le président Biya parle; mais il n’aime pas trop la parole».Dixit Augustin Kontchou Kouemegni. Un jour de juin 2011, Issa Tchiroma Bakary disait à peu près la même chose aux hommes de médias: «le président Paul Biya parle. Mais il parle à la hauteur nécessaire mais pas hautaine». L’une comme l’autre déclaration sont à situer en écho aux critiques sur l’attitude de Paul Biya de mépriser la presse locale. La communication verrouillée, ponctuée d’images-symboles et de rares interviews aux organes de presse à capitaux publics, c’est son affaire. En 39 ans, on dirait que le thermomètre de la relation entre Paul Biya et la presse à capitaux privé indique invariablement : froid polaire.
Pseudos
Dans un pays où les lexicographes manquent le moins, le nom Paul Biya a surtout le mérite d’être traduisible et ou adaptable. D’ailleurs, lui-même connait la chose : pour parler d’Ahmadou Ahidjo publiquement, l’homme du 6 novembre préfère «mon prédécesseur». Et pourquoi? Inutile d’enfoncer le couteau dans des plaies restées ouvertes depuis août 1983. Cette année-là, des artistes comme Marie Archangelo ou Ngalle Jojo mus par l’admiration pour l’actuel président de la République, ont fabriqué des diminutifs tels «Popol».Avant que Jacques Fame Ndongo ne parle de «créateur», Marie Mbala Biloa et les bayam-sellam du Cameroun étaient entrées dans leurs grimoires avant de sortir «Congélateur national». Dans ce florilège, «la force de l’expérience» sans doute le surnom le plus célèbre de Paul Biya. Entendu pour la première fois lors de la campagne pour l’élection présidentielle d’octobre 2018, il a été fabriqué pour rassurer les pessimistes et faire taire quelques bruyants opposants et tous ceux qui, à tort ou à raison, jalousent sa capacité à gérer le pays.
Jean-René Meva’a Amougou
Mimi Mefo : les yeux dans le rétro
La journaliste du groupe de presse camerounais Equinoxe est, depuis peu, la vedette d’un feuilleton ultra-enchevêtré. Portrait.
Un tweet. Convocation chez le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire de Douala. Audition. Requalification des faits. Menottes. Détention préventive à la prison centrale de Douala. Remise en liberté. Indignations et inculpations multiformes. Comparution libre. La suite, incertaine. C’est à plus rien y comprendre. Un vrai vaudeville. Au centre de celui-ci, Mimi Mefo Takambou. Son métier est «le plus beau du monde», car bachelor en journalisme (université de Buea) depuis 2011. Un an chez Hi Tv dans le Sud-ouest et au Groupe Equinoxe à Douala. Dans cette dernière boîte la «mi-Baleng, mi-Bali Nyongha» épaissit son CV: présentation des informations télévisées et radiophoniques, réalisation de reportages sur le terrain, représentation du groupe dans certaines activités sociales et humanitaires.
Elle est aussi à la manœuvre de nombreuses enquêtes sur la crise anglophone. Quelques anecdotes valident qu’elle est passionnée de chant et de danse. Elle revendique d’ailleurs une tenue de majorette au lycée à Bali Nyongha. Justice Ako, l’un de ses camarades du département de «journalism and mass communication» dit que Mimi est «accro à l’impératif du news, de l’adrénaline de l’événement, de la révélation, du scoop». Mais son angélisme s’arrête là.
Tourbillon
Depuis la semaine dernière, la justice militaire lui prête des intentions anti-patriotiques et une responsabilité dans la propagation de fausses informations relatives à la mort de Charles Truman Wesco. Par rapport à ce décès survenu officiellement le 30 octobre 2018 dans la région du Nord-ouest, le commissaire du gouvernement reproche beaucoup de superficialité dans la démarche ayant précédé le tweet de Mimi.
