Home INTÉGRATION RÉGIONALE Tailler la baguette à la maquette

Tailler la baguette à la maquette

48
0

Ainsi se résument les exhortations faites au nouveau président en exercice de la CEMAC.

« J’annonce la mise en place d’un mécanisme concret pour faciliter la libre circulation des personnes et des biens, pierre angulaire d’une intégration régionale encore fragile ». Le 10 septembre 2025, à Bangui, a livré un discours appelant à un renforcement de la libre circulation des personnes et des biens en Afrique centrale. À première écoute, ces propos du président Denis Sassou Nguesso résonnent comme une promesse de dynamisme pour la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), qui peine depuis des décennies à traduire en réalité les ambitions de ses dirigeants.

« Sur le papier, ce discours s’inscrit dans les objectifs de la CEMAC et de l’Union africaine », apprécie Jeanne Mboua, spécialiste des questions régionales, basée à Yaoundé. Pour l’analyste centrafricaine Samira Modi, « c’est un discours qu’on a déjà entendu. La volonté politique existe, mais elle bute toujours sur les intérêts nationaux et les lenteurs administratives. Sans mécanismes de suivi stricts, ces promesses risquent de rester lettre morte ». 

Les habitants, eux, jugent la question à l’aune de leur quotidien. Au lieu-dit « Marché 8e » à Yaoundé, Awa Tikounda, vendeuse de tissus, confie : « Chaque fois qu’on traverse la frontière, il faut payer des taxes et remplir des formulaires sans fin. Si le président Sassou Nguesso veut que la libre circulation fonctionne, il doit commencer par nous faciliter la vie, nous, les commerçants ». Pour aller dans le même sens, Jean-Claude Tchoumba, un habitué de l’axe Yaoundé-Libreville, se montre plus circonspect : « On nous parle d’intégration depuis des années, mais nos camions restent bloqués aux frontières.

On espère que cette fois ce n’est pas juste un discours pour la galerie ». « Je transporte des marchandises entre Yaoundé et Malabo tous les mois. Chaque contrôle nous fait perdre du temps et de l’argent », raconte Ahmed Souleymane, chauffeur de camion. Pour lui et beaucoup d’autres, le discours présidentiel ne prend sens que si la frontière devient réellement plus fluide.

Pour d’autres citoyens et acteurs économiques, la vraie mesure du succès ne sera visible ni dans les hôtels officiels ni dans les communiqués de presse, mais aux frontières, dans les échanges et dans la vie quotidienne. « Le président congolais a parlé, les mots ont circulé. Il reste à voir si la libre circulation suivra son chemin. Pour moi, chaque frontière devient du coup le baromètre du sérieux de cette promesse », explique Leiticia Farida Dangbi, une commerçante centrafricaine rencontrée à Yaoundé.

Jean-René Meva’a Amougou

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here