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Pr Marius Ayou Bene : «L’émergence qu’on veut dans tous les pays d’Afrique centrale est compromise»

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Selon l’universitaire camerounais, tant que les peuples de la sous-région n’arrivent pas encore à compenser l’érosion de leur pouvoir d’achat due au renchérissement des prix des produits pétroliers et alimentaires, l’émergence reste hors de portée.

Il faut bien qu’on s’entende : l’inflation, c’est une hausse généralisée des prix. La première cause de l’inflation, c’est la sous-production. C’est-à-dire que l’offre des biens est inférieure à la demande. Quand l’offre est inférieure à la demande, les prix montent nécessairement. Parce que beaucoup de personnes auront envie d’acheter mais ne trouvant pas les produits demandés, ceux qui sont chargés de vendre commencent à spéculer. Parce qu’ils ont plusieurs personnes devant eux, ils ne peuvent pas satisfaire tout le monde. Ce sera donc au mieux disant. La seconde raison qu’on peut évoquer ici, c’est que notre économie est import dépendante. On ne produit pratiquement rien. Ou alors, ce qu’on produit est essentiellement résiduel par rapport à ce que nous consommons. Une forte quantité de biens consommés provient de l’extérieur. Et quand nous importons les biens et qu’ils rentrent sur le territoire national, il y a toute une politique fiscalo-douanière qui peut occasionner des augmentations de prix. Quand les commerçants sont soumis à des coûts très contraignants au niveau de la douane, ils les répercutent sur le prix de vente des biens qu’ils ont importés. Il peut donc arriver que, quand l’Etat fixe des objectifs un peu plus ambitieux à la direction générale des douanes, les taxes douanières augmentent et les commerçants se retrouvent en train de revoir leurs prix à la hausse. Cela a généralement pour conséquence la montée de l’inflation.

Maintenant, en interne, quand on augmente les biens qui constituent les inputs pour la production des biens de consommation (le panier de la ménagère, tarif du taxi, tarif du pain par exemple), tout ce que cela induit a un impact sur l’économie. Le bonhomme qui fait dans le transport des tomates de Foumbot à Douala paie une facture de carburant plus élevée. Par conséquent, les tomates qu’il transporte connaissent une légère augmentation. Le bonhomme qui fabrique le pain va acheter les intrants dans les marchés, parfois on lui coupe l’électricité, le gars fonctionne au groupe pour continuer à produire, et tout ce qui nécessite le carburant pour être produit va connaître une augmentation de prix. Et il n’y a pas une seule chose qu’on produit localement qui n’ait pas un besoin certain de carburant. Ce qui fait donc que la hausse des prix des biens sensibles comme le carburant entraîne fatalement une augmentation des prix des denrées de première nécessité. A cela, il faut ajouter la politique monétaire de la banque centrale. Il peut arriver, comme maintenant que les économies de la Cemac aient besoin de se développer. Tout le monde veut atteindre l’émergence, alors on adopte une politique de croissance économique. Or celle-ci fait qu’on peut dans un premier temps adopter une politique expansionniste. Mais quand les résultats de cette politique commencent à être visibles au point où les prix chutent, la conséquence c’est que la banque centrale va se réajuster pour refaire remonter les prix parce que la situation de déflation est encore plus pernicieuse. Maintenant, une politique monétaire restrictive fait monter également les prix parce que l’argent coûte moins cher. Il me semble que ce n’est que maintenant que la Beac a recommencé à baisser ses taux directeurs. Cela veut dire qu’elle avait maintenu les taux directeurs haut, ce qui faisait que l’argent était rare. Et donc les entreprises ne produisaient pas suffisamment et la demande a commencé à dépasser l’offre, faisant le lit de l’inflation. Donc, l’émergence qu’on veut dans tous les pays d’Afrique centrale est compromise parce que dans un contexte d’inflation accentuée, ça veut dire qu’on n’arrive même pas à satisfaire les moindres moyens de subsistance. Vous voyez qu’aujourd’hui, les fonctionnaires qui atteignaient le 15 de mois avec quelques miettes ne peuvent plus sortir de leurs poches 10 000 FCFA avant le 10.


Propos recueillis par JRMA

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