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Dr Flavien Nkoudou : «J’y vois une franche hostilité à l’égard de la construction communautaire»

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Dr Flavien Nkoudou.

Aux yeux de l’ingénieur financier camerounais, seule la volonté des puissances occidentales et des bailleurs de fonds explique toutes ces batailles et pagailles autour des réserves de change de la CEMAC.

Dr Flavien Nkoudou.

L’actualité en provenance de Paris vient-elle nous renseigner ou bien elle vient renforcer ce qui était déjà connu, s’agissant notamment des réserves de change de l’espace CEMAC ?
Dans les livres comptables de bailleurs de fonds, qu’on se le dise, la CEMAC est désormais présentée comme le concentré des malheurs financiers de toute l’Afrique centrale. D’aucuns estiment même qu’elle serait actuellement plongée dans une crise du type des années 1930 (un chômage encore plus fort, une déflation des prix aiguë, la ruine des épargnants). Il est expliqué à peu près partout que les pays de la CEMAC n’ont pas été capables de mener une politique expansive de relance de l’investissement à cause des Traités instituant la dépendance du FCFA au trésor français, les déficits budgétaires et d’un endettement désordonné. Dans les États membres de la CEMAC, cela a creusé les déficits au point de rendre les États incapables de mener un programme d’investissement vigoureux.

On dirait que chaque fois qu’on évoque la crise économique en zone CEMAC, la question de la dévaluation est au centre de tous les procès. Et selon les procureurs de ces procès, plus la crise dure, plus le spectre de la dévaluation plane au-dessus du FCFA d’Afrique centrale. Croyez-vous que ce qui s’est passé dans la capitale française augure d’un plan ourdi depuis longtemps contre le FCFA?
On peut le dire sans risquer de se faire recadrer. Voyez-vous, l’anémie économique que vit la sous-région est grandement due aux prétendues politiques d’austérité extrêmement brutales qui n’ont pas seulement aggravé le tassement de la croissance mais qui ont plongé certains pays des États de la CEMAC dans un cercle vicieux dessiné depuis des cabinets financiers logés aux États -Unis, en Grande-Bretagne, en France et que sais-je encore. À ce handicap grave et structurel est venu s’ajouter un élément de déséquilibre qu’on croyait transitoire mais qui s’est installé dans le paysage de la CEMAC. Il s’agit du transfert massif de capitaux par les banques et autres établissements financiers. Et si l’on insiste sur la problématique de la souveraineté de la BEAC, vous voyez bien que celle-ci ne peut se déployer unilatéralement contre des holdings miniers qui régulent la scène des réserves de change. Or, ces réserves sont une espèce de cuirasse qui protège contre la dévaluation du FCFA d’Afrique centrale. En fait, ces gens savent bien ce qu’ils font pour pousser la CEMAC à bout. J’y vois une franche hostilité à l’égard de la construction communautaire et surtout une procrastination aiguë des pays de cette zone à l’égard de leur avenir économique.

Lire également : Réunion des ministres de l’Economie de la zone Cemac : Coulisses d’un pugilat franco-américain à Paris

Vous semblez dire que ceux que vous désignez sous le mot  » ces gens » tiennent la CEMAC en captivité ?
Absolument ! Ils disposent de trois catégories d’instruments dont l’importance respective varie beaucoup en fonction des époques et du contexte: 1) la réglementation des changes, 2) les modifications de parités, et 3) les interventions des banques centrales sur les marchés.
Il existe une grande diversité de situations dans le monde quant à l’importance et à la nature du contrôle des changes. Tous les pays ont connu, à un moment donné de leur histoire, un dispositif réglementaire destiné à limiter les opérations susceptibles d’entraîner des pressions sur le cours de leur monnaie.
L’un des aspects essentiels des réglementations des changes concerne la convertibilité des monnaies. Une monnaie est convertible lorsque son détenteur peut l’échanger librement et sans limites contre toute autre monnaie. La convertibilité repose sur une double obligation de la part du pays émetteur de la monnaie : la banque centrale de chaque pays doit, d’une part, racheter sa propre monnaie à la demande de ses partenaires, et d’autre part, garantir la libre circulation de sa monnaie sur les marchés.
Dans les pays de la CEMAC où la monnaie est très fragile et les paiements extérieurs déséquilibrés, la convertibilité est limitée par des mesures fixées par ces gens.


Propos recueillis JRMA

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