Fidèle à ses petites phrases, Issa Tchiroma Bakary, le ministre de la Communication, dira que l’employée d’Equinoxe a commis le pire. Puisqu’elle a déclaré péremptoirement que le missionnaire américain a été tué par l’armée camerounaise. Elle avait publié ceci le 30 octobre 2018: «Bambili in pictures! Doors destroyed, houses ransacked, animals killed. It has the picture of a war zone, where civilians are caught by «stray bullets» targeted killings. A missionary has died today after he was shot by soldiers».Venu de toutes parts, le mitraillage est intense, nourri, continu. Au nom de cette journaliste, chacun s’arrache à lui-même chaque geste de plus. Au nom de Mimi Defo, la surenchère se vend comme un curieux remède à l’arbitraire d’un côté, et de l’autre, les voix disent qu’il est intolérant de mettre en prison une jeune femme pour une première faute. En off, ces voix-là estiment que l’infraction commise par Mimi n’est pas de faible gravité. Mais, pour elles, la réponse n’est pas nécessairement pénale.
Jean-René Meva’a Amougou
Conférence générale anglophone : Le point des préparatifs
Malgré le silence des autorités de Yaoundé, le cardinal Christian Tumi est à pied d’œuvre pour la tenue de cette grand-messe dédiée au retour à la paix dans les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest du Cameroun.
Le cardinal Christian Tumi Trente-deux millions trois cent quarante-six mille huit cents (32.346.800) francs CFA. Voilà le montant qu’il faut pour organiser la Conférence générale anglophone (AGC). Au cours d’un point de presse ce 11 octobre 2018 à Douala, le cardinal Christian Tumi assure tenir le pari de la tenue de cette Conférence. A la tête d’un collège des coordonnateurs, l’archevêque émérite de Douala réitère le lieu et la date : «A Buea, les 21 et 22 novembre 2018, tel qu’arrêté par la commission statutaire chargée de l’organisation».
Simon Munzu, porte-parole de l’AGC, ne fait pas mystère des préparatifs de l’événement. Cité par le site d’informations Camerooninfo.net, l’assistant du secrétaire général des Nations unies (Onu) se félicite simplement des avancées. Il précise aussi que la collecte des fonds est en cours. Selon lui, l’esprit du moment est uniquement guidé par «la volonté de voir cesser les nombreuses souffrances que la crise anglophone est en train de causer aux populations du Nord-ouest et du Sud-ouest et dont l’impact commence à se faire sentir dans d’autres régions du pays». Occasion belle pour inviter les habitants des régions affectées à participer massivement à l’AGC.
Black-out
Reste que le prélat ne dit aucun mot sur la position du gouvernement par rapport à cette initiative soutenue par trois autres dignitaires religieux : l’imam de la mosquée centrale de Bamenda, l’imam de la mosquée centrale de Buea et le rapporteur de l’assemblée presbytérienne du Cameroun. En effet, jusqu’ici, aucune information ne filtre, à défaut d’être feutrée. À son corps défendant, le comité d’organisation évite de dire clairement si certaines questions de fond sont déjà liquidées. «Avant d’aller à ce dialogue national, il est important que les populations des deux régions anglophones se retrouvent ensemble, d’abord pour se mettre d’accord sur les principaux problèmes à aborder lors de la tenue de ce dialogue national, mais aussi pour désigner des représentants des deux régions qui participeront à ce dialogue», posait en effet Simon Munzu en juillet dernier.Les organisateurs de la AGC ont-ils obtenu du Gouvernement camerounais la libération des anglophones détenus dans le cadre de la crise et la facilitation du retour des exilés et des réfugiés ? A moins qu’il ne s’agisse d’ajustements de circonstance, la lente gestation de la position des autorités de Yaoundé renforce le sentiment que le cardinal Tumi et son équipe ne gardent pas l’exclusivité de l’événement. Tout au moins, est-ce là une lecture première, à défaut d’être forcément plausible, surtout en ce lendemain électoral, où toute la classe politique nationale se cherche une ligne de crête. Bien plus, l’ingénierie politico-stratégique, côté pouvoir, avait déjà décliné sa posture. «On ne peut pas non plus demander à un Etat de droit, comme le nôtre, de libérer ceux qui ont tué, massacré… Quoi qu’il arrive, parce que nous sommes dans un Etat de droit, ils seront donc traduits devant les tribunaux pour répondre de leurs forfaits», dixit Issa Tchiroma Bakary, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.
Jean-René Meva’a Amougou
Yaoundé-Washington : On refait ami ami
Après la brouille survenue à la suite des déclarations controversées de l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun en mai dernier, les deux parties fument de nouveau le calumet de la paix.
Issa Tchiroma et Peter Balerin: hier et aujourd’hui, c’est diffférent Au sortir de l’audience que vient de lui accorder Issa Tchiroma Bakary ce 04 août 2018, S.E. Peter Henry Barlerin se montre sous son meilleur jour. La tonalité bien moins agressive, le détour puis le souci de trancher sur des choses qui fâchent, c’est le cliché que le diplomate américain semble vouloir distiller devant les micros et les caméras d’une partie de la presse locale. La rencontre de ce jour à Yaoundé avec le ministre camerounais de la Communication (Mincom), sert de pont d’or aux deux parties visiblement préoccupées à enterrer la hache de guerre. Avec délectation, chacune joue le rôle, sans donner l’impression de vouloir passer à la machine à laver médiatique. Selon un déroulé convenu, Issa Tchiroma Bakary reste dans la peau de simple figurant. A l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun de faire part du contenu des «discussions franches» qu’il vient d’avoir avec le Mincom.
Selon l’Américain, cité par le quotidien Cameroon Tribune (CT) le 05 août 2018, Washington n’a pas de candidat préféré au scrutin présidentiel du 07 octobre prochain au Cameroun. Au contraire, rapporte le journal, le pays de l’Oncle Sam ambitionne de se démultiplier en vue d’une élection «libre, juste et crédible». Derrière les mots, l’on voit bien S.E. Peter Henry Barlerin refusant toute catégorisation (à tort ?) de son pays. Il y a quelque temps, celui-ci avait été soupçonné d’accointances avec certains leaders politiques camerounais, candidats à la présidentielle. Une attention particulière avait même révélé la mise à disposition de ceux-ci d’un pactole financier destiné à faire tomber politiquement Paul Biya. Ce que l’ambassadeur avait bien sûr démenti.
Félicitations post-volte-face
Dans sa démarche, le diplomate est venu «féliciter» le Mincom. Il le dit d’ailleurs lui-même dans les colonnes de CT: «J’ai félicité monsieur le ministre sur ses déclarations et nous sommes d’accord que ces crimes sont terribles et que les coupables seront jugés et sanctionnés par la justice». En filigrane, la volte-face du porte-parole du gouvernement camerounais au sujet d’une vidéo montrant des hommes en uniforme militaire exécutant deux femmes et deux enfants, dont un nourrisson. On se souvient qu’au plus vif de ce scandale, Heather Nauert s’était fendue en une déclaration. «Nous appelons le gouvernement du Cameroun à mener une enquête avec minutie et transparence sur les événements montrés sur la vidéo, à en rendre les conclusions publiques et, si des militaires camerounais étaient impliqués dans ces atrocités, à les tenir responsables de leurs actes», lançait la porte-parole du Département d’État des États-Unis.
«Sur plusieurs aspects, souligne Pierre Malobé Ndinda, même sans le dire clairement, le diplomate américain est allé dire au Mincom que leur amitié peut résolument reprendre son sens positif». L’internationaliste valide que le coup de froid observé entre Issa Tchiroma Bakary et S.E. Peter Henry Barlerin, qui semble aujourd’hui révolu, a eu pour source deux actualités: «ce que le Mincom qualifiait le 19 mai 2018 sur RFI (Radio France internationale) d’ingérence des Etats-Unis dans les affaires internes du Cameroun et le refus d’accepter la vérité affichée par la vidéo incriminant certains militaires camerounais en faction dans l’Extrême-nord du pays».
Jean-René Meva’a Amougou
Violations des droits de l’Homme: Yaoundé lutte contre une enquête de l’Onu
Sa démarche sur l’affaire de la vidéo montrant l’exécution des femmes et des enfants participe de ce combat.
Le président du Cameroun et le SG de l’Onu «Un revirement à 180 degrés». C’est l’expression qui revient pour qualifier le communiqué du ministre de la Communication signé le 10 août 2018. Dans ce document, Issa Tchiroma Bakary avoue implicitement que la vidéo montrant des hommes en uniforme exécutant des femmes et des enfants, qui a fait irruption sur les réseaux sociaux au début du mois de juillet, n’est pas un fake news. Plus encore, la scène se serait bien déroulée au Cameroun et les bourreaux de ces femmes et enfants pourraient bien être des soldats camerounais.
En effet, informe le porte-parole de fait du gouvernement, l’enquête ouverte pour «élucider cette affaire et en établir les responsabilités éventuelles a conduit à l’arrestation des personnels militaires». Il s’agit d’un lieutenant de vaisseau, d’un sergent, de deux caporaux, deux soldats de 2e classe et d’un soldat de 1ère classe «mis à la disposition de la justice», précise le document.
Cette position est aux antipodes du discours tenu par le gouvernement dès l’apparition de cette vidéo. Lors d’une rencontre avec la presse, le 11 juillet dernier, tout en annonçant l’ouverture d’une enquête, Issa Tchiroma Bakary parle alors de «fake news», «de manœuvre de désinformation grossière dont les faits projetés n’ont aucun rapport avec l’action menée par les forces de défense et de sécurité dans le cadre des missions qui leurs sont confiées», de «conspiration manifeste», de «malheureuse tentative de transfiguration de la réalité et d’intoxication du public».
A sa suite, le ministère de la Défense (Mindef) désigne même un coupable: «L’activiste Patrice Nganang, qui en est l’auteur, a tout simplement manipulé une série d’images prise hors du Cameroun, qu’il a par la suite monté dans un scénario pour accabler les forces de défense», accuse un message publié le 18 juillet sur la page Facebook du Mindef.
Le revirement qui surprend beaucoup de monde aujourd’hui, a commencé à se dessiner le 20 juillet. Ce jour-là, dans une déclaration que fait le Mincom, on apprend que «le chef de l’Etat, SE Paul Biya [et] le gouvernement ont été choqués et indignés par l’atrocité des images contenues dans la vidéo et expriment leur compassion à l’égard des malheureuses victimes, ainsi qu’à leurs familles respectives». Issa Tchiroma admet même la possibilité de bavures contre lesquelles «le chef de l’Etat [a] prescrit la tolérance zéro».
Enquête de l’Onu
Mais pourquoi ce changement? «Il s’agit d’une démarche qui vise à préserver l’image du chef de l’Etat à l’international», nous avoue une source au fait du dossier. Il faut dire que depuis le déclanchement de l’affaire, Yaoundé subit des pressions de la part, des médias, des ONG et des partenaires internationaux. Après avoir rappelé que «les médias du monde entier, Amnesty International et les organisations camerounaises de défense des droits de l’Homme attribuent les actions montrées sur la vidéo à l’armée camerounaise», les Etats-Unis par la voix de la porte-parole du Département d’Etat, appellent, le 16 juillet, «le gouvernement du Cameroun à mener une enquête avec minutie et transparence sur les événements montrés sur la vidéo, à en rendre les conclusions publiques et, si des militaires camerounais étaient impliqués dans ces atrocités, à les tenir responsables de leurs actes».
Mais il y a plus redoutable aux yeux des stratèges de Yaoundé. Ce sont les pressions exercées par le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies qui souhaite venir au Cameroun mener des investigations. «Nous avons dit au gouvernement camerounais: si vous affirmez que les informations qui circulent ne sont pas vraies, laissez-nous voir. (…) Clairement il faut une enquête, il faut que les gens rendent des comptes», indique le 27 juillet le Haut-Commissaire sur les antennes de RFI. Selon Zeid Ra’ad Zeid al-Hussein, jusqu’ici, le gouvernement leur oppose une fin de non-recevoir.
Les autorités camerounaises redoutent d’autant plus la mission de cet organisme onusien qu’elle souhaite se consacrer aux accusations de tortures et d’exécutions extrajudiciaires dans l’Extrême-nord mais aussi dans les régions anglophones. En enquêtant lui-même sur les dénonciations de violation des droits de l’Homme, le régime de Yaoundé espère donc couper l’herbe sous le pied du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies. Selon nos informations, la célérité avec laquelle les enquêtes sont ouvertes, ces derniers jours, contre les soldats indélicats participe également de cette stratégie.
Aboudi Ottou
25ème édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse: L’UPF met les journalistes dans la mouvance électorale
La section camerounaise de l’Union internationale de la presse francophone a organisé le 03 mai dernier à Yaoundé un symposium sur la couverture journalistique des élections. Comme pour anticiper sur l’agenda politique national, très chargé en cette année.
Au terme de la cérémonie d’ouverture du symposium. 2018 est une année essentiellement électorale au Cameroun. Après les élections sénatoriales tenues en mars dernier, on attend notamment les élections législatives et présidentielle. Et pour assurer une bonne couverture médiatique de ces évènements politiques majeurs, la section camerounaise de l’Union internationale de la presse francophone (UPF-Cameroun) a saisi la balle au bond à Yaoundé, le 03 mai 2018.
A l’occasion de la célébration de la 25e édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse, l’UPF – Cameroun, sous la férule de son président Aimé Robert Bihina, a organisé à Yaoundé, avec l’appui de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), un symposium international sur la couverture des élections par les médias. Une rencontre présidée par le ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary en présence du représentant personnel de la Secrétaire générale de la Francophonie, le Pr Tidiane Dioh, par ailleurs chargé des programmes médias à l’OIF.
Le fil conducteur retenu à cette occasion: «La qualité du traitement de l’information en période électorale», a permis aux journalistes de mesurer leur responsabilité en périodes électorales. Pour éviter certaines dérives, il a été question de rappeler aux hommes de médias certains fondamentaux afin de mettre à mal les velléités d’instrumentalisation et de manipulation des médias.
Pour une couverture impartiale et équilibrée du processus électoral, le Pr. Tidiane Dioh a partagé une réflexion sur la base de ses trois années d’expérience dans l’exercice du journalisme et en sa qualité d’enseignant d’université. De ses propos, l’on retient qu’il n’y a aucune convention régissant la couverture médiatique électorale.
Pourtant, cette couverture reste un élément important dans la vie d’une nation, car une élection mobilise toutes les composantes d’une nation. «La couverture d’une élection s’apprend. Le journaliste est l’historien du présent, c’est-à-dire qu’il raconte ce qui se déroule sous ses yeux. Il ne doit pas se constituer en état médiatique», a expliqué le Pr Tidiane Dioh. Et d’ajouter : «Le journaliste ne doit pas perdre de vue que le jour du scrutin n’est pas le jour de vérité et doit disposer d’un minimum de recul historique basé sur la vérité des faits».
Cette initiative de l’UPF-Cameroun a été saluée par le Ministre camerounais de la communication. Issa Tchiroma Bakary en a profité pour rappeler que le Cameroun a une presse libre et diversifiée. Il a invité les journalistes camerounais à être les ambassadeurs dignes du traitement de l’information partout où besoin est, précisément en période électorale.
«Vous avez le devoir de protection des intérêts supérieurs en tant que citoyen dans le respect éditorial des médias qui constituent le paysage médiatique de notre pays», a conclu le Mincom. Issa Tchiroma Bakary a annoncé que les prochaines assises mondiales de l’UPF en novembre de l’année prochaine au Cameroun ont reçu le parrainage du chef de l’Etat, S.E Paul Biya.
Une quarantaine de participants, journalistes politiques dans en service dans les médias camerounais, ont pris part à ce symposium qui a développé les thèmes ci- après: «les enjeux et défis des élections 2018 au Cameroun», par le socio-politiste Pr Owona Nguini Eric Mathias ; «La chasse aux fake news et l’équilibre dans la couverture médiatique des élections», par le Pr Thomas Essono; «Droits et devoirs des journalistes en période électorale», par le Pr Albert Mbida.
