Mes parents étaient upcistes. Mon père, Tonye Nko’o Paul, a fait le maquis, il était alors secrétaire de l’UPC dans la Grande Sanaga à l’époque.
Il avait une machine et des documents avec lesquels ils se promenaient toujours pour prendre des notes. Donc, lorsqu’il y’avait des rencontres secrètes, on le mettait en sureté quelque part avec son matériel de travail pour éviter qu’en cas d’arrestation les documents ne tombent entre les mains des militaires. Une fois, lors d’une rencontre, sous la dénonciation des villageois, des militaires ont encerclé la zone de réunion. Papa a été informé de leur présence et a voulu s’enfuir avec ses documents.
Il a été fusillé en brousse par des militaires. Il a été touché à la cuisse. La balle l’a transpercé sans causer trop de dommages. Il semblait qu’il n’était pas question de le tuer mais de le ramener vivant et donc il y a eu une course-poursuite dans la brousse. Papa a pu s’échapper en utilisant une terre mole que les vers en brousse fabriquent souvent. Il a badigeonné la terre su sa blessure pour stopper le sang. Quelques mètres plus loin, il a trouvé un grand tronc d’arbre dans lequel il s’est caché. Nous avons vécu une bonne partie de notre enfance dans la peur. Des fois on arrêtait ma mère pour qu’elle dise où se trouve son mari.
Ma mère en prison, on était comme des orphelins et ma grand-mère ne voulait pas qu’on mette le nez dehors. On passait notre temps à prier. Après la sortie du maquis, notre vie était difficile parce que mon père était maître d’école et quand il est sorti il n’a plus eu d’emplois pendant longtemps. C’est bien que la France reconnaisse qu’elle a fait du mal aux membres de l’UPC. Qu’ils reconnaissent que l’UPC a fait des choses pour ce pays et nous sommes satisfaits. Si la France reconnaît ses torts nous disons merci.