De l’avis des participants, le symposium sur «la qualité du traitement de l’information en période électorale» aura été un grand moment de renforcement de capacités en matière de couverture des éléctions au Cameroun.
Jean-René Meva’a Amougou
SNJC : guerre contre la presse à gage
Le syndicat menace d’exclure désormais de ses rangs, tous les journalistes qui se rendront coupables de chantage, dénigrement et de plagiat.
Le 03 mai dernier, dans sa déclaration solennelle faite à l’occasion de la célébration de la 25e édition de la Journée internationale de la liberté de presse, la condamnation du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) est claire: «Le SNJC dit non à la presse à gages. Non au journalisme de haine et de division sociale. Non au chantage médiatique. Non à la presse des mallettes. Non à la presse aux ordres des groupuscules occultes».
Son président se veut même menaçant : «seront désormais exclus du syndicat, les confrères qui se sont rendus coupable de chantage, dénigrement et de plagiat», a met en garde Denis Nkwebo lors des universités du SNJC organisé à l’occasion sous le thème, «le SNJC d’aujourd’hui, le SNJC de demain, la liberté et le professionnalisme au service du public». «Tous les membres du SNJC ont l’obligation morale, syndicale, professionnelle de respecter les règles d’éthique et de déontologie. Nous devons produire un travail de bonne qualité professionnelle», a-t-il prescrit.
Mais le syndicaliste n’est pas dupe. Il sait très bien qu’un travail de qualité peut difficilement se faire dans un environnement précaire. C’est pourquoi le SNJC a aussi appelé «à l’émancipation économique des femmes et des hommes des médias». Pour défendre leurs droits, les journalistes ont donc été invités à se syndiquer. «L’employé seul face au patron est faible. Le patron est tout puissant.
Il peut renier certains acquis et chercher à le mettre à la porte. Or rassemblé dans un syndicat, on devient fort, fort pour défendre les intérêts et bien formuler les doléances. Nous regardons vers la même direction et nous sommes capables de demander les meilleures conditions de travail de sécurité», explique Hilaire Ham Ekoue, le vice-président SNJC.
Dans le même sens, Denis Nkwebo, par ailleurs rédacteur en chef adjoint du quotidien Le Jour attire l’attention des uns et des autres sur ceux qu’il considère comme des «marionnettes visibles»: «le Conseil national de la communication et la Commission de délivrance de la carte de presse sont tant de pièges tendus. Il y a des institutions taillées sur mesure pour démontrer l’incapacité des journalistes camerounais à se prendre en charge et assumer leur mission sociale».
Alain Biyong
Marcel Namata Diteng
Au moment où nous mettions sous presse, l’on est sans nouvelle du sous-préfet de Batibo (département de la Momo dans le Nord-ouest du pays). Victime d’un enlèvement depuis le 11 février au matin, sa voiture a été retrouvée brûlée à Batibo, avant le défilé de la Fête de la jeunesse, qu’il devait présider et qui, de fait, a été annulé. Des nouvelles de son exécution ont foisonné. Un vidéogramme posté le même jour sur la page Facebook de Ayaba Cho Lucas, commandant en chef de la branche armée des séparatistes anglophones semblaient confirmer la mort de cette autorité administrative. Yaoundé, qui poursuit les recherches, a démenti par le canal du ministre de la communication Issa Tchiroma Bakary, porte-parole du gouvernement. Néanmoins, le gouvernement dit prendre cela avec le plus grand sérieux, d’autant plus que c’est le même qui avait, quelques minutes après la capture du sous-préfet, publié les images de son véhicule incinéré, et surtout une photographie de l’intéressé grillant une cigarette dans un bosquet. Les noms de ses ravisseurs, ou à tout le moins des commanditaires de l’enlèvement, sont déjà dévoilés. Il s’agit de Tenyong Mbah Divine alias Fon Neymar et Brainand Fongoh alias Fiango. Selon des sources sécuritaires, Acha Ivo, concepteur présumé du plan d’enlèvement de Batibo, est originaire du village Ashang près de Batibo